Poser la question de la nation, c’est poser celles de la propriété et du pouvoir. Les évènements actuels doivent nous amener à repenser notre lutte contre l’impérialisme, lutte qui est avant tout nationale en ce sens qu’il s’agit d’agir contre l’impérialisme français.
Lorsque Marx écrivait « qu’un peuple qui en opprime d’autres ne saurait être libre », il n’y allait pas d’un élan de lyrisme et de morale. Au contraire, ces mots symbolisent la justesse de notre action qui doit impérativement lier l’intérêt de classe à celui de la fraternisation des nations.
Nier la question nationale « au nom de la révolution sociale » serait une erreur fondamentale. L’impérialisme français est le fruit d’exportations de capitaux produits originellement sur le territoire national, accaparés par une poignée de parasites. Lorsque les travailleurs des raffineries luttent pour leurs salaires, et par conséquent pour la diminution des profits de Total, il ne fait aucun doute qu’ils dérangent – à minima - l’activité impérialiste du groupe sur d’autres continents.
Il est de notre devoir – et cela à toujours fait notre force – de rappeler que chaque nation, qu’elle soit grande ou petite, possède ses particularités qualitatives, son caractère spécifique. Que chaque nation – grande ou petite – est l’égale de toute autre nation. Que chaque nation, par ses spécificités, enrichie et participe au trésor commun.
Question sociale et question républicaine
Durant la campagne menée pour les élections présidentielles, deux caractères de notre projet ont su faire la différence. D’abord, la question sociale, menée avec intelligence. Ensuite, la question républicaine. Un espace s’ouvre à nous sur ce dernier point.
Dans la continuité de notre action de toujours, nous devons représenter cette force qui souhaite rassembler les Français et non les diviser. Nous devons représenter cette gauche qui ne connaît pas de frontières entre Français, « en dehors de celles qu’imposent aux travailleurs la malhonnêteté, la corruption, l’exploitation et l’expropriation cruelle de la France ».
Nous ne sommes pas de ceux qui voient la nation comme une communauté "naturelle", fantasmée par un certain récit national qui ferait de facteurs biologiques le préalable à la nationalité. C’est d’ailleurs de là que provient la thèse, « aussi absurde au regard de la science qu’inhumain du point de vue moral – des nations élues, appelées à régner sur les nations inférieures ».
Nous ne sommes pas non plus de ceux qui perçoivent différemment les travailleurs et leur "niveau d’oppression" en fonction de leur origine, de leur religion, de leur couleur de peau.
Nous sommes de ceux qui luttent contre toutes les formes du nationalisme, de l’obscurantisme, et, comme le disait Anatole France, qui « regardent les peuples étrangers sans effroi ni haine ».
C’est en ce sens que nous sommes profondément républicains et universalistes. Républicain dans notre ambition démocratique, sociale et populaire, universaliste dans notre volonté de rassemblement. L’obstacle à toute émancipation demeure le respect de la « sacro-sainte propriété privée », celle-ci qui asservi les peuples et qui, dans sa dimension impérialiste, entraine le retard économique de nombreuses nations. En somme, le socialisme fait œuvre de bon qualitatif tant il permet – ou tout du moins vise - le développement harmonieux des forces productives à l’opposé de la recherche du taux de profit maximal.
Classes et nations
La question nationale, la question sociale, la question internationale et la question républicaine sont donc franchement liées. Liées car elles sont directement le fruit des rapports entre classes.
« Mais cela pose naturellement la question. Le sentiment national n’est-il pas incompatible avec l’esprit de classe ? N’y a-t-il pas, autrement dit, une contradiction entre la lutte des classes et la lutte pour l’indépendance nationale ? La réponse est non. Plus précisément il n’y a pas de contradiction pour la classe ouvrière. »
C’est en vain que certains, pour tenter de justifier leur nihilisme national, font référence à une phrase du manifeste communiste de 1848 : « Les ouvriers n’ont pas de patrie. On ne peut pas leur prendre ce qu’ils n’ont pas ». Cette phrase de Marx et Engels décrit simplement une réalité concrète dans laquelle les travailleurs sont dépossédés de tout par la bourgeoisie qui se considère comme propriétaire de tout, y compris de la nation elle-même. Mais les falsificateurs du marxisme se gardent bien de citer la suite : « Comme le prolétariat doit en premier lieu conquérir le pouvoir politique, s’ériger en classe dirigeante de la nation, se constituer lui-même en nation, il est encore par-là national, quoique nullement au sens où l’entend la bourgeoisie » (Marx et Engels, Manifeste du parti communiste). La responsabilité de la classe ouvrière dans la lutte pour l’indépendance et l’avenir de la nation n’est pas un complément à son combat pour la révolution socialiste ; elle est partie intégrante de ce combat.
Le PCF dans ce combat
Considérant que nous sommes les seuls à répondre à cette question nationale par l’unité et le progrès ; que la logique mortifère du profit ne mène qu’aux nationalismes ou à la renonciation des souverainetés nationales et populaires ; que la paix nécessaire entre les peuples nous amène à accentuer grandement la lutte contre l’impérialisme dans notre pays ; que l’idéal républicain est plus que jamais d’actualité ; que la prise du pouvoir et le socialisme doivent être notre démarche ; notre Parti doit continuer, approfondir, et affirmer par son action quotidienne cette volonté.
Loin de toute caricature ou folklorisme, nous continuons la France. La tentative désespérée d’une frange de la gauche d’abandonner cet héritage populaire sous prétexte de "modernisme" ne doit pas nous faire dévier de cette route idéologique.
Poser la question de la nation c’est aussi poser celle de la souveraineté, en toutes ses dimensions. C’est parler de réindustrialisation et de reconstruction de nos filières industrielles, c’est parler de nationalisation – notion à rebours de la "simple étatisation" - c’est, en définitive, reprendre la main sur nos choix.