La Chine est-elle impérialiste ? Ouvrage dirigé par Rémy Herrera, paru aux « éditions critiques »

, par  Remy Herrera , popularité : 84%

Le camarade Rémy Herrera a bien voulu autoriser la parution sur ce site de la préface à l’ouvrage qu’il a dirigé, donc à multiples auteurs, chinois pour la plupart, intitulé « La Chine est-elle impérialiste ? » ; nous l’en remercions.
Bien évidemment, cette préface ne nous donne qu’un avant-gout du livre organisé en 5 chapitres indépendants et tous très bien renseignés et argumentés de manière scientifique. C’est pourquoi je ne peux que vous conseiller de vous le procurer (17 € seulement !) car il remet bien à leur place les idées fausses diffusées par la propagande de l’idéologie dominante concernant le statut de la Chine ; et croyez-moi, s’il y en a un qui sait que ce n’est que de la propagande, c’est bien le propagandiste en chef, à savoir Donald Trump qui n’a qu’une hâte, c’est d’en finir avec la guerre en Ukraine, car celle avec la Chine (guerre tous azimuts) doit selon lui, prendre toute son ampleur.
En tous cas, ce livre tombe à pic pour remettre en cause toutes ces idées reçues sur la Chine, dans lesquelles semblent se prendre les pieds avec trop de facilités un certains nombre d’adhérents du PCF ; il est vrai qu’un trotskiste à la tête de la commission internationale du PCF, ainsi qu’un atlantiste responsable de la rubrique internationale à l’Huma, ça n’arrange pas les choses...
PB

Défendre la thèse selon laquelle la Chine serait « impérialiste » présuppose, par construction, d’admettre que le système économique actuellement en vigueur dans ce pays est « capitaliste », dans la mesure où l’impérialisme se définit lui-même, dans la tradition marxiste tout au moins, en tant que phase du capitalisme.

Le système chinois n’est pas capitaliste

A ce propos, un consensus très large – emportant jusqu’à l’adhésion de progressistes influents – s’est établi pour qualifier le système économique chinois de capitaliste. Ce serait une évidence. Depuis la fin de la décennie 1970, et plus encore au cours de ces dernières années, la tendance à la pénétration des mécanismes de marché capitalistes ne va-t-elle pas croissant ? Le périmètre du secteur privé ne s’est-il pas considérablement élargi, quand celui du secteur public reculait ? Les entrepreneurs capitalistes, qu’ils soient locaux ou étrangers, n’y sont-ils pas aujourd’hui omniprésents ? Et ce pays n’est-il pas lui-même plongé dans la mondialisation, de plus en plus étroitement intégré au système mondial capitaliste ? Des mesures d’ordre bancaire et financier n’ont-elles pas été récemment adoptées qui confirment les pressions exercées par les oligopoles de la haute finance globalisée et maints experts d’organisations internationales sur les autorités chinoises afin de faire appliquer par ces dernières des politiques économiques « libérales » ? Et si ce n’était pas encore suffisant, le Parti communiste chinois (PCC) n’accueille-t-il pas parmi ses membres des personnalités connues pour être de puissants capitalistes, multimilliardaires aux mentalités fort éloignées des idéaux socialistes ?

Dans un ouvrage déjà publié aux Éditions Critiques, en 2019, La Chine est-elle capitaliste ?, cosigné avec Zhiming Long, professeur à l’École du marxisme de l’Université Tsinghua de Pékin, nous avions tenté d’aller au-delà des apparences et de montrer que tenir pour capitaliste le système chinois actuel ne va pas de soi. A contre-courant de l’opinion dominante sur cette question, nous insistions sur le fait que le processus de développement chinois connaît des contradictions profondes, reflétant l’intensité de la lutte des classes qui le traverse. Ainsi, bien que de très nombreux traits qui caractérisaient le communisme maoïste aient disparu ou reculé depuis les réformes engagées en 1978, certains éléments ont résisté, lesquels sont beaucoup plus proches du socialisme que du capitalisme. On ne saurait les oublier, ou les sous-estimer, au risque de ne plus être en mesure de réfléchir sérieusement sur la vraie nature de ce système. Quels sont (quelques-uns d’entre les plus déterminants de) ces éléments ?

