Lille, le 24 mai 2010
Contribution de Gautier Weinmann à la rencontre-débat avec Michelle Demessine et Jacques Fath « Paix, solidarité, désarmement, quelle politique de la France à l’étranger ? »
Une contribution politique pour le programme
Dans le cadre de ce débat organisé à Lille, je suis intervenu pour indiquer ce qui m’apparaît comme les manques du programme du Front de gauche.
Jacques Fath a été assez réceptif. Quant aux représentants du Parti de Gauche présents, ils ont bien été obligés de faire leur mea culpa sur la Libye...
1) La guerre s’intensifie en Libye. La France envoie des hélicoptères d’attaque pour mieux zigouiller les Libyens. L’assassinat de Kadhafi n’a jamais fait partie de la résolution de l’ONU, les masques impérialistes tombent et certaines illusions s’estompent.
Il faut affirmer que la guerre propre n’existe pas. Il faut mettre dans le programme du Front de gauche l’arrêt immédiat des frappes sur la Libye et l’arrêt de notre participation à cette guerre civile, ce qui ne figure pas actuellement. Il y a un vide terrible. Il faut être solidaire du peuple libyen, comme avec le peuple afghan, ce qui n’empêche pas d’exiger le retrait des opérations de guerre dans ces deux pays !
2) Sur la doctrine d’utilisation de nos forces, je voudrais dire que la légalité internationale est une condition nécessaire, mais pas suffisante. Combien de guerres impérialistes ont obtenu l’aval du Conseil de sécurité ? Je me pose donc la question de la réforme de l’ONU. Quelle réforme veut-on exactement ? Pense-t-on qu’une réforme de l’ONU soit suffisante ?
3) Concernant la reconnaissance de l’État palestinien, pourquoi ne pas inscrire la proposition de la reconnaissance unilatérale, par la France, de l’État palestinien ? Cela aurait un effet d’entraînement. D’autres l’ont fait…
4) Pour lutter contre le surarmement, il faut un objectif concret de diminution de notre budget militaire. Cela pourrait être une réduction par deux, à débattre, incluant la fin du nucléaire militaire, arme obsolète.
5) Pour sortir les armes de la logique de rentabilité financière, on doit nationaliser toute l’industrie de défense française et la consolider dans un pôle public qui promeuve le travail en synergie des industries, et non la concurrence. On en est loin lorsqu’on voit que la SNPE a été absorbée par Safran ou que DCNS est promise à Thales, industrie privée.
6) Si le retrait de la France est le préalable indispensable à la dissolution de l’OTAN, il faut faire attention à ne pas remplacer un impérialisme atlantique par un impérialisme européen. Une défense européenne ne peut être le pendant à l’OTAN, on le sait bien - pratiquement tous les membres de l’Union sont dans l’OTAN -. Mais surtout, puisque nous sommes contre le Traité de Lisbonne, nous somme aussi, je l’espère, contre la « coopération structurée permanente », expression barbare. Proposons-nous la fin de la coopération structurée permanente ?
7) Voulons-nous continuer à jouer les gendarmes du monde ? Non. Dans ce cas, il faut fermer toutes les bases militaires permanentes françaises à l’étranger. Cela ne signifie pas la fin des opérations extérieures, ce sont deux choses différentes.
8) Taxer les ventes d’arme pour les Objectifs du Millénaire pour le développement. Fin de la vente d’armes à Israël, en concordance avec la Position commune européenne.
9) Sur les coopérations internationales. J’insisterai sur la nécessité de mettre fin à l’accord d’association UE-Israël. Avec des pays d’Afrique du Nord, les coopérations, sous la forme actuelle, sont à dénoncer avec force. Les accords d’association prennent la forme d’accords de libéralisation des échanges de biens, services et capitaux. Pourquoi ne pas mener une campagne contre ces accords de pillage économique ? Quelles coopérations économiques alternatives ?
Si on prend l’accord d’association avec la Tunisie, l’article 34 prévoit la libre circulation des capitaux concernant les investissements directs en Tunisie et le rapatriement du produit de ces investissements et de tous les bénéfices en découlant. L’article 36 édicte qu’est « incompatible avec le présent accord toute aide publique qui fausse ou menace de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions ».
10) Le programme du Front de gauche ne peut être muet sur la défense de Cuba socialiste et la fin du blocus US.
Voir en ligne : Le programme du Front de gauche : Changer le cours de la mondialisation : une politique internationale de paix et de coopération