« Le Capital au XXIème siècle », ouvrage de Thomas Piketty, commenté par Jean-Claude Delaunay (2)

, par  Jean-Claude Delaunay , popularité : 3%

Deuxième article : L’évolution du capital et du rapport K/Y.

Dans l’article précédent, j’ai rendu compte des objectifs poursuivis par Piketty avec son livre sur Le Capital au 21ème siècle et de la façon dont il évalue la croissance du revenu national Y au cours des 100 prochaines années.

Son hypothèse étant que le facteur explicatif des inégalités est K/Y, la deuxième partie de son livre est donc consacrée, après avoir évalué Y, à l’évaluation de K, pour en déduire quelle pourrait être l’évolution de K/Y. Ce faisant, il expose ce qu’il appelle les deux lois du capitalisme. Puis il examine comment pourrait évoluer le partage entre salaires et profits pendant le 21ème siècle.

Deuxième partie (188 pages)

Cette deuxième partie comprend trois sous-parties.

La première sous-partie (chapitres 3 et 4) contient des résultats portant sur la mesure du capital depuis le 18ème siècle dans les pays riches. Entre 1870 et 1990, ces pays produisaient environ 80% du PIB mondial.

Dans une deuxième sous-partie, Piketty présente ce qu’il appelle les lois fondamentales du capitalisme (chapitre 5) [1]. La conclusion statistique de cette deuxième partie est une série longue K/Y, établie pour le monde entier sur l’intervalle 1870 à 2100 (graphique, p.309).

Dans une troisième sous-partie (chapitre 6), il s’estime en mesure de dire comment le partage salaires/profits pourrait évoluer dans le siècle à venir.

Il serait fastidieux de lire le compte rendu de toutes ces sous-parties de son livre. Aussi ai-je seulement indiqué ci-dessous, dans une première partie, quels sont, selon moi, les 5 principaux points concernant la mesure du capital. Dans une seconde partie, j’ai soulevé la question de savoir quelle était la signification du rapport K/Y.

I - La mesure du capital dans le Vieux Monde et le Nouveau Monde

Les deux chapitres concernés (3 et 4) sont intéressants car ils racontent l’histoire du capital (et donc du capitalisme) dans les principaux pays riches du monde. Le chapitre 3 est consacré à l’évolution du capital en Grande Bretagne et en France depuis 1700 (le Vieux Monde). Le chapitre 4 montre comment le capital a évolué pendant le même intervalle de temps, en Allemagne et en Amérique du Nord (le Nouveau Monde).

A) 5 points dans ce récit

Voici les 5 points que j’ai retenus.

1 - Le premier point, qui semble le plus important pour Piketty, est celui relatif au changement profond intervenu dans la structure concrète du capital depuis 1700. Aujourd’hui, le capital foncier (mesuré en unités de revenu national) ne vaudrait quasiment rien alors qu’en Grande Bretagne et en France, il y a 3 siècles, il représentait à peu près les deux tiers du capital total. Ce constat est, évidemment, de nature macroéconomique, car au plan individuel, nombre de petits paysans feront remarquer que, quand ils achètent des terres, c’est pour eux un coût important et qu’ils doivent s’endetter. Mais le constat de Piketty est d’une autre nature et il signifie que l’aristocratie foncière a disparu en tant que classe significative. Les fortunes se construisent désormais dans l’industrie ou les services.

Le tableau 1, issu des données figurant aux pages 196-197 de son livre, résume cette évolution pour la Grande Bretagne et la France. Les habitants de cette partie du monde bénéficieraient aujourd’hui d’un revenu annuel moyen (évalué en parité de pouvoir d’achat) de 30.000 euros. Ils seraient propriétaires d’un capital moyen de 180.000 euros, partagé pour moitié en capital logement (90.000 euros) et pour l’autre moitié en capital professionnel et financier (90.000 euros). Ce tableau indique, par conséquent, que le rapport du revenu au capital est actuellement, pour ces deux pays, d’environ 1 à 6. L’évolution du prix de la terre demeure cependant une inconnue (p.310 et sq.).

Tableau 1 - Le capital total moyen au Royaume Uni en 1700, 1900, 2010 (%). Le revenu annuel moyen et le capital total moyen en France en 2010 (euros et %).

1700
Royaume-Uni
(%)
1900
Royaume-Uni
(%)
2010
France et Royaume-Uni
(euros et %)
Revenu annuel moyen 30.000
Capital terrien 66% 6% 0%
Capital logement 17% 28% 50%
Capital professionnel intérieur et à l’étranger 17% 66% 50%
Capital total moyen 100% 100% 100%

Source Piketty, p. 196-197.

En 1900, en Grande Bretagne, le capital professionnel et financier se partageait entre l’intérieur et l’étranger à peu près à égalité (33 + 33). On voit que déjà en 1900, le capital des capitalistes industriels et financiers avait pris la place du capital terrien. Il est moins élevé en pourcentage en 2010, comparé à son poids relatif en 1900 dans la mesure où le capital externe a été fortement réduit.

2 - Le deuxième point a trait à la mesure du stock de capital nord américain en unités de revenu national.

On pourrait penser, a priori, que les États-Unis, pays leader de l’impérialisme, seraient caractérisés par un rapport K/Y plus élevé qu’en France ou en Grande Bretagne. Il n’en est rien, dit Piketty. Le rapport K/Y est, aux États-Unis, de l’ordre de 4 à 5 et non de 5 à 6 comme en Europe.

Cette différence, selon lui, ne serait pas de nature accidentelle. Sa conclusion prend appui sur la deuxième loi du capitalisme. Je n’en dis pas davantage. Je note simplement que ce point 2 est extrêmement discutable.

Les graphiques fournis par Piketty (p.188 : Royaume Uni, p.189 : France, p.239 : États-Unis), montrent, en effet, que le capital industriel et financier, dans ces 3 pays, est d’environ 2 années de revenu national. La différence du rapport K/Y total entre les États-Unis et l’Europe occidentale provient donc du capital des ménages (leurs investissements en logements). Ce capital est de l’ordre de 2 années de revenu en Grande Bretagne et en France. Il est de l’ordre de 1 année de revenu aux États-Unis. La conclusion de Piketty sur la moindre valeur comparée de K/Y aux États-Unis et en Europe m’apparait donc comme un effet de sa définition du capital et non comme la conséquence d’une loi du capitalisme.

Le débat à mener avec Piketty devrait donc être approfondi. Il devrait l’être d’autant plus que l’Allemagne semble être un cas contraire très intéressant (graphique, p.225). Dans ce pays, le capital des ménages est du même montant relatif qu’en France ou en Grande-Bretagne (2 années de revenu national). Mais le capital industriel et financier y est égal à 1 année de revenu national. En France, en Grande Bretagne et aux États-Unis, ce montant est égal, je le rappelle, à 2 années de revenu national. Comment se fait-il que l’Allemagne, pays économiquement le plus puissant d’Europe, soit dotée d’un rapport K/Y du capital industriel relativement plus petit que ses voisins, britannique ou français ? La force relative d’une économie de type capitaliste ne proviendrait-elle pas de ce que le rapport K/Y, évalué pour les entreprises, y serait plus petit qu’ailleurs ?

