Le Rafale, l’Union bancaire, Gaia et le Lapin de jade...
Regardez le monde qui bouge !

, par  pam , popularité : 1%

En quelques nouvelles entendues à la radio ce 20 décembre au matin, un raccourci saisissant de l’état réel du monde, bien loin du discours médiatique dominant sur un occident démocratique puissant, confronté à un monde instable et dangereux. C’est le rapprochement inopiné de trois nouvelles présentées successivement qui fait entendre, malgré le discours dominant, ce monde qui bouge...
- le Brésil rejette le Rafale et choisir l’avion suédois
- l’Union Bancaire Européenne se met en place
- le satellite Gaia est lancé de la base de Kourou par une fusée Soyouz...

Évidemment, aucun journaliste n’a fait de commentaire rapprochant ces trois informations, et pourtant, elles révèlent toutes les trois l’affaiblissement des impérialismes historiques européens et nord-américain, la fuite en avant dans l’OTAN et l’UE qui se heurte de plus en plus aux résistances du Sud, dans un contexte d’accélération des capacités scientifiques et techniques de l’humanité dans lesquelles le Sud joue un rôle croissant...

Le Rafale gagne en Libye mais la France perd au Brésil

Quelques jours seulement après la visite du président français, la présidente du Brésil lui inflige un revers politique en annonçant le choix du Gripen du suédois Saab pour 36 avions de combat et 4,5 milliards de dollars. Le Figaro avait pourtant annoncé fièrement après la visite en 2009 de Sarkozy au Brésil :

"Le chef de l’Etat est rentré, la nuit dernière, à Paris, avec le premier contrat de ventes du Rafale. Un succès politique, diplomatique et industriel pour le président français puisque l’achat de ces 36 avions de chasse représente un contrat d’environ 5 milliards d’euros."

Au-delà des questions techniques et économiques, les commentaires politiques sont révélateurs du fonds, le Brésil comme les BRICS et tous les pays du Sud, n’ont aucun intérêt à rendre leur défense dépendante d’une grande puissance impérialiste qui n’hésite jamais à imposer brutalement ses propres intérêts !

L’annonce de Sarkozy n’était pas un bluff, sauf que le journal brésilien "Le Globe" révèle la colère de Lula contre la France qui refusait l’accord sur l’enrichissement de l’uranium iranien avec la Turquie, alors que Lula avait personnellement conduit les négociations avec Sarkozy. Lula a finalement reporté la décision en discussion sur le Rafale... remettant en lice les concurrents...

Et les révélations de Edward Snowden sur l’espionnage US (entre autres au Brésil) a éliminé brutalement l’offre US du F-18 de Boeing, qui était donné favori de la présidente brésilienne.

Les pays indépendants savent bien qu’il y a un lien entre l’industrie militaire et la domination économique et politique. Les dirigeants occidentaux ne s’en cachent pas ! Lors d’une visite dans la base française à Abu Dhabi, Hollande [1] avertit les pilotes de Rafales susceptibles d’intervenir au Mali qu’il faudrait montrer aux dirigeants du Golfe toutes les qualités du Rafale. Et d’ajouter : "C’est aussi un élément très important de votre mission : montrer que les matériels français sont les plus performants... Merci pour votre double mission : à la fois opérationnelle et... commerciale !"

Et c’est quelques heures après le début de l’intervention française au Mali, que l’Inde a annoncé qu’elle envisageait d’acheter 63 Rafales de plus à l’avionneur français, dans un contrat en discussion depuis janvier 2012 pour 126 avions. François Hollande commente :

"C’est un très bon avion. Je n’ose pas dire que l’expérience l’a démontré, mais c’est pourtant le cas, aussi bien en Libye que sur le théâtre malien."

La France Sarkolandisée perd les derniers acquis de sa diplomatie indépendante en devenant le pays occidental le plus agressif militairement, à la pointe de l’OTAN. Elle le paie et le paiera de plus en plus cher dans ses relations avec les nombreux pays qui tentent de construire leur indépendance économique. Comment faire confiance à un Laurent Fabius, reprenant l’histoire coloniale du parti socialiste en appelant à l’assassinat de dirigeants étrangers ?

