I. Pour la Paix et un nouvel internationalisme
La situation internationale se révèle extrêmement dangereuse. Le risque d’une guerre mondiale et de l’utilisation de l’arme nucléaire sont aujourd’hui évoqués ouvertement par les dirigeants de ce monde.
La guerre en Ukraine est d’abord un affrontement entre l’Otan et la Russie, une guerre où les stratèges américains affirment « Faire la guerre jusqu’au dernier ukrainien ». L’OTAN élargit toujours plus son champ d’action et accentue sa force de frappe en Europe orientale, au mépris des engagements pris avec la Russie par les États-Unis et leurs supplétifs européens à la fin de la guerre froide. Si le militarisme du régime de Poutine est indéniable et que celui-ci rêve de restaurer la Russie au rang des puissances impérialistes, cela ne saurait cacher qu’à ce jour la Russie n’est pas une puissance impérialiste, mais une puissance militariste acculée par l’OTAN. Si les opérations russes doivent être questionnées voire condamnées quand des crimes sont avérés, cela ne doit pas masquer que la responsabilité première se trouve du côté de l’OTAN, c’est-à-dire, in fine, des États-Unis et de ses alliés européens. Nous ne pouvons être dupes. Il s’agit pour les Etat-Unis d’atteindre la République populaire de Chine, de s’emparer de nouveaux marchés et de nouvelles richesses, de garantir la suprématie idéologique de l’occident capitaliste sur le monde.
Le blocus impérialiste contre Cuba persiste ainsi que les intimidations contre le Venezuela et le Nicaragua.
Les fossoyeurs néolibéraux s’organisent toujours plus, comme en décembre 2021au “Sommet pour la démocratie”, initié par les États-Unis, pour décider disent-ils, de “renouveler le monde” au nom du marché libre, au nom des libertés individuelles et au nom de ce qu’ils appellent « leur démocratie ».
L’objectif affiché est clair, créer toutes les conditions pour poursuivre la soumission des peuples qui produisent les richesses, et celle des Nations qui perdent leur souveraineté, à la volonté du capital et à son accumulation durable.
La paix est donc la condition pour ne pas laisser s’installer la barbarie.
La déclaration et les objectifs de travail des 78 partis communistes et ouvriers à la rencontre de La Havane d’Octobre 2022, constitue une base de travail permettant de relancer un mouvement international pour la Paix et nous demandons que le PCF y prenne activement sa place. L’internationalisme doit se décliner dans les initiatives prises par la direction du PCF mais aussi par l’impulsion d’initiatives locales d’informations, de rencontres et de solidarités concrètes.
La France doit sortir de l’OTAN et exiger sa dissolution !
Le 39e congrès doit prendre la décision d’une campagne pour la Paix dans toute la France permettant d’éclairer l’opinion publique et débouchant sur une grande marche avec l’ensemble des forces progressistes pour stopper cette escalade et exiger la Paix !
II. HUIT THÈSES POUR OSER LE SOCIALISME DES JOURS HEUREUX
Le programme « Des Jours heureux » porté par Fabien Roussel à l’élection présidentielle a rencontré un écho dans la société française. Dans leur diversité, les communistes se le sont appropriés. Ils veulent lui donner corps, le développer au-delà du cadre électoral comme un projet de société.
Car les luttes de ces dernières années buttent sur l’absence d’une perspective politique crédible, alternative à la société capitaliste actuelle. L’électorat populaire qui subit de plein fouet la violence de cette société s’exprime dans l’abstention, ou trop souvent dans la recherche d’un bouc émissaire.
Il appartient aux communistes de porter dans la société un projet politique de rupture en faveur des milieux populaires, avec au centre la question du travail, de son organisation, de la maîtrise des richesses produites. Il reste fort à faire !
Notre prochain congrès est un moment clé pour mettre en débat un tel objectif que nous proposons de nommer « le socialisme des jours heureux », le situant résolument dans le mouvement historique national de 1793 et la commune, du CNR à la dernière présidentielle, comme dans le mouvement historique mondial de toutes les révolutions progressistes, ayant démontré aux peuples qu’une autre société est possible, qu’elle est difficile, marquée par des avancées et des reculs, des tâtonnements et des erreurs, mais que les peuples peuvent y gagner beaucoup pour les salaires, les services publics, les droits fondamentaux (éducation, santé, culture…).
Pour travailler à une telle refondation globale de la société française, nous avons besoin des outils marxistes et léninistes pour mieux comprendre le mouvement du monde capitaliste, en innovant pour construire une perspective socialiste adaptée à la réalité française du 21e siècle dans un monde en plein bouleversement. En ce sens, il nous faut interroger les « éléments de conquis sociaux » en France, comme leur difficulté à résister à la guerre du capital. Nous devons innover en relation fraternelle avec les forces communistes et progressistes qui se battent partout sur la planète.