3 - Le troisième point ressortant des travaux de Piketty est que, partout dans les pays riches actuels, la plus grande part du capital est privée. « La France comme le Royaume-Uni, écrit-il, ont toujours été des pays fondés sur la propriété privée, et n’ont jamais expérimenté le communisme de type soviétique… » (p.205). Cette caractéristique serait aujourd’hui renforcée par le fait que le partage du capital total entre capital privé et capital public s’effectuerait de plus en plus en faveur du privé.

Dans les dernières décennies, la part publique du capital dans le capital total a diminué au point de devenir quasiment nulle. Le capital privé s’est vivement requinqué. Voici, par exemple, ce que Piketty écrit pour le Royaume-Uni et la France. « Les patrimoines ont repris des couleurs… » (p.190). Puis il ajoute « …Les patrimoines privés constituent au début des années 2010 la quasi totalité du patrimoine national, plus de 99% au Royaume Uni, et environ 90% en France… » (p.202). La privatisation des capitaux est aujourd’hui une tendance mondiale. Elle s’est notamment produite en Europe orientale, en Russie, en Chine (p.293). On peut ajouter, indépendamment du livre de Piketty, que, sous la pression de la Banque mondiale, les pays en voie de développement, au cours des années 1990, ont été conduits à privatiser leur capital public.

4 - Le quatrième point a trait à la dette publique. Eu égard à l’importance actuelle de la dette publique dans un pays comme la France, il est intéressant de lire Piketty sur ce sujet. « La dette publique, écrit-il, ne constitue… qu’une créance d’une partie du pays (ceux qui touchent les intérêts) sur une autre (ceux qui paient les impôts)… Or même si la dette publique… est encore loin d’avoir retrouvé… son niveau astronomique du début du 19ème siècle… elle se situe en France et dans de nombreux pays tout près de ses records historiques… » (p.185). Parlant de la dette publique « … il ne fait aucun doute que ce très fort endettement public a renforcé le poids des patrimoines privés… » (p.207). Piketty souligne ainsi, à juste titre, l’étroitesse du lien entre dette publique et capitaux privés dans l’histoire du capital. Les communistes savent que l’État, dans une formation sociale dominée par la bourgeoisie, n’est pas du tout l’ennemi du Capital. Ce que Piketty confirme à propos de la dette publique. « Du point de vue de ceux qui en ont les moyens, écrit-il encore, il est évidemment beaucoup plus intéressant de prêter une somme donnée à l’État (puis de recevoir des intérêts pendant des décennies) que de la payer sous forme d’impôts (sans contrepartie) » (p.208).

En France aujourd’hui, l’État possède encore quelques actifs, d’une valeur estimée à une année de revenu national. Mais son endettement est d’un même montant (une année de revenu national). La situation patrimoniale de l’État est donc à peu près égale à 0. Ce qui est remarquable est que l’État, en France, a été plusieurs fois très endetté. Il a alors drastiquement réduit sa dette, ne la remboursant pas ou la supprimant par l’inflation. La position patrimoniale nette de la France étant plutôt équilibrée aujourd’hui, cela signifie que, globalement, l’annulation de la dette concernerait avant tout des entreprises et des résidents de ce pays.

Cela mérite d’être réfléchi. Car comme le montre fort bien Piketty, l’État britannique, pour satisfaire ses financiers, a honoré ses dettes domestiques. Il en a résulté, pendant une grande partie du 20ème siècle, une situation de déflation quasiment permanente (p.207 et sq.).

5 - Le cinquième point concerne la part du capital nord américain possédée par les autres pays. On pourrait penser, en effet, que la politique monétaire des États-Unis engendre un pouvoir d’achat externe en dollars d’un montant tel que les pays créanciers soient en passe d’acheter tout son capital domestique. Ce n’est pas ce que l’on observe. « Les États-Unis sont détenus à plus de 95% par les américains et à moins de 5 % par les étrangers » (p.247). L’État américain veille à ce que le capital national ne soit que peu entamé de l’extérieur par les effets de sa politique monétaire. La Chine aimerait certainement acheter des entreprises américaines avec les dollars qu’elle gagne, mais cela lui est interdit. C’est l’une des manifestations du rôle contemporain des États des pays capitalistes que de protéger collectivement la propriété privée de leurs capitalistes, quitte à élargir un peu la famille.

B) Une description globale de la société engendrée par le capitalisme et non une approche économique du capitalisme

Après avoir présenté ces résultats qui concernent uniquement les pays riches (car les autres pays ne commencent à accumuler du capital que depuis peu de temps), voici un commentaire.

A la question "Qu’est-ce que le capitalisme industriel ?", on peut répondre, en lisant le livre de Piketty, que c’est un système grâce auquel la production et la consommation ont décollé il y a 300 ans et qui s’est développé depuis en accumulant du capital, de manière plus rapide et intense que les sociétés traditionnelles.

L’accumulation contemporaine semble présenter les traits suivants. D’une part, elle n’est pas infinie et tend vers diverses constantes (par exemple, pourquoi, se demande Piketty, retrouve-t-on en Europe le rapport K/Y de 6 à 1 avant et après les guerres de la première moitié du 20ème siècle ?). D’autre part, elle se diversifie par types d’agents (entreprises, ménages, administrations, extérieur). Mon commentaire va porter ici sur ce deuxième trait.

Dans les pages précédentes (cf. premier article), j’ai critiqué l’amalgame effectué par Piketty entre le capital des ménages, le capital des administrations et le capital des entreprises. Il s’agit, à mon avis, d’une erreur si l’on veut comprendre l’évolution économique du capitalisme. Je m’en suis déjà expliqué. Je rappelle l’argument que j’ai utilisé. Ces capitaux ne sont pas de même nature économique. Le capital logement est une consommation finale individuelle. Le capital professionnel et financier est une valeur mise en valeur. Le capital public est une consommation finale collective.

Le paradoxe de la démarche de Piketty et de ses résultats est, selon moi, qu’ils aident néanmoins à mieux comprendre ce qu’est, aujourd’hui, la société engendrée par le capitalisme industriel. Ils n’aident pas à comprendre le fonctionnement économique du capitalisme, car ce fonctionnement ne repose que sur une partie de ce que Piketty (et les comptables nationaux) appellent le capital. Mais ils aident à comprendre ce qu’est la société issue du capitalisme, ensemble vivant, doté d’organes distincts, disposant d’acteurs et de capitaux différemment réglés.

Depuis trois siècles, assure Piketty, le capital a complètement changé de forme. Il s’est transformé de fond en comble. Il était terrien au 18ème siècle. Il est aujourd’hui professionnel, financier, administratif et de logements (p.190, p.192, p.217).

