Le meilleur score du KKE depuis 25 ans dans un paysage politique recomposé par le capital Les communistes grecs continuent de progresser avec 8,5% des voix et 26 sièges

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Le scrutin qui inquiétait les marchés européens ce dimanche 6 mai n’était pas celui opposant en France le partisan de l’ « austérité de droite » contre celui de la « rigueur de gauche ». Il s’agissait bien des élections législatives en Grèce, dans un climat de colère sociale et de rejet du consensus dominant PASOK-droite.

Les résultats définitifs confirment d’une part l’ampleur de ce mécontentement populaire mais d’autre part révèlent à quel point le grand capital grec et surtout européen est en mesure de trouver des roues de secours viables lorsque ses serviteurs habituels se retrouvent à bout de souffre, discrédités par la politique d’austérité qu’ils font subir au peuple grec.

La première leçon de ce scrutin, c’est la déroute historique des deux partis du consensus libéral-européiste dominant.

Une déroute historique pour le consensus dominant PASOK-Nouvelle démocratie

Le parti de droite classique, Nouvelle Démocratique, a sauvé les meubles grâce à sa puissante organisation clientéliste et ses positions conservatrices traditionnelles.

Avec 18,9% des voix et 108 sièges, elle sera sans doute le pivot de la future coalition gouvernementale, mais perd 13,6 points (33,48% en 2009) par rapport au dernier scrutin.

Son alter ego à gauche, le PASOK socialiste s’effondre pour atteindre un minimum historique, avec 13,2% des voix et 41 sièges mais il reste le partenaire le plus crédible pour une nouvelle « grande coalition » gauche-droite.

La politique de casse sociale menée d’abord par Georgios Papandreou depuis 2009 puis par son successeur Lukas Papademos, avec le soutien du PASOK a logiquement conduit à la désaffection d’une grande partie de sa base électorale. Le PASOK avait réalisé 43,92% des voix en 2009.

L’effondrement des deux partis dominants a laissé un large espace à des forces, à gauche comme à droite, participant largement d’une recomposition maîtrisée par ces mêmes forces dominantes. Tout comme le capital européen envisage une « faillite contrôlée » de l’économie grecque, il a tenté d’opérer une « faillite contrôlée » du système politique grec.

Les communistes progressent une nouvelle fois, avec 8,5% des voix et 26 sièges, bravant l’anti-communisme ambiant

JPEGLe point positif du scrutin, c’est la nouvelle progression électorale des communistes du KKE, reflet de leur ancrage de masse et de leur participation décisive aux luttes depuis 2009.

Avec 8,5% des voix et 26 sièges, les communistes gagnent du terrain par rapport au déjà bon score de 2009 (7,5% des voix et 21 sièges). Ils réalisent pour un scrutin national leur meilleur score depuis la chute du mur de Berlin, plus exactement depuis 1985, lorsqu’ils avaient obtenu 9,1% des voix (mais seulement 12 députés).

Une progression d’autant plus méritoire qu’elle se produit dans un climat de rare hostilité où ont alterné menaces et insultes anti-communistes frontales et manœuvres plus subtiles au nom du vote utile pour SYRIZA et Gauche démocratique, des méthodes vicieuses qui ont eu sans doute leur impact.

Les positions courageuses du KKE vis-à-vis des illusions d’un gouvernement de gauche alternatif dans le cadre du système alternatif ont été reconnues par une large partie de la classe ouvrière grecque. Mais leur intransigeance a pu orienter une partie des classes moyennes paupérisées, déçues du PASOK, vers une gauche qui se présente comme radicale mais de gouvernement.

La percée de la « gauche radicale » ou la « faillite contrôlée » de l’aile-gauche du système politique traditionnel grec

L’écroulement du PASOK était la seule donnée certaine, connue avant le déroulement même de ces élections. Le grand capital grec avait anticipé sa décomposition et préparé la recomposition de la ’gauche’ grecque, à partir de l’aile-gauche de la social-démocratie Grecque, la coalition dite SYRIZA.

La coalition SYRIZA est un amalgame hétérogène composé de maoistes, de trotskistes, d’ex-communistes rénovateurs, de transfuges de la social-démocratie, de nationalistes de gauche ou encore d’écologistes, minés par des querelles internes interminables qui l’ont mené plus d’une fois au bord de l’implosion. Une coalition unie sur le plus petit dénominateur commun, celui d’une vague gauche unie sans programme ni idéologie claire.

