Socialisme et sécurité-emploi-formation
La sécurité-emploi-formation et le socialisme

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Les articles de Jean-Louis Cailloux mettant en débat le rôle de la sécurité emploi formation dans le projet d’un vrai changement de société et Jean-Claude Delaunay interrogeant ce projet de sécurité-emploi-formation dans le cadre du capitalisme ou dans le cadre du socialisme ouvrent le débat sur un enjeu fondamental et très actuel : quelle réponse les communistes peuvent apporter aux salariés qui défendent leur emploi ? C’est la question discutée notamment par les salariés en lutte de General Electric qui se demandent comment sortir de ce monopoly capitaliste qui les écrase ?

L’histoire du projet de société des communistes

Cette discussion a une histoire. Pendant longtemps, les communistes centraient leur réponse sur la nationalisation des grands groupes privés. C’était l’objet des difficiles négociations des années 70 avec le parti socialiste sur le niveau de nationalisation du programme commun.

L’échec terrible pour le peuple de cette union de la gauche et de son programme électoral a conduit les communistes à s’interroger sur le type de construction politique comme sur leur projet de société, tenant compte de l’expérience sur deux points principaux.

Le premier point est l’importance du parti comme force organisée au service du mouvement populaire. Les tensions ont été fortes pendant des décennies entre ceux qui considéraient que l’échec de l’union de la gauche était l’échec de la "forme parti" qu’il fallait dépasser. C’est ce qui a poussé à la mutation du PCF, puis aux diverses démarches de collectifs, fronts, qui ont toutes échouées en délaissant le rôle du monde du travail et en donnant la parole d’abord aux couches moyennes ou supérieures urbaines et éduquées. Le 38ème congrès du PCF a conclu cette période de renoncement communiste en réaffirmant la nécessité du parti et de son implantation dans le monde du travail.

Le deuxième est celui du projet de société. La critique de ce que sont devenues les nationalisations de 1981 a conduit les communistes à s’interroger sur les formes de pouvoir des travailleurs sur l’économie, insistant sur leurs droits, que ce soit dans le privé ou dans le public, mettant au second plan la question de la propriété. Cela a conduit Jean-Claude Gayssot ministre a justifié la privatisation d’Air France en considérant que ça n’empêchait pas d’avoir une gestion orientée vers l’intérêt général. En quelque sorte, plus la peine de chercher une "rupture" avec le capitalisme, et donc bien sûr, plus la peine d’une révolution. Il suffirait d’intervenir partout dans la gestion pour orienter les décisions. Cela accompagnait la place prépondérante des élus, souvent intégrés dans des exécutifs "de gauche".

Là aussi, le 38ème congrès a marqué une rupture et une réorientation autour des idées de la commission économique du parti sur la sécurité-emploi-formation et la mobilisation pour des décisions politiques d’orientation du crédit, des investissements vers la création d’emplois utiles.

Le changement de société de nouveau à l’ordre du jour dans la crise politique

C’est dans cette histoire que la crise politique, la crise de confiance marquée par un niveau record d’abstention, aggravée par la crise sanitaire révélant l’incapacité du capitalisme à organiser simplement la protection sanitaire, que ces crises interpellent les communistes sur leur utilité pour les luttes comme pour ouvrir l’espoir d’une autre société.

Avons-nous avec le 38ème congrès les outils théoriques et politiques pour y répondre ? C’est le débat qu’il faut ouvrir en grand avec la nécessité d’une approche dialectique de notre histoire, qui peut conduire à faire le lien entre le besoin d’affirmer la rupture avec le capitalisme en dénommant notre projet de société comme une société socialiste, et et le besoin de tirer les leçons des échecs du socialisme comme des expériences de gauche en faisant de l’intervention populaire dans l’économie le coeur de notre réponse au défi de l’emploi.

Les deux articles de Jean-Louis Cailloux et Jean-CLaude Delaunay sont utiles pour cela.

Le socialisme et la sécurité-emploi-formation

Jean-Louis Cailloux insiste avec raison sur l’urgence de relever le défi de l’emploi, donc de nos propositions économiques plutôt que faire vivre des illusions politiciennes d’accord large à gauche qui n’auront aucune utilité pour le développement des luttes.