En réalité, ce que me suggère ce livre (je ne sais pas si cela faisait partie du dessein de Piketty en l’écrivant) est que la société engendrée par le capitalisme industriel du 18ème siècle est devenue, au 21ème siècle, la combinaison de quatre modalités au moins de la vie sociale. L’évolution de ces 4 modalités au cours des 3 derniers siècles repose sur ce que j’ai appelé dans le précédent article, l’enrichissement général. En sorte qu’aujourd’hui,

1 - Le capitalisme industriel est un mode industriel de production et de consommation des biens et des services. Ce mode de production constitue le cœur de la société capitaliste dont il a permis le développement. Depuis plusieurs siècles, sous les angles de la production, de la consommation, de la distribution et du financement, et avec une phase d’accélération aux 18ème et 19ème siècles, le capitalisme est devenu industriel en profondeur. Sa maturation contemporaine se traduit par l’industrialisation intensive, depuis un demi-siècle, des trois grands secteurs de l’économie (agriculture, industrie, services). Le capital industriel total est aujourd’hui, dans les pays développés, de l’ordre de 2 unités de revenu national.

2 - C’est ensuite, autour de ce cœur industriel, un mode de gestion de la société, de son devenir et de la vie collective. La société capitaliste s’est étatisée en même temps qu’elle devenait plus complexe. L’activité de l’État tend aujourd’hui à s’industrialiser elle aussi, à accumuler non seulement du capital fait de bâtiments mais du capital technique et de la connaissance, ce qui est plus étendu que le seul capital militaire ou policier. Le capitalisme met au point des modes de gestion étatiques de sa complexité, tendant simultanément à les industrialiser grâce à une pénétration informatique intensive. Cela dit, les lois de fonctionnement du secteur étatique ne sont plus celles du secteur industriel, même si elles en empruntent certains aspects. L’État est utilisé pour renforcer l’économie privée. Mais le capital public, ou étatique, est un grand absent du capitalisme contemporain. Quand existe le capital public, il est bien souvent compensé par un endettement d’un même montant. Physiquement, l’État est alors présent, mais statistiquement, il est absent.

3 - C’est un mode de gestion et d’organisation de la vie individuelle. Les dimensions individuelles de la vie sociale ont été également industrialisées en même temps que se développaient la production de logements, l’urbanisation, les services à la personne, l’industrialisation de la vie domestique (appareils électroménagers, moyens de transport et de communication, domotique). Ce secteur est privé. Il constitue un débouché de premier plan pour l’activité industrielle et bancaire. Le capital des ménages est égal au capital industriel en Europe (2 unités de revenu national) et il en vaut la moitié aux États-Unis. Ses lois économiques de fonctionnement sont très différentes de celles encadrant le capital des entreprises ou des administrations.

4 - C’est enfin un outillage mental fait de comportements, de savoirs, de connaissances et d’idéologies. Le capitalisme industriel est loin d’être seulement une technique. C’est aussi, et notamment, une culture. Cet ensemble non matériel est sans doute presqu’impossible à mesurer en termes de valeur. Il est fortement orienté et structuré par l’idéologie de la propriété privée, aujourd’hui très majoritairement dominante, comme le montre Piketty. L’usage du capital propre à cette dimension de la société engendrée par le capitalisme industriel est diffus et peut-être mis en œuvre tant par les ménages que par les entreprises ou l’État. On ne sait pas s’il constitue ou non un capital, ni comment il est relié au cœur industriel du capitalisme.

Au total, alors que ce système subit une très grave crise économique et morale, il s’étend néanmoins. Cette extension s’accompagne du développement accéléré tant de la production matérielle et des formes marchandes correspondantes que de l’urbanisation et de la production des administrations. La Chine moderne, par exemple, de moins en moins rurale, est devenue une Chine industrielle et verticale (urbanisée). C’est vraisemblablement cette évolution qui prévaudra dans toutes les parties du monde aujourd’hui en développement. L’interrogation des communistes est sans doute de savoir comment mener une action révolutionnaire dans ce contexte, de plus en plus favorable au secteur privé.

L’ouvrage de Piketty n’apprend pas, je le crois, comment fonctionne économiquement le capitalisme industriel. En revanche, il donne une première approche quantitative du développement des diverses fonctions majeures de la société capitaliste (production matérielle, mode de vie, mode de gestion étatique, production idéelle) et de leur soubassement capitalistique depuis 3 siècles.

Le sous-produit inattendu du livre de Piketty, pour lequel le capitalisme et le capital sont des catégories éternelles, serait d’inciter à réfléchir non pas au mode de production capitaliste mais à la société produite par le capitalisme.

Toutefois, la richesse descriptive de cet ouvrage est en même temps sa faiblesse, ou son ambigüité intrinsèque. Car Piketty, pour anticiper l’évolution des inégalités caractéristiques de la distribution de la richesse dans le capitalisme, a besoin d’utiliser certaines lois du capitalisme. Il les confond alors, à mon avis, avec des lois de l’enrichissement général. Tel est, en tout cas, mon sentiment de lecteur, à savoir qu’il passe sans prévenir du territoire du capital stricto sensu au territoire de l’enrichissement général, et réciproquement.

Sa description de l’enrichissement général montre l’immensité de la tâche révolutionnaire à notre époque, plus grande encore qu’à l’époque de Marx, dans la mesure où le capitalisme n’est plus seulement un système économique stricto sensu, mais est devenu, même si c’est dans la contradiction, un système social ainsi qu’une pratique dominante et individualisée de la propriété privée.

Le livre de Piketty, mais aussi sa démarche déjà ancienne et les travaux qui en ont résulté, peuvent dès lors être considérés comme une contribution à l’élaboration d’une idéologie documentée du réformisme contemporain. Mon observation ne signifie pas que je partage cette conclusion pratique. Elle vise seulement à dire que le réformisme français, qui s’est désormais converti à la mondialisation capitaliste, est peut être en train de rechercher comment se différencier des autres mouvements d’idées. L’image de sa différence dans le champ politique serait de tenir compte des inégalités mieux que les autres formations politiques.

II - Signification du rapport K/Y

Je ne vais pas rendre compte ici, dans ce texte, de ce que Piketty appelle des lois fondamentales du capitalisme, ou d’autres relations. Cela pourrait être utile mais néanmoins trop difficile sans que le gain de la lecture soit important. J’ai reporté leur exposé en note.

Le livre de Piketty est certes un livre de résultats statistiques. Mais il fourmille de notations théoriques qui, parfois, m’ont posé problème. Celui que j’ai retenu pour ce compte rendu a trait à K/Y. La principale question à laquelle je me suis attaché est celle de la signification de ce rapport. Quelle en est la signification pour Piketty ? Pourrait-on envisager, dans le cadre de son étude, d’autres significations ? Je vais d’abord indiquer la façon dont Piketty introduit K/Y. Je dirai ensuite le sens que je donne à ce concept.

1 - Piketty témoigne en permanence de son intérêt pour le rapport K/Y. Il lui reconnait une place majeure dans son dispositif scientifique. « La nouveauté du travail proposé ici, écrit-il, est qu’il s’agit à ma connaissance, de la première tentative pour replacer dans un contexte historique plus large la question du partage capital/travail, et de la hausse récente de la part du capital, en mettant l’accent sur l’évolution du rapport capital/revenu depuis le XVIIIème siècle jusqu’au début du XXIème siècle » (p.349) Je trouve cette intention très louable. Mais mon impression est aussi qu’il ne lui accorde pas une signification précise. Les significations qu’il lui reconnait dans le système capitaliste (j’en ai repéré 3) confèrent, selon moi, à sa conception de K/Y, un caractère hétéroclite.