Il y a, tout d’abord, une propriété collectiviste des sols – et donc un accès à la terre garanti pour la paysannerie –, ainsi que celle des sous-sols, ouvrant en cela une latitude d’action efficace pour la protection de l’environnement. Il y a ensuite le statut public de la plupart des secteurs jugés économiquement stratégiques – beaucoup des grandes entreprises des secteurs industriels clefs sont des sociétés d’État –, comme de toutes les infrastructures les plus importantes du pays, mais aussi une conception étendue des services publics, hors marché ou faiblement marchands. Il y a encore la réalité d’une planification centrale de l’économie et son application vigoureuse. Bien qu’ayant changé dans ses objectifs et ses instruments, elle continue d’être utilisée, servant de cadre général pour la mise en œuvre de la stratégie de développement suivie par l’État et le PCC. Guidés par de tout autres objectifs que la maximisation des dividendes privés, les conglomérats publics géants s’intègrent à la planification pour satisfaire prioritairement les besoins sociaux. Ils ont de surcroît un rôle d’entraînement bénéfique sur les petites et moyennes unités qui, quant à elles, renvoient très souvent davantage à la production familiale ou artisanale qu’au capitalisme. Les décisions en matière de rémunérations et de conditions de travail dans ces conglomérats dépendent de l’État, qui contrôle les prix des produits et des facteurs de production, pour ne pas les laisser entre les mains des agents économiques les plus puissants, et qui sait aussi infléchir la logique de rentabilité quand l’intérêt stratégique national le commande. Tout ceci relève plus d’un projet qui se distingue encore assez nettement du capitalisme.

Un "socialisme de marché", "phase première du socialisme"

Il n’est donc pas aussi évident qu’il y paraît que le système économique chinois actuel soit "capitaliste". Cependant, d’aucuns pourraient peut-être ici avancer que le fait de soutenir que la Chine n’est pas capitaliste n’exclut pas pour autant celui de considérer que ce même pays puisse avoir un comportement ou des visées "impérialistes".

Car la Chine, depuis plus de deux décennies maintenant, achète tous azimuts les actifs les plus divers, pénètre la structure de propriété de multiples entreprises étrangères, accorde des prêts… Dans ce contexte, encore conviendrait-il de démontrer, pour qu’il soit possible d’affirmer que la Chine est également impérialiste, que l’exportation de capitaux chinois vers le reste du monde s’effectue par des oligopoles financiers en expansion – un capital financier ayant la mainmise sur le capital industriel et actionnant le capital bancaire – dans le but d’accaparer privativement des profits extorqués à l’échelle globale. Or, tel n’est pas le cas. Les plus grands établissements bancaires et financiers chinois sont des institutions qui dépendent de l’État, lequel contrôle très strictement les mouvements de capitaux quittant le ou sortant du territoire national et surveille de près les opérations financières réalisées sur les divers compartiments du marché domestique. Le financement de l’économie demeure principalement fondé sur l’intermédiaire bancaire. Les taux d’intérêt restent largement administrés et leur utilisation est complétée par un dispositif de réserves obligatoires. Les autorités chinoises maîtrisent avec fermeté la politique monétaire, sous ses aspects interne (l’offre de monnaie) et externe (le taux de change), et empêchent donc que la monnaie nationale fluctue "librement" sur le marché des changes, ce qui, par-là même, limite les risques de perturbations affectant l’économie domestique, en terme d’inflation notamment.

Cet argumentaire perdrait sans doute de sa portée si l’on acceptait l’expression de « capitalisme d’État », se rapprochant sans doute un peu plus de la réalité chinoise et traduisant la conjonction des actions étatiques et des pratiques de concentration des actions étatiques et des pratiques de concentration du surplus par les entreprises privées. Toutefois, en Chine, le secteur privé ne constitue que l’une des composantes d’une économie mixte, où la prédominance est accordée à un vaste secteur public et où la puissance de l’État doit être assurée. Ce dernier exerce une surveillance non seulement des conditions d’implantation sur le territoire national des transnationales étrangères, qui doivent respecter des règles strictes, mais également du comportement des investisseurs chinois eux-mêmes en activité au-delà de leurs frontières. Et le PCC s’est installé tout au sommet du pouvoir politique pour superviser l’action de cet État surpuissant, et pour éviter d’éventuelles dérives, qu’elles proviennent d’entreprises privées ou d’institutions publiques, dans les relations d’entités chinoises avec leurs partenaires étrangers. Des relations qu’il s’agit de préserver aussi bonnes que possible.

