Bien sûr traquer et punir les coupables. Mais poser publiquement la question : comment se fait-il qu’ils aient pu (...)
Intervention de Fabien Roussel au Conseil National du 18 juin 2012
Une intéressante analyse des législatives par un camarade "nordiste", lue sur le blog de l’ANR (Action Novation Révolution)...
Avec trois députés élus dans le Nord, nous réélisons tous nos députés sortants. Ce résultat est à mettre à l’actif des trois députés, JJ Candelier, Marc Dolez et Alain Bocquet qui ont réussi à rassembler bien au-delà de la gauche sans rien cacher de leurs idées. Dans les deux arrondissements où ils se présentent, nous avons réussi, ces dernières années, à développer l’influence communiste bien au-delà des scores du Front de gauche à la présidentielle (Valenciennois : 340 000 habitants et 31% - Douaisis : 250 000 habitants et 30% contre 18% à 21% pour JL Mélenchon à la Présidentielle).
Contrairement à ce qui a été écrit dans la presse, nos députés sortants se sont présentés à leurs électeurs avec l’étiquette communiste ou parti de gauche ajoutée à celle du Front de gauche. Mais nous avons également fait un choix dans ces circonscriptions : celui de ne pas utiliser JL Mélenchon pour ne pas réduire le large rassemblement que les députés sortants ont su construire localement.
Nous enregistrons aussi un score en progression dans les grandes villes grâce à la dynamique du Front de Gauche suite à l’élection présidentielle, (8% à Lille contre 2% en 2007 – 7% à Roubaix contre 1,5% en 2007). Notre département contribue à hauteur de 115.000 voix au résultat national en tenant ces deux bouts. Nous enregistrons plus de 20.000 voix de plus par rapport à 2007.
Notre espace politique a été réduit pendant les législatives : après avoir viré Sarkozy, les français ont voté pour le changement et ont voulu donné une majorité franche au parti du Président de la République. Ne nous cherchons pas d’excuse – calendrier électoral inversé, bipartisme, vague rose – il est urgent de prendre le temps de repenser notre rôle et notre utilité. Quand la droite gagne : on perd. Quand la gauche gagne : on y laisse des plumes.
Certes, avec le Front de Gauche, nous avons augmenté légèrement notre influence lors des dernières séquences électorales. Mais l’électorat Front de Gauche reste très volatile et sensible au vote utile en faveur du PS. Surtout, nous n’arrivons pas à porter la colère des milieux populaires, du monde du travail et nous n’arrivons pas à percer dans le monde rural. De plus, il reste 40 à 50% d’électeurs qui choisissent de s’abstenir et qui se sentent méprisés par les politiques. Pour une part de ces électeurs que nous n’arrivons pas à convaincre, nous appartenons à la « classe politique ». Cela doit nous interroger sur nos pratiques.
De plus, la stratégie du « front contre front » renvoie dos à dos le Front National et le Front de gauche, réduit la portée de nos idées et peux donner de nous l’image d’un parti extrémiste.
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Oui, le Front de Gauche nous a fait sortir du trou dans lequel nous étions. Mais nous voyons ses limites, nous voyons que cela ne suffit pas et que nous devons être plus ambitieux pour notre pays, pour aller plus loin dans le rassemblement à construire.
Deux alternatives :
ou nous restons une force, un mouvement qui rassemble 10% à 15% des électeurs mais sans jamais ébranler le rapport de force existant,
ou nous nous fixons l’objectif de construire un rassemblement populaire, avec l’ambition qu’il inverse le rapport de force afin qu’il soit favorable à la plus grande majorité de nos concitoyens, dans leur grande diversité. Relevons le défi de rassembler les français pour relever la France, pour que notre pays reprenne son destin en main et les rênes de son économie !
On peut résister à cette guerre économique que mènent l’Allemagne, le patronat et les marchés financiers, si on arrive à rassembler largement les français, les humanistes, les acteurs économiques, - et même certains de droite !- qui rejettent cette économie ultra financiarisée.
Enfin, le Parti socialiste ne manquera pas de nous solliciter pour soutenir sa politique. Nous serons également appelés, dans les grandes collectivités, les agglomérations, les conseils régionaux et généraux, à accepter des plans d’économie, des mesures d’austérité.
Sans participer au gouvernement, nous pourrions demain participer à la mise en œuvre d’une austérité « décentralisée ».
Les conséquences politiques en seraient les mêmes. Ne devrions-nous pas nous préparer, dans les régions, à porter un autre projet que celui de l’accompagnement de la crise, et conçu à partir d’une autre utilisation de la richesse. N’avons-nous pas un message à adresser aux collectivités, étranglées par les banques mais indispensables à l’économie par leurs investissements publics ? A moins de deux ans des municipales, nous avons des initiatives à prendre sans attendre, sur ces enjeux-là.
Enfin, nous avons rencontré une population exaspérée par les conditions de vie dans les quartiers, dans les villages. Le « vivre ensemble », la solidarité, le respect, le goût de l’effort, le travail, sont des valeurs qui se perdent. Et cela nourrit l’isolement, le repli sur soi, parfois la colère… Choisissons de les porter dans nos actes militants, dans les quartiers ! De plus, la pauvreté et les malheureuses aides sociales ont conduit des hommes et des femmes à accepter de vivre dans des conditions indignes de ce 21ème siècle. Notre combat est-il de se battre pour gagner un « plus » d’aide sociale avec la gauche au pouvoir ou de faire reculer le chômage, défendre le droit au travail pour tous et une place pour chacun dans la société.
Combattre le capitalisme, c’est aussi défendre la dignité humaine, c’est faire respecter la dignité d’hommes et de femmes qui ont le sentiment d’être abandonnés.
En s’adressant à tous, bien au-delà de la seule gauche, dans cette période de crise profonde, économique et politique, le Parti communiste peut devenir un acteur essentiel d’un rassemblement très large, comme il a su le faire dans son histoire.
Les groupes communistes et Front de gauche du Sénat et de l’Assemblée nationale seront déterminants. Les pressions de l’exécutif socialiste, aidé par les médias, seront fortes et nous devrons y résister, sans tomber dans les dérives gauchistes ni dans le sectarisme, et sans rien perdre de notre originalité.
Fabien Roussel