- a) - K/Y est d’abord, pour lui, un instrument statistique. C’est une aide à la mesure. J’ai déjà indiqué ce rôle particulier que lui attribue Piketty. En voici une illustration. Il écrit « Pour le XVIIIème et le XIXème siècle, les estimations de la valeur du stock de capital sont probablement plus précises que celles portant sur les flux de revenus du travail et de revenus du capital. Dans une large mesure, il en va de même aujourd’hui. C’est pourquoi nous avons choisi dans le cadre de notre enquête de mettre l’accent sur l’évolution du rapport capital/revenu et non sur le partage capital/travail, comme cela a été fait plus classiquement dans la recherche économique » (p.323). Il adopte alors la posture de la neutralité statistique. Il a confiance dans les chiffres. Les données statistiques sont pour lui son critère de vérité. Il s’agit, je le crois, d’une confiance aveugle, dans la mesure où, « pour mesurer il faut savoir ». Mais cette confiance peut se justifier.

En effet, il procède à des comparaisons entre les différents pays. Il lui faut rendre les quantités de capital comparables d’un pays à l’autre. Aussi explique-t-il que « la façon la plus naturelle et la plus féconde de mesurer l’importance du capital dans une société donnée, consiste à diviser le stock de capital par le flux annuel de revenu » (p.89).

C’est vrai. Supposons que je compare le capital des États-Unis et celui de la France. En procédant à une comparaison directe, de K américain à K français, le capital américain sera forcément plus grand que le capital français. Mais cette information, bien qu’utile, est peu intéressante. En divisant chaque quantité de capital par le revenu national du pays correspondant, je lui donne plus de sens, car je compare alors les efficacités du capital des deux pays considérés indépendamment de leur taille. Toute proportion gardée, il en est de même pour la comparaison des activités. Si je veux comparer la population active de la Roumanie et celle des États-Unis, je vais utiliser des pourcentages et pas seulement des données brutes. Il en est de même avec la division de K de chaque pays par son Y. La démarche de Piketty est donc justifiée. Mais est-elle suffisante pour donner un sens important a K/Y ?

- b) - K/Y est ensuite, pour lui, une variable dont l’intérêt me parait dérivé. Il écrit, par exemple, que « pour bien comprendre ces transformations (celles de la capitalisation patrimoniale observée actuellement dans les pays riches, JCD)… l’approche la plus féconde consiste à analyser l’évolution du rapport entrele stock total de capital et le flux annuel de revenu… » (p.77). Puis il ajoute que « la très forte hausse des patrimoines privés observée dans les pays riches entre 1970 et 2010, notamment en Europe et au Japon, s’explique à titre principal par le ralentissement de la croissance et le maintien d’une épargne élevée, au travers de la loi β = s/g » (p.289).

Il ressort de ces citations que pour Piketty, K/Y n’est pas le concept économique central de son investigation. Les vraies variables sous-jacentes à K/Y sont s (le taux d’épargne) et g (le taux de croissance). Or s et g « …dépendent de millions de décisions individuelles influencées par de multiples considérations sociales, économiques, culturelles, psychologiques, démographiques… » (p.315. K/Y joue donc un rôle explicatif dérivé. Et c’est ici un rôle surprenant, en tout cas pour moi, puisque son mouvement contemporain révélerait « …le rôle central du ralentissement de la croissance dans l’accumulation du capital » (p.310).

Plus la croissance serait ralentie et plus les capitalistes accumuleraient du capital sur le long terme. En vérité, s’agit-il d’accumulation (nouvelle) ou de valorisation du capital ancien ? Je trouve que Piketty n’est pas clair sur ces points. « Dans les sociétés stagnantes, écrit-il encore, les patrimoines issus du passé prennent naturellement une importance considérable » (p.368). C’est ainsi que Piketty en arrive à la série du rapport K/Y sur l’intervalle 1870/2100 (p.309). De 2010 à 2100, le K/Y mondial augmenterait de 50% (un peu plus), passant de 4 à 6 unités de revenu environ. Certes, c’est la conséquence de ses hypothèses, à savoir que 1) l’épargne détermine l’investissement et son taux serait d’environ 10% dans les 90 ans à venir, 2) le taux de croissance serait de plus en plus ralenti et atteindrait environ 1 à 1,5% après 2050. Ce résultat (la croissance ininterrompue de K/Y combinée à un taux de croissance très ralenti), lui parait plausible (p.310).

- c) - K/Y est enfin le concept des techniques ambiantes. Il faut croire que Piketty s’est rendu compte du caractère très discutable des résultats que je viens d’indiquer au point précédent s’ils n’étaient accompagnés d’une argumentation particulière.

Aussi écrit-il, par la suite, que « Trop de capital tue le capital. Quelles que soient les institutions et les règles organisant le partage capital/travail, il est normal de s’attendre à ce que la productivité marginale du capital diminue à mesure que le stock de capital augmente » (p.340). Cette remarque de bon sens fait partie de la doxa économique, et Piketty s’y réfère. Mais en même temps, il modifie son interprétation de K/Y. Ce rapport devient « le capital », c’est dire la technologie.

Comment justifie-t-il alors que K/Y soit susceptible d’augmenter de façon continue pendant un siècle avec une croissance de plus en plus faible ? Il dit à peu près ceci. 1) Il est clair que si le capital augmente (si K/Y augmente), r, le taux macroéconomique de profit diminue. 2) Mais la vraie question est celle de savoir à quel rythme. Puisque le partage alpha du revenu est égal à

r multiplié par K/Y

Ce partage sera favorable au capital si, quand K/Y augmente, r diminue à petite vitesse alors que K/Y augmente à grande vitesse.

Il sera au contraire défavorable au capital si, quand K/Y augmente, r diminue à grande vitesse et K/Y augmente à petite vitesse.

Or comment être renseigné sur les vitesses respectives de variation des variables considérées ? Eh bien, écrit Piketty, « cela dépend de la diversité des techniques disponibles » (p.342). Certes, le partage observe au cours des récentes décennies a été influence par ce que Piketty appelle « un régime politique objectivement très favorable aux intérêts privés » (p.77). Il écrit encore que les deux autres facteurs ayant « substantiellement renforcé les effets (de K/Y) au cours des derniers décennies, (sont) d’une part un mouvement de privatisation et de transfert graduel de la richesse publique vers la richesse privée depuis les années 1970/1980, et d’autre part un phénomène de rattrapage de long terme des prix des actifs immobiliers et boursiers, qui s’est également accéléré dans les années 1980/1990, dans un contexte globalement très favorable aux patrimoines privés… » (p.273/274). Mais je pense respecter sa pensée en disant que, à long terme, ce sont les techniques, « les caprices de la technologie » (p.370), qui déterminent le partage du produit entre capital et travail. Sa prévision pour le 21ème siècle est que « Avec un rapport capital/revenu de l’ordre de sept/huit années, et un taux de rendement mondial du capital d’environ 4-5%, alors la part du capital pourrait se situer autour de 30-40% du revenu mondial, soit à un niveau voisin de celui observé au XVIIIème et XIXème siècles, et pourrait même le dépasser » (p.369).