Dans cet esprit voici quelques thèses que nous souhaitons porter au débat :
1. Pour envisager un autre projet de société, il faut rompre avec un capitalisme en crise systémique.
Le 22e congrès en 1976 proposait de prolonger les acquis du CNR dans une « étape de démocratie avancée » par une stratégie d’union de la gauche orientée vers une victoire électorale. L’histoire a tranché, la gauche livrée au parti socialiste s’est tourné vers l’accompagnement du capitalisme en crise, jusqu’au macronisme.
La vague « libérale » initiée par Thatcher, a montré la violence de l’état contre les milieux populaires. On ne peut gagner ni même conserver des acquis partiels sans mettre en cause la domination des pouvoirs économiques. Le capitalisme en crise systémique n’accepte aucun compromis. Il faut rompre tout de suite avec la domination de l’état par la bourgeoisie.
2. Au niveau mondial, l’impérialisme sous égide étasunienne se raidit dans une succession de crises qui mettent en cause sa domination monétaire, économique, technologique et même culturelle.
Aux impérialismes concurrents du début du 20e siècle a succédé une mondialisation intégrée sous égide étasunienne. Présenté comme le gendarme d’un monde censé protéger la démocratie face aux États dits « totalitaires », cet impérialisme assure en fait un pillage systématique des ressources des nations du Sud. En délocalisant dans ces pays une part toujours croissante de leur industrie, les multinationales peuvent compter sur une main-d’œuvre à exploiter à moindre coût et sur la relance de l’accumulation du capital dans les nouveaux pays ouverts à leur règne pour tenter de contrer une baisse tendancielle du taux de profit, pourtant irrémédiable.
3. Au plan national, l’impérialisme prend la forme d’un capitalisme monopoliste d’État financiarisé contestant de plus nos conquis sociaux. Pourtant, la manne financière versée aux entreprises privées est un puissant facteur de socialisation des grands moyens de production et d’échange.
Profitant des délocalisations et du chômage qui en résulte, le capital a pu attaquer avec succès le pouvoir des syndicats, détruire les conquis sociaux et comprimer les salaires. Fermant la parenthèse du capitalisme monopoliste d’État social où les institutions publiques étaient ambivalentes, à la fois au service des intérêts du capital et du bien public du fait du rapport de force issu de la 2de guerre mondiale, le capital, avec la diminution progressive de sa plus-value causée entre autres par la décolonisation, a mis l’appareil des États impérialistes à son seul service pour qu’il garantisse son taux de profit.
4. Le capitalisme en crise doit briser toute résistance populaire. Il ouvre la voie aux fascismes
Face au sentiment généralisé de déclassement et à la colère grandissante du peuple, le capitalisme joue la carte de la division, usant tour à tour de son influence pour faire monter le populisme ou le fascisme. Si nous voulons parler à tous ceux qui doutent du système nous ne pouvons nous contenter de leur parler de nos valeurs progressistes, il faut en fait proposer une rupture avec le système qui apparaissent comme un projet alternatif.
5. Briser le règne du capital, sortir de la logique du taux de profit, réorienter les sommes prodigieuses que l’État met au service du capital, nécessite la prise du pouvoir d’État.
Le rôle du Parti communiste est de rendre le contrôle de l’État à la classe des travailleurs et des travailleuses, de les aider à prendre le contrôle des entreprises et à les laisser décider de l’usage des fonds mis à la disposition des entreprises.
Un tel choix concourt à la remise en cause systémique des pouvoirs de la grande bourgeoisie et se traduit forcément par un affrontement total dont l’enjeu est la prise définitive de contrôle de l’appareil d’État. Mais nous pourrons enfin disposer des leviers nécessaires pour résoudre les grands enjeux de civilisation. Une fois conquis cet appareil d’État, il sera plus aisé de créer les outils d’une planification démocratique de réorienter l’allocation du capital vers le bien commun et progressivement mettre en place de nouveaux critères de gestion.C’est ainsi que le programme des Jours heureux pourra finalement transformer la société et bâtir le socialisme des Jours heureux en France.
6. Parce que nos conquis sociaux, comme le financement public des monopoles privés, sont des constructions nationales, la souveraineté de la France face à l’UE et à l’OTAN est primordiale.