Il prend de front la question difficile à laquelle sont confrontés les salariés de General Electric qui ont besoin de dire "Comment faire autrement qu’avec les actionnaires de General Electric". Ils demandent l’intervention de l’état, donc de fait une prise de participation, mais ils comprennent vite qu’elle doit permettre de reconstruire la cohérence de toute la filière, donc qu’elle doit être large, et surtout qu’elle doit retrouver la réponse au besoin global de notre système énergétique, et donc être guidé par l’utilité sociale des investissements. De ce point de vue, on ne peut pas du tout se contenter d’une nationalisation comme celle de Sarkozy, jouant lui aussi au monopoly, dans l’illusion qu’il "sauvait" Alstom, avant de le revendre à son ami Bouygues pour marge à venir... Comment organiser les décisions économiques dans cette filière dont tout le monde comprend qu’elle intégrera nécessairement des acteurs publics et des acteurs privés ?

Jean-Louis Cailloux critique les illusions du salaire universel, qui suppose que l’état vienne compenser le chômage de masse, ou d’un état qui créerait tous les emplois que le capital supprime. Il considère que la sécurité-emploi-formation, un système qui garantirait le salaire de tous les travailleurs dans la mobilité de l’emploi et des formations, est porteur d’un changement de société qui réponde à ce défi.

Jean-CLaude Delaunay lui répond en interrogeant justement ce "changement de société" en deux temps. Si on est dans le capitalisme, il faudrait que la sécurité-emploi-formation soit "imposée" au capital pour faire reculer la marchandisation du travail, mais comment le faire sans remettre en cause ce pouvoir du capital sur les investissements ? Et s’il s’agit alors de considérer que la sécurité-emploi-formation se construit dans la rupture avec le capitalisme et la construction d’une autre société, alors faut-il le dire ? En tout cas, il faut répondre alors à de nombreuses questions.
- Qui décide des investissements ? Comment répondons-nous aux théoriciens de la "destruction créatrice" qui justifient que les investisseurs soient les décideurs de qui doit vivre ou non ?
- Qui décide des formations ? c’est le débat autour de l’apprentissage organisé par le patronat ou par l’éducation nationale. Prenons l’exemple de l’informatique. Le célèbre patron de free organise son école pour former rapidement les développeurs dont il a besoin tout de suite. Mais si sa plateforme change de technologie, beaucoup de ses développeurs seront handicapés car ils n’auront jamais eu la formation de base qui leur permet de changer de technologie. Certains y arriveront, mais c’est le chacun pour soi. Au contraire, un plan de formation massive à cette triple compétence de base "lecture-calcul-codage" ne peut pas être décidé par le patronat !
- Qui décide de l’emploi et des salaires ?
Si c’est le marché seul qui en décide, alors les effets d’aubaine, spéculatifs, ou concurrentiels organisent l’inégalité permanente de salariés en guerre continue entre eux. Pour un salaire qui repose sur la qualification, il faut absolument le sortir du seul marché du travail considéré comme une marchandise.

Conclusion, deux pistes de discussion

On peut proposer deux idées qui pourraient être le coeur d’une mise à jour de notre projet tel qu’issu du 38ème congrès

- il faut nommer le changement de société que nous proposons, et celui-ci repose sur la planification contre le marché, l’état comme garant de l’intérêt général contre l’intérêt privé de l’actionnaire, la démocratie économique et les droits des travailleurs contre la concurrence "libre et non faussée", une organisation de l’économie qui "encadre" le marché en s’appuyant sur des droits nouveaux des travailleurs. Appelons le clairement un "socialisme à la française du XXIème siècle"

- il faut répondre aux questions très actuelles de qui décide de l’emploi et comment on peut intervenir pour créer des emplois, sans tomber dans l’illusion du keysianisme même de gauche, ou d’un "solidarisme" qui inventerait des droits de tous sans toucher aux privilèges de quelques uns. La sécurité-emploi-formation ne suffit pas pour répondre à cette question de qui décide. Elle pourrait même être comprise comme venant seulement atténuer l’impact des décisions du marché. Au contraire, elle doit s’inscrire dans la perspective de retirer au capital son pouvoir tout puissant sur les investissements. C’était le sens de l’article faisant suite aux discussions avec les salariés de General Electric à Villeurbanne. Elle doit donc être complétée par des nationalisations qui sont le cadre nécessaire pour construire l’appropriation sociale de ces investissements au service de l’intérêt général.

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