A Mantes-la-Jolie, la municipalité de droite a célébré le 8 mai 1945, square Brieussel, là où un monument a été érigé « (...)
La lettre aux français du secrétaire général du PCF
Ce qu’aurait du écrire Fabien Roussel....
Chers citoyens, chers amis et camarades,
Le 7 juillet, nous avons barré la route à l’extrême-droite. Malgré ses 11 millions de voix au premier tour, malgré ses 37% des exprimés au deuxième tour, elle n’aura pas la possibilité de diriger le gouvernement de la France. C’était le premier objectif du nouveau Front Populaire.
Mais la crise politique est toujours là. La vague d’extrême-droite continue de monter et si le barrage républicain en a limité les conséquences, il ne l’a pas fait reculer. Il peut être submergé demain.
Il a aussi sauvé le bloc macroniste responsable des réformes que nous avons combattu sans succès. Le bloc de gauche a 179 députés, le bloc macroniste 165 et peut en débaucher à gauche comme à droite comme il l’a fait ces dernières années. Il n’y a pas de majorité pour une rupture politique. Le nouveau Front Populaire ne peut pas gouverner pour mettre en œuvre son programme.
Cette élection est pourtant bien une nouvelle défaite pour Macron et son gouvernement, mais dans le contexte d’une France très majoritairement à droite. La gauche ne représente que 28% des exprimés ce 7 juillet. Elle n’a mobilisé qu’un électeur sur 5 le 30 juin, alors qu’elle en représentait un sur 4 en 2012, et plus d’un sur 3 en 1981. La gauche est bien trop faible pour diriger la France.
C’est pourquoi les communistes ne participeront à aucun gouvernement. Ils ne voteront pas de motions de censure avec l’extrême-droite pour ne pas fragiliser encore plus la république, ils soutiendront même si besoin les éventuelles lois positives pour le monde du travail, les milieux populaires, les services publics, la paix et la coopération internationale, et ils combattront comme toujours les lois antisociales, l’austérité pour le peuple et les cadeaux pour les "premiers de cordées", et la dérive vers la guerre pour imposer une domination occidentale de plus en plus contestée.
Il faut se dire la vérité
Je dois vous dire la vérité. Les difficultés de la gauche ne sont pas résolues. Des millions d’ouvriers, d’employés, de jeunes ne lui font plus confiance pour contester la domination des capitalistes, pour changer la société.
C’est normal puisqu’au fonds, la gauche n’a jamais tiré les leçons de ses propres échecs. Ni en 1981, ni en 1997, ni en 2012, elle n’a "changé la vie", au contraire, elle s’est toujours adapté au capitalisme, à la mondialisation, et les inégalités, les ségrégations, les injustices se sont aggravées sous ses gouvernements. Le résultat est terrible. Le premier parti du monde du travail reste l’abstention, et le deuxième est le Rassemblement National.
Le parti communiste sort une nouvelle fois affaibli de cette élection. Nous avons pris nos responsabilités en participant au nouveau Front Populaire, nous avions des députés et des candidats le plus souvent dans les circonscriptions où le rassemblement national était déjà à un haut niveau en 2022. Nous l’avions battu difficilement, nous n’y parvenons pas cette fois.
Là aussi, nous n’avons pas clairement tiré toutes les leçons des échecs de la gauche dans les situations ou nous avons participé au gouvernement, comme dans celle où nous étions pourtant dans l’opposition. Nous n’avons pas non plus tiré toutes les leçons des échecs successifs du mouvement social, malgré la puissance de ses manifestations contre la réforme des retraites, du droit du travail... Nous devons dire clairement comment la gauche et le mouvement social pourrait faire autre chose, autrement, tenant compte de que ce qu’elle représente aujourd’hui pour le monde du travail.
Oui, je dois vous dire la vérité. Le monde du travail est profondément divisé par l’extrême-droite qui a réussi sa "dédiabolisation". Il faudra comprendre comment cela a été possible dans notre pays où la lutte contre le racisme a toujours été porté par la gauche. De l’affaire Dreyfus, jusqu’à la solidarité avec les luttes anticoloniales et pour l’indépendance des peuples, en passant par la lutte contre l’apartheid. Mais c’est la réalité actuelle.
Ouvrir en grand le débat pour faire reculer l’extrême-droite
C’est pourquoi je vais consacrer toutes mes forces à mobiliser les communistes pour un grand débat national sur cette division des milieux populaires dans toutes ses dimensions ; entre urbains et ruraux, métropoles et périphéries, statutaires et précaires, salariés et bénéficiaires d’aides sociales, divisions aussi sur l’origine, la religion, les modes de vie.
Nous devons mettre sur la table les questions déterminantes dans le vote d’extrême-droite, immigration, racisme, islam, inégalités, aides sociales. Dans la campagne des européennes comme des législatives, nous avons multiplié les arguments expliquant notamment les nombreux votes des députés RN contre les intérêts de beaucoup de leurs électeurs. Pourquoi cela n’a pas eu d’effet ? Pourquoi tant d’ouvriers, de retraités, de jeunes, pensent que le migrant n’est pas leur frère et ne voient pas que Bolloré qui finance et anime la bataille d’idées pour l’extrême-droite ne sera jamais leur frère ? Cela doit être l’urgence des forces de gauche, des militants progressistes. Nous devons faire la critique de nos discours contre l’extrême-droite et nous mobiliser pour la faire reculer enfin, pas à pas. C’est la condition pour reconstruire une alternative politique. Et je sais que c’est la condition pour reconstruire un parti communiste utile au monde du travail.
Un tour de France des assemblées du Front Populaire contre l’extrême-droite
J’appelle donc les communistes à organiser dans toute la France des assemblées du nouveau Front Populaire pour aborder toutes ces questions, partager la compréhension de ce rapport de forces si difficile pour la gauche, sortir des habitudes et des certitudes, sortir aussi d’une pratique quasi publicitaire du débat public où les slogans remplacent la réflexion partagée, sortir d’un débat limité aux réseaux sociaux qui enferment dans les "boucles" de ceux que l’on connait, attise les querelles inutiles entre les forces de gauche, et ne permettent pas de nous mobiliser pour parler à tous, y compris à ceux qui ne nous croient plus.
J’engage un nouveau tour de France pour contribuer, avec toute la direction du PCF a cet immense effort nécessaire pour réunir notre peuple, surmonter ses divisions, et ouvrir une perspective de rupture politique avec les droites, macronistes, dites républicaines ou extrêmes, une rupture progressiste pour un vrai changement de société.
10 juillet 2024,
le secrétaire national du PCF.