Haiti : Procès PetroCaribe sous Moise-Céant : Un jeu de Poker Menteur

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Pendant que nos médias dénoncent la crise humanitaire au Vénézuela, personne n’évoque la situation explosive de Haiti, que nos avions "humanitaires" survoleraient pendant que le colonialisme US exploite ce qui reste des richesses de ce pays...


Artifices, procrastinations, usure du temps, feintes, tromperies, bluffs, chantages, menaces, intimidations, toutes les astuces et tous les trucs du jeu Poker-Menteur se déferlent dans les discours et les actions de la présidence et de la primature sur le fameux dossier de procès PetroCaribe.

par Carly Dollin

Samedi 2 mars 2019 ((rezonodwes.com))– A l’émission[1] très prisée de la Radio Télé Métropole « Le Point », présentée par le journaliste vedette Wendell Theodore, en date du 12 décembre 2018, l’illustre historien Michel Sukar n’a pas utilisé la langue de bois pour démystifier les velléités factices et les volontés précaires du gouvernement Jean Henri Céant à pouvoir se dresser en face de ce régime, à l’encontre de ce système dont il a été au service toute sa vie professionnelle durant ; système où pérennisent les désordres, les gabegies, l’opacité, les malversations et la corruption.

Un notaire est un conservateur, il est au service des propriétaires passés, présents et futurs. Un notaire ne peut changer un système ; car personne ne peut travailler contre ses propres intérêts ; ce n’est tout simplement pas humain, a soutenu le célèbre historien. Le professeur Michel Sukar a surenchéri avec la métaphore : « Demander à un notaire de changer un système, c’est demander à un médecin de ne plus soigner ». Comment peut-on transformer un système quand on y a fait son beurre, se questionne le remarquable historien qui doute de l’autorité morale du premier ministre actuel à entreprendre un procès PetroCaribe impartial et équitable.

Que ce soit dans le sillage de la présidence ou de la primature, aucun signal crédible, aucune volonté forte, aucune détermination réelle – de faire aboutir une enquête PetroCaribe juste et transparent pour sanctionner les coupables des dilapidations des fonds obtenus de l’accord économique bilatéral entre Haïti et le Venezuela, sur les dix dernières années – ne peuvent être concrètement manifestés pour prendre des mesures drastiques sur ce délit financier.

Les principaux acteurs et firmes impliqués et indexés par la Cour Supérieure des Comptes d’avoir signé des contrats publics en l’absence des normes de passation de marchés, sont interconnectés de très près avec la présidence qui, elle-même, n’aurait pas les mains propres dans ce crime sinistre. Issus de la même famille politique, des compères et des camarades polkas buvant dans les mêmes verres, cantonnant les mêmes refrains carnavalesques dénigrants, savourant les mêmes musiques Ti-Sourit, comment peut-on demander à la présidence de mettre en branle une machine d’investigation pour faire la lumière sur les dilapidations des fonds alors que les cordes ombilicales de celle-ci ainsi que les liens fraternels, paternels et maternels de cette famille politique s’en trouvent fragilisés, car ils y ont été pratiquement tous épinglés par les rapports d’enquête du Sénat et de la Cour Supérieure des Comptes.

La firme Comphener S.A, dont l’actuel président de la République a été un important actionnaire, avait bénéficié d’un contrat de 4.8 millions de gourdes pour le projet d’électrification par lampadaires solaires, entrepris sous l’égide du BMPAD, entre les années 2012et 2013. La Cour des Comptes a relevé des irrégularités graves dans les principes de passation de marchés et des conventions d’ouvrage de service public. De tels contrats ne sont pas soumis aux règles de l’art et violent les principes des dispositions de la loi du 10 juin 2009. Le projet de lampadaires « Ban’m Limyè Ban’m Lavi » (BLBL), au gigantesque coût de 13.78 millions de dollars, entrepris sous le gouvernement de l’amateur administratif Laurent Lamothe, a été un véritable fiasco.

Au regard de ces données consignées dans le rapport de la CSC/CA, comment peut-on s’attendre à l’invention d’une approche auto correctionnelle où le joueur fautif choisirait lui-même de se donner carton rouge, de se sanctionner et de s’expulser du terrain de jeu. Pour paraphraser l’historien Michel Sukar, « ce n’est tout simplement pas humain » de solliciter une plaidoirie où le bourreau devrait siéger comme magistrat au tribunal.

