« La transition vers la transition » Ou comment faire pour que l’idée du socialisme devienne une force matérielle

, par  Jean-Claude Delaunay , popularité : 2%

Merci Jean-Claude d’avoir enfin et avec un humour que j’apprécie (l’ironie et la ténacité sont les vertus du bolchévique) abordé la réponse à ma question qui portait non pas sur le socialisme, en tant que transition, mais sur la manière dont nous pourrions envisager la transition vers la transition socialiste et ses difficultés. Il y a dans tes propositions des jalons théoriques que je partageais intuitivement et que nous mettions en œuvre dans ce blog. Tu proposes de développer “trois faits majeurs". Le premier est que la société française est structurée par l’impérialisme et non par « le capitalisme néo-libéral ». Le deuxième est que l’impérialisme d’aujourd’hui est sensiblement différent de celui du début du 20ème siècle et cela depuis une cinquantaine d’années. La prise en compte de la révolution scientifique et technique en cours donne sa pleine signification à cette affirmation et la consolide. Le troisième est que notre compréhension du socialisme doit évoluer en conséquence. Et mille fois d’accord avec ton invite à amplifier notre lutte pour la paix. Cela dit nous ne pouvons pas ignorer que les guerres soient les grandes "accoucheuses" de l’Histoire, ne serait-ce que parce que le peuple accède aux armes, (les forces productives depuis la naissance des sociétés de classe pour renvoyer à un autre débat sur la "rareté") une autre manière de revendiquer la paix, même si le capitalisme a ses armées de métier, si le dévoiement fasciste est sa logique, peut-être la question que nous n’osons même pas nous poser est la fin de la coexistence pacifique et d’une espérance quelconque dans le processus électoral de plus en plus conçu pour interdire le changement. De ce point de vue, ce qui se passe en Amérique latine est à voir de près. (note de Danielle Bleitrach pour "Histoire et société")

Le problème soulevé

On peut comprendre aisément que le socialisme doive être une forme de société assurant la transition vers le communisme. Mais encore faut-il que les masses populaires s’engagent dans cette voie. Il faut transiter vers la transition. Nous avons cru par exemple, que l’Union de la Gauche, dans les conditions de ce que nous appelions le Capitalisme monopoliste d’Etat, pouvait assurer cette transition vers la transition. Qu’en est-il aujourd’hui ? Quelle est la transition qui mènera au socialisme ? Tel est le problème que soulève Danielle dans l’un de ses récents billets : « Quel pourraient-être, en France, en 2023, la forme et le contenu de la transition vers cette société transitoire que nous appelons le socialisme ? ».

Si, pour tenter de le résoudre, on fait l’inventaire de l’existant, il faut bien reconnaître que l’on débouche sur une conclusion plutôt pessimiste. Je repