Dettes : Quelle variable d’ajustement ? Critique des préconisations de Paul Krugman, Prix Nobel d’Economie.

, par  citoyen lambda , popularité : 2%

En visite à Paris, le Prix Nobel d’économie 2005, Paul Krugman, a accordé une interview au Journal Le Monde, publiée dans l’édition du 30 janvier 2012.

http://www.lemonde.fr/economie/article/2012/01/30/paul-krugman-l-inflation-n-est-pas-le-probleme-c-est-la-solution_1636446_3234.html

L’article est intéressant, car il explique les choix économiques du gouvernement. Qui établit le vrai rapport entre l’augmentation de la TVA et la crise de la dette ?

Les dettes sont elles en rapport avec des déséquilibres budgétaires ?

Contre toute idée reçue et en opposition à la pensée unique qui anesthésie tous les commentateurs sur l’ensemble des média, Paul Krugman répond clairement "NON".

Et Krugman de renvoyer l’Allemagne à sa philosophie : "l’Allemagne croit que la rectitude et la discipline budgétaires sont la solution. Elle a tort", estime l’économiste.

Cette critique courageuse a l’avantage de mettre en évidence l’absurdité de la thèse allemande consistant à dire aux autres : Faites comme nous !

En effet, pour qu’il y ait des excédents il faut bien des déficits. Et Paul Krugman d’ajouter, que si cela venait, par extraordinaire, à se réaliser pour l’ensemble de la zone euro, cela impliquerait de "trouver une autre planète pour exporter les produits de l’Europe !".

Les dettes résultent-elles d’un manque de compétitivité, lui-même consécutif à la lourdeur et aux coûts des systèmes de protections sociales ?

Là aussi, prenant tous les commentateurs "autorisés" à contre pieds, Paul Krugman répond "NON", ajoutant que la productivité horaire du travail de la France est excellente, et que des pays comme la Suède s’en sortent plutôt bien.

Dette privée !

Tout d’abord, "la crise est générée par la dette privée et non par la dette publique", affirme-t-il. Mais alors il y aurait transferts de cette dette privée à la sphère publique ? Quelles dettes sont réellement présentées aux contribuables ?

Lors de sa conférence à la société Lunalogic, il a présenté 5 tableaux graphiques. Le premier montre clairement l’explosion de la dette privée.

(lien : http://www.atlantico.fr/decryptage/cinq-graphiques-paul-krugman-pour-comprendre-crise-allemands-sont-autant-responsables-que-grecs-279169.html?page=0,0 )
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Le second montre comment endettement public et excédents privés évoluent en contre-phase :

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Nous avons comparé endettement public et endettement privé, et sommes parvenus aux mêmes conclusions : les excédents ou déficits budgétaires des administrations publiques ne modifient en rien la dette globale, ils ne font que transférer l’endettement sur le privé (excédents) ou sur le public (déficits). On comprend dès lors pourquoi les budgets des Etats sont si structurellement en déficits.
Cela confirme notre thèse développée dans le document 4, § 4.3.2.2.
(Lien : http://www.citoyen-lambda.fr/pdf/mdcf-04.pdf )

Balance des paiements internes à la zone euro.

"Le problème est celui d’un déséquilibre des balances des paiements" – dit-il également – Mais d’un déséquilibre interne à l’Europe, entre l’Allemagne et les PIGS (ou anciennement GIPSI, entendez Greece, Italy, Portugal, Spain, Ireland), et non pas avec l’extérieur de l’Europe.

Cela conforte encore notre thèse largement développée dans le document 4, § 4.2.4,
(Lien : http://www.citoyen-lambda.fr/pdf/mdcf-04.pdf )
ainsi que celle développée par Jacques Nikonoff (www.m-pep.org).

Zone euro !

Il ajoute : "Le problème de la zone euro, c’est sa construction même."

Et plus loin, ce constat édifiant : "Je dois dire que, quand je pense à la zone euro, je me trouve dans cette situation étrange où tout semble inextricable. Je ne peux imaginer que la zone euro s’effondre. Cela me paraît inconcevable, on perdrait tant. Je me dis donc que les politiques feront tout pour résoudre cette crise. Mais je pense alors aux solutions à mettre en place, et là je me dis : "Non, il est impossible qu’ils prennent de telles mesures." Je suis alors confronté à une double impasse."

Quand un Prix Nobel vous dit que le système est à ce point "inextricable", quel plus bel aveu de la nécessité d’en sortir ? !

Dont acte.

Mais, Paul Krugman s’interdit de remettre en question l’existence même de l’Euro, tout en pointant les rigidités de toutes sortes qui interdisent toute adaptation. Cela est d’autant plus surprenant que devant ses propres arguments, n’importe quel lycéen apprend, en sciences économiques, que les variations de parité des monnaies servent précisément à ça. C’est son option.

Au passage, nous remarquons qu’il admet que les mouvements de capitaux (traduisez : "la spéculation") peuvent évidemment anéantir les corrections monétaires aux déséquilibres commerciaux.

Et donc, dès lors qu’il constate l’impossibilité de jouer sur les parités monétaires entre des pays aux forts différentiels économiques, puisqu’ils ont malheureusement la même monnaie, et qu’il abandonne toute idée de contrôle des transferts de capitaux (et des marchés des devises), il en est réduit à chercher d’autres variables d’ajustements.

