« Les communistes dérangent la classe dirigeante en Ukraine »

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Les autorités de Kiev tentent d’interdire le Parti communiste d’Ukraine. Le procès commence aujourd’hui. Entretien avec Petro Simonenko (réalisé par Robert Allertz pour Junge Welt, quotidien communiste), premier secrétaire du Parti communiste d’Ukraine (KPU) et président du groupe parlementaire du KPU.


Jeudi dernier a commencé au tribunal administratif du district de Kiev un procès visant à l’interdiction du parti et de ses symboles. Le KPU a été dissous en août 1991 comme partie intégrante du PCUS déjà une fois dans la loi, puis en 1993 un nouveau parti a été fondé. Pourquoi votre parti, qui est désormais la plus ancienne organisation politique du pays, serait interdit ?

Petro Simonenko : Nous dérangeons, pour des raisons politiques. On dérangeait la classe dirigeante, déjà sous Victor Ianoukovitch, on dérange encore sous Petro Porochenko. Ainsi, il faut en finir avec nous.

Mais votre parti a coopéré avec le Parti des Régions de M.Ianoukovitch dans un gouvernement qui a perduré de 2010 à 2014 ?

C’est vrai. Nous étions d’accord avec le Parti des région sur certains points, c’est pourquoi nous avions soutenu les projets de loi qui étaient conformes à notre programme électoral. Mais nous avons refusé toutes les initiatives anti-sociales de Ianoukovitch et de son parti, comme la réforme du système de santé ou celle des retraites. Par contre, ces contre-réformes, elles étaient soutenues par l’opposition, devenue putschiste en février et qui est désormais au pouvoir. Maintenant, le Parti des régions collabore activement avec le président Porochenko. Nous n’avons plus rien en commun avec eux.

Quelles sont les raisons invoquées pour l’interdiction du parti ?

Petro Simonenko : Le reproche qui nous est adressé, en général, c’est que le Parti est entre les mains d’ennemis de l’Ukraine, qu’il soutient les séparatistes, qu’il est un « agent de Poutine ». Nous, nous continuons à avancer notre proposition – que nous avions déjà suggéré sous Ianoukovitch –, celle d’un référendum pan-ukrainien, pour décider de ce que sera notre politique étrangère. Ce référendum ne serait alors ni celui du président, ni celui de l’opposition. Notre initiative a été bloquée par la justice.

Quelles preuves mettent-ils en avant pour justifier l’interdiction ?

Petro Simonenko : L’acte d’accusation comprend 18 pages, plus 129 pages d’annexes rendues publics avec des journaux, tracts, vidéos, etc. Ils doivent prouver que le KPU a violé l’article 5 de la loi sur les partis d’Ukraine. On parle de violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale.

Donc, de séparatisme ?

Petro Simonenko : Tout à fait. Les soi-disant preuves de cette affirmation soulevée par le ministre de la Justice sont douteuses, ridicules même, elles reposent sur des messages – enfin des reproductions – et des citations déformés. Il y a même des "rebelles" ou des "terroristes" qui sont cités comme témoins et qui affirment avoir été recrutés comme "représentants du KPU".

Pour le parti ?

Petro Simonenko : Non, pour la lutte armée contre Kiev. Bien sûr que c’est absurde. La ligne du parti a toujours été de prévenir les conflits armés. Nous avançons et défendons des solutions pacifiques, appelons à des cessez-le-feu et à des négociations. Ce qui nous est reproché est de la pure propagande de guerre.

On dit que nous voulions, c’est quand même fou de nous le reprocher, faciliter le renforcement des séparatistes soutenus par Moscou.

Il doit y avoir des attaques non seulement contre les installations du parti mais contre ses représentants ?

Petro Simonenko : C’est cela. Les attaques ont commencé dans l’ouest de l’Ukraine, suivant le mouvement de Maïdan, et elles n’ont cessé de monter en puissance. Il y a eu des infractions de domiciles de reponsables du parti, certains ont été enlevés, on les a forcés à abjurer et à se retirer.

Les députés fascistes de Svoboda sont tombés sur moi au Parlement et m’ont tabassé. Cela a été le cas pour moi, mais aussi pour d’autres camarades. Les membres du KPU – démocratiquement élus – ne sont plus au Parlement, victimes de la terreur.

Quelles en sont les conséquences ?

Petro Simonenko : Dans ce climat d’anticommunisme, d’anarchie et de violence, le travail parlementaire n’est plus possible. Neuf députés ont quitté le groupe parlementaire, nous sommes encore 23.

Où sont les neuf autres députés ?

Petro Simonenko : Ils sont passés du côté de la famille de l’oligarque Sergei Kourtchenko, du groupe "Pour la paix et la stabilité". Il a 27 ans, c’est un des hommes les plus riches du pays, à l’Ouest, il est considéré comme le Rockfeller ukrainien. Sous Ianoukovitch, il a engrangé des milliards en transactions pétrolières et gazières. Il achète des entreprises comme il achète les députés. Le parti traverse une période très difficile, compliquée, et la publicité qu’on nous fait est loin d’être positive.

Néanmoins il existe une solidarité internationale avec le soutien venant de bords différents, enfin surtout des partis communistes qui ont gardé leur principes. Gabi Zimmer, au nom du Groupe de la Gauche unitaire européenne (GUE) au Parlement européen, a adressé une lettre au président Porochenko pour dénoncer le procès intenté à notre égard comme illégitime.

Traduction MA pour "Solidarité-internationale-PCF"

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