Chers camarades,
Nous sommes réunis pour ces trois jours des « assises du communisme », car la situation économique et politique que nous vivons en ce moment est lourde de menaces. Je ne vous ferai pas l’injure de vous expliquer que notre époque est marquée par l’évolution « naturelle », si l’on peut parler ainsi, du système capitaliste, et le « blocage » de son expansion vers plus de profits encore est limité par ses contradictions.
Cela, vous le savez.
Vous n’ignorez pas non plus que cette crise... naturelle, comme je le disais, ne peut connaître que deux issues :
– L’affrontement généralisé, qui en « détruisant du capital », comme l’a
analysé Marx, aboutit à la redistribution des cartes et enclenche un
nouveau cycle de développement du système... jusqu’à la crise suivante ;
– La rupture avec cette logique, dont la sortie par le haut débouche
sur un changement de système économique et politique : le socialisme.
Cette rupture, dont la classe ouvrière sera le fer de lance, implique deux conditions :
– Le développement inédit des luttes syndicales dans les usines, dans la rue, par des victoires électorales, politiques, auxquelles ces luttes conduiront, par la volonté largement majoritaire exprimée par l’ensemble des citoyens ;
– La présence matérielle de militants politiques actifs, regroupés dans un parti communiste qui sera capable d’ouvrir des horizons, est indispensable pour mener à bien cette « mission ».
Les différents congrès du parti, loin d’abonder dans ce sens, ont tourné le dos à cette espérance et aux objectifs que j’ai suggérés. Il reste que, dans ce parti nombreux sont les « communistes », qui n’ont pas renoncé aux idéaux qui les ont amenés à y adhérer. Nous disposons d’une richesse inexploitée de militants, de structures prêtes à entrer en action, de volontés d’agir pour changer le monde. Je ne pense pas que le moment est venu de quitter ce parti pour une autre organisation communiste, mais plutôt d’y revenir, afin d’y lutter pour lui redonner les armes idéologiques que sa direction a abandonnées. Je vais vous
livrer ma propre expérience de communiste qui a choisi de rester dans le parti.
Dans notre section, après la déroute électorale des présidentielles, nous avions réuni l’ensemble des militants. La direction sortante penchait, avec JC Gayssot, pour ne pas présenter de candidat coco aux législatives qui allaient suivre, et proposait de rallier le candidat socialiste dès le premier tour, arguant le « danger Le Pen ». Nous avons bien fait de mettre cette direction en minorité et de présenter notre candidat, ceci nous a permis de maintenir, puis de développer notre influence communiste à Béziers. Nous avions contre nous, la direction fédérale et l’ensemble du comité fédéral de l’époque. Je ne vous raconterai pas les réunions du comité fédéral, houleuses, agressives, insultantes que nous avons connu. Nous sommes restés au parti. Nous avons continué à développer une politique communiste et la situation est, dans notre département, totalement inversée. Nous avons même, ce qui paraissait impensable il y a quelques années, deux camarades au bureau fédéral. Nous allons d’ailleurs aborder les municipales dans une situation politique largement plus favorable que lors des précédentes. En effet, la division continuant, nous avions en face de nous une liste socialiste qui comportait quatre communistes, dont l’ancienne secrétaire de la section et le secrétaire fédéral de l’époque (qui aujourd’hui est à la direction de La Marseillaise).
Aujourd’hui, notre section est unie pour ces échéances électorales... Vous pouvez imaginer quelle aurait été la situation si, excédés, écoeurés, désabusés, nous avions quitté le parti.
Redonner au pays un parti communiste digne de ce nom, c’est plus qu’une urgence aujourd’hui, en France. Les différentes élections qui se sont tenues depuis les présidentielles montrent, par l’importance du vote « Le Pen » et surtout par la puissance des abstentions, un désarroi croissant dans les têtes. Les suffrages qui se sont reportés sur les candidats du « Front de gauche » sont décevants et indiquent eux aussi une perte de confiance... dans l’avenir.
L’interview de Thierry Le Paon dans l’Huma de mercredi, l’article de Cohen-Seat sur l’Euro... montrent une tendance nouvelle, une inflexion dans l’attitude de nos dirigeants. La question des cellules a été portée dans le dernier congrès, et dix ans après le congrès de Martigues qui en avait entériné la disparition, cette question est un événement, même si ce congrès, en acceptant le fait, s’est arrangé pour ne pas fournir les moyens nécessaires à leur fonctionnement.
Concernant la réforme des retraites, la lutte pour l’emploi et du pouvoir d’achat, je pense que nous allons au devant de nombreuses manifestations et le
mouvement social pourrait très bien s’emballer d’ici peu. Nous devons être prêts. Les structures de base du parti sont à reconstruire là où elles ont disparu, et cela ne dépend pas du comité national, mais de nous. Les communistes ont besoin d’un véritable parti communiste.
Nous avons un outil, il ne tient qu’à nous de le nettoyer.
Armand Lecoq, section de Béziers , cellule Barbusse