Quels ajustements ? Inflation, dévaluation, création monétaire.

Paul Krugman affirme : "L’inflation n’est pas le problème, c’est la solution".

Et il développe en introduisant le concept de "dévaluation interne" (!!!) : "L’euro ne pouvant être dévalué par un pays puisqu’il est une monnaie commune à 17 Etats membres de l’Union monétaire, les gouvernements pourraient envisager d’imposer par décret dans leur pays un abaissement de l’ensemble des prix (salaires, contrats, loyers). En France ou en Italie, il s’agirait de procéder à une dévaluation fiscale (hausse de TVA, et des taxes pouvant financer des baisses équivalentes de charges sur le travail)."

Si l’on fait le détail de sa préconisation, il distingue les pays les plus en déficit avec l’Allemagne, des autres.

Aux P.I.G.S. ou G.I.P.S.I. on appliquerait le plan A : baisse autoritaire des prix, des salaires, et des contrats, et aux autres (France, Italie) on appliquerait le plan B : relèvement de la TVA.

Dans les deux cas c’est à une baisse sévère, ou moindre, des salaires que l’on aboutit, tout ça, uniquement pour rééquilibrer les échanges commerciaux internes à l’Europe (entre l’Allemagne et les autres) !

Aparté  : Ceux qui n’auraient pas compris le rapport entre la question de la dette publique et la hausse du taux commun de la TVA annoncée par Sarkozy lors de son intervention télévisée du dimanche 29 janvier 2012, ont l’explication.

Paul Krugman, bloqué par la question de la monnaie unique, conscient que là est le problème, trouve le subterfuge de la "dévaluation interne" ! … C’est astucieux en effet. Astucieux mais franchement filandreux, voire tortueux, voire impossible. Imaginer un retour à un contrôle autoritaire des prix et des salaires à la baisse dans une Union Européenne qui se veut la championne du monde du libre échange, de la concurrence libre et non faussée, et du non interventionnisme de l’Etat … On comprend son sentiment d’impuissance.

Plus réaliste dans sa conclusion, il estime finalement que la solution est de provoquer de l’inflation (exactement le contraire des préconisations des experts de la BCE) : "il faudrait que, disons d’ici les cinq prochaines années, les salaires baissent, dans les pays européens moins compétitifs, de 20 % par rapport à l’Allemagne. Avec un peu d’inflation, cet ajustement est plus facile à réaliser. Cela consisterait donc à laisser grimper les prix sans que les salaires suivent."

Inflation, oui, mais par quels moyens ?

Krugman estime que "l’Europe a besoin d’une politique monétaire très agressive. Plus agressive encore que celle des Etats-Unis. Il n’y a pas d’autre moyen de faire les ajustements nécessaires. La BCE devrait racheter plus de dettes d’Etat mais aussi favoriser davantage l’expansion monétaire".

Incohérence

Nous pointons là une incohérence.

En effet, s’il y a un problème d’endettement privé et/ou public, vu le mécanisme de création monétaire en vigueur depuis la loi française du 6 janvier 1973 et les accords internationaux de la Jamaïque du 8 janvier 1976, dont les dispositions sont confirmées sans l’article 123 du traité de Lisbonne, toute création monétaire ne fera qu’augmenter l’endettement.

Car toute création monétaire a pour contrepartie une dette dont le montant est toujours supérieur à elle-même, puisqu’elle comprend les intérêts. Ce qui oblige, mathématiquement, à sur emprunter encore pour la payer. C’est pourquoi le montant des dettes, publiques et privées, sont à tous instants le résultat du cumul des intérêts depuis que ce système a été mis en place, aux variations près de la balance des paiements.

Double fuite en avant

La "solution Krugman" consiste donc en une double fuite en avant :

La première consiste à contrer la croissance exponentielle des dettes, par une croissance exponentielle encore plus rapide de la création monétaire.

La seconde consiste à contrer l’écart entre la croissance de la productions des richesses et la croissance bien plus rapide de la masse monétaire, par de l’inflation, des prix, mais pas des salaires.

Une chose est sure, avant que nous ayons pu expliquer ces subtilités monétaires aux gens qui vont en subir les conséquences calamiteuses, il y aura eu des dégâts de faits.

Nos solutions à nous…

Nos solutions à nous sont bien plus logiques, plus simples, et immensément plus confortable pour les peuples qui auraient à les expérimenter.

Pour rester sur les points développer par Paul Krugman, nous préconisons :

Un retour de la gestion des "choses publiques" par les plus concernés, c’est-à-dire par les gens eux-mêmes, vous, nous, et non plus par cette oligarchie de technocrates de l’Union Européenne qui, depuis plus de 40 ans, ne fait que des bêtises,
- La fin de l’euro comme monnaie unique,
- L’établissement de l’euro comme monnaie commune,
- Le retour aux monnaies nationales,
- Le contrôle des transferts de capitaux et du marché des devises,
- La nationalisation du secteur bancaire et financier,
- Une régulation des échanges commerciaux sur la base des accords de La Havane de 1953.

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