36ème congrès
Clarification sur l’appropriation collective des moyens de productions Contribution de Pascal Tournois, Nice

, par  lepcf.fr , popularité : 3%

Marx avait donné une définition claire du communisme dans le manifeste du parti communiste :

« En ce sens, les communistes peuvent résumer leur théorie dans cette formule unique : abolition de la propriété privée » en précisant un peu plus loin « ce que l’ouvrier salarié s’approprie par son activité (…) nous ne voulons en aucune façon abolir cette appropriation personnelle des produits du travail indispensable à la reproduction de la vie du lendemain. (…) Le communisme n’enlève à personne le pouvoir de s’approprier des produits sociaux ; il n’ôte que le pouvoir d’asservir le travail d’autrui à l’aide de cette appropriation ».

Donc, être communiste, c’était l’abolition de la propriété privée des moyens de production tout en préservant la propriété individuelle pour améliorer ses conditions de vie.

Aujourd’hui, qu’en est-il du parti communiste français ?

Pierre Laurent, le 15 août 2012 sur le journal Libération, a commencé à donner sa vision du communisme. La première phrase de son interview donne le ton : « Le communisme, c’est une mise en commun, un partage ». Cela devrait rassurer les communistes ! Cela me rassure-t-il ? Je reste perplexe car plus loin, je lis le passage sur l’appropriation des moyens de production et la vision qu’en a Pierre Laurent.

Pour ne pas dénaturer ses propos, il suffit de lire le passage in extenso :

Libération : En tant que communiste, êtes-vous toujours opposé à la propriété privée des moyens de production ?

Pierre Laurent : La vision étatiste, centralisée de la propriété collective est dépassée, mais pas l’appropriation sociale des richesses. Le système de la Sécurité sociale, créé en France à la Libération à l’initiative d’un ministre PCF, est une idée profondément communiste ! Prélever à la source une partie des richesses pour la consacrer au bien-être social des populations, c’est communiste ! Mais cela n’est pas contradictoire avec l’existence d’entreprises privées ! Le communisme aujourd’hui est tout sauf un égalitarisme qui s’imposerait de manière administrative et qui nierait le travail. Les individus ont besoin de confronter librement leurs envies de création. Mais, je n’aspire pas à une société idéale.

Loin de confirmer que le communisme c’est bien être contre la propriété privée des moyens de production, Pierre Laurent parle plus de prélèvement sur la richesse produite et précise même que tout cela n’est pas contradictoire avec l’existence d’entreprises privées. Mais, qu’entend-il par entreprise privée ? Est-ce juste pour faire une différence avec les services publics, propriété de l’Etat ?

Il faut être très clair. Comme dans ce passage, il ne donne pas de définition de ce qu’il entend par entreprises privée, il faut partir du postulat qu’il imagine que tout le monde comprend ce qu’il veut dire et donc qu’il se réfère bien aux entreprises privées actuelles, avec un (ou plusieurs) patron(s) et des salariés. Cela veut-il dire que nous sommes dorénavant en accord avec le fait qu’un patron récupère à son seul bénéfice la plus-value créée par ses salariés ? Cela entrerait alors en contradiction avec l’idée communiste du refus du « pouvoir d’asservir le travail d’autrui ».

Le terme d’entreprise privée me gène car il reste dans le schéma actuel des entreprises d’aujourd’hui fondées sur la propriété capitaliste. Si Pierre Laurent ne se réfère pas aux entreprises privées sous leur forme actuelle (ce que j’espère), ne devrait-il pas donner un autre nom à ces entités économiques différentes de celles gérées par l’État ? Il en existe déjà plusieurs comme « coopératives, entreprises autogérées, etc. » On peut même en créer d’autres comme entreprises communes, entreprises collectives, socialisées, etc.

Car sinon, on a l’impression que le PCF a beaucoup atténué son propos depuis les années 80. Il ne parle plus que de nouveaux droits et pouvoirs d’intervention des salariés et d’un droit de préemption pour les salarié-es sur leur outil de travail alors que le parti communiste était à l’origine pour l’abolition de la propriété privée.

Sans même faire remarquer que ces propositions sont imprécises, floues, trop générales pour qu’on puisse vraiment s’en saisir dans les luttes (puisqu’on parle toujours de nouveaux droits sans les préciser, il faudrait au moins indiquer des exemples), on voit surtout qu’il n’est plus question de remettre en cause la propriété du chef d’entreprise ou du conseil d’administration, seulement de refuser ses pleins pouvoirs, voire au mieux d’autoriser les salariés à racheter l’entreprise qu’ils ont fait prospéré par leur travail. Ainsi, ils rachèteraient au patron l’entreprise qu’il a acquise grâce à la confiscation de la plus-value.

Donc quand on lit cela, quelle différence avec la social-démocratie ? On ne parle évidemment pas du social-libéralisme, dont la différence est évidente. Mais ces propositions pourraient très bien être adoptées par un parti social-démocrate, réformiste ou keynésien qui ne veut pas remettre en question l’économie de marché. Le PC proposerait-il donc simplement un aménagement de la gouvernance d’entreprise ? Pas plus ?

Cela semble se confirmer dans la suite des propos de Pierre Laurent : « Prélever à la source une partie des richesses pour la consacrer au bien-être social des populations, c’est communiste ! ». Pour moi, ce n’est pas communiste ; c’est surtout keynésien. Je croyais que le partage équitable des richesses produites entre ceux qui les ont produites était communiste. Ici, rien de tel, a priori, on laisserait l’État, en fin de course, réparer ce que l’entreprise privée n’a pas fait.

Ce congrès doit être le moment clé d’une clarification sur ce sujet. Comme il a tranché sur la dictature du prolétariat, le parti communiste doit préciser s’il est pour l’appropriation collective des moyens de productions (soit par l’État et ses services publics, soit par les salariés-coopérateurs avec des formes à définir d’entreprises en coopératives) ou s’il est pour maintenir le système actuel d’entreprise patronale amélioré et d’un service public qui réparerait les abus, comme c’est le cas aujourd’hui ?

Pour ma part, les phrases « droit de préemption pour les salarié-es sur leur outil de travail » page 17 et « Les salarié-es doivent gagner du pouvoir sur l’organisation du travail comme sur les grandes orientations de l’entreprise et son financement » page 21 sont plus des propositions sociales-démocrates que communistes. Je préfèrerais plutôt « Par la loi, les salariés deviendront propriétaires à part égale de leur entreprise pour enfin réaliser la démocratie dans l’entreprise ; un salarié = une voix ».

Pascal Tournois, Nice-Est

Lu sur congres.pcf.fr

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