39ème congrès du PCF
Je ne suis pas du tout convaincu par la thèse du « Communisme déjà là »

, par  Jean-Paul Legrand , popularité : 3%

Sur la thèse du « communisme déjà là » dont l’un des créateurs est B. Vasseur, il y a un réductionnisme de la pensée de Marx qui m’interroge.

Sur la thèse du communisme déjà là dont l’un des créateurs est B. Vasseur, j’apporte ici ma réflexion : j’ai écouté la conférence de Bernard Vasseur publiée en vidéo il y a quelques mois par le journal l’Humanité. Il y développe une thèse qui est celle dite du « communisme déjà là ».

Je suis très sceptique, pourquoi ? Il y a dans son exposé un réductionnisme de la pensée de Marx qui m’interroge.

Si je comprends son exposé, il suffirait que nous soyons dans une société capitaliste aux forces productives extrêmement développées pour que les hommes puissent envisager de passer au communisme dans un avenir proche.

Or Vasseur oublie qu’il n’y a jamais de correspondance directe entre l’état matériel des forces productives et l’état de la pensée, ou autrement de l’idéologie des hommes. Il y a toujours un décalage qui se règle, se réduit dans la lutte des classes, par l’appropriation des hommes de leur expérience de classe et cela progressivement. Progressivement, j’insiste là dessus.

Par conséquent si l’idée que le communisme frappe à notre porte est séduisante en raison de la socialisation poussée des forces productives dans le capitalisme, on est loin d’une socialisation de la propriété et de la gestion des moyens de production qui elle nécessite un très haut niveau de conscience non seulement technique des travailleurs mais surtout politique de leur part. Je ne voudrais pas que l’on sombre dans l’idéalisme qui consisterait à dire que les conditions sont d’emblée existantes pour construire le communisme, elles le sont en partie du point de vue des potentialités du travail mais elles restent hypothétiques quant à l’idéologie nécessaire pour une maîtrise politique des moyens de production par la classe travailleuse. Il faut un certain temps historique pour que les idées des hommes s’accordent au nouveau car l’ancien perdure toujours longtemps.

Par conséquent je m’interroge sur la condamnation sans appel de Vasseur sur ce qu’il nomme « l’étapisme ».

Je ne vois pas comment déjà dépasser le capitalisme sans rupture avec lui et sans que cette rupture ne se fasse par des luttes progressives et durables parce que tout simplement les classes dominantes résistent au nouveau et que même si la révolution est en œuvre son pendant est la contre révolution. Vasseur élude cette question qui est au cœur de toutes les expériences révolutionnaires : celle de la contre-révolution !
Ensuite je trouve rapide et caricatural ce qu’il dit de l’URSS. Non que je ne pense pas qu’il faille éluder la question de la construction du socialisme « stalinien » mais au contraire il nous faut l’étudier avec beaucoup plus de rigueur que les caricatures qui en sont faites dans et hors du PCF.

C’est le reproche que je ferai à certains intellectuels communistes français ou d’autres qui ne sont pas communistes qui ont une fâcheuse tendance à être franco-centriste du point de vue politique et philosophique. Tout ce qu’il a dit sur le socialisme existant sont des raccourcis rapides, bien trop rapides pour venir sérieusement à l’appui de sa thèse.

J’ai depuis longtemps intégré la réflexion de Marx sur l’individu quand il dit que « le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous ». Mais cette idée ne peut être sortie du contexte précis dans lequel elle se trouve à la fin du 2ème chapitre du "Manifeste" ! Et je pense que sur les millions de lecteurs du "Manifeste" de Karl Marx, il n’ y a pas eu des millions qui n’ont pas lu et pas réfléchi sur le sens profond de cette phrase. La mettre en exergue est intéressant mais à condition de le faire en la remettant dans son contexte et c’est là que le bât blesse avec l’intervention de Vasseur.

En effet Marx conditionne ce libre développement de chacun au moment où les différences de classe auront disparu et QUE TOUTE LA PRODUCTION sera concentrée entre les mains des individus associés, qu’à ce moment de l’histoire les pouvoirs publics PERDRONT leur caractère politique, c’est à dire que Marx envisage bien un processus d’abolition de l’Etat.

Pensons nous sérieusement que la condition des salariés aujourd’hui même avec des forces productives développées comme jamais dans l’histoire permet le libre développement de chacun ? Bien sûr que non et donc pour y parvenir il va falloir que les producteurs deviennent propriétaires des moyens de production, maîtres des rapports de production par des gestions dont ils devront faire l’apprentissage dans le but de devenir une gestion pour la société et non plus pour une accumulation privée du capital mais une transformation de celle-ci en économie de libre association des travailleurs au service des besoins de la société.

Ce processus qu’on le veuille ou non ne peut se constituer que dans la lutte des classes et nécessairement par la domination de la classe anciennement dominée sur la classe anciennement dominante. Peut-on penser un seul instant que même avec des forces productives extrêmement développées avec des producteurs dirigeants le nouvel État prolétarien, la classe capitaliste disparaitra comme par enchantement et qu’il ne sera pas nécessaire d’avoir un moment historique de lutte pour combattre dans les relations sociales et dans l’idéologie ce que B. Vasseur évoque sous le terme d’aliénation ? Le fait que nous ayons conscience de cela alors doit nous conduire à considérer qu’il y a un moment historique de transition (que Vasseur nie comme étape) nommé par les marxistes et Marx lui même « le socialisme », qui je le rappelle n’a rien à voir avec la politique que le parti socialiste a mis en place qui n’est qu’un aménagement libéral du capitalisme.

Les marxistes l’ont justement nommé socialisme parce qu’ils n’abandonnent aucunement le communisme. Ils voient le communisme comme le but et ils doivent aussi le considérer comme le moyen tout en sachant que leur volonté n’est pas la seule et qu’elle se confrontera à tous ceux qui par intérêt de classe ou par survivance de l’idéologie ancienne s’opposeront au communisme.

C’est la raison fondamentale qui me conduit à considérer que la vision de Vasseur que j’ai tentée de comprendre dans cette conférence est totalement idéaliste parce qu’elle ignore les aspects fondamentaux de la persistance des anciennes idéologies dans les phases de transition d’un mode de production à un autre et donc qu’elle nie la nécessité de la lutte sur ce terrain éminemment politique, la nécessité donc de l’organisation du prolétariat dans son parti pour mener ce combat des idées en faveur non seulement des intérêts du prolétariat mais de la création d’une nouvelle culture universelle dans laquelle la classe qui travaille est reconnue comme la classe dirigeante parce qu’étant la seule capable de subvenir aux besoins de toute la société.

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