Un élément factuel du débat sur l’énergie utile pour les communistes...
20 décembre 2011
Dans une tentative de montrer que le nucléaire est plus cher que les renouvelables, un collectif publie dans Le Monde du 8 décembre une comparaison des coûts d’investissement des différentes sources d’énergie. Prenant l’exemple de l’éolien, ce collectif donne le chiffre 1,3 € par Watt, contre 3,64 € par W avec du nucléaire (EPR à 6 G€). Même en tenant compte de l’intermittence, l’éolien resterait moins cher que le nucléaire, démantèlement inclus. Argument décisif ? Voire.
L’intermittence signifie qu’un Watt installé n’est pas un Watt effectif : une éolienne ne produit pas d’électricité lorsqu’il n’y a pas de vent, ou lorsqu’il y en a trop (danger de rupture qui force à mettre en berne). En moyenne, pour une éolienne terrestre, la puissance moyenne est de l’ordre de 20 % de la puissance installée (ce « facteur de charge » est de 17% en Allemagne, 22% en France). Le facteur de charge passe à environ 30% pour les éoliennes de mer, mais leur coût d’installation revient dans ce cas à 3 € le Watt.
Prenons le cas des éoliennes de mer, puisque c’est là que les grands chantiers à venir se concentrent (notamment en Manche et en Mer du Nord). En tenant compte du facteur de charge, le Watt effectif moyen revient donc à 9 €. Mais ce n’est pas tout. Ces éoliennes sont données pour une durée de 20 ans, alors qu’une installation nucléaire est conçue pour 60 ans. Encore un facteur 3. Sur la longueur, le Watt moyen éolien revient donc à 27 € ! Pour obtenir l’équivalent de la puissance moyenne d’un EPR, soit 1,4 GW (1,6 GW installés fonctionnant avec un facteur de charge de 90 % pour 6 G€), il en coûte donc 37,8 milliards d’euros.
Est-ce vraiment tout, cette fois ? Non, car faire la moyenne de l’énergie produite sur une année ne résout pas le problème de l’intermittence, c’est-à-dire l’absence de vent pendant quelques heures, un jour, trois jours. Il faut de la puissance de réserve, facilement mobilisable, en quantité égale à environ la moitié de la puissance éolienne installée. Tant que la puissance à compenser est faible, l’hydraulique peut suffire, si l’on en a (ou si le voisin en a : c’est ainsi que le Danemark exporte vers la Norvège et la Suède la majeure partie de sa production éolienne dont l’irrégularité pose des problèmes de gestion !). Mais ceux qui envisagent un développement massif de l’éolien semblent ignorer cette donnée de base du fonctionnement des réseaux électriques : l’offre doit équilibrer la demande à chaque instant. La « capacité de substitution » de l’éolien aux sources fossiles descend alors à quelques pourcents seulement de la puissance installée. Les constructeurs de centrales à gaz, voire au charbon, eux, ne l’ignorent pas. .. Reste donc à rajouter le coût de ces sources d’appoint.
Arrêtons-là le décompte. Il est parfaitement légitime d’être opposé au nucléaire, il est parfaitement légitime d’être favorable aux éoliennes… mais il n’est pas légitime de se tromper à ce point sur les formes d’énergie qu’on prétend promouvoir.
Jacques Treiner, physicien
Association « Sauvons le climat »
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