Oscillations, sinusoidalités, instabilités, vicissitudes dans les discours PetroCaribe

En conversation avec des Franco-Haïtiens, à Paris en décembre 2017, le président ne passait pas par quatre chemin pour exprimer son farouche désaccord quant à la recherche de la vérité et de la justice dans cette affaire PetroCaribe. Il associait les démarches de la population à des manipulations et des persécutions politiques, dont la présidence ne va tolérer et supporter. Quelques mois après, à l’instigation de certaines institutions internationales qui finissent toujours par obéir, malgré elles, à l’adage « Vox Populi, Vox Dei », le président était obligé de changer son fusil d’épaule en déclarant qu’il canalisera son énergie dans la recherche de la vérité et la justice sur le crime PetroCaribe. La concession de la présidence allait même atteindre son paroxysme suite à la colère populaire exprimée les 6-7 juillet 2018. Le chef du gouvernail était contraint de déclarer hypocritement qu’il se met du côté de la population « Nou Pale, m tande Nou ». Révocations, suppressions et démissions spectaculaires devaient suivre pour envoyer des signaux crédibles en guise de stratégies pour essayer de rétablir le calme dans la Cité, en ébullition. C’était déjà de puissants uppercuts, apchagis et bichagis qui mettaient à genoux le fébrile pouvoir présidentiel, au ton autoritaire « point barre » en début d’année.

Du sang neuf, un nouveau joueur, un grand manitou politique devait monter sur le ring pour prendre le relais et venir en aide à la présidence, tête baissée, pieds cassés, amputée, saccagée et malmenée par la vigueur des petrochallengers. Dans les discours luminaires de la nouvelle équipe gouvernementale, via porte-parole, Premier Ministre et chef de cabinet, on transpirait éloquence, confiance, espoirs, mais pas nécessairement de la cohérence ; car les promesses gouvernementales oniriques allaient de la mise en œuvre du procès PetroCaribe jusqu’à la concrétisation des rêves folkloriques de la présidence qui ne peut plus berner la population avec les discours fallacieux d’électricité 24/24, de l’argent dans les poches et la nourriture dans les assiettes. Apres plusieurs mois de prise de fonction, les actions concrètes et les résultats probants n’ont jamais été au rendez-vous. Trois mois après l’installation du nouveau gouvernement, on avait même assisté au déclin des conditions de vies, déjà immondes et abjectes. La gourde a reçu des gifles sans arrêt, l’inflation s’accélère, la corruption et l’impunité continuent leur petit bonhomme de chemin, avec les dossiers de Dermalog, de députés et sénateurs rançonneurs des institutions gestionnaires et génératrices de fonds publics telles que l’ONA, la CAS, le FAES, le BMPAD, l’APN, le FDI, etc.

En raison des comportements malicieux et dédaigneux des irresponsables politiques, la population a jugé nécessaire de reprendre ses gants et de monter le dojo en un deuxième round le 17 octobre, un troisième le 18 novembre et un quatrième le 7 février. A chaque round, on sentait que l’adversaire malmené, mourant, agonisant, trépassant, n’a pas été KO uniquement grâce à des supports anti-fairplay de certains arbitres et fanatiques intéressés. Il s’agit tout simplement d’une stratégie de procrastination ; car, à un certain moment, aucun arbitre n’y pourra rien pour une équipe déjà battue, pour un régime en situation « échec et mat ». Avec cette dextérité dans les dribles, dans les feintes, dans les set-plays et les combinaisons de l’équipe de la population, même des dopages ou des arbitrages-maison ne peuvent vaincre cette exquise performance manifestée dans la conscience, la solidarité et les manifestations populaires.

Avec des sénateurs qui se soulèvent contre ce régime dans lequel ils faisaient leur beurre, des sénateurs et des députés qui s’avilissent, qui se déresponsabilisent, qui s’entremangent, qui sortent les listes de mariages indécents et d’ententes malsaines entre les vampires politiques et les institutions gestionnaires de fonds publics, on sent que la fin du match est proche. Les carottes sont quasiment cuites à travers de nombreux buts déjà scorés par la population et également à travers des buts marqués par les animaux politiques dans leurs propres camps (des auto-goals).