J’en ai terminé avec la conception de K/Y exprimée par Piketty. Elle est selon moi hétéroclite et nécessiterait d’être unifiée. Je ne vais donc pas discuter les résultats obtenus par Piketty. A mon avis, il retombe sur ses pieds au plan théorique en présentant K/Y comme une expression des technologies, qu’il étudie avec les instruments classiques de la théorie économique. J’avoue être cependant extrêmement gêné par la confusion qui est la sienne entre capital des entreprises et capital des ménages. Car le capital des ménages n’est pas utilisé dans le cadre d’une technologie d’entreprise. Or les tableaux des pages 359-360, par exemple, montrent que les évolutions sont vraisemblablement différentes et favorables à la croissance du capital des ménages.

Je pense que l’augmentation de K/Y, qu’il anticipe au cours du 21ème siècle, pourrait être largement due aux logements, parce que ce bien durable est devenu une composante de la valeur de la force de travail et du revenu permanent. C’est, me semble-t-il, le point principal qu’il conviendrait de vérifier avec Piketty. Car le texte dont je rends compte parle de technologies, de fonctions de production à facteurs substituables, de profits, comme si le capital dont il est question était principalement un capital d’entreprises. Il s’en suit un très grand décalage qui me conduit à situer K/Y dans un autre champ théorique.

2 - En se situant dans le champ de la théorie de Marx, voici une interprétation de K/Y, différente de celle de Piketty. Ce rapport, débarrassé de la consommation des ménages en logements, est l’expression quantitative de la composition organique du capital.

Dans une publication de 1974, Paul Boccara a rattaché le concept (K/Y) utilisé par les théoriciens de la croissance, à celui de la composition organique du capital, ébauché par Marx dans le Livre III du Capital [2]. Cette interprétation, dont il avait déjà fait part au sein de la section économique du Comité central, m’a toujours semble éclairante et je l’ai utilisée, si je puis dire pour mon propre compte dans diverses publications. Je vois aujourd’hui l’opportunité de la reprendre, toujours pour mon propre compte, de façon à l’appliquer à la lecture du livre de Piketty.

Je suggère à ce dernier d’y réfléchir à son tour. La problématique mise en œuvre par Marx est relative au travail. Le travail est le volcan sur lequel repose l’œuvre de Marx. Son étude du Capital avait l’ambition de montrer comment les rapports économiques capitalistes formataient le travail, établissant à son propos une structure inégalitaire fondamentale. Cette structure inégalitaire fondamentale est le rapport social du Capital, qui, au plan économique, met en relation antagonique le capital et le travail. Marx ne s’intéresse pas seulement aux inégalités matérielles engendrées par le Capital, Il s’intéresse d’abord et avant tout au Capital.

- a) La structure de base de toutes les inégalités, ou l’inégalité fondamentale.

La composition organique du capital apparait comme le centre réel et conceptuel du capitalisme. C’est une sorte de résume exhaustif de la structure capitaliste. C’est, en effet, le rapport du travail passé accumulé et privativement approprié, et du travail vivant salarié mis en œuvre grâce à ce travail passé accumulé.

C’est, dans le modèle réduit d’une société capitaliste développée, le rapport entre le travail passé accumulé dans le but de faire du profit (K) et le travail vivant, nouveau, dépensé pour produire et vendre (Y), et qui sera effectivement à l’origine du profit. Le concept de composition organique du capital ne renvoie pas directement à une structure concrète (la terre, les équipements, les bâtiments…) mais à une structure temporelle des valeurs dans leur relation au profit.

Évidemment, ce que je viens d’écrire est une approximation. La composition organique telle que je viens de la définir est un concept pur. Car dans le travail passé accumulé, concrètement observable, il y a, par exemple, du capital public, ou bien dans le travail vivant mis en œuvre et concrètement observable, il n’y a pas que des salariés. On compte aussi des artisans, des paysans propriétaires, et ainsi de suite. Ce rapport résume néanmoins l’essence du capitalisme et définit la base structurelle de l’inégalité capitaliste.

Cette façon de comprendre le rapport K/Y ne s’oppose pas aux aspects technologiques de la compréhension qu’en donne Piketty. Derrière ce rapport quantitatif, il y a forcément des technologies, des fonctions de production. Mais elle conduit, non seulement à en modifier la mesure mais encore et surtout à en préciser autrement la signification. Celle que j’avance me parait plus intéressante, plus éclairante, plus riche, au plan théorique, que celle qu’il suggère (un problème de mesure ou la conséquence nécessaire d’une croissance ralentie). Elle parait autrement féconde que la fonction de Cobb Douglas, qui, dans la théorie académique, est le malingre substitut de la composition organique du capital au sens de Marx. Que chacun réfléchisse et choisisse.

Étudier les inégalités dans le capitalisme, comme le fait Piketty, sans percevoir que le capitalisme repose sur une inégalité structurelle spécifique, n’incite pas à voir l’essentiel. J’ai écrit, dans mon précédent article, que le capitalisme reposait sur une inégalité spécifique et la reproduisait. Voici comment, selon moi, on peut décrire l’inégalité capitaliste.

  • 1 - C’est une inégalité enracinée dans l’économique. Théoriquement, dans la société capitaliste, nous sommes tous égaux en droits politiques. Dans le grand mouvement de rationalisation interne des sociétés évoqué par Max Weber, la bourgeoisie capitaliste a achevé la séparation entre le pouvoir religieux et le pouvoir politique. Ensuite, elle a introduit une nouvelle séparation, celle entre l’économique et le politique. L’inégalité capitaliste prend racine dans l’économique, ce domaine de l’activité sociale ou, dit on, on ne fait pas de politique.
  • 2 - C’est une inégalité de propriété (ou d’appropriation) des moyens de production, de commercialisation, de financement ou d’accès à ces moyens. L’inégalité dans la propriété du logement, par exemple, peut être très grave (plus le logement fait partie de l’enrichissement général et plus le fait de ne pas en avoir est durement ressenti), sans cependant être une propriété qui décide du fonctionnement de la société. Un certain nombre de prolétaires ou de salariés moyennement aisés ont un patrimoine immobilier, mais ils n’ont pas de capital.
  • 3 - C’est une inégalité dans la consommation individuelle des biens et des services, qui s’effectue par l’intermédiaire des salaires. Elle est souvent doublée d’une inégalité d’accès individuel aux consommations collectives. Le sabotage de l’État social par la bourgeoisie ne peut qu’amplifier les inégalités existantes.
  • 4 - C’est une inégalité politique et culturelle. Dans la société capitaliste, une personne sans propriété est, de façon spontanée, une personne sans voix, sauf à rejoindre une organisation de lutte de classes. Une personne sans voix est une personne risquant d’être abandonnée sur le bord de la route de la société.

Sur cette base structurellement inégalitaire se construisent et se reproduisent diverses familles d’inégalités, qui se combinent aux inégalités naturelles. Je n’entre pas dans cette analyse, souhaitant simplement faire remarquer qu’on ne peut intervenir sur ces divers types d’inégalités pour les modifier durablement, si la population concernée le souhaite, sans intervenir, pour la révolutionner, sur la mère de toutes les inégalités, sur cette base structurelle que représente, en la résumant, le rapport K/Y.