L’expression contradictoire de « capitalisme d’État » resserre la gamme des possibles entre capitalisme et socialisme, certes, mais elle laisse trop de flou dans la définition d’un mélange institutionnel unique au monde. Plutôt qu’à un « capitalisme d’État », le système s’apparente davantage, selon nous, à une économie « avec capitalistes, mais sans capitalisme ». En Chine, pouvoir économique et pouvoir politique ne coïncident pas. Jusqu’à l’heure présente, en effet, les possesseurs du premier sont encore maintenus sous le contrôle des détenteurs du second. Car l’expropriation politique de la bourgeoisie n’implique pas son expropriation économique tant que le Parti reste en mesure d’empêcher sa reconstitution en classe dominante dans l’État. L’objectif du PCC n’a pas été de tout s’approprier économiquement, mais plutôt de garder sur tout le contrôle politique, ce qui n’est pas la même chose. La coexistence des activités publiques et privées, stimulées les unes et les autres dans un système hybride, est le moyen qui a été choisi par les dirigeants afin de développer au maximum les forces productives du pays – y compris en attirant des capitaux étrangers et en important des technologies avancées –, et par conséquent aussi son niveau de développement. Ce, dans le but, non d’abandonner la voie du socialisme, mais d’améliorer les conditions de vie de la population : de l’extirper d’abord de la misère, puis de la faire accéder à la moyenne aisance, et enfin de viser l’abondance.

Voila pourquoi nous avançons qu’il est pertinent, pour cerner le processus de transition en cours en République populaire de Chine, de parler de « socialisme de marché ». On se trouverait ainsi dans la « phase première du socialisme », soit l’étape incontournable consistant à développer les forces productives et demandant beaucoup de temps pour parvenir à son terme. Néanmoins, la visée historique reste, selon les déclarations du PCC, le « socialisme développé » - même si ses contours sont imprécis. Les secteurs considérés comme fondamentaux pour l’essor de l’économie, le bien-être de la société, l’intérêt supérieur de la nation ou le rayonnement culturel du pays sont placés, d’une façon ou d’une autre, sous la tutelle de l’État. Limités par l’ampleur de la propriété publique (étatique ou collective) des moyens de production, les détenteurs du capital privé n’ont pas pu conquérir le pouvoir sur l’État et la PCC. Nous n’avons donc pas affaire au capitalisme – sans bien entendu sous-estimer les risques de restauration, réels –, mais à une forme de socialisme de marché ou de socialisme avec marché (et maintes contradictions) intégrée dans un processus de transition socialiste de long terme. Un processus perfectible assurément, dans de très nombreux domaines : de la démocratisation politique à l’aménagement du territoire, de l’égalité sociale à la protection environnementale, entre autres.

N’y a-t-il pas malgré tout une forme d’impérialisme mercantile ?

Reste qu’en plus des acquisitions de biens, prises de participation au capital ou crédits consentis à l’échelle mondiale, il y a les innombrables produits chinois partis à la conquête de l’univers. La Chine exporte ses marchandises, et le fait massivement. Partout. Comment alors analyser cet expansionnisme commercial ? N’est-ce pas là une forme d’impérialisme mercantile ?

Deux points méritent ici d’être soulignés. Le premier est illustré par les résultats de notre article proposé ci-après aux lecteurs, cosigné avec les collègues chinois Zhiming Long, Zhixuan Feng et Bangxi Li, consacré à l’analyse des relations commerciales sino-étasuniennes [1]. Il montre que la Chine engrange évidemment des recettes tirées de ses excédents commerciaux bilatéraux, mais aussi que ces gains sont compensés par le fait, révélé par nos calculs de l’échange inégal, que ce sont les États-Unis qui ont surtout profité de ce commerce dès lors que nous mesurons les temps de travail qui sont incorporés dans les marchandises échangées. En d’autres termes, même aujourd’hui, la Chine reste encore un pays du Sud « en développement », c’est-à-dire que du point de vue des capitalistes étrangers du monde entier, elle demeure aussi une réserve de main-d’œuvre à exploiter. Cette analyse est corroborée par l’étude de Minqi Li, qui définit la position de la Chine au sein du capitalisme mondialisé comme « semi-périphérique » [2]. L’hypothèse que nous formulons est ainsi que, venue se surajouter à une guerre monétaire qui lui préexistait, la guerre commerciale lancée par Washington contre Pékin, dans le cadre de la nouvelle "guerre froide" qui les oppose, pourrait s’interpréter comme une tentative de l’administration des États-Unis pour freiner la détérioration continue des bénéfices que leurs entreprises capitalistes extorquent du commerce qu’elles effectuent avec la Chine ; et donc aussi pour essayer de retarder le déclin de l’hégémonie étasunienne. Cette fébrilité des États-Unis face à une concurrence chinoise de plus en plus menaçante est illustrée par le texte de Junfu Zhao qui aborde le question stratégiquement cruciale des hautes technologies et des circuits intégrés [3].

