Bien sûr traquer et punir les coupables. Mais poser publiquement la question : comment se fait-il qu’ils aient pu (...)
Le résultat de Mélenchon analysé par GQ
Mélenchon à 11% c’est en fait un succès pour l’homme, dont la personnalité est la principale force. Il avait vraiment envie de gagner, et comment gagner sans cela ? Il se rêve en Chavez français. Pourquoi pas ? Il a revitalisé les thèmes révolutionnaires et patriotiques, et une partie du peuple l’a entendu bien au delà de ce qui était prévu, même au mois de janvier. Il n’a pas eu peur de la médiacratie, il n’a pas eu peur de déplaire aux biens pensants en attaquant ad-hominem les monopolisateurs de la communication.
Mais il n’a pu dépasser les 14% de la « gauche de gauche » en 95 et en 2002 parce qu’il a refusé d’affronter les questions qui fâchent les travailleurs.
En négligeant complètement la question de la sécurité, il s’est trouvé pris à contre-pied avec le retour brutal du thème sur scène avec l’affaire Merad, qui a coupé court à sa dynamique.
Il est monté sur les salaires, et il est redescendu sur la « sixième république » qui a occupé de plus en plus de place dans ces discours de fin de campagne, discours de plus en plus courts prononcés pourtant devant de plus en plus de monde. Il paye là le prix de sa faiblesse politique sur l’Europe, et c’est justice car il ne peut pas ne pas se rendre comte que la « sixième » existe déjà depuis longtemps : le traité de Lisbonne est notre constitution, et Maastricht (qu’il avait voté) l’était déjà.
Au lieu de préconiser la diminution de l’immigration pour favoriser l’intégration, il est apparu comme une fois de plus le porte parole de la main gauche du capital : la main droite noie les immigrés dans la Méditerranée, tandis que la main gauche les encourage à s’embarquer en promettant la régularisation à tout le monde. Ce qui concourt à un monde parfait pour le capital où les immigrés sont utilisés à la fois pour faire baisser les salaires et pour détourner le débat politique du social et de l’économique vers les questions identitaires.
Je ne lui reproche pas son engagement écologiste, les limites des ressources vitales de la planète et les menaces sur son habitabilité sont une réalité qu’il faut accepter en matérialiste. Mais de ne pas dire ce qu’il sait très bien, que l’écologie réelle est pro nucléaire et pro OGM.
Après avoir surpris agréablement en n’ayant pas peur de chahuter les fausses icônes médiatiques de la CIA telle le Dalaï Lama, il avait déçu sur la Libye, sur la Syrie en refusant de s’opposer aux ingérences impérialistes dans ces pays. Mais a su tout de même au cours de la campagne se montrer solidaire de Cuba et préconiser la sortie unilatérale de l’OTAN.
Le vote Mélenchon représente donc la petite bourgeoisie de gauche, historiquement forte dans ce pays depuis Proudhon, avec une petite percée en direction des jeunes prolétaires d’origine immigré, et fort dans le secteur public, et comme lui très homogène sur le territoire : il fait bien plus que Marchais en Alsace, bien moins que lui dans le Nord. Et il ne peut donc guère servir à des conquêtes législatives ou municipales qui supposent des points forts.
Cela dit Mélenchon reste meilleur, c’est-à-dire plus révolutionnaire au moins dans les mots, moins compromis avec le PS, moins crypto-atlantiste et moins pro-européen que le groupe dirigeant du PCF. Ce qui est paradoxal, puisqu’il est utilisé par cette même direction pour faire disparaître toute trace de marxisme et de classe ouvrière au PCF et le transformer en coquille vide. Et c’est lui en ce moment qui peut, peut être, retenir notre parti sur la pente glissante d’une nouvelle gauche plurielle.
Gilles Questiaux, le 4 mai 2012
PS : je vote Hollande dimanche. Sarkozy est un dangereux ersatz mussolinien qu’il faut éradiquer.