Ce qu’est le populisme de gauche, antagonique à l’organisation démocratique du prolétariat

, par  Jean-Paul Legrand , popularité : 21%

POURQUOI LA FRANCE INSOUMISE EST UN MOUVEMENT POPULISTE ANTI-COMMUNISTE ?

On ne s’étonne aucunement de l’attitude de La France insoumise à l’occasion des élections municipales, lorsqu’elle présente des listes partout, y compris là où cela risque objectivement de faire battre des maires communistes et à favoriser l’élection de maires de droite ou d’extrême droite.

On ne s’en étonne pas, parce que La France insoumise relève pleinement d’une logique populiste.

Le présent article n’entend donc pas se limiter à une polémique conjoncturelle ou électorale. Il vise à caractériser politiquement et théoriquement ce qu’est le populisme de gauche, en tant que courant structuré, historiquement situé, et fondamentalement antagonique à l’organisation démocratique du prolétariat telle que la conçoivent les marxistes, les communistes.

LE POPULISME DE GAUCHE : UN OBSTACLE À L’AUTONOMIE DU PROLÉTARIAT

Le populisme de gauche constitue le bras gauche alternatif de la domination capitaliste. Il existe non pour abolir cette domination, mais pour empêcher que le prolétariat ne s’organise de manière autonome, consciente et durable en vue d’une transformation socialiste de la société.

À l’inverse, un parti communiste authentique a pour vocation centrale de favoriser l’organisation politique, économique et théorico-stratégique du prolétariat. Cette organisation ne peut être réduite à l’horizon électoral : elle s’inscrit dans la lutte de classes quotidienne, dans la durée, et dans la perspective de la prise du pouvoir d’État, conformément à l’analyse marxiste selon laquelle « l’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes » (Marx, Statuts de l’AIT).

L’ORGANISATION COMMUNISTE : CELLULES, DÉMOCRATIE VIVANTE ET INTELLECTUEL COLLECTIF

Les cellules communistes de quartier et d’entreprise, les réseaux d’échanges sociaux et politiques construits en dehors des intérêts capitalistes constituent le socle irremplaçable d’une démocratie vivante du monde du travail. Elles sont les lieux où s’articulent expérience concrète, formation politique et élaboration collective de la stratégie.

Les directions communistes, à tous les niveaux, n’ont de légitimité que si elles se donnent un objectif clair :
• dynamiser la vie des cellules,
• recruter et former de nouveaux militants,
• confier des responsabilités réelles en fonction des compétences et des aspirations,
• assurer le rajeunissement permanent de l’organisation,
• construire ce que Gramsci appelait un « intellectuel collectif », capable d’unir théorie et pratique.

C’est à cette condition seulement que peut émerger une stratégie démocratique de conquête du pouvoir d’État et de construction du socialisme.

LE POPULISME CONTRE LE MARXISME EN ACTION

Un parti véritablement communiste combat l’opportunisme et le révisionnisme propres au populisme. Ceux-ci vident la théorie marxiste et léniniste de sa puissance critique et opératoire, en la réduisant soit à un corpus figé, soit à un discours moral abstrait.

Le populisme s’oppose au marxisme en action, c’est-à-dire au marxisme pratiqué collectivement par des militants organisés. Il tolère éventuellement Marx dans les livres ou dans la bouche de quelques experts médiatiques, mais il refuse qu’il devienne un outil vivant d’analyse et de transformation sociale porté par le plus grand nombre.

PERSONNALISATION ET CULTE DU CHEF : UNEPOLITISATION DE MASSE

Le populisme favorise systématiquement la personnalisation de la politique. En substituant le chef au collectif, il retire aux prolétaires leur responsabilité historique de s’organiser démocratiquement. Cette logique conduit inévitablement au culte du leader, forme moderne de dépossession politique.

Comme l’écrivait Lénine, sans organisation consciente et disciplinée, il n’y a pas de force révolutionnaire durable. Le populisme, au contraire, dissout la conscience de classe dans une adhésion affective et fluctuante.

UNE FALSIFICATION DE L’HISTOIRE DU MOUVEMENT OUVRIER

Le populisme se réclame volontiers de l’histoire du prolétariat, mais il en extrait uniquement les épisodes glorieux, en occultant les contradictions, les erreurs et les défaites. En refusant toute critique dialectique de cette histoire, il la transforme en récit mythifié.

Ce faisant, il désarme le prolétariat de la connaissance de sa propre expérience historique, pourtant indispensable pour éviter la répétition des impasses passées.

ÉLECTIONS, CONSTITUTION ET ILLUSIONSMOCRATIQUES

Pour le populisme, l’organisation démocratique permanente en parti de lutte est une aberration. Son objectif réel n’est ni la prise du pouvoir d’État, ni la transformation du mode de production, ni la mise en place d’institutions favorisant le monde du travail contre la bureaucratie capitaliste.

Son horizon est la conquête de positions gouvernementales, dans l’illusion qu’une victoire électorale et un changement constitutionnel suffiraient à contraindre la classe capitaliste à renoncer à sa domination.

Or, comme Marx l’a montré, une Constitution ne transforme jamais une société : elle est toujours le produit d’un rapport de force issu de la lutte de classes. Faire d’une Constitution « citoyenne » l’axe central du combat politique, en l’absence d’un prolétariat organisé, formé et conscient, ouvre la voie à de graves régressions démocratiques.
La bourgeoisie, elle, dispose du temps, des moyens, des think tanks et des appareils idéologiques pour peser sur toute procédure constituante.

LE MYTHE D’UN CAPITALISMEFORMABLE

Enfin, le populisme de gauche entretient l’illusion fondamentale selon laquelle le capitalisme serait réformable. Or, plus le capitalisme se développe, plus il est contraint d’intensifier la surexploitation du travail, conformément à ses lois internes d’accumulation.

Il ne s’agit donc pas de réformer le capitalisme, mais de le dominer politiquement par une transformation radicale des rapports de propriété, de production et de pouvoir. Cela suppose l’instauration d’un régime politique nouveau, démocratiquement choisi par celles et ceux qui ne vivent que de leur travail, et qui utilise l’appareil d’État pour contraindre la classe capitaliste à se soumettre aux décisions du peuple organisé.

C’est précisément cette perspective que le populisme de gauche redoute et combat avec acharnement , car elle met fin à son rôle historique : canaliser la colère sociale pour préserver l’essentiel de l’ordre existant capitaliste.

Jean-Paul LEGRAND
24/12/2025

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