Il faut se dire la vérité
Je dois vous dire la vérité. Les difficultés de la gauche ne sont pas résolues. Des millions d’ouvriers, d’employés, de jeunes ne lui font plus confiance pour contester la domination des capitalistes, pour changer la société.
C’est normal puisqu’au fonds, la gauche n’a jamais tiré les leçons de ses propres échecs. Ni en 1981, ni en 1997, ni en 2012, elle n’a « changé la vie », au contraire, elle s’est toujours adapté au capitalisme, à la mondialisation, et les inégalités, les ségrégations, les injustices se sont aggravées sous ses gouvernements. Le résultat est terrible. Le premier parti du monde du travail reste l’abstention, et le deuxième est le Rassemblement National.
Le parti communiste sort une nouvelle fois affaibli de cette élection. Nous avons pris nos responsabilités en participant au nouveau Front Populaire, nous avions des députés et des candidats le plus souvent dans les circonscriptions où le rassemblement national était déjà à un haut niveau en 2022. Nous l’avions battu difficilement, nous n’y parvenons pas cette fois.
Là aussi, nous n’avons pas clairement tiré toutes les leçons des échecs de la gauche dans les situations ou nous avons participé au gouvernement, comme dans celle où nous étions pourtant dans l’opposition. Nous n’avons pas non plus tiré toutes les leçons des échecs successifs du mouvement social, malgré la puissance de ses manifestations contre la réforme des retraites, du droit du travail... Nous devons dire clairement comment la gauche et le mouvement social pourrait faire autre chose, autrement, tenant compte de que ce qu’elle représente aujourd’hui pour le monde du travail.
Oui, je dois vous dire la vérité. Le monde du travail est profondément divisé par l’extrême-droite qui a réussi sa « dédiabolisation ». Il faudra comprendre comment cela a été possible dans notre pays où la lutte contre le racisme a toujours été porté par la gauche. De l’affaire Dreyfus, jusqu’à la solidarité avec les luttes anticoloniales et pour l’indépendance des peuples, en passant par la lutte contre l’apartheid. Mais c’est la réalité actuelle.
Ouvrir en grand le débat pour faire reculer l’extrême-droite
C’est pourquoi je vais consacrer toutes mes forces à mobiliser les communistes pour un grand débat national sur cette division des milieux populaires dans toutes ses dimensions ; entre urbains et ruraux, métropoles et périphéries, statutaires et précaires, salariés et bénéficiaires d’aides sociales, divisions aussi sur l’origine, la religion, les modes de vie.
Nous devons mettre sur la table les questions déterminantes dans le vote d’extrême-droite, immigration, racisme, islam, inégalités, aides sociales. Dans la campagne des européennes comme des législatives, nous avons multiplié les arguments expliquant notamment les nombreux votes des députés RN contre les intérêts de beaucoup de leurs électeurs. Pourquoi cela n’a pas eu d’effet ? Pourquoi tant d’ouvriers, de retraités, de jeunes, pensent que le migrant n’est pas leur frère et ne voient pas que Bolloré qui finance et anime la bataille d’idées pour l’extrême-droite ne sera jamais leur frère ? Cela doit être l’urgence des forces de gauche, des militants progressistes. Nous devons faire la critique de nos discours contre l’extrême-droite et nous mobiliser pour la faire reculer enfin, pas à pas. C’est la condition pour reconstruire une alternative politique. Et je sais que c’est la condition pour reconstruire un parti communiste utile au monde du travail.
Un tour de France des assemblées du Front Populaire contre l’extrême-droite
J’appelle donc les communistes à organiser dans toute la France des assemblées du nouveau Front Populaire pour aborder toutes ces questions, partager la compréhension de ce rapport de forces si difficile pour la gauche, sortir des habitudes et des certitudes, sortir aussi d’une pratique quasi publicitaire du débat public où les slogans remplacent la réflexion partagée, sortir d’un débat limité aux réseaux sociaux qui enferment dans les « boucles » de ceux que l’on connait, attise les querelles inutiles entre les forces de gauche, et ne permettent pas de nous mobiliser pour parler à tous, y compris à ceux qui ne nous croient plus.
J’engage un nouveau tour de France pour contribuer, avec toute la direction du PCF a cet immense effort nécessaire pour réunir notre peuple, surmonter ses divisions, et ouvrir une perspective de rupture politique avec les droites, macronistes, dites républicaines ou extrêmes, une rupture progressiste pour un vrai changement de société.
10 juillet 2024,
le secrétaire national du PCF.