Le choix du Brésil rejetant ainsi les US et la zone Euro, ce choix du pays du Nobel, historiquement symbole de la neutralité, est bien un choix politique [2]

Pas d’inquiétude cependant selon les échos pour Dassault :

Si les budgets militaires ne sont plus ce qu’ils étaient dans les pays développés, et même si les acheteurs des pays émergents sont devenus de plus en plus regardants sur la marchandise, le secteur dans son ensemble a conservé suffisamment de dynamisme ces derniers mois, grâce à sa branche civile, et donc suffisamment d’attention, pour que les investisseurs aient eu le loisir de bien mettre en perspective ce dernier rebondissement du duel sans merci auquel se livrent ces « top guns » depuis des années. Chez Dassault Aviation, ils suivent aussi les démonstrations de l’avion d’affaires haut de gamme Falcon...

Cette défaite du Rafale n’est donc qu’un épisode, et la surdomination militaire des USA et de ses alliés anglais et Français reste la caractéristique principale du monde. Mais un monde qui bouge et dans lequel des puissances économiques qui sont désormais de la taille des plus grands affirment leur indépendance politique et militaire.

L’Union Bancaire contre l’Union des peuples...

Et dans cet affrontement qui bouscule le partage historique du monde entre les grandes puissances, le capitalisme européen pour garantir son taux de profit et donc les revenus de ses rentiers et actionnaires, organise la fuite en avant dans la dissolution des cadres nationaux au profit d’une Union Européenne qui apparait de plus en plus comme une nouvelle institution répressive. Loin d’un nouvel état plurinational qui organiserait "son" capitalisme monopolistique, cette institution "hors sol" des multinationales est au service d’oligarchies économiques, pour qui les peuples et leurs velléités politiques sont des obstacles à maitriser, et si nécessaire réprimer, face à la mondialisation capitaliste.

Cette union bancaire est une nouvelle étape pour imposer cette domination sur les peuples et le Figaro ne s’y trompe pas : « Un saut fédéral qui change la donne », « une révolution en Europe ».

Comme toujours, on fait la guerre officiellement pour sauver des victimes, et on fait l’Union Bancaire officiellement pour sauver les épargnants de la prochaine crise financière... Mais les mécanismes sont clairs :

- la supervision des banques est désormais centralisée directement à la BCE et non plus par les états, qui comme ils disent, manqueraient de courage pour résister aux pressions des intérêts privés. Au contraire, on peut être sûr que la BCE n’hésitera jamais face aux mesures les plus dures. Elle a démontré son insensibilité aux souffrances du peuple grec, a qui elle a imposé un recul social historique, digne des plus beaux succès du FMI en Amérique Latine dans les années 80, avant que les peuples concernés ne bousculent les rapports de forces politiques dans leur pays.
- tenant compte de la fronde générée par la décision de s’attaquer aux comptes de tous les chypriotes lors de la dernière crise bancaire de ce pays, l’Union Bancaire va garantir les dépôts de moins de 100.000 euros, et veut faire croire que les actionnaires et créditeurs paieront les dettes... en fait, cet engagement est limité à 8% des dettes... Si demain un autre Dexia annonce un trou de 2.000 M€, nos impôts n’auront à combler "que" 1.840 M€...
- certes, il y aura un fonds de garantie, qui devrait être mis en place d’ici 10 ans, d’autant qu’il nécessite un nouveau traité européen... fonds doté de 55 Milliards, ce qui peut paraitre énorme, mais le bilan cumulé des banques européennes atteint 43.000 Milliards [3] ! L’Allemagne a imposé que le fonds de stabilité (MES) doté lui de 500 milliards ne soit pas impliqué directement, ce seront aux états s’ils en ont besoin de s’endetter pour financer leurs banques... L’Union Européenne impose ainsi son contrôle mais sans bien sûr autoriser une redistribution tournée vers l’égalité...

Et au moment de ce pas de plus dans la dépossession des peuples de leur capacité à agir, l’idéalisme proeuropéen continue à faire ses ravages. La dirigeante des verts, Emmanuelle Cosse, à la télévision, affirme que son parti souhaite la dissolution de la France et des nations européennes au profit des régions européennes et d’une Europe fédérale. Autrement dit, elle veut encore plus d’union bancaire !