Une histoire faite de nouvelles coalitions et de nouvelles scissions incessante. La dernière en date, celle du groupe Gauche démocratique (DIMAR) trouvant SYRIZA trop intransigeante, et plutôt favorable à un gouvernement d’union avec le PASOK, pour le tirer à gauche dans sa politique d’austérité.

Gauche démocratique a finalement obtenu 6,1% des voix et 19 sièges tandis que SYRIZA a décroché la deuxième place avec 16,8% et 52 sièges.

Les pertes du PASOK ont donc été très largement redistribués vers des partis qui soit soutiennent ouvertement le PASOK, comme Gauche démocratique, soit soutiennent une ligne dont l’opposition formelle à la ligne actuelle du PASOK n’en est pas moins concordante avec les positions social-démocrates traditionnelles.

En effet, outre la complaisance sans précédent dont a bénéficié SYRIZA durant la campagne, en premier lieu pour son jeune chef sémillant, le télégénique Alexis Tsirpas, la « Coalition de la gauche radicale » a fait campagne pour une véritable « coalition gouvernementale de gauche » capable de mener une autre politique en Europe.

Une alliance proposée à DIMAR, au KKE et même au PASOK, si « il bouge vers la gauche ». Le KKE a refusé cette main tendue, et ce que l’autre dissimule. Car SYRIZA ne propose aucune rupture avec le système capitaliste, qu’elle souhaite aménager, avec l’Union européenne, qu’elle souhaite réformer ou avec le système politique grec corrompu, sachant qu’elle est alliée au PASOK dans bon nombre de municipalités et départements du pays.

Les deux nouveaux piliers de l’aile-gauche système politique grec s’appellent donc Gauche démocratique, comme force d’appoint parlementaire du PASOK et de la « grande coalition », et SYRIZA comme opposition officielle, chargée de canaliser la colère populaire vers des solutions compatibles avec le système dominant.

Recomposition préoccupante à droite, entre montée d’un nationalisme populiste et fascisation de la vie politique grecque

Le résultat le plus inquiétant de ce scrutin ne provient sans doute pas de la gauche de la vie politique grecque. Certes, l’effondrement des partis de droite paraît moins net que celui du PASOK, mais il est néanmoins indiscutable.

Outre Nouvelle démocratie, le parti d’extrême-droite traditionnaliste LAOS recule et paye sa collaboration au gouvernement de l’austérité. Il passe de 5,63% des voix et 15 sièges à 2,9% et sans aucune représentation parlementaire.

La recomposition de la droite grecque profite partiellement à une nouvelle formation de droite, dissidente de la Nouvelle démocratie, les Grecs indépendants, qui obtiennent 10,6% des voix et 33 sièges, sur fond d’un discours souverainiste et populiste, dont il est encore difficile de savoir les implications politiques au vu du caractère nouveau de ce parti.

Le plus préoccupant reste la percée historique d’un groupuscule d’extrême-droite, issu de la mouvance néo-nazie, l’Aube dorée qui récolte 7% des voix et 21 sièges.

Utilisant un symbole proche de la croix gammée, exaltant la violence et le droit du sang, prônant un nationalisme ethnique et expansionniste, anti-communiste et contre-révolutionnaire, tout en adoptant un discours superficiellement radical sur les questions sociales, en indiquant un bouc-émissaire : l’étranger, l’Aube dorée rassemble tous les critères d’une formation de droite néo-fasciste.

Les origines national-socialistes de cet ancien groupuscule d’extrême-droite transparaissent dans son réseau international qui rassemble notamment le Parti national-démocrate (NDP) allemand, héritier du parti nazi, ou encore la Forza nuova italienne, qui se revendique comme une fidèle héritière du parti national fasciste italien.

« Faillite contrôlée » des deux piliers du système politique grec, émergence de nouvelles gauches et de nouvelles droites de gouvernement (Grecs indépendants, Gauche démocratique), mise en avant d’une opposition officielle canalisant vers les solutions institutionnelles avec SYRIZA, fabrication de toutes pièces d’un parti néo-fasciste comme recours ultime du capital, le paysage politique grec, décomposé est aussitôt recomposé par le grand capital grec et européen.

Mais dans cette sombre apparence d’un contrôle total de la classe dominante européenne sur les événements politiques grecs, une épine dans le pied du capital persiste. Une force résiste et progresse, le Parti communiste grec (KKE).

Dans l’hostilité la plus totale, malgré les menaces, intimidations ou manœuvres politiciennes subtiles, les communistes grecs continuent à être perçus consciemment par des centaines de milliers grecs comme la seule alternative viable au pouvoir mortifère du capital grec et de l’Union européenne sur leurs vies.

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Voir en ligne : Article AC sur le site solidarite internationale pcf

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