La question des présidentielles "Tout est pour le mieux dans le meilleur des monde"

, par  Bruno Bergman, lepcf.fr , popularité : 2%

"Les plus grands triomphes, en matière de propagandes, ont été accomplis, non pas en faisant quelque chose, mais en s’abstenant de faire. Grande est la vérité, mais plus grand encore du point de vue pratique, est le silence au sujet de la vérité. En s’abstenant simplement de faire mention de certains sujets, en abaissant ce que Mr. Churchill appelle un "rideau de fer" entre les masses et tels faits ou raisonnements que les chefs politiques locaux considèrent comme indésirables, les propagandistes totalitaires ont influencé l’opinion d’une façon beaucoup plus efficace qu’ils ne l’auraient pu au moyen des dénonciations les plus éloquentes, des réfutations logiques les plus probantes."

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"Les chevilles rondes dans des trous carrés ont tendance à avoir des idées dangereuses sur le système social et à contaminer les autres de leur mécontentement" (Aldous Huxley dans l’introduction au Meilleur des Mondes).

La question des Présidentielles

Nous sommes tous fondés à nous inquiéter du processus de désignation d’une "candidature-communiste-à-la-candidature-Front-de-Gauche", puisque c’est naturellement de cela, et uniquement de cela qu’il s’agit.

J’invite chaque Camarade, à relire très attentivement la résolution du 35ième congrès, laquelle dit très clairement (§9) :

"Pour l’élection présidentielle, la candidature pourra soit être issue de l’une des formations du front de gauche, soit être issue du mouvement social, et partager les objectifs du pacte. Ce débat doit être mené sans préalable ni exclusive. Dans cette perspective, des personnalité(e)s communistes sont légitimes à s’engager comme candidat(e) potentiel(le) du rassemblement pour porter l’originalité de cette ambition. Dans le cadre de la préparation du congrès du printemps 2011, nous examinerons toutes les propositions et les hypothèses que les communistes souhaiteront mettre en débat. Au terme de ce processus, à ce congrès, nous désignerons le ou la candidate soutenu(e) par le PCF. L’assemblée des animateurs de section, fin 2010, constituera un point d’étape de cette réflexion et de ce processus."

Donc si l’on reprend les choses dans l’ordre chronologique, nous devrions dès maintenant, ou au plus tard dès l’automne, engager cette réflexion collective, de manière à ce que l’assemblée des animateurs de sections (fin 2010) puisse adosser ses travaux sur un travail collectif déjà amorcé. Suite à quoi le débat devrait se poursuivre en interne jusqu’au congrès du printemps 2011, lequel tranchera la question.

Outre cette résolution qui nous le prescrit, il semble donc important de ne pas tarder à nous préoccuper de cette question pour plusieurs autres raisons :
Nous avons combattu ce mode de scrutin au moment de son instauration, car il est contraire à notre vision de la démocratie. Et il n’a jamais été facile de gérer la contradiction consistant à présenter un candidat à une élection que nous contestons. Nous y sommes donc mal à l’aise, et, à l’exception de la candidature de Jacques Duclos, elle nous a toujours été défavorable. Pour autant notre activité politique ne peut aujourd’hui se déployer que dans le cadre des institutions de la cinquième république, qu’elles nous conviennent ou pas.

Or comme l’ont souligné très justement de nombreux Camarades lors des congrès départementaux : "Dans nos institutions, qui n’existe pas lors d’une élection présidentielle, n’existe plus politiquement". La réciproque est aussi vraie, comme l’ont parfaitement compris nombre de groupuscules ou personnalités.

Nous draper d’un voile, même avec prestance, et faire fi de la difficulté en argumentant, devant le peuple de France, de notre non participation par un "Ce n’est pas notre conception de la démocratie..." sera incompris, ridicule et risible.

L’élection qui se profile va de toute évidence contenir de nombreux pièges qu’il va nous falloir déjouer, le principal étant le "vote anti-sarko coûte que coûte pour arrêter la casse", y compris pour un DSK ... ou un Villepin ... ou le FN).
La stratégie de Front de Gauche, à déployer en "Pacte d’Union Populaire", impliquera nécessairement la désignation d’un candidat. Or Mélenchon se positionne déjà, et depuis plusieurs mois en "candidat naturel". Le Parti de Gauche étant inexistant, il ne peut s’appuyer sur un processus démocratique. Il entend donc, de toute évidence, être imposé à cette place par les médias. Devons nous attendre que les jeux soient faits ? Renonçons nous, avant même d’en avoir discuté à l’éventualité d’une candidature "du Parti Communiste" à la candidature "du Front de Gauche" ?

Pour ajouter à la difficulté, quels que soient les candidat(e)s pressenti(e)s, comment imaginer un processus démocratique de désignation, dans la mesure où les autres composantes du Front de Gauche sont homéopathiques en terme d’organisation. Ne nous leurrons pas, le choix va donc relever "du Parti lui-même", ou "de l’opinion publique"... Les médias, fabricants d’opinion, doivent-ils décider pour nous du candidat providentiel ? C’est en tous cas la carte que s’apprête à jouer Mélenchon. Mais est-ce cela "notre conception de la démocratie" ?