Il résulte de cette discussion, j’y insiste à nouveau, que la mesure de K/Y n’est pas identique, dans ma conception des choses, à celle de Piketty. La propriété des logements, par exemple, n’engendre pas un capital (à supposer que l’on puisse parler de capital) de même nature que la propriété des moyens de production ou de financement. Je peux exploiter massivement le travail d’autrui si je possède une grande entreprise. J’aurai beaucoup plus de difficultés à exploiter le travail d’autrui si je ne possède qu’un grand logement.

- b) Piketty et Marx.

Je ne crois pas que Piketty connaisse Marx de manière approfondie. Il ignore sans doute que Marx est un très gros morceau. Mais c’est sa génération, peu importe d’ailleurs. Ma préoccupation n’est pas de le lui reprocher. Keynes a accompli une œuvre scientifique considérable sans la moindre référence à Marx. C’est aux marxistes de s’approprier de manière critique toutes les œuvres de l’esprit correspondant à leurs convictions.

Cela dit, il parle de Marx sans agressivité. Ce qui facilite le travail de confrontation critique avec son propre ouvrage. Je vais juste mentionner un point qui me parait anecdotique, lorsqu’il considère que Marx est passé à côté de la comptabilité nationale. Je lui suggère de prêter attention, par exemple au Livre II du Capital.

Cela dit, l’essentiel me parait être contenu dans les citations suivantes, qui reprennent plusieurs parties du texte des pages 360/361. « Pour Marx…les capitalistes accumulent des quantités de capital de plus en plus importantes, ce qui finit par conduire à une baisse inexorable et tendancielle du taux de profit… Une façon logiquement cohérente d’interpréter son propos est de considérer la loi dynamique beta = s/g, dans le cas particulier où le taux de croissance est nul, ou tout du moins très proche de 0 » (p.360).

Or, ajoute-t-il, « …dans l’esprit de Marx, et dans une large mesure…jusqu’aux travaux de Solow dans les années 1950/1960, la notion même de croissance structurelle tirée par une croissance permanente et durable de la productivité, n’était pas clairement formulée et identifiée… Autrement dit, on produit plus (il s’agit de +, JCD), uniquement parce que chaque travailleur dispose de plus de machines et d’équipements et non parce que la productivité en tant que telle…a augmenté » (p.360-361). « La contradiction dynamique pointée par Marx correspond donc à une vraie difficulté dont la seule issue logique est la croissance structurelle qui seule permet d’équilibrer, dans une certaine mesure, le processus d’accumulation du capital. C’est la croissance permanente de la productivité et de la population qui permet d’équilibrer l’addition permanente de nouvelles unités de capital… » (p.361-362).

Après les travaux de Solow, la critique énoncée par Piketty à l’encontre de Marx fut directement reprise contre Marx par Nabuo Okishio (article de 1980), pour lequel il suffit qu’une entreprise capitaliste et une seule réalise un progrès de productivité dans les équipements qu’elle produit pour que toutes les autres entreprises bénéficient de l’abaissement du prix du capital ainsi induit. La conclusion d’Okishio était, en quelque sorte, qu’il ne peut y avoir de loi tendancielle de la baisse du taux de profit puisque le système capitaliste est toujours en mesure de produire l’antidote (l’accroissement de la productivité) de son empoisonnement (l’accumulation infinie du capital).

Que permet de dire à ce propos le concept de composition organique du capital et ce que l’on sait de Marx ?

- c) La composition organique du capital comme concept de la contradiction fondamentale du capitalisme

Je vais aller à l’essentiel, en utilisant un vocabulaire que l’on considérera peut être comme philosophique (non économique) pour la simple raison que les économistes académiques utilisent une autre philosophie que celle de Marx.

La nature soi disant philosophique de mon propos tient à ce que le concept de composition organique du capital n’est pas seulement un résumé économique de la structure fondamentale du capital. C’est encore, et peut être surtout, son résumé sociologique profond.

Le rapport K/Y n’est pas uniquement un rapport technique. C’est aussi une sorte de résumé sociologique de la société capitaliste. A son numérateur se trouve le travail accumulé K, que possèdent ou que s’approprient les capitalistes. A son dénominateur, figure le travail vivant Y, nouvellement dépensé dans la période. Le rapport K/Y, ne désigne donc pas seulement la croissance de la production ou de la productivité du travail par les équipements pour résister à la baisse du taux de profit. C’est l’image statistique de l’unité et de l’opposition (de la contradiction) entre le travail vivant et le travail passé. C’est l’image statistique du Capital, en tant que rapport social (pas seulement en tant que rapport économique).

Si l’on pense que la contradiction majeure de la société capitaliste est celle existant entre le travail accumulé et le profit, je crois qu’on manque l’essentiel. Ce n’est pas faux. C’est une contradiction parmi les plus importantes au plan économique. Mais ce n’est pas la contradiction principale, au plan social, qui est celle existant entre la classe des capitalistes et la classe des travailleurs. Cette contradiction est à la fois vivante et permanente, que le taux de profit baisse ou augmente. Le conflit de classe ne s’arrête pas parce que le taux de profit passerait de 3 à 4% voire à 10%. Au contraire, il sera vraisemblablement relancé car les travailleurs, qui ont un très mauvais esprit, seront encouragés à revendiquer de nouvelles augmentations de salaires ou d’autres conditions de travail. La permanence de la contradiction de classes entraine la permanence de la lutte des classes.

Ce que je veux dire, en soulignant l’essence sociologiquement contradictoire du concept de composition organique du capital, c’est que les capitalistes, tels que Marx les décrit et tels que les marxistes généralement les appréhendent, ne restent pas immobiles quand ils accumulent du capital.

D’abord, ils investissent sans cesse, car ils sont, les uns avec les autres, en concurrence permanente. Le taux de profit P/K peut être écrit (P/Y) / (K/Y). A technologie inchangée, le taux de profit diminue quand K/Y augmente par suite de la lutte concurrentielle. C’est l’aspect que Piketty retient de Marx.

Mais en même temps, le taux de profit peut être écrit (P/V) / (K/V). Autrement dit, le taux de profit peut être poussé à la hausse en augmentant P/V (le taux de la plus-value) et en réduisant K/V (ce que Marx appelle la composition valeur du capital).

Le problème ressortant des textes de Marx n’est donc pas seulement le fait que le taux de profit puisse diminuer sans cesse en raison des investissements effectués par les capitalistes au cours de leur lutte concurrentielle (premier expression du taux de profit). C’est aussi le fait que le taux de la plus-value est une variable à la disposition des capitalistes. Ils ont l’obligation systémique de l’augmenter sans cesse (deuxième expression du taux de profit).

Toutefois, la difficulté (la contradiction) vient de ce que K/Y peut croître infiniment (du moins en imagination) alors que l’accroissement de P/V est borné supérieurement. Le taux de la plus-value tend vers une limite tandis que l’investissement matériel est sans limite. Telle est, me semble-t-il, la contradiction ressortant assez clairement des textes de Marx en ce qui concerne la composition organique du capital et que n’exprime pas Piketty, se limitant à la dimension technique de la contradiction. En outre, les diverses formes de la composition organique du capital (cf. note de fin d’article) montrent clairement, pour l’une d’entre elle en tout cas, que la croissance de la productivité est l’une des manières de lutter contre la baisse du taux de profit engendrée par l’excès d’investissement.

