Les derniers des barbares, l’OTAN
Kadhafi… Spinoza et les derniers barbares…

, par  Danielle Bleitrach , popularité : 2%

JPEG لحظة القبض على القذافي حي قبل موته
La première vidéo de Mouammar Kadhafi mort diffusée sur Al-Jazira

Kadhafi certes l’actualité est là… Il y a ces images, cette vidéo abominable… Mais pourquoi Spinoza ? Parce que nous sommes plus que jamais confrontés à l’interrogation de Spinoza », est-il possible de faire avec la multitude une collectivité d’hommes libres ? ». Vous reconnaîtrez qu’il n’y a pas qu’en Libye que la question se pose de manière urgente.

Cet assassinat n’avait qu’un but, asseoir la domination des forces de l’OTAN, de l’impérialisme sur le pays.

Et on doit dénoncer sans le moindre état d’âme tous ceux qui ont contribué de manière diverses à ce crime contre un peuple, il y a tous ceux qui se réjouissent bruyamment devant cet assassinat du « Tyran », tous ceux qui ont masqué les enjeux réels de l’intervention de l’OTAN en faisant de cette intervention une lutte de la « démocratie » contre la « tyrannie », les médias complices dans leur quasi totalité, TOUTES les forces politiques, les chefs d’entreprises qui se sont rués vers la Libye alors que Syrte agonisait.

Donc ces images ne sont pas « un mal nécessaire » pour vaincre la tyrannie mais bien la démonstration de ce qu’est la tyrannie que nous imposons depuis des siècles à tous les peuples du monde, esclavage, colonialisme et voici les hommes que nous avons créés, ceux qui ont toujours été nos complices. Nous dégradons jusqu’à l’aspiration à la liberté. Nous, c’est-à-dire cette servitude que nous tolérons pour notre peuple et qui a nom le capitalisme à son stade ultime de barbarie, l’impérialisme. la multitude pourra devenir libre quand elle renoncera à opprimer les autres : un peuple qui en opprime un autre ne peut pas être libre, c’est la leçon que Marx a emprunté entre autres à Spinoza…

Retour sur le contexte de cet assassinat

Depuis le début de cette sinistre histoire, je n’ai pas évolué d’un iota, opposée à l’intervention de l’OTAN sans pour autant voir dans Kadhafi autre chose qu’un révolutionnaire nassérien qui avait mal tourné et cru pouvoir ruser avec l’occident. Donc me refusant à toute intervention occidentale en Libye comme en Syrie ou en Iran, les pays dans la mire, je n’ai jamais considéré que ces dirigeants ne relevaient pas d’un droit à l’insurrection de leur peuple. De leur peuple et exclusivement de ce peuple et pas de nos soudards et bombardiers larguant des missiles. Et aujourd’hui je veux encore affirmer que si Kadhafi a été abattu ce n’est pas parce qu’il était un tyran mais un vassal capricieux et tentant en sous main de poursuivre un destin de libérateur de l’Afrique.

Cet homme dont les conditions de sa mort demeurent floues, quelles que soient ses dérives a eu une fin, les armes à la main, confondue à jamais avec le martyr d’une ville, affamée, pilonnée par les bombardements de l’OTAN. Il est mort après une résistance de 5 semaines, au combat, dans une ville totalement détruite et qui de ce fait rejoint dans l’histoire Guernica, Falloujah, Gaza. Vous n’y pouvez rien, vous les médias aux ordres, vous les dirigeants occidentaux, vous avez fait rentrer le fantasque Kadhafi dans la légende, celle des Hannibal, des Jugurtha… Et les assassins hystériques qui l’ont déchiré en meute n’inspirent que mépris. D’abord pour avoir avancé sous les bombes de l’étranger, ensuite pour avoir été des cannibales déchirant une victime à terre.