La forme pervertie de socialisation de l’investissement et d’une large partie des profits qui a déjà eu lieu s’est faite à l’échelle nationale, y compris au sein de l’Union européenne (UE). C’est dans l’histoire nationale que sont construits nos conquis sociaux. Loin de minorer les interdépendances entre les États, notamment au sein de l’UE, et le besoin de larges coopérations, nous aurons besoin d’autres révolutions ailleurs qu’en France pour desserrer l’étau que le capital ne manquera pas de faire peser sur la France des Jours heureux. Le capitalisme dont nous hériterons est un capitalisme de monopoles nationaux financé par leurs États-Nations.
7. Nous pourrons nous appuyer sur un début de rééquilibrage des forces entre l’impérialisme mondialisé et les pays du sud.
Malgré l’effondrement des pays de l’Est et l’affirmation d’une victoire totale de l’impérialisme, en trente ans la part de l’économie mondiale contrôlée par l’impérialisme n’a cessé de régresser passant de près de 50 % à moins de 30 %. Les BRICS en voie d’élargissement, et notamment la Chine subvertissent la mondialisation qui bénéficiait tant à la classe capitaliste des pays impérialistes.
C’est vers l’ensemble de ces pays en voix d’émancipation de l’impérialisme que nous trouverons aide et coopération comme le font déjà des pays comme Cuba ou le Venezuela. Une prise de distance avec les traités de l’UE se traduira par un internationalisme renouvelé.
8. Nous avons besoin d’une internationale, loin de la trahison de 1914 , qui ouvre de nouvelles relations internationales préfigurant une « communauté de destin pour l’humanité » nécessaire à la résolution des enjeux climatique et de développement mondial. [1]
On ne peut espérer construire et réussir une telle rupture seul sans avoir au préalable tissé de nombreux liens de coopérations et d’échange avec tout ceux qui nous ont précédés ou qui comme nous cherchent une voie vers le socialisme. Dans cet esprit, la coopération avec les partis communistes et ouvriers telle qu’elle s’est matérialisée lors de la conférence de la Havane doit s’intensifier.
III. Le PCF : Son organisation, une clef indispensable pour gagner la bataille idéologique, un outil pour construire le socialisme des jours heureux.
Pour agir et bâtir la France des Jours Heureux, notre 39e congrès doit affirmer clairement la nécessité du Parti, de son organisation, de son activité, du redéploiement des communistes en France qui exige une politique de formation ambitieuse. Seul un parti organisé, un parti de proximité, en phase avec les réalités concrètes peut mener la bataille idéologique et un combat émancipateur.
1. Un PCF utile, au plus près des préoccupations populaires : Priorité à la cellule
Par sa structuration, le parti doit offrir des champs d’action et d’intervention aux travailleurs et travailleuses et se donner les moyens de son renforcement.
La cellule est aujourd’hui l’outil pouvant nous permettre un travail de proximité efficace. Notre but est la prise du pouvoir politique et économique, cela passe par notre ancrage sur le terrain au plus près des travailleurs et travailleuses, des citoyens et citoyennes.
Notre objectif est de structurer le PCF avec des cellules, en dépassant les difficultés. Nous devons travailler la question de fond de notre ancrage local, de son renouvellement de la formation des militants à la base. Être un parti populaire contre tous les populismes, c’est permettre à nos concitoyens de s’emparer du fait politique à chaque instant.
Notre rôle est d’éveiller les consciences et de faire vivre la démocratie.Il nous faut rompre avec l’électoralisme qui nous pousse trop souvent à n’agir qu’en fonction des échéances électorales, dans un pays où la constitution et l’hyper présidentialisation structure la vie politique.
Il est essentiel de montrer jour après jour la pertinence du socialisme des jours heureux pour répondre aux problèmes concrets que rencontrent la population.
Dans un contexte de défiance vis à vis de la politique, l’ancrage et l’identification de nos camarades par leurs collègues de travail, leur voisinage permet de montrer que le PCF n’est pas un parti comme les autres. Loin des professionnels de la politique, il est le parti de ceux qui s’organisent et s’activent.
Avec la dévitalisation financière de nos cellules, les lieux d’échanges des communistes se sont fortement reportés vers les AG de section. Nous constatons que si elles sont parfois nécessaires, elles tendent à scléroser l’activité du parti autour d’un petit nombre de camarades, réduisent l’expression et la mobilisation du plus grand nombre.
En revanche, la cellule permet au parti de confier à chacun de ses adhérents une part dans l’effort commun et dans la discussion commune, condition préalable à la démocratie interne et à la mobilisation de chaque adhérent.
Lors de la réunion de cellule, c’est au travers des échanges et des discussions sur la situation internationale, nationale et locale que se forgent les actions et la feuille de route. C’est dans ces moments que chacun apprend, enrichit ses analyses, et se forme.