Dans les médias, en privé, au sein de leur propre temple, il y a des sénateurs qui portent la veste de « Snowden », pour dénoncer avec fermeté les torts, les préjudices, les crimes, les délits d’initiés, les prévarications et les comportements déloyaux affichés par les membres de leur propre famille. Des déshonorables collègues, des amis et des camarades pères-conscrits qui devaient se retrouver en prison pour les gabegies, les désordres et les galvaudages financiers dont ils sont l’objet, car ils ont monté leurs propres firmes et sont les principaux dilapidateurs des fonds PetroCaribe, a amèrement décrié le sénateur Willot Joseph, lors de la séance de ratification du premier ministre Jean Henri Céant, à la salle de théâtre du Bicentenaire, le 17 septembre dernier.

Conflit d’intérêt patent entre la Primature et la Présidence

Le numéro un du gouvernement avait relaté dans son discours de « politique générale », tenu au temple bicaméral que les fraudes et les malversations commises par des mains du pouvoir en place, ne sauraient rester impunies. Le premier ministre, en tant que serviteur des propriétaires passés, présents et futurs, est bien imbu, même avant la soumission du rapport de la Cour des Comptes, des pratiques déloyales de nombreux dilapidateurs des fonds de l’Etat. Des milliards dévolus à l’éducation, la culture, la santé, le sport ; mais canalisés dans certains comptes bancaires personnels et qui ont enrichi un petit clic au détriment de toute une population. Le premier ministre a obtenu son poste, par le truchement et l’influence de grands manitous de ce régime politique, aux têtes mal calées. Si aujourd’hui le courant entre la Primature et la présidence oscille en mode alternatif, c’est tout simplement en raison d’enjeux et d’intérêts politiques de taille. Mais, non parce que la Primature détient la bravoure et l’autorité adéquates pour prendre des décisions Pétrocaribéennes contre des grands commis du pouvoir en place, car le PM demeure une recrue de cette mauvaise équipe au pouvoir ?

A la suite de la soumission du rapport partiel au Parlement par la Cour des Comptes, les feux des projecteurs sont allumés sur la présidence, révélée entachée et imbibée dans les irrégularités. Comment la présidence pourra-t-elle alors sortir la tête de l’eau, aucun espoir ne semble se pointer à l’horizon.

Les refus d’engagement de quasiment toutes les institutions invitées dans la commission « mort-né » du PM Céant pour entreprendre les investigations sur les gabegies des fonds PetroCaribe prouvaient déjà que la société a compris que le PM ne peut s’immiscer dans ce projet de procès de Petrocaribe. Il s’agit d’une situation patente de conflit d’intérêt. Ce serait un cas flagrant de violation de la fameuse notion de récusation dans les codes de procédures civiles (articles 339, 340) qui voudrait que le juge ne participe au débat et au délibéré, lorsqu’il est avéré que celui-ci a des accointances avec l’une des parties. L’avocat doit se dispenser d’intervenir lorsque son indépendance risque de ne plus être entière. Cela tient même dans la profession médicale qui préconise, dans certains cas, des distances entre des pratiques professionnelles d’un médecin sur un membre proche de la famille.

Dans cet imbroglio dont il est un grand acteur, comment serait-il possible à un premier ministre de jouer pleinement son rôle, en prenant des reculs, pour mener un procès équitable, empreint d’objectivité ? A-t-il bu l’opium du fameux film « Equilibrium », pour se détacher de ses propres émotions et de ses profonds sentiments ? Le premier ministre n’a-t-il pas été recruté par la famille présidentielle en place ? N’a-t-il pas trouvé la bénédiction du parlement, trempé jusqu’au coup, dans les gabegies et les collusions déloyales ? Même au cas où le premier ministre serait lui-même « clean », hypothèse peu plausible tout au moins moralement, comment saurait-il entreprendre des démarches pour mettre en accusation le président, lui-même épinglé dans le dossier PetroCaribe ?

Les intérêts fougueux de la Primature à mener ce procès risquent de servir un met suffoquant, mal cuisiné, non cuit, car n’inspirant pas confiance. La prise en charge formelle, légitime et probe du dossier PetroCaribe n’est pas l’affaire de l’équipe du pouvoir en place. Il faut une fin à ce jeu de mensonges et de duperies pour enfin plébisciter au pays des gens honnêtes, compétents et loyaux, capables de prendre en main les destins de la nation. Cette nouvelle équipe saura également identifier clairement et objectivement les responsables et les coupables des distorsions, des gabegies et des malversations pour les évincer et leur brandir des cartons rouges pour ne plus s’investir à hypothéquer l’avenir et le devenir des enfants, de la jeunesse et de la population.

Carly Dollin
carlydollin@gmail.com

Voir en ligne : sur le site rezonodwes.com

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