Je ne prétends pas (et je ne pense pas) que ce raisonnement de base soit suffisant pour établir de manière convaincante comment le taux moyen de profit évolue dans une société capitaliste, par suite des contraintes que le système capitaliste impose aux capitalistes. Mais c’est une dimension dont il faut tenir compte de façon nécessaire. Car ces concepts existent. Ils ont déjà été utilisés et développés. Les travaux de Kondratiev continuent d’impulser des recherches académiques (comme par exemple une thèse pas trop ancienne de Gilles Rasselet, de l’Université de Reims) que Piketty aurait peut être intérêt à feuilleter.

Et puis surtout, les contradictions qu’étudie Marx sont certes de nature économique. Mais par dessus leur revêtement économique, elles sont de nature sociale. Or le principe de la contradiction me parait étranger à la démarche de Piketty. Comme il l’écrit lui même, il raisonne « par de-là les chocs et les crises » (p.269). Les travaux de Kondratiev et de ceux qui ont suivi semblent situés en dehors de son champ de curiosité. Paradoxalement, le recours de cet auteur aux séries longues dont les variables sont lissées pour faire ressortir les tendances longues, le conduit à ignorer que le capitalisme progresse par cycles. Par phases d’expansion et de récession. Et que, de phase en phase, il change.

La scène économique explorée par Piketty est uniquement celle que règle l’hypothèse du long terme. Avec cette hypothèse, la société fonctionne toujours à l’équilibre. Les petits et les grands accidents de la vie ordinaire, les crises, qu’elles soient courtes ou longues, les périodes de sous-emploi ou de sur-emploi, les mutations technologiques, les changements institutionnels profonds, tout cela s’évapore ou tend à le faire. Ainsi, par exemple, peut-il considérer que le rapport K/Y est une fonction du taux d’épargne, par ce que, pour lui (c’est en tout cas l’hypothèse que j’ai retenue en lisant son texte), il existe toujours un taux d’intérêt d’équilibre permettant que l’épargne soit entièrement transformée en capital.

C’est sur la base de cette hypothèse que disparait le postulat keynésien selon lequel l’investissement (fonction de l’efficacité marginale du capital) crée le niveau de revenu engendrant l’épargne qui en assure le financement.

- d) Comment conclure ce point ?

Je le répète, je ne prétends absolument pas que les chercheurs de référence marxiste aient accompli, relativement au point de théorie en question, tout le travail indispensable. Je pense même qu’il y aurait urgence à progresser dans ce domaine. Par conséquent, on peut comprendre que le chercheur Piketty n’y trouve pas son compte. Une théorie inachevée ou comprenant trop de trous théoriques ne peut emporter la conviction générale.

Je crois cependant que ses arguments sont insuffisants pour aboutir au résultat théorique qu’il vise, à savoir montrer les erreurs de Marx, et manquent leur cible. Je peux, à la rigueur, concéder l’insuffisance de Marx, en faisant remarquer que Marx a fait ce qu’il a pu comme tout un chacun, qu’après Marx d’autres ont suivi et prolongé son travail. Mais je ne concéderai pas l’erreur de Marx. C’est lui, Piketty, qui se trompe théoriquement. C’est lui qui est dans l’erreur et non Marx. Cela dit, la discussion me parait saine. Et puis quel chercheur, quel penseur fut-il de génie, accomplira jamais la totalité du savoir ? Je doute que cela soit possible.

La composition organique du capital est non seulement le concept d’une structure économique. C’est aussi, et simultanément, le concept d’une structure sociologique. La contradiction dont il est le résumé est donc une contradiction vivante. Les capitalistes contribuent collectivement à faire baisser le taux moyen de profit de l’économie (ce qui n’est pas exactement le taux de profit moyen des entreprises). Ils font monter la composition organique du capital dans un contexte technologique qui demeure approximativement constant au moins pendant un certain temps (car les technologies ne modifient pas chaque matin la productivité des systèmes productifs). Il y a de l’inertie dans l’investissement et dans la découverte de procédés nouveaux. La fluidité bienfaisante des théorèmes (et des fonctions de production) de Solow n’est pas de mise dans le monde réel.

Cela dit, à un moment ou à un autre, la baisse du taux moyen macroéconomique affecte le taux moyen des entreprises et la lutte concurrentielle reprend de plus belle. Car les capitalistes ne restent pas devant le taux de profit, à le regarder monter tout en se grattant le nombril et en disant, sur un ton de lamentation « O Tempora, O Mores ». Non, ils mettent en œuvre ce que Marx a appelé des contre tendances. Ils cherchent à accroitre l’exploitation du travail. Ils s’efforcent d’en modifier l’organisation ou la législation, comme ils le font aujourd’hui. Ils exigent un nouveau partage du profit social, demandant à l’État de réduire leurs impôts, de les subventionner. Simultanément, on a observé jusqu’à ce jour, qu’ils ont réussi à élaborer de nouvelles bases productives, de nouvelles technologies permettant de relacer la productivité.

Pour exprimer cette diversité d’actions, le concept central de la composition organique du capital voit tourner autour de lui deux autres planètes qui sont la composition valeur du capital et la composition technique du capital, sans oublier que la composition organique du capital elle-même, peut être exprimée en valeur ou en prix, que la production peut être exportée et vendue sur des marchés extérieurs, que l’investissement peut aujourd’hui être effectué en actifs réels ou financiers, que les pays émergents offrent parfois de nouvelles frontières à l’investissement.

Il résulte de toutes ces actions que l’économie progresse de façon cyclique et dans la lutte sociale. J’observe que les cycles de Kondratiev sont gommés dans les résultats fournis par Piketty. Il n’y fait en tout cas aucune mention. Cela voudrait-il dire que, pour lui, ces cycles ne sont qu’une illusion théorique ? Mais alors pourquoi ? Personnellement, je demande à voir, ma crainte étant que la confusion faite par Piketty entre le capital des entreprises et l’enrichissement général, soit à l’origine de cette disparition partielle.

III - Conclusion générale de l’article

Quand on prend connaissance d’un travail, on le fait avec ses propres lunettes et celles-ci ne sont pas une garantie de vérité. Du moins mes remarques sont-elles l’expression de ma vérité, tout comme le livre de Piketty est l’expression de sa vérité. Bien que me trouvant en désaccord avec Piketty sur plusieurs points essentiels, je me suis efforcé d’argumenter mon propos. Ensuite, le débat peut se poursuivre si les protagonistes y voient un intérêt.

Cela dit, j’ai trouvé un premier point très intéressant dans l’examen de cette deuxième partie de son livre. C’est la description que j’y ai trouvée de l’enrichissement général depuis trois siècles. Je dirai que, pour les communistes, ce point est peut être le plus immédiatement important. Comment l’ambition révolutionnaire qu’ils portent, peut-elle s’articuler avec la réalité sous-jacente à cette description, que je crois à peu près juste ?

