Un candidat des communistes
La personne du candidat communiste importe peu, mais sa présence est nécessaire pour exprimer les 20% de Français environ qui refusent le système capitaliste et rêvent d’une société régie par les besoins des hommes et non plus la loi du marché et du profit. Au-delà de son étiquette partisane, il doit s’engager clairement sur les choix essentiels des communistes de France, sachant que ces options ne sont pas celles de « la gauche », socialiste, « écologiste », ou centriste, qui pour aujourd’hui et pour demain, approuve le capitalisme, quitte à en dénoncer les excès. L’objectif de sa candidature ne peut être simplement la défaite de la droite sarkozyste et de l’extrême droite démagogue et xénophobe, qui rêve de la rejoindre au gouvernement. Elle doit exprimer le plus fort possible la volonté de millions de Français d’éradiquer la logique capitaliste qui, aujourd’hui, détruit les conquêtes sociales et les libertés collectives et individuelles. Les Français ont depuis trente ans, fait l’amère expérience de gouvernements « de la gauche » dirigés par le parti socialiste, qui ont privatisé, désindustrialisé, détruit des acquis sociaux, autant que la droite. Le candidat des communistes doit donc, pour être crédible, refuser tout renouvellement de cette soit-disant « union de la gauche ». Ce serait une escroquerie, avec un parti socialiste et des « verts » qui ne rêvent que de gérer la société capitaliste à leur profit. Le candidat des communistes veut influer dans le bon sens en faveur des salariés. Il pourra même soutenir au second tour un candidat de moindre mal contre la droite et l’extrême droite. Mais il n’aspire pas à quémander des ministères, il se refusera de cautionner ainsi une politique néfaste que pourrait mettre en œuvre un quelconque Strauss-Kahn.
Des engagements clairs et de rupture
Le candidat des communistes ne saurait en aucun cas se contenter de quelques promesses consensuelles d’amélioration des conditions de vie. Annoncer la hausse des salaires, la création des emplois nécessaires, la construction des centaines de milliers de logements modestes qui font défaut, le retour au plein régime des retraites et de la sécurité sociale, une fiscalité plus juste, est nécessaire. Mais ce ne serait qu’une annonce démagogique si on ne prévoit pas les réformes structurelles, les mesures de rupture avec le capitalisme actuel, qui, seules, permettront de les assurer. En revanche, ces mesures de rupture esquissent une nouvelle société, régie par les besoins et les volontés collectives, et non plus par la « logique de marché » libérale, la volonté de profit des actionnaires, une société non-capitaliste.
Ces propositions communistes peuvent se réduire à une dizaine de mesures, qui relèvent de la politique extérieure autant que nationale :
1- La France ne peut inverser sa politique économique sans reconquérir son indépendance monétaire et commerciale, aujourd’hui abandonnée entre les mains de la banque européenne de Francfort, incarnation de l’Europe supranationale, tout entière au service du « grand marché » des capitaux, des emplois, et des hommes. La première proposition du candidat des communistes doit donc être que la France dénonce les traités de Maastricht et Lisbonne, et sorte de la zone euro, comme le propose l’économiste Jacques Nikonoff.
2- Cela seul permettra, combiné avec la nationalisation des banques, d’en refaire ce qu’elles n’auraient jamais dû cesser d’être, l’instrument contrôlé par les élus de la nation, de l’investissement productif, de lutte contre le chômage, et de restauration de l’équilibre commercial. Le secteur bancaire nationalisé, service public, se doit de gérer en dépôt l’épargne française, de l’investir, pour produire en France au lieu d’importer massivement, de combattre les délocalisations qui ravagent l’industrie française, et de s’opposer à la spéculation sur les monnaies et les capitaux au lieu d’y participer comme les banques privatisées le font actuellement. Ce « produire en France » devra s’accompagner de mesures appropriées de protection des productions nationales, et donc de l’emploi à rebours de la logique du capitalisme « ultra-libéral » du moment.
3- Le troisième engagement des communistes, permis par les deux précédents, doit être la restauration des services publics, propriété de la nation, sous le contrôle des usagers, dans tous les secteurs essentiels de la vie quotidienne : transports (rail, route, air, etc.), énergie (électricité, gaz), eau, téléphone, santé (hôpitaux et médicaments), éducation. Cette notion de service public, au service non d’un pouvoir politique ou financier, mais des citoyens, doit s’étendre aux grands médias, vecteurs d’information et de culture (télévision et radios notamment), dont la Constitution doit garantir l’indépendance et le pluralisme.
4- L’objectif doit être clairement affirmé du blocage des prix des terrains à bâtir et des loyers, seul moyen d’empêcher la spéculation immobilière qui se déploie depuis des décennies, et de pouvoir construire enfin dans chaque commune, les millions de logements modestes qui manquent. Le droit au logement est un des droits imprescriptibles de l’homme, mais il ne suffit pas de l’affirmer.
5- Dans le domaine des relations internationales, le candidat des communistes doit l’énoncer clairement : la France doit en finir avec son impérialisme actuel, aligné sur le leadership nord-américain. Cela signifie sortir de l’OTAN et de l’Alliance Atlantique, rapatrier les soldats français engagés dans des aventures impérialistes en Afghanistan, au Tchad, en Côte d’Ivoire, et démanteler les bases militaires françaises en Afrique et à Abu Dhabi, aux frontières de l’Iran. L’armée française doit être uniquement un élément de défense nationale, dans une optique de non-ingérence et de coopération internationale, notamment en direction des pays africains, où l’aide française, technologique et financière, devrait contribuer à développer la production industrielle et agricole, et l’emploi sur place (au lieu d’une simple quête de matières premières, sans développement indigène).
6- Enfin, le candidat des communistes doit être porteur de réformes politiques profondes de la France du 21e siècle. Le pouvoir monarchique actuel, à la fois médiatique et personnel, doit laisser place à une République Démocratique, pluraliste, reposant sur des scrutins nationaux et locaux au suffrage universel, et à la proportionnelle, sans découpages électoraux destinés à écraser les minorités. Elle devra redonner le pouvoir aux assemblées élues, à l’échelle de la nation (députés) et des collectivités locales. Mais les expériences du 20e siècle et les trahisons successives de leurs engagements par les politiciens de gauche ou de droite, rend nécessaire un dispositif de contrôle des élus par leurs mandants : révocabilité des élus et référendums d’initiative populaire auraient ainsi empêché Nicolas Sarkozy et son pouvoir de contresigner la Constitution européenne malgré le « non » des Français, et de détruire la retraite à soixante ans. En ce sens, le candidat des communistes doit affirmer clairement son désir de supprimer l’élection du Président au suffrage universel, véritable falsification monarchiste et médiatique de la souveraineté populaire ?
Ces orientations nouvelles sont seules à même de redonner à la France, aux yeux du monde, son image d’héritière de la Révolution de 1789-94, et d’inventrice des Droits de l’Homme et du Citoyen, aujourd’hui usurpée. Elles seules seraient susceptibles de créer en 2012 un engagement massif, militant et populaire en faveur d’un candidat.
Francis Arzalier
25/01/2011