Second point important : malgré ses imperfections, le commerce de la Chine avec les autres pays du Sud est le plus souvent très avantageux pour ces derniers, tout spécialement parce que les marchandises provenant de Chine sont généralement obtenues à prix relativement bas, et aussi parce que la conception chinoise du commerce avec les pays les plus pauvres s’inscrit dans une logique « gagnant-gagnant ». Et lorsqu’il arrive que, dans la pratique des relations commerciales internationales, ces échanges se révèlent déséquilibrés en faveur de la Chine, particulièrement quand ils tendent à accentuer la spécialisation productive de ses partenaires (spécialisation dans les exportations de matières premières), les contreparties et compensations qu’y trouvent ces pays du Sud (comme la construction d’infrastructures publiques, l’accès à des prêts à taux faibles et sans conditions politico-économiques, voire des annulations de dettes, par exemple) s’avèrent si substantielles qu’elles ne tardent guère à emporter leur accord.

Sinon un impérialisme militaire ou peut-être culturel ?

Peut-être conviendrait-il alors de se rabattre sur une définition plus classique de l’impérialisme, compris comme expansion de la puissance étatique, extension de souveraineté ou recherche de grandeur, pratiques par lesquelles un pays élargit son influence au-delà de son territoire national pour imposer sa loi à des populations étrangères.

Sous cette dimension politique, pouvant impliquer jusqu’à des interventions militaires directes, le fait est que, rappelons-le, la Chine n’a historiquement jamais eu de colonies dans le monde, ni mené de politique coloniale vis-à-vis d’autres peuples. Elle n’a pas non plus été engagée dans des guerres à l’époque moderne – à l’exception de conflits limités dans le temps et l’espace qui l’ont opposée à l’Union soviétique et au Vietnam indépendant, pays socialistes comme elle –, ni d’ailleurs proféré des menaces de guerres offensives contre un quelconque ennemi extérieur. Elle n’a pas de base militaire à l’étranger, sauf une "installation logistique" située à Djibouti, sur le chemin conduisant au canal de Suez, point stratégique pour le trafic maritime, ainsi que des dispositifs de défense du territoire national déployés en Mer de Chine, notamment sur les îlots Spratleys et l’atoll de Scarborough, face aux Philippines, pays où les États-Unis ont des installations militaires secrètes – venant s’ajouter à leurs 1150 bases militaires officiellement déclarées dans le monde, et sans tenir compte des implantations tenues à leur disposition par les alliés de l’OTAN.

N’y aurait-il pas tout de même un impérialisme culturel prodigué par la Chine ? Ne chercherait-elle pas à diffuser son "idéologie", notamment en distribuant dans les pays du Sud nombre de bourses pour étudiants ou de formations pour travailleurs ? N’est-ce pas là une preuve de la dissémination d’un « soft power » ?

Le système éducatif chinois, classé parmi les meilleurs de la planète, a de quoi impressionner, et séduire. Mais la conception que les Chinois se font de ces échanges culturels, au sens large, vise avant tout à diffuser des valeurs morales fortes et le respect des différentes civilisations. Elle se détourne de l’idée d’imposer leur mode de vie ou même un modèle de développement. Cette vision entend plutôt partager une expérience vécue, dont les peuples étrangers pourraient, s’ils le veulent, apprendre, tirer des leçons utiles pour déterminer leur(s) propre(s) trajectoire(s). A titre d’exemple, les hauts responsables chinois avancent que l’ouverture à la mondialisation peut présenter des avantages, mais à condition que les effets contradictoires de cette ouverture puissent être fermement contrôlés par un État volontariste agissant au service du bien-être de la population. En bref, les leaders chinois considèrent que c’est aux peuples étrangers, souverains, et à eux seuls, de définir les chemins de leur développement et de leur émancipation.