Je vais maintenant souligner un deuxième point d’intérêt. Ma conviction est que l’économie capitaliste procède par grands cycles. Depuis les débuts de l’ère industrielle, il y en aurait eu 4 à 5 environ. De cycle en cycle, la base productive, sociologique, institutionnelle du capitalisme changerait. Dans cette suite de cycles, le cycle de l’après-guerre, ou cycle du capitalisme monopoliste d’État (pour aller vite) a expérimenté les premiers éléments d’un changement structurel en profondeur du système capitaliste. En tout cas, cela signifie que, jusqu’à présent, le capitalisme a été en mesure de trouver la nouvelle base productive lui permettant de surmonter la crise précédente. Sommes-nous dans cette situation aujourd’hui ?

Aujourd’hui, nous sommes plongés dans l’antithèse de l’expérimentation du capitalisme monopoliste d’État. Nous sommes entrés dans une forme appuyée et brutale de réaffirmation du capitalisme, dans le cadre de sa mondialisation. Cette dernière caractéristique ressort clairement du livre de Piketty. Tout tend à redevenir privé. Tout, par conséquent, s’achète et se vend et les modes de régulation de l’économie deviennent d’autant plus aveugles que le système s’est mondialisé sans construire, au niveau mondial, ce qui existait antérieurement au plan national. Le capital public tend à disparaitre de l’épure du capitalisme.

Pourtant, le capitalisme engendre de nouvelles activités, de nouveaux besoins, de nouvelles catégories de population, de nouvelles compétences. Si l’hypothèse que je fais personnellement, consistant à dire que de nouveaux services collectifs s’imposent désormais pour le fonctionnement optimal de la société capitaliste complexe, services qui seront d’autant mieux fournis qu’ils seront publics, comment concilier l’exigence de développement de l’action publique, reposant sur un capital public conséquent, avec la tendance à la disparition générale des États et de leurs moyens d’action ?

La mise en œuvre socialisée et démocratisée de l’action publique au plan national, dans toutes les nations du monde, serait la condition nécessaire d’existence d’une nouvelle base productive (et sans doute aussi d’une nouvelle base sociologique et politique). Mais le Capital en se mondialisant comme il le fait, réduirait au point de l’anéantir, sa capacité à porter jusqu’à son terme l’installation de cette nouvelle base productive et sociale. Voici, me semble-t-il, exprimé toutefois sous forme d’interrogation, le véritable enjeu sous-jacent à l’évolution du Capital au cours du 21ème siècle.

Piketty ne soulève pas cette question, mais son livre permet de le faire.

Jean-Claude Delaunay, le 7 Septembre 2014

Article 1 : « Le Capital au XXIème siècle », ouvrage de Thomas Piketty, commenté par Jean-Claude Delaunay (1)

Article 3 : « Le Capital au XXIème siècle », ouvrage de Thomas Piketty, commenté par Jean-Claude Delaunay (3)

[1Je vais reprendre ici l’exposé technique simple de ce que Piketty appelle les deux lois fondamentales du capitalisme (chapitre 5). J’y ajouterai une troisième relation relative à la croissance de la population, ainsi que divers concepts tirés de Marx.

Première loi fondamentale :

Elle vise à exprimer la part du profit dans le revenu national en fonction de K/Y. Soit P le profit et Y le revenu national. La part du profit dans le revenu national, noté alpha (α), s’écrit
α = P/Y
Pour faire apparaître K/Y dans cette équation sans la modifier, il suffit de diviser haut et bas par K. Il vient
α = P/Y = (P/K) / (Y/K)
Avec les notations suivantes∶ P/K = ∏ et K/Y = β,
α = ∏. β

Dans cette équation, P est plus grand que le profit global des entreprises. C’est une quantité macroéconomique que les anciens appelaient le surplus net. Le surplus net contient le profit des entreprises ainsi que les impôts. Lorsque ∏ diminue, le profit des entreprises peut être stabilisé, ou peut même augmenter si l’État rétrocède aux entreprises une partie des impôts qu’il perçoit.

Deuxième loi fondamentale :

Il s’agit maintenant d’expliquer β = K/Y.

Dans ce but, Piketty utilise ce qu’on appelle le modèle de Harrod et Domar. Ce modèle établit une relation entre le taux de croissance du revenu (g), le taux d’épargne (s) et le rapport K/Y.

L’équation résumant ce modèle est :
g = s / β

Piketty reprend cette équation, mais intervertit la place de g et de β. D’où sa deuxième loi fondamentale :
β = s / g

Troisième relation :

Soit μ = Y / N, le revenu par tête. On peut écrire ∶
dμ /μ = dY / Y - dN / N
Soit dY / Y = dμ /μ + dN / N

Une autre expression de α (première loi fondamentale) :
Soit P le profit macroéconomique et Y le revenu, α, le taux de partage du revenu,
α = P / Y

En divisant haut et bas par V, la masse salariale versée aux producteurs, il vient :
α = (P / V) / (Y / V)
P / V est le taux de la plus-value (au sens de Marx), que l’on note m.
Y / V est le taux de partage du revenu entre salaires V et profit global P.
Y / V = (1 + m)
α = m / (1 + m)

On voit que α peut être exprimé soit comme une fonction de β, la composition organique du capital, soit comme une fonction de m, le taux de la plus-value. Dans le premier cas, on peut concevoir que la part de l’investissement constitutive de la composition organique du capital soit augmentée sans limite. Dans le deuxième cas, on perçoit que la capacité des capitalistes à accroitre le taux de la plus-value est limitée. Il existe une limite humaine à l’accroissement de la plus-value. Il faudrait aussi considérer la masse de la plus-value. Car un taux de plus-value peut être très grand. Mais s’il s’applique à 3 clampins, cela ne fait pas beaucoup de plus-value pour nourrir le profit. C’est sans doute l’une des raisons pour lesquelles les capitalistes vont en Asie. Les populations exploitables sont non seulement peu chères. Elles sont en grand nombre. Elles produisent de la masse.

Diverses formes de la composition organique du capital chez Marx :

- 1 - β est la composition organique du capital. La quantité de capital inscrite au numérateur de β (Marx) est plus petite que celle retenue par Piketty. Elle contient à coup sûr, le capital des entreprises. On peut discuter de savoir s’il faut y joindre une partie seulement ou la totalité du capital public. Le capital des ménages en biens durables en est exclu.

- 2 - La composition valeur du capital :

Soit Δ = K / V
∏ = P / K le taux macroéconomique de profit. En divisant haut et bas par V, il vient
∏ = (P / V) / (K / V)
∏ = m /Δ

- 3 - La composition technique du capital, volumes et prix :

Soit γ (gamma) = K′ / N, avec K′ (K prime) le volume de capital et N la population active.
β = K / Y = p(k). K′ / p.Q

En divisant par N, il vient :
β = p(k)/p . (K′ / N) / (Q / N) = rapport des prix du capital et du produit que multiplie la composition technique du capital divis"e par la productivité du travail.

Cette formule introduit les concepts de stock de capital en volume et en prix, de revenu global en volume et en prix, de composition technique du capital (γ), de productivité du travail (π).

β = p(k)/p . γ / π

[2Études sur le Capitalisme Monopoliste d’État, sa crise et son issue, 2ème édition 1974, reprise de l’article « Éléments sur la crise du CME », publié dans la Nouvelle Revue Internationale de décembre 1972 et dans Économie et Politique du même mois, p.404, sous le titre Évolution du rapport capital/produit.

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