Hypothèse sur la fonction contre-révolutionnaire de l’homophobie

, par  Gilles Questiaux

Le 16 janvier 2013 à 09:00, par Gilles Questiaux En réponse à : Hypothèse sur la fonction contre-révolutionnaire de l’homophobie

4% ça me parait peu, dans mon entourage ce serait plutôt ... pas loin de 40% !

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Hypothèse sur la fonction contre-révolutionnaire de l’homophobie

La "manif pour tous" ayant fait le plein des troupes de l’épiscopat (dans des proportions qui ne sont nullement supérieures à ce qu’il fait d’habitude), il est intéressant de se pencher sur les raisons de ce succès relatif. Pourquoi des gens ordinaires, exploités, sont-ils prêts à s’allier à leurs ennemis de classe dans un front homophobe (au fond du fond il ne s’agit que de cela, la différence entre la MPT et Civitas n’étant que dans le degré de haine).

L’homophobie joue un rôle non négligeable dans l’idéologie traditionnelle. Elle affirme la naturalité de la division entre les sexes, qui engendre dans l’idéologie la naturalité de la division du travail et de la société de classe. L’homophobe reproche à l’homosexuel de brouiller la distinction des sexes et donc la division du travail entre sexes et la fondation symbolique de l’exploitation. Plus crûment, ce que l’homophobe ne peut pas supporter, dans sa vision de l’ordre familial et social qui sont intimement liés, c’est que des hommes jouent un rôle de femme. Cette féminisation comprise comme démasculinisation remet en cause l’idée fondamentalement ancrée dans l’éducation traditionnelle monothéiste judéo christiano islamique et présente encore dans l’inconscient de chacun, que les femmes valent moins que les hommes (dans le Coran, qui a le mérite de la clarté, exactement deux fois moins, du point de vue de l’héritage, à noter qu’il s’agit là d’un progrès pour l’époque de sa rédaction), et par réplication du jugement, que les ouvriers valent moins que les patrons, que les travailleurs manuels moins que les intellectuels, etc.

Plus rarement, l’inverse aussi peut être invoqué : des femmes scandaleuses usurperaient des rôles d’homme. Mais c’est beaucoup plus rare parce la tradition admet cette substitution en cas de défaillance masculine pour occuper une case libre dans le système familial-social (d’où la présence de figures féminines fortes dans l’histoire politique et dynastique).

L’homophobie doit donc être combattue avec détermination, mais dans une perspective assez différente de celle qui actuellement se développe dans le militantisme à tendance implicitement communautariste LGTB, plutôt dans une perspective proche de la politique de fond pour l’éradiquer qui est mise en œuvre à Cuba depuis la sortie du film "Fraise et Chocolat" qui fit époque en 1993. Il ne s’agit pas d’affirmer une orientation sexuelle comme un contenu positif, une culture, voire une nation intérieure dissidente, mais de lutter contre un préjugé qui touche au socle même de la société de classes, qui fait que les hommes combattent pour leur servitude comme si c’était leur liberté.

En France aujourd’hui, les homosexuels en tant que tels, c’est à dire en pratique ceux de la bourgeoisie ne sont plus un groupe opprimé. Les opprimés sont les homophobes et les racistes de toute religion des classes populaires, piégés dans une alliance "contre nature " ou plutôt "antisociale" avec leurs oppresseurs, contre leurs semblables de religion, d’orientation religieuse ou sexuelle différente, qui sont d’autant plus leurs "prochains" qu’ils les haissent davantage.

Mais les homosexuels courent encore le risque de devenir les boucs-émissaires de l’exploitation comme le furent autrefois les Juifs, surtout si contrairement au regretté Guy Hocquenheim, ceux qui font profession de les représenter se font récupérer en masse par la frange libérale de la bourgeoisie (celle qui possède et qui s’exprime dans les médias tels "Libération", "Canal plus", etc.). Ils devraient viser politiquement à approfondir "le droit à l’indifférence" plutôt qu’à surenchérir sur un "droit à la différence" qui n’a jamais été plus large ni plus illusoire qu’à notre époque, sur fond de triomphe de l’idéologie du désir, c’est à dire de la consommation aliénée. ll faut lutter pour le droit des "hommes sans qualités", des prolétaires à choisir leur orientation sexuelle, et non confondre politique, pseudo art contemporain et exhibition festive. En cela les provocations exhibitionistes contre les manifestations homophobes sont néfastes, et confondent libération sexuelle et prostitution.

Il est d’ailleurs assez drôle de constater que le modèle scénographique et communicationnel de la "Manif pour tous" , Frigide Barjot en tête, n’est autre que ... la Gay Pride !

GQ, 14 janvier 2013

PS il faut remarquer aussi, si l’on suit les termes du raisonnement ci-dessus, que la lutte contre l’homophobie est une composante particulièrement importante du combat féministe réel (je ne parle pas du politiquement correct subventionné par l’UE qui veut introduire des figures féminines dans les livres... de maths !).

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