Au Front de gauche... les cadres supérieurs en sont le fer de lance ? Une nouvelle Mélenchonade...

, par  Pascal Brula , popularité : 3%

S’agit-il de se référer sans cesse de manière bougonne à l’échec des communistes de juin 2011 ? Ou de se lancer à corps perdu dans cette embellie des sondages qui reflètent certainement une réalité, mais laquelle ? Car après tout, si Mélenchon rassemble 100.000 personnes à la Bastille et que les sondages lui donnent 14%, pourquoi ne pas se laisser porter par le courant, sans se poser de question.

Pourtant, la vraie question qu’un communiste devrait se poser (selon mon modeste point de vue, bien sûr) est la suivante : dans ce contexte (un groupement d’états-majors mené par un bateleur trotsko-réformiste), qu’est-ce qui peut le plus faire avancer nos idées et notre combat pour une société de rupture avec le capitalisme ?

Dans la campagne actuelle, j’ai plutôt l’impression que l’expression des communistes est minorée et même qu’elle recule toujours plus. Vous me direz, c’était couru d’avance qu’en refusant un candidat communiste, on se tirait une balle dans le pied. Oh je sais bien qu’il y a quelques sections où les communistes ont les mains libres pour s’exprimer. Mais je sais aussi que dans un grand nombre d’autres sections et de fédérations, seul le Front de gauche se réunit, s’exprime, voire impose ses décisions lorsqu’il y a encore quelques réunions du PCF. Il aurait été bien de pouvoir mener une vraie campagne communiste organisée nationalement, sur des thèmes communistes, pour essayer de percer la carapace médiatique monopolisée par Mélenchon. Mais cela n’a pas été possible et pourtant...

Et pourtant, dans la situation actuelle de crise systémique du capitalisme, tout est ouvert. Dans ce contexte, que signifie la "vague" Mélenchon-Front de gauche ? Que la personnalité de Mélenchon jouerait un rôle capital ? 2012 n’est pas 2007 et encore moins 2002. Je pense personnellement qu’un candidat communiste aurait pu faire aussi bien, car les travailleurs et l’ensemble de la population sont en train d’accumuler de l’expérience qui ne demande qu’à s’exprimer. Cette expérience a commencé avec la politique de casse et de surexploitation organisée par les gouvernements Jospin, Raffarin, puis Villepin et Fillon, politique qu’ont subi de plein fouet les travailleurs dont une grande partie avait pourtant voté Sarkozy en 2007 en pensant lui échapper. Les points d’orgue de la résistance qui se lève ont été les luttes massives contre le CPE (gouvernement Villepin) et pour les retraites (gouvernement Fillon), jeunes, parents et anciens réunis. Elle s’est prolongée avec le Non de classe au TCE en 2005, car la dimension européenne de la dictature du capital s’est imposée dans la tête des français souffrant le plus de la crise. Et tout cela leur est confirmé par les attaques sans précédent contre les travailleurs grecs. Enfin, on ne dira jamais assez, combien il y a eu et il y a encore d’entreprises en lutte, que ce soit pour les salaires ou plus tristement contre la fermeture des usines, ce qui semblait inimaginable, il y a seulement quelques années en arrière. D’ailleurs, dans cette bataille, on peut se demander où est la direction du parti ? J’ai connu un vrai parti communiste dans lequel la direction réfléchissait en permanence à l’organisation des luttes dans les entreprises où les communistes se trouvaient comme des poissons dans l’eau, seul véritable baromètre pour mesurer le rapport de force avec la bourgeoisie. De mon point de vue, c’est toute cette expérience de résistance accumulée par la population et les travailleurs qui est en train de s’exprimer au travers de la candidature Mélenchon. Et c’est pourquoi, je ne dis pas qu’il faut combattre ce mouvement qui est bien concret et malgré tout positif, mais que nous devons profiter de notre position pour pousser dans le bon sens avant que la machine ne s’emballe dans une impasse réformiste (si ce n’est déjà trop tard).

En effet, peut-on se laisser porter par la "vague" Mélenchon sans rien dire ? Car même s’il y a des éléments intéressants dans le "Programme partagé", ce dernier n’organise en fait aucune rupture avec le capitalisme qui, dans son état actuel, ne peut plus "être passé à la machine" comme le dirait Souchon. En ce sens, je dirais même que le "Programme partagé" peut être dangereux, car créateur d’illusions. De même, doit-on gober béatement tout ce que raconte Mélenchon sans le retoquer, sous prétexte que "pour une fois qu’il se passe quelque chose..." ? Non bien sûr, car dans le niveau de crise qu’a atteint le capitalisme, notre rôle est de porter un point de vue révolutionnaire dans la vie concrète et sur le plan des idées. Dans cette période d’euphorie électoraliste, gardons notre esprit critique pour conserver la possibilité d’aller de l’avant.

Vous me direz : "mais alors, pourquoi ce titre à ton article ?". Et bien tout simplement pour tirer la sonnette d’alarme, celle du "bougon" communiste qui soutient que Mélenchon n’est pas celui que l’on a envie de croire. Le titre de mon article se réfère à une interview donnée au journal Cadremploi par le candidat. Le journaliste David Abiker a intitulé la partie de l’interview "Les cadres conduiront le changement", car c’est ce qu’exprime très clairement Mélenchon ! A moins qu’il soit capable de dire tout et son contraire...

« Les cadres sont la clef. Le moment où la classe ouvrière se met en ébullition, c’est une chose : c’est triste à dire, on est habitué. (Par contre, ndlr) C’est le moment où la couche moyenne supérieure qualifiée dit : "maintenant, ça suffit, y’en a marre, c’est la pagaille, on va s’en occuper nous-mêmes". Ça c’est une idée de cadre. Le même que vous voyiez, qui deux mois avant vous tenait des discours un peu angéliques sur l’avenir de la société, vous le retrouvez, énervé comme pas un, soit il vous dit qu’il va aller attaquer une banque, soit qu’il n’aime pas les arabes. En réalité, il est tombé dans les excès. Vous vous dites, c’est pas possible, il était tout calme, tout gentil, et là… tout saute ! Les cadres vont inéluctablement se mettre en mouvement et ils vont marcher devant. Je n’ai pas de doute sur le sujet. Je ne sais pas vous dire quand ça va se passer, mais ça va se passer… »

Le journaliste interprète à raison les propos de Mélenchon en lui faisant dire qu’il "estime que les cadres assureront la transformation de la société capitaliste à bout de souffle". Même si ce ne sont pas tout-à-fait ses propos, on peut dire que c’en est une traduction à peu près correcte. En tous cas, que la classe ouvrière ne se trompe pas, dans la tête des dirigeants du Front de gauche, il n’y a pas forcément ce que les communistes souhaiteraient que, logiquement, il y ait et même ce qu’en apparence (à la tête de la manif de la Bastille, notamment), il y avait...

Pascal Brula

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