La mort transforme une vie en destin et celle de Kadhafi témoigne de ce qu’est l’occident et les chiens qu’il se donne, les « révolutionnaires » qui acceptent d’affamer puis de détruire une ville et leur concitoyens sous le pilonnage des bombardiers étrangers. Vous avez donné à Kadhafi une mort que la fin de sa vie, ses revirements ne méritaient peut-être pas, mais il était trop périlleux pour vous qu’il passe en jugement. Mais probablement, il fallait vite, très vite régler la question de la propriété des puits de pétrole, trouver une autorité officielle avec qui piller le pays. Ce qui par parenthèse commande ce qu’il adviendra, les lambeaux que chaque chien s’arrachera tandis que la population verra sa misère s’accroître…

Spinoza et les derniers barbares

Pourquoi ai-je pensé, cette nuit, en écoutant les indécents bulletins de triomphe du système de propagande français, à l’assassinat de Johan de Witt et à la réaction de Spinoza devant cet assassinat, lynchage ?

Je rappelle les faits, en 1668, les Pays-Bas sont un des rares régimes républicains où l’on jouit de liberté. A leur tête les frères de Witt sont les alliés des Français et menacés par les orangistes pro-anglais. Louis XIV, qui cherche à s’emparer de l’actuelle Belgique, persuadé que la Triple alliance (Suède, Provinces-Unies et Angleterre) mise sur pied pour contrecarrer ses desseins sur les Pays-Bas espagnols est le fruit de la fourberie de de Witt, ne se sent plus tenu par l’alliance de 1663, et travaille activement à une coalition contre la République en concluant le traité secret de Douvres avec Charles II d’Angleterre.

Johan de Witt ne peut empêcher Louis XIV d’envahir les Pays-Bas (guerre de Hollande). Accusé d’avoir livré la République à la France, le 20 août de la même année, il est massacré, avec son frère Cornelis, par un attroupement pro-orangiste. L’entourage de Guillaume III d’Orange-Nassau ayant ainsi travaillé au rétablissement du stathoudérat, c’est la fin de la République.

Après l’assassinat des frères de Witt (1672), l’indignation de Spinoza est telle qu’il souhaite afficher dans la rue un placard contre les assassins (« Ultimi Barbarorum », les derniers des barbares), mais il se résigna à ne pas le faire vu sa solitude face au rétablissement de la monarchie derrière anglais et français réunis.

En voyant cette vidéo de massacre, j’ai repensé à cette désignation spinoziste : « Ultimi Barbarorum », les derniers des barbares.

Certes je ne compare pas Kadhafi aux frères républicains de Witt, il n’empêche, ce qui a été détruit, ce que l’occident est venu traquer jusqu’à cette scène de massacre est le Mummar kadhafi qui crée l’indépendance et se situe dans le sillage de Nasser… Le drapeau sous lequel s’est fait cette reconquête est celui de la monarchie de Benghazi complètement soumise aux occidentaux et les nouveaux hommes du CNT sont les vieux complices de la dictature et ce jusqu’à la caricature puisque l’affaire des infirmières bulgares a lieu à Benghazi, que l’accusateur est le dirigeant de l’actuel CNT, ministre de la justice qui accuse les dites infirmières, les torture sans doute pour que l’on ne voit pas où est passé l’argent de l’hôpital… Question complémentaire notre président a-t-il lui aussi reçu une mallette et fallait-il tuer Kadhafi (comme Ben Laden) avant qu’il ne parle ?

Le fait est que ce qui va être installé en Libye est un système de pillage et d’affrontement tribal où chacun voudra complaire aux nouveaux maîtres à qui on livrera les ressources libyennes dont le peuple ne bénéficiera plus et qui engendrera l’assassinat comme un des moyens de régler les rivalités…

Voilà pourquoi j’ai repensé à l’assassinat des frères de Witt, les français et les anglais en train de piller le pays bas espagnol et le massacre de ceux qui étaient devenus un obstacle à ce pillage, la France de Louis XIV coiffée au poteau par la perfide Albion dont le candidat triomphe et instaure la monarchie, à la seule différence qu’en Libye ce sont les États-Unis qui ont toutes chance d’emporter la mise.

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La fin de la philosophie

Quand la folie, le refus de la raison s’empare des masses, qu’il s’agisse des chiens qui déchirent les cadavres sur ordre ou de ceux qui ici les tiennent en laisse et ceux qui détournent la tête, il n’y a plus de philosophie qui puisse subsister dans la Cité.

