Grèce : entre le KKE (les communistes grecs) et Syrisa (membre du PGE), y a pas photo

, par  Pascal Brula , popularité : 6%

Je reviens au journal l’Humanité du 5 mai 2010. La crise du capitalisme vient d’éclater en Grèce et le parti communiste grec, le KKE (Cou-Cou-Hé), est au four et au moulin pour organiser la riposte à cette attaque sans précédent contre leur peuple. Bien que la direction du PCF n’ait plus de lien officiel avec les communistes grecs, l’Humanité n’a pas pu faire autrement que de publier une intervention d’un de ses responsables. Mais, l’Humanité et la direction du PCF n’oublient pas qu’ils sont membres du PGE (Parti de la Gauche Européenne) et que la formation grecque gaucho-trotsko-écolo, Syrisa (ex-Synaspismos), en est aussi membre. Il y aura donc en contrepartie la publication dans l’Humanité d’un texte émanant de ce groupuscule réformiste qui rappelons-le, a voté le traité de Maastricht et ne s’est pas véritablement insurgé contre les positions du PASOK (le PS grec). D’ailleurs, pendant plusieurs jours, une interview officielle de la secrétaire de Syrisa trônera également en une du site Internet du PCF. Je n’ai pas pu m’empêcher de publier côte à côte sur notre site les deux interventions parues dans l’Humanité du 5 mai dernier. Ces deux textes sont significatifs des différences qui peuvent exister entre une vision réformiste, technocratique de la situation, incapable d’ouvrir des perspectives au peuple grec, et la position communiste de nos camarades du KKE, d’une clarté révolutionnaire. En quelques mots : y a pas photo… A noter cependant que Syrisa évoque timidement la sortie possible de la zone euro, ce qui peut sembler encore bien plus osé que l’invraisemblable position pro-BCE de la direction du PCF

Pascal Brula


L’Humanité, le 5 mai 2010

Une véritable politique régressive

Par Alekos Alavanos, ancien président de Synaspismos, chef du groupe Syriza au parlement hellénique.

Les mesures d’austérité ne sont pas nouvelles : ce sont les méthodes de charlatan du FMI. Même pendant la dictature des colonels, nous n’avons pas dû affronter des attaques aussi sévères contre le système social grec. Nous vivons un moment noir, dramatique, dans l’histoire du pays. Et en réalité, n’avons pas eu une aide de l’Union européenne et du FMI. Il y a eu des pressions sur les Grecs, et c’est notre société qui est attaquée mais aussi la société européenne.

Premièrement, les mesures proposées ne sont pas des solutions. Tous les économistes, même les monétaristes qui s’expriment dans la presse européenne ou américaine, prédisent que, dans cinq ans, l’économie de la Grèce sera moins développée, que son endettement sera plus important (120% du PIB aujourd’hui, 150 % dans cinq ans), et que les taux d’intérêt vont grandir. La solution pour la Grèce est d’abord de demander une renégociation de sa dette. Ce n’est pas possible que la Grèce la paie parce que nous payons des taux d’intérêt très élevés imposés par des marchés qui ne sont pas contrôlés.

Nous devons discuter en Grèce si nous voulons rester dans la zone euro. Dans ces conditions, je pense qu’il est très dangereux pour un pays périphérique comme le nôtre de rester dans la zone euro. Bien sûr, ce serait différent si les conditions étaient différentes. Enfin, nous devons stabiliser nos finances mais pas comme le gouvernement procède, contre le développement, contre les échanges commerciaux, mais en maintenant ses dépenses militaires. Nous sommes le premier pays au monde, après la Chine, l’Inde et les Émirats arabes unis à dépenser autant pour l’armement. Nous devons avoir un système fiscal qui fasse mieux rentrer les impôts. Nous devons enfin investir pour notre développement, en renforçant les investissements dans l’éducation et les technologies.

