Mesdames, Messieurs, Chers amis et camarades,
Je ne suis ni historien, ni économiste mais ces deux domaines me semblent riches d’enseignements pour analyser le présent et prévoir le futur.
1. Le monde change
La mondialisation, le développement de la Chine, sont des éléments de remise en cause du leadership des États-Unis et du système économique libéral.
L’Europe est surendettée.
L’Afrique se désengage de la tutelle de la France, elle ne veut plus d’anciens ou de nouveaux maitres colonisateurs.
Après le coup d’État au Mali en 2020, on a assisté à ceux successifs au Burkina Faso, en Guinée, dernièrement au Niger et enfin au Gabon.
Depuis 2011, le groupe des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) plaide pour une refondation des organisations comme le "conseil de sécurité de l’ONU", "Le FMI", "La Banque Mondiale". La réforme du système monétaire se met en place. Depuis janvier 2024, l’Égypte, les Émirats Arabes Unis, l’Éthiopie et l’Iran ont rejoint les BRICS.
La réalisation d’un nouvel ordre international alternatif à celui imposé par l’Occident est donc possible, sur la base d’un engagement partagé, afin de restructurer l’architecture politique, économique et financière mondiale dans le but qu’elle soit équitable, équilibrée et représentative.
Les BRICS ont déjà lancé un plan de dédollarisation des échanges commerciaux pour réduire l’hégémonie du dollar. Un exemple : un contrat entre l’Arabie Saoudite et Total pour la livraison de pétrole sera réglé en yuans.
2. Petit Tour d’Horizon international
Alors que les mouvements sociaux se développent en France, en Europe et sur plusieurs continents, alors que les profits des uns n’ont jamais été aussi grands, que la pauvreté touche l’ensemble de la planète. La réponse des gouvernements est de pousser, de développer les conflits, les guerres.
Nous sommes depuis un certain temps dans un environnement de conflits militaires qui semble oublier les vertus de la diplomatie, du dialogue.
Le monde est sur une poudrière, le risque d’une conflagration nucléaire n’est plus un cas d’école.
Le "Réveil des Combattants" (le mensuel de l’ARAC) titre dans son n° d’Avril « Imposer la Paix doit être notre combat ».
A l’image de ses fondateurs, en 1917, l’ARAC poursuit son engagement pour la paix. Elle n’a jamais cessé de dénoncer les causes des guerres, leurs conséquences. Notre Président-Fondateur Henri Barbusse, « soldat de la paix », exprimait ses convictions : « Notre priorité est de se rebeller, d’organiser le rassemblement de tous, de faire la guerre à la guerre ».
Les forces pacifistes aujourd’hui en France me semblent faibles et divisées. Cette réalité ne permet pas de mettre en action un mouvement populaire exigeant l’arrêt de toute confrontation guerrière.
Nous ne gagnerons la paix, par la diplomatie que dans la mesure où les forces progressistes unies faisant abstractions de leurs actuelles différences d’analyses auront à l’exemple de Jean Jaurès « le courage de chercher la vérité et de la dire ».
Le monde occidental a décidé de présenter sa vision de la réalité, en appliquant les 5 principes de la propagande de guerre :
• Cacher les intérêts économiques
• Cacher l’histoire.
• Diaboliser l’adversaire
• Inverser l’agresseur et la victime
• Empêcher le débat (une seule version est présentée alors que plusieurs points de vue doivent s’exprimer)
Les médias font partie du dispositif militaire de préparation tant au consentement à la guerre, qu’à l’économie de guerre :
• Il faut persuader les peuples que les motifs sont nobles
• Il faut la guerre car le danger serait plus grand
• Il faut centrer sur un dirigeant ou un groupe
• Il faut produire des images très émouvantes, réelles, voir modifiées où hors contextes.
Si nous prenons comme exemples la situation en Palestine et le conflit Ukrainien, il n’y aurait qu’un méchant responsable ; le Hamas et son action terroriste en Israël et Poutine et son intervention en Ukraine.
Ne devrions-nous pas penser que les responsabilités doivent être au moins partagées.
L’objectif est de nous faire croire que l’Histoire ne commence que le 7 octobre 2023 pour l’un et le 24 février 2022 pour l’autre. La vérité est incontestablement différente.
La situation au Moyen-Orient est grave.