Spinoza, revenons à lui n’était pas allé, comme il l’avait envisagé, poser des placards dénonçant les derniers barbares ; il ne s’agissait pas des derniers au sens où il n’y en avait pas d’autres après mais bien de ceux que chaque actualités nous offre à profusion y compris en 2011.

Il y avait Spinoza, le prince des philosophes comme l’appelait Deleuze, aujourd’hui nous avons en France les philosophes de gondole de supermarché que sont Bernard Henri Levy et son alter ego Michel Onfray… C’est dire…
Deleuze jadis déclara que BHL et les « nouveaux philosophes » étaient des dents creuses… Leur concept n’engendrait rien, aucun devenir, un simple ballotement dénué de capacité à mordre sur la réalité, en voulez-vous la preuve : Bernard Henri levy peut avec toute la chiennerie médiatique parler à propos de ce qui vient de se passer de triomphe de la démocratie sur la tyrannie. Regardez cette vidéo et jugez de cette affirmation.

Qu’est-il advenu de Spinoza puisque dans le fond c’est le personnage le plus intéressant de cette histoire qui s’était passée en 1672, écoutons ce qu’en dit Deleuze dans la biographie de Spinoza dont il est l’auteur.

Quand les frères De Witt, en 1672, eurent été assassinés, et que le parti orangiste eut repris le pouvoir, il ne pouvait plus être question pour Spinoza de publier l’Ethique : une courte tentative à Amsterdam, en 1675, le persuade vite d’y renoncer. « Des théologiens en prirent occasion pour déposer ouvertement une plainte contre moi auprès du prince et des magistrats ; de sots cartésiens en outre, pour écarter le soupçon de m’être favorables, ne cessaient pas et continuent d’afficher l’horreur de mes opinions et de mes écrits ». Pour Spinoza, il n’est pas question de quitter le pays. Mais il est de plus en plus solitaire et malade. Le seul milieu où il aurait pu vivre en paix lui fait défaut. Il reçoit pourtant des visites d’hommes éclairés qui veulent connaître l’Ethique, quitte ensuite à se joindre aux critiques, ou même à nier ces visites qu’ils lui firent (ainsi Leibniz, en 1676). La chaire de philosophie que l’Electeur palatin lui offre à Heidelberg, en 1673, ne peut pas le tenter : Spinoza fait partie de cette lignée de « penseurs privés » qui renversent les valeurs et font de la philosophie à coups de marteau, et non pas des « professeurs publics » (ceux qui, suivant l’éloge de Leibniz, ne touchent pas aux sentiments établis, à l’ordre de la Morale et de la Police). « N’ayant jamais été tenté par l’enseignement public, je n’ai pu me déterminer, bien que j’y aie longuement réfléchi, à saisir cette magnifique occasion ». La pensée de Spinoza se trouve maintenant occupée par le problème le plus récent : quelles sont les chances, d’une aristocratie commerciale ? Pourquoi la république libérale a-t-elle fait faillite ? D’où vient l’échec de la démocratie ? Est-il possible de faire avec la multitude une collectivité d’hommes libres au lieu d’un rassemblement d’esclaves ? Toutes ces questions animent le Traité politique, qui reste inachevé, symboliquement, au début du chapitre sur la démocratie. En février 1677, Spinoza meurt, sans doute d’une affection pulmonaire, en présence de son ami Meyer, qui emporte les manuscrits. Dès la fin de l’année, les Opera posthuma paraissent sur don anonyme.

Toutes nos questions après ce qui paraît être un soubresaut de la fin des espérances des années soixante, socialisme, libération des peuples continuent à alimenter nos réflexions sur l’échec de la démocratie : « Est-il possible de faire avec la multitude une collectivité d’hommes libres ? ». Vous reconnaitrez qu’il n’y a pas qu’en Libye que la question se pose de manière urgente.

Danielle Bleitrach

Illustration : Courbet, la folie de la foule et en matière de conclusion, une femme parle…

Libye ; temoignage de lizzy phelan vost

Voir en ligne : Sur le site de Danielle Bleitrach, histoire et société

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