Il importe également d’accentuer vigoureusement l’effort de formation, préalable à l’efficacité de notre activité ainsi qu’au renouvellement des cadres. Il nous faut mettre en œuvre, à tous les niveaux de notre parti, des temps de formation. Ces temps doivent également mettre en avant les revues et publications du parti.
La forme parti est une nécessité. C’est un gage d’efficacité dans le combat révolutionnaire pour la prise du pouvoir.
2. Un parti présent et actif sur les lieux de travail
C’est dans les entreprises que s’exerce la contradiction capital/travail ; lieu d’exploitation, l’entreprise est l’endroit où le capital assure sa domination.
A l’inverse de ce qu’affirme le capital, la classe ouvrière est une réalité inhérente au monde du travail. Bien qu’hétérogène, le monde du travail a des intérêts communs et des aspirations communes dont nous devons nous emparer.
Entre 1937 et 1996, les cellules d’entreprises ont groupé entre 25 % et 35 % des adhérents du parti [2]. Se retrouver et militer sur le lieu de travail est essentiel, même si cela exige de la prudence.
Aujourd’hui, les 50 plus grandes entreprises françaises regroupent plus de 15 % des salariés du privé, soit plus de 2 millions de salariés. Les 500 plus grandes entreprises en regroupent plus du double. Et les petites et moyennes entreprises sont le plus souvent organisées au sein d’un groupe : 80 % des PME de plus de 40 salariés font partie d’un groupe. En France, 6,5 millions de salariés travaillent pour une multinationale (française ou à contrôle étranger).
Le pouvoir économique de ces groupes et de ces entreprises est immense et le combat au sein de ces entreprises pour un pouvoir populaire est essentiel. Être capable de contester les choix des capitalistes, les choix économiques des directions des entreprises et des groupes suppose d’acquérir une connaissance concrète de l’outil de production, des enjeux d’investissement. C’est seulement ainsi que nous sommes capable de montrer que d’autres politiques, des politiques de développement, d’investissements sont possibles et nécessaires.
Dans l’entreprise, le travail politique et le travail syndical sont complémentaires. Un tract du parti peut apporter des explications, des perspectives qui vont au delà du combat syndical et sont essentielles à la compréhension des enjeux et des combats. Le syndicat peut alors se centrer sur ses missions et rassembler largement les salariés.
Les lieux de travail, les lieux d’activité sociale et économiques, ce ne sont pas que les entreprises privées. Dans la plupart des villes, les premiers employeurs sont souvent l’état, une collectivité, un hôpital… Là aussi, une présence communiste régulière, auprès des travailleurs, par un bulletin ou un tract thématique diffusé massivement, animé si possible par une cellule communiste fraternelle et ouverte doit être une priorité.
Notre congrès doit faire de l’activité du PCF en direction des travailleurs et travailleuses une priorité politique et d’organisation.
Être au plus près des travailleurs et travailleuses, c’est se donner les moyens d’être visible et de rayonner sur tout un bassin de vie. C’est le lieu pour relayer nos grandes campagnes politiques et thématiques et notre conception du socialisme. Tourné vers l’avenir et combattant du bonheur universel, le PCF doit être la force qui bouscule l’ordre établi.
Les élections Européennes avec Ian Brossat et les élections présidentielles avec Fabien Roussel ont permis notre retour dans le paysage politique et sur le plan médiatique.
L’engagement déterminé de milliers de communistes à travers le pays à pu s’exprimer lors de ces batailles. Faisons de cette force un moyen de poursuivre le renforcement de notre parti au travers de notre présence auprès des travailleurs et travailleuses.
Le Parti Communiste doit reprendre le chemin de la proximité, travailler d’arrache-pied à sa réimplantation au plus près des intérêts populaires pour construire la France des Jours Heureux.
Contribution collective : Kamel BEN AZZOUZ, Stephane BAILANGER,Pierre Boufflers, Pascal BRULA, Robert BRUN, Marie-Christine BURRICAND, Michèle CARBONNIER, Esteban EVRARD, Clara GIMENEZ, Gilles Gourlot Kevin GUILLAS-CAVAN, Jonathan JUILLARD, Jean-Paul LEGRAND, Fabienne LEFEBVRE, Anne MANAUTHON, Franck MARSAL, Jean-Pierre MEYER, Pierre-Alain MILLET, Leila MOUSSAVIAN-HUPPE, Michèle PICARD, Hervé POLY, Gilbert REMOND, Benoit ROGER, Laurent SANTOIRE, Nicolas STIENNE, Danielle TRANNOY