Nous ne pouvons accepter la colonisation par Israël et encore moins le génocide en cours.
Nous ne pouvons laisser les mains libres, ni à Netanyahou avec sa politique d’annexion des territoires palestiniens et sa politique d’extrême droite, ni au Hamas avec sa politique basée sur le terrorisme, qui ne résout en rien les besoins et les attente du peuple palestinien.
Il y a urgence à faire cesser ce conflit meurtrier entre Israël et le Hamas, dont les premières victimes sont les peuples palestiniens et israéliens. Certains comme les États-Unis, soufflent sur les braises au risque d’élargir le conflit à d’autres pays de la région.
Il suffit de regarder une carte pour voir l’implication militaire des États-Unis dans cette région.
Il faut mettre en œuvre les résolutions et les accords d’Oslo, il faut soutenir ceux qui en Israël et en Palestine se battent pour la Paix et la démocratie.
Il ne suffit pas de condamner les crimes de guerre du pouvoir israélien, mais d’agir pour l’arrêt immédiat de toutes fournitures d’armes.
Russie-Ukraine
Nous devrions plutôt dire OTAN-Russie.
Dès le 24 février 2022, l’ARAC était claire : nous condamnions l’intervention russe en Ukraine, contraire aux lois internationales, au respect de la charte des Nations Unis, au respect de la souveraineté des Nations, mais nous déclarions également devoir prendre le temps de la réflexion.
En effet, nous devons comprendre si nous voulons agir.
Si la Russie a clairement agressé l’Ukraine, elle l’a fait suite à un long processus de provocations américaines. Washington savait que l’Ukraine était une « ligne rouge » pour les Russes et qu’ils réagiraient.
Les États-Unis sont donc tout autant responsables de ce conflit que Moscou.
Ci-après quelques éléments de réflexion :
• En 1990, à la veille de la dissolution du Pacte de Varsovie, le secrétaire d’état américain James Baker assurait le Président de l’URSS Mikhaïl Gorbatchev que : « l’OTAN ne s’étendra pas d’un pouce à l’Est ». Mais, en 1999, l’OTAN englobait déjà les 3 premiers pays de l’ex Pacte de Varsovie : la Pologne, la République Tchèque et la Hongrie. Ce n’était que le début.
• Dès 2008, l’OTAN au sommet de Bucarest avait annoncé l’adhésion possible de l’Ukraine et de la Géorgie.
Rappelons 2 faits :
1 - le coup d’État sanglant de novembre 2013, contre le président Ianoukovytch démocratiquement élu, et cela après des mois de déstabilisation politique. Victoria Nuland, assistante du secrétaire d’Etat pour l’Europe a reconnu, lors d’un discours au National Press Club le 25 avril 2014, avoir dépensé 5 milliards de dollars afin d’organiser ce coup d’Etat.
2 - le massacre de la maison des syndicats à Odessa (le 2 mai 2014) où les forces d’extrême droite, fascistes, décident de mettre le feu au bâtiment et empêchent les gens de sortir – un vrai massacre. Plus de 60 militants de gauche, communistes, syndicalistes, intellectuels ont perdu la vie. Aucune enquête officielle n’a été lancée, aucune poursuite.
• Nous avons constaté, le mutisme de l’Europe et de ses dirigeants. 11 partis d’opposition, considérés comme pro-russes ont été interdits. Un grand nombre de griefs mis sur le compte de la Russie, ne le seraient-ils pas également pour l’Ukraine ? Où se situe l’Ukraine démocratique qui demande d’intégrer l’Union Européenne ?
En 2014, le protocole des accords de Minsk est signé, il prévoit un cessez-le-feu immédiat, mais cet accord ne sera jamais appliqué. Un accord de 2015 prévoyait notamment le retrait des armements lourds. De fait, il y a eu un non-respect de ses accords par le gouvernement Ukrainien avec le soutien de l’OTAN, de l’Union Européenne et des USA.
Posons-nous la question suivante : Serions-nous dans la situation d’aujourd’hui si les accords de Minsk avaient été respectés ?
Quelques réponses sur la guerre, sa durée et le non-respect des accords :
• Le 13 février 2023, lors d’une conférence de presse Jens Toltenberg, secrétaire général de l’OTAN déclare : « En fait, depuis 2014, l’OTAN a mis en place les plus grands renforts de défense collective depuis une génération, car la guerre n’a pas commencé en février de l’année dernière. Cela a commencé en 2014…
Lorsque nous avons, le matin de l’invasion, décidé d’augmenter notre présence, nous avons pu nous appuyer sur la présence accrue que nous avions déjà mise en place au cours des dernières années… Nous avons déjà beaucoup fait en plaçant 40.000 soldats sous le commandement de l’OTAN dans la partie orientale de l’Alliance. »
• Angela Merkel confirme « Les accord de Minsk de 2014 ont servi à donner du temps à l’Ukraine. L’Ukraine de 2014-2015 n’était pas l’Ukraine d’aujourd’hui. Poutine aurait pu alors facilement gagner, et je doute fort qu’à l’époque l’OTAN aurait été en capacité d’aider l’Ukraine comme elle le fait aujourd’hui » (déclaration à Die Zeit le 7/12/2022).
L’appui de l’occident à l’Ukraine ne cesse de se développer. Le sommet de l’OTAN de juillet a confirmé la présence de 100.000 soldats états-uniens en Europe et l’envoi d’avions de combats F-16 à l’Ukraine.
Le résultat : La guerre s’enlise, les pertes humaines progressent, les budgets militaires semblent n’avoir plus de limites.
Raisonner en terme de victoire militaire d’un pays sur un autre, ne permet pas de créer la paix. L’escalade militaire n’est donc pas la solution.
3. Soyons clairs sur l’atlantisme
Arrêtons de croire que les États-Unis sont une puissance bienfaitrice de l’humanité, désintéressée, pacifique et qui ne viserait que le bien commun.
L’OTAN a été créée pour des intérêts hégémoniques et non pacifiques.
N’oublions pas que l’OTAN créée en 1949 avait pour objectif, d’assurer aux USA et aux grandes firmes américaines, la maitrise politique et économique de la planète. Et non, comme certains le croient encore pour répondre au pacte de Varsovie qui ne vit le jour qu’en 1955.
Aujourd’hui l’Union Européenne agit dans l’intérêt des États-Unis au détriment de la souveraineté de chaque pays.
En 2020, les dépenses militaires mondiales se sont élevées à 2000 milliards de dollars. Autant d’argent qui manque pour les services publics et la satisfaction des besoins humains.
4. Nous voulons un monde de paix
Pour l’ARAC, la défense des avancées sociales, et le combat pour la paix sont un même engagement, qui nécessite : courage, lucidité et détermination.
L’ARAC rappelle en permanence que la solution en Ukraine comme dans les autres conflits ne doit pas être militaire mais bien diplomatique. Il y a urgence à arrêter les combats et ouvrir des négociations sous l’égide de l’ONU. Il y va de l’intérêt de tous les peuples d’Europe :
• Nous exigeons le retrait de la France de l’OTAN, ainsi que sa dissolution.
• Nous militons pour un désarmement universel, simultané et réciproque sous l’égide de l’ONU.
• La signature et la ratification du Traité du 7 juillet 2017 visant à interdire l’utilisation et la prolifération des armes nucléaires.
• Nous exigeons l’abolition des armes chimiques et bactériologiques.
Pour l’ARAC, la France s’honorerait, en développant une politique qui favorise le rapprochement des peuples dans la défense de leurs intérêts mutuels.
Lutter pour la Paix, faire vivre la mémoire, pour que chacun s’approprie l’histoire, c’est œuvrer à construire « des jours heureux ».
L’avenir des femmes, des hommes dépend de notre capacité à œuvrer pour la paix.
La paix c’est le respect des individus, de leurs histoires, de l’identité de chaque pays.
La paix, c’est le respect de l’autre, c’est refuser l’accaparement des richesses par le plus fort, c’est le refus de régler les problèmes par la guerre.
La paix, c’est la volonté de trouver des solutions qui répondent à l’intérêt mutuel de chaque Nation.
La paix, c’est refuser les inégalités, la casse des droits des salariés, des femmes et des hommes.
La paix, c’est la possibilité de chaque peuple de vivre libre et indépendant, maitre de son développement et de son histoire.
La paix, c’est le respect de la souveraineté de chaque peuple. Seul le respect de la souveraineté de l’autre permettra de s’attaquer à la course aux armements, au commerce des armes, à créer de nouveaux rapports entre les peuples.
5. La nécessité d’agir doit déboucher sur la création d’un puissant mouvement pour la paix.
La paix est un combat quotidien difficile, il demande courage et lucidité. La paix, c’est le seul chemin pour garantir l’avenir de l’humanité et de la planète.
La seule façon d’agir pour la paix, consiste à exiger un cessez-le-feu immédiat, sans conditions (de tous les conflits), et l’ouverture de négociations sans préalables.
Pour cela nous devons nous rassembler afin de faire entendre la voix de toutes celles et tous ceux qui sont épris de justice, du respect des peuples, d’égalité, de justice sociale.
Si nous voulons stopper les guerres, nous devons être déterminés, lucides, avoir le courage d’expliquer les raisons de ces guerres et développer un argumentaire commun pour des règlements sous l’égide de l’ONU.
Aujourd’hui les conditions ne semblent pas réunies pour agir avec succès.
Nous ne sommes plus dans les années 1930 où le Parti Communiste Français jouait un rôle de premier plan dans le cadre international d’Amsterdam-Pleyel avec à sa tête Henri Barbusse et Romain Rolland. Ce mouvement contre la guerre impérialiste et l’antifascisme regroupait tous les partis, organisations et personnalités se réclamant du pacifisme.
L’influence communiste des années 1950 contre l’armement atomique, et par la suite pour la décolonisation n’existe plus.
Les intellectuels actuels sont globalement silencieux.
Aujourd’hui la gauche ne doit plus cautionner les guerres, elle doit développer sa matrice pacifiste.
Elle doit se réapproprier la pensée de Jean Jaurès et agir pour la paix avec « Le courage de chercher la vérité et de la dire… »
Michel Tali
Première constatation : l’invitation a réuni bon nombre de participants. Mieux situé dans l’organisation de la fête, le débat général a drainé 90 personnes et a été difficile. Peu d’intervention émanant des participants.
Pour ce débat, ce fut l’inverse, les auditeurs une soixantaine, se sont rapidement agglutinés, évitant aux organisateurs la traditionnelle kyrielle de rappels. Le débat s’est déroulé dans l’assistance avec plus de 20 intervenants. La tribune n’agissant que par ses tentatives de modération et pour inviter à revenir si possible sur l’ensemble de la situation internationale et notre bataille en France pour la paix, le désarmement, la coopération internationale.
Deuxième constatation : L’assistance n’en a pas voulu ! Le débat, parfois avec des échanges proches de l’invective, n’a porté que sur le conflit Israélo-palestinien et les massacres à Gaza, en Cisjordanie. Avec un thème central "quelle est la nature du Hamas" : mouvement de résistance à la terreur infligée au peuple, "ou" "et" organisation religieuse intégriste aux finalités pour le moins opposées à l’essentiel de nos objectifs. Curieusement les concepts et même les mots de : sionisme et apartheid n’ont jamais été utilisés dans l’assistance. La réalité de la guerre impérialiste menée pour diviser le monde arabo-musulman (Syrie, Iran, Irak, Afghanistan, Yémen...) étant retenue par de nombreux intervenants mais jamais traitée comme une réalité écomico-politique et militaire de l’impérialisme mondialisé et donc clairement minorée.
De nombreuses interventions basées sur des témoignages plus ou moins récents ont mis en avant le caractère déshumanisant constant de l’occupation de la Palestine, de Gaza. La guerre à outrance excluant toute négociation ne relève-t-elle pas d’une volonté de destruction de la culture, du peuple palestinien ? En fin de débat, la diversité des prises de position en Israël et l’opposition pacifiste à Netanyaou ont été soulevées.
L’échange a été tout à la fois très divers, souvent riche d’apports mais incapable de sortir d’une approche spécifique. Il est resté centré sur la situation au Moyen Orient. La guerre en Ukraine, l’implication de plus en plus directe de l’OTAN, le risque de mondialisation et toutes les questions de notre apport communiste à la lutte pacifiste n’ont pas été débattus.
C’est entre cette participation et ces manques que se situe notre appréciation de ces échanges.
Ils montrent l’espace à occuper et le besoin de développer, théoriser, rendre accessible au plus grand nombre l’analyse de l’état actuel de la mondialisation.
Paul Barbazange pour ce tout début d’analyse