La proposition de l’Humanité qui consiste à prêter à 1 % est une très bonne proposition. Elle fait partie des conditions pour rester dans la zone euro. Nous ne pouvons pas accepter que la Banque européenne prête à 1 % à des banques privées qui se font du bénéfice sur le dos des États et des populations. Nous devons donc trouver un moyen de venir réellement en aide aux pays en difficulté. Il faut aussi développer des obligations européennes. Mais la BCE devrait aussi pouvoir racheter les obligations des États. En Grèce, elles sont actuellement d’une valeur très faible.


Leurs mesures visent à réduire le prix du travail

Par Eliseos Vagenas, membre du comité central et responsable de la section des Affaires internationales du Parti communiste grec (KKE).

Quelles propositions après l’adoption du plan d’hyperaustérité imposé par l’UE et le FMI ?

Les mesures prises par le gouvernement du PASOK (social-démocrate) constituent une forme de guerre pour écraser le peuple travailleur, une guerre qui conduira une large partie des couches populaires à une paupérisation encore plus vaste, avec une réduction dramatique de leurs revenus et la réduction de ce qui reste encore de leurs droits à la sécurité sociale et du droit du travail. Ces mesures portent sur deux axes :

a) Réduire davantage le prix de la force du travail et assurer que les capitalistes disposeront de travailleurs bon marché.

b) Trouver des capitaux, à travers les prêts que le peuple grec paiera encore une fois, pour financer et soutenir les banques, les industriels et les armateurs. Ces derniers feront face quand même à une puissante vague de résistance et des luttes populaires. Ce qui est important pour nous les communistes, c’est que, à travers la lutte contre les mesures antipopulaires, se créent des conditions de contestation, de rupture et de renversement du système capitaliste d’exploitation.

Notre parti croit que Lénine avait raison quand il écrivait, en 1915, dans son article sur « Le mot d’ordre des États-Unis de l’Europe », qu’une telle union serait soit impossible à réaliser, soit réactionnaire. En effet, la Communauté économique européenne (CEE) et ensuite l’Union européenne (UE), avec le traité de Maastricht (pour lequel ont voté pour tous les partis en Grèce sauf le KKE), ont prouvé qu’elle est une union du capital, qui a pour but d’attaquer les droits des travailleurs et de préserver les profits des capitalistes ! Un de ses outils est aussi la Banque centrale européenne. Nous ne sommes pas censés cultiver l’illusion chez les travailleurs que la nature impérialiste de l’UE peut changer. Encore moins que nous puissions mettre « les gens avant les profits ». En réalité, ce qui compte, c’est de créer un système où il n’existera pas de profits capitalistes ! C’est pour cela que notre parti insiste à la sortie de notre pays de l’Otan et de l’UE et appelle à la constitution en Grèce d’un front de lutte pour le pouvoir populaire, l’économie populaire, le socialisme.

Le KKE propose des mesures particulières dans la situation actuelle de crise capitaliste. Des mesures qui ont pour but de soulager les travailleurs et les chômeurs, comme la taxation du grand capital avec une taxation à 45 % au lieu de 20% aujourd’hui. Nous proposons un faisceau complet de revendications basées sur les besoins modernes des travailleurs. Pourtant, dans le système capitaliste, il peut y avoir quelques conquêtes seulement à travers le développement de la lutte des classes. Nous luttons sans cesse pour des conquêtes immédiates et nous allons continuer pour qu’elles soient imposées, par la puissance du mouvement, des mesures qui diminuent la sévérité des problèmes, qui soulagent. Nous soutenons le PAME (Front syndical de lutte), qui englobe tous les syndicats de classe de Grèce. De plus, nous posons au peuple ouvertement notre proposition alternative, celle d’une économie de socialisation des moyens de production, de planification centrale et de contrôle ouvrier, avec un système de santé exclusivement public, avec un système d’éducation, de santé et de sécurité sociale, qui sera unifié et gratuit pour tous. Une économie qui sera basée sur un autre pouvoir, qui renversera le pouvoir des monopoles et construira des institutions populaires neuves.

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