Vers le co-développement, la coopération internationale et la paix mondiale

Dans ces conditions, que dire du système chinois, si nous pensons qu’il n’est pas impérialiste ? Le socialisme aux caractéristiques chinoises n’est pas du communisme, ni non plus l’idéal du socialisme ; ses défauts et insuffisances sont si criants que l’affirmation ne traverse pas l’esprit. Ceci entendu, on notera que la forme actuelle prise par le capitalisme des oligopoles financiers à l’échelle mondiale, emmené par l’hégémonisme étasunien (déclinant, mais encore effectif), est celle d’une accumulation militaro-financière – les deux piliers de la monnaie et de l’armée étasuniennes soutenant le pouvoir totalitaire et destructeur de la haute finance globalisée. Or, telle n’est pas la voie qu’ont souhaité prendre les dirigeants chinois, qui cherchent à orienter résolument leur stratégie en direction de l’économie non financière, de la production réelle et de la consommation domestique, à l’intérieur du pays, d’une part, et, d’autre part, à l’extérieur de ses frontières, vers le co-développement, la coopération internationale et la paix mondiale. Dans cette dernière optique, le projet stratégique chinois, de portée planétaire, dispose déjà d’une série de puissantes institutions nationales et multilatérales (comme la Banque asiatique d’Investissement et d’Infrastructure, entre autres) afin de mener à bien le plan économico-stratégique de la Nouvelle Route de la Soie, qui entend impulser un développement productif polycentrique extraordinairement ambitieux, et complété par un très vaste accord commercial international, appelé « Partenariat régional économique global ».

Comme le suggèrent le texte de John Bellamy Foster ainsi que la contribution de Sit Tsui et de ses coauteurs placés en tête de cet ouvrage, le succès de ce projet chinois serait alors la condition de l’avènement d’un monde multipolaire [4]. L’issue d’une telle transition systémique est incertaine, d’autant que les oligopoles financiers du Nord, actionnant la machine de guerre des États-Unis, secondés par l’OTAN, semblent vouloir de plus en plus frontalement entrer en conflit avec la Chine – et/ou avec son allié russe. Les perspectives de confrontations entre puissances en présence se précisent, dangereusement. De tout cela, les forces progressistes de l’Occident (dont l’Europe), ou du "Nord" (Australie, Nouvelle-Zélande et Japon compris), devront prendre conscience ; comme il leur faudra aussi comprendre que la crise du capitalisme a désormais enfoncé ce système dans l’impasse et que son agonie n’apportera que des reculs sociaux au Nord et des guerres incessantes contre le Sud – en plus des dévastations irréversibles de la nature.

Dans leurs luttes anti-impérialistes, les forces progressistes ne devront pas se tromper de cibles. En voyant dans la Chine un impérialisme, elles désigneraient ses dirigeants comme des ennemis à combattre, alors qu’ils ne sont ni en guerre (sociale) contre leur peuple, ni en guerre (militaire) contre des peuples étrangers. Au contraire, la Chine constitue même plutôt à l’heure présente un contrepoids à l’impérialisme militaro-financier des pays capitalistes centraux ; impérialisme uni, organisé et placé sous le joug de la haute finance et des forces armées des États-Unis.

Rémy Herrera
Économiste au CNRS (Centre d’Économie de la Sorbonne)
Préface à l’ouvrage intitulé "La Chine est-elle impérialiste ?", paru aux Éditions Critiques, 184 p., 2023.

[1Cf. chapitre : «  Guerre commerciale sino-étasunienne : le vrai « voleur » enfin démasqué  », p.139.

[2Cf. chapitre : «  Chine : impérialisme ou semi-périphérie  ?  », p.91.

[3Cf. chapitre : «  L’économie politique de la guerre technologique entre les États-Unis et la Chine  », p.157.

[4Cf. les chapitres : «  La nouvelle guerre froide contre la Chine  », p.19, et «  Vers la déconnexion : une voie chinoise alternative au cœur de la nouvelle guerre froide  », p.59.

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