Zoyouz lance Gaia 3 jours après que Shenzhou-10 pose Chang’e-3 sur la Lune...

Mais le même jour, le satellite Gaia était mis en orbite par une fusée Soyouz, lancement présenté par le Pdg d’Arianespace disant « Nous sommes à l’aube de révolutionner notre compréhension de l’histoire de la Voie lactée ». Ce satellite est une réussite du CNES, outil national du développement de l’aventure spatiale Française, dans le cadre d’une structure de coopération d’une autre époque, entièrement indépendante de l’Union Européenne. L’ESA est un outil de coopération entre des pays [4] avec un financement de base solidaire et des projets optionnels à géométrie variable... [5].

Et contrairement aux projets technocratiques de l’Union Européenne, cela fonctionne plutôt bien ! La sonde Gaia va permettre de passer des 100.000 étoiles de son prédécesseur HYPARCOS à 1 milliard d’objets avec une précision 100 fois meilleure... et ce milliard ne représente à peu près que 1% de ce qui existe dans l’univers... autant dire que l’aventure humaine n’en est qu’à son enfance...

Et c’est le lanceur de légende Soyouz, celui qui a lancé Spoutnik en 1957, puis Gagarine et plus de 1.700 tirs, qui a une nouvelle fois montré sa fiabilité. C’est le sixième tir de Soyouz depuis son pas de tir guyanais dans le cadre d’une coopération entre l’ESA et la Russie initiée en 1966 avec l’URSS !

Et la Chine de son côté, venait de réussir 3 jours avant son premier alunissage du "lapin de jade", le Chang’e-3 transporté par la fusée Shenzhou-10 qui a déjà permis 5 voyages de taikonautes... Et la Chine fait vivre sa station spatiale Tiangong-1, lancée le 29 septembre 2011, et annonce son premier voyage lunaire avec retour d’échantillons pour 2017...

Pendant ce temps, le CNRS voit son budget 2014 disponible baisser de 4,6 % et perd 479 équivalents temps plein. La Conférence des Président d’Université lance un appel au secours. « Une part importante d’universités est inéluctablement conduite au déficit »... De fait, la priorité absolue est donnée aux grandes multinationales qui ne peuvent voir leur développement que dépendant d’autres zones économiques, avec le système financier qui défend bec et ongles sa part des profits totaux au service des oligarchies. On le voit avec la soumission toujours plus directe de la recherche aux impératifs privés, en même temps que la stratégie de "spécialisation intelligente" conduit à accepter de détruire des pans entiers de l’histoire technologique de la France.

Les USA ont reculé en Syrie pour la première fois depuis longtemps. Ils réévaluent leur stratégie face à l’Iran. Décidément, oui, le monde bouge, et la militarisation qu’affiche de plus en plus la France n’est pas un signe de force, au contraire, sauf que cette militarisation montre les risques que portent la soumission à cette mondialisation capitaliste qui porte en elle la guerre mondiale comme la nuée l’orage...

Le message du jour aurait pu être en conclusion de cette tranche d’information "l’union des banques pour les oligarchies et les guerres, ou l’union des peuples pour la science et la paix".

[1Selon le Canard enchainé.

[2Même si le rapprochement de la Suède avec l’OTAN se poursuit depuis sa participation militaire à l’opération en Libye.

[3Deux exemples pour illustrer : le trou de la seule banque Dexia était de 3 milliards, la petite Slovénie qui vient d’entrer dans l’UE annonce un besoin de 4,8 Milliards pour renflouer ses banques...

[4L’ESA compte 20 États membres. tous les pays membres de l’Union européenne ne sont pas membres de l’ESA et inversement tous les États membres de l’ESA ne sont pas membres de l’UE. L’ESA est une organisation entièrement indépendante bien qu’elle entretienne des relations étroites avec l’UE en vertu d’un accord-cadre conclu entre les deux organisations.

[5Les activités obligatoires de l’ESA (programmes de sciences spatiales et budget général) sont financées par des contributions financières que versent tous les États membres et qui sont calculées en fonction du produit national brut de chacun.

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