Il n’aura échappé à personne que la formulation "des personnalité(e)s communistes sont légitimes à s’engager comme candidat(e) potentiel(le)" est très inhabituelle, voire inédite, pour notre Parti. Stricto sensu, cela signifierait que des camarades peuvent faire acte de candidature (on imagine les chances de voir prospérer de telles initiatives...) mais que la direction nationale n’en proposera pas. À aucun moment il n’est question d’une telle proposition comme le suggérait l’amendement du la fédération du Nord. Toutefois c’est sur ce point que Pierre Laurent a répondu "Tout le monde est d’accord, donc il n’y a pas besoin de l’écrire". Reconnaissons que ça aussi c’est nouveau... La suite du texte parle toutefois d’un processus de désignation d’un candidat. Les deux parties étant reliées il n’est pas illégitime de s’interroger : La direction nationale n’est-elle pas en train d’exclure, sans vraiment le dire, toute candidature du Parti à la candidature Front de Gauche, tandis qu’elle n’exclurait aucune autre alternative ? Est-ce vraiment cela que veulent les communistes ?

Cette invitation à des candidatures individuelles, ou de fédérations, ou encore de collectifs internes informels, sur quoi peut-elle déboucher ? Il n’y a que deux alternatives : la stigmatisation de ces éventuelles candidatures laminées dans l’œuf en externe par les médias, et non soutenues en interne par notre direction, ou au contraire, en l’absence de celles-ci, démonstration programmée d’avance que vraiment aucune candidature communiste n’est réaliste. Si ce n’est pas un terrain miné, c’est en tous cas bien imité...

N’est-on pas en train de mettre en place, non pas un processus de désignation du meilleur candidat "Front de Gauche", mais plutôt, en catimini, une entreprise de pédagogie pour expliquer aux communistes que le (la) meilleur(e) candidat(e), NE doit PAS, ou NE peut PAS être communiste ?
Lors de la dernière élection présidentielle, avec la candidature de Marie-Georges Buffet, nous avons fait l’expérience de plusieurs erreurs à ne pas re-commettre. Une en particulier : Notre parti est incapable de conduire une campagne en dernière minute, il nous faut donc être en mesure de démarrer la campagne le plus tôt possible.

Enfin, les questions sus-évoquées montrent à l’évidence que le problème est de taille, difficile et délicat à trancher de façon totalement satisfaisante.
En amont, le problème qui se pose à tous les membres du Parti est finalement le suivant : Comment organiser et conduire la discussion de toutes ces questions quand la direction entend donner l’illusion d’un débat tout en l’escamotant par des tours de passe-passe de procédure, où par des subtilités sémantiques dont le décryptage des "dits et non-dits" relève d’une linguistique rigoureuse et sophistiquée ?

À ce propos, revenons un instant, sur cette rapide mais très remarquée intervention de Pierre Laurent suite à l’amendement de la fédération du Nord ("Tout le monde est d’accord, donc il n’y a pas besoin de l’écrire"). Point n’est besoin d’être fin dialecticien pour en saisir toute la saveur. Et donc si l’on n’écrit pas ce avec quoi tout le monde est d’accord, alors qu’écrit-on dans une résolution ? - Ce avec quoi tout le monde n’est pas d’accord, ou ce avec quoi personne n’est d’accord ?

Deux textes ont été présentés à la "discussion" des communistes, mais sans amendements possibles, et c’est un troisième texte, issu d’on ne sait où, qui a été soumis au congrès, et amendé via une commission des amendements où la direction sortante était ultra majoritaire.

Il ne serait peut-être pas inutile d’étudier de très près les trois textes pour en comprendre "l’intention réelle". Car il n’est pas à exclure que les deux premiers aient surtout servi à vérifier où il était possible de lâcher du lest, et jusqu’où "on" pouvait aller sur :
- la forme institutionnelle du Front de Gauche (parti, association),
- le renoncement à une candidature du Parti aux présidentielles,
- le renoncement à une activité propre du Parti dans les luttes contre les agressions de la droite et du MEDEF,
- disparition du logo du Parti de tous nos documents,
- renoncement à toute référence au socialisme ainsi qu’à toute nationalisation (zéro occurrence de ces deux termes dans la résolution).

Les textes 1 et 2 préparatoires au congrès ont-ils été les "thermomètres" dont la direction avait besoin pour ajuster au mieux le troisième texte ? Si tel était le cas, voilà une innovation dans "notre conception de la démocratie" qu’il conviendrait de faire valider par la base, non ?
Pierre Laurent a introduit ainsi son rapport devant le Conseil National du 30 juin 2010 :

"Les décisions adoptées dans la résolution sont désormais notre feuille de route.

Elles ont été le fruit d’un réel travail des communistes, malgré un temps limité qui a, nous le savons, restreint la participation d’une partie de nos adhérents. Je rappelle que plus de 5500 délégués représentatifs des sections ont participé aux conférences départementales et adopté des procès-verbaux, relevés de décisions et résolutions qui ont servi de matière à la rédaction de la résolution finale, à son amendement, et à sa très large adoption par le Congrès.

Je note également que l’ambiance du Congrès a été appréciée par la grande majorité de ses participants. "Un congrès de travail" a ainsi résumé un camarade dans une réunion à laquelle je participais hier soir, qui a permis un approfondissement, un éclaircissement, une progression partagée des questions discutées.

Le Congrès a été marqué par une ambiance d’écoute, de respect, de fraternité, qui a permis d’effectuer le changement du secrétariat national dans d’excellentes conditions. La qualité et la sérénité des débats, la clarté et l’ample majorité autour des décisions finales, l’intervention de Marie-George, son accueil par le Congrès, la présence ce soir là de très nombreux invités et de toute la gauche politique représentée à son plus haut niveau, les conditions de mon élection, tout cela a finalement contribué à un bon succès du congrès et à une couverture médiatique abondante et à un large écho public de nos décisions."

Mais pourquoi Diable, Voltaire fait-il dire à Candide en décembre 1758 : "Tout est pour le mieux dans le meilleur des monde" ?

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