Lorsque Donald Trump, quelques jours seulement après son retour à la Maison-Blanche, annonçait le retrait des États-Unis de l’accord de Paris sur le climat, beaucoup redoutaient un mouvement général de désengagement des politiques internationales de lutte contre le réchauffement. Près d’un an plus tard, il n’en est rien : la Chine vient tout juste d’annoncer un renforcement de ses ambitions de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Publication de la nouvelle CDN chinoise
L’accord de Paris repose sur des mécanismes nationaux de réduction des émissions, les contributions déterminées au niveau national (CDN), qui fixent les objectifs de chaque État pour les dix années à venir. Les pays publient actuellement leurs CDN de troisième génération pour la période 2025-2035. Ironie de l’histoire : les États-Unis, désormais sortis de l’accord, ont tout de même publié leur nouvelle CDN sous l’administration Biden — alors que l’Union européenne ne l’a pas encore fait.
Lors du sommet des Nations unies sur le climat, du 22 au 24 septembre, Xi Jinping est intervenu en visioconférence pour présenter les grandes lignes de cette troisième CDN chinoise.
Le contexte des politiques climatiques chinoises
Pour bien comprendre la portée de cette annonce, il faut rappeler les engagements précédents et les résultats obtenus.
Dans sa seconde CDN, publiée en 2021, la Chine s’était fixé pour 2030 d’atteindre le pic de ses émissions – autrement dit, le moment à partir duquel elles commenceraient à décroître – et la neutralité carbone avant 2060. Elle visait aussi une réduction de 65 % de son intensité carbone (émissions rapportées à la production économique) par rapport à 2005, et une part de 25 % d’énergies renouvelables dans son mix énergétique.
Quatre ans plus tard, le bilan est remarquable : les énergies renouvelables représentent déjà plus de 20 % du mix énergétique, et au premier trimestre 2025, les émissions chinoises ont baissé de 1,6 %, non pas en raison d’un ralentissement économique, mais grâce à la montée en puissance des filières solaire et éolienne. Cette baisse semble durable depuis mars 2024, ce qui laisse penser que la Chine aurait atteint son pic d’émissions six ans plus tôt que prévu. Autrement dit, Pékin tient – et dépasse – ses engagements.
Certes, la Chine a atteint son pic d’émissions bien plus tard que les pays occidentaux (le Royaume-Uni, par exemple, dès les années 1980). Mais cette comparaison purement comptable occulte une réalité essentielle : la Chine reste un pays en développement, qui doit encore construire ses infrastructures. Ses émissions sont donc structurellement plus élevées, tout en restant très inférieures aux États-Unis en termes cumulés historiques.
La troisième CDN chinoise
Dans son intervention, Xi Jinping a rappelé que la transition énergétique est « la tendance de notre époque », dénonçant « certains pays qui agissent contre » — allusion transparente aux États-Unis. Il a insisté sur la nécessité que cette transition « réduise plutôt qu’élargisse le fossé Nord-Sud », réaffirmant le principe de responsabilité commune mais différenciée entre pays développés et pays en développement.
La nouvelle CDN chinoise fixe les objectifs suivants pour 2035 :
– Réduction de 7 à 10 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport au pic ;
– Plus de 30 % d’énergies renouvelables dans la consommation finale ;
– Capacités solaires et éoliennes multipliées par six par rapport à 2020 (soit 3 600 GW) ;
– Augmentation du stock forestier à plus de 11 milliards de m³ ;
– Généralisation des véhicules électriques ;
– Extension du marché carbone.
Un changement d’échelle
Cette nouvelle CDN marque un tournant : la Chine passe d’objectifs visant à freiner la hausse des émissions à des objectifs de réduction nette. Cela s’appuie sur deux leviers : un développement massif des énergies renouvelables et le renforcement du puits carbone forestier, approche saluée par la communauté scientifique et similaire à celle du plan climat “Empreinte 2050” du PCF.
Elle confirme la volonté de la Chine de rester pleinement engagée dans l’accord de Paris et de contribuer à la limitation du réchauffement à +2 °C. Toutefois, les réductions annoncées restent légèrement insuffisantes pour espérer contenir la hausse à +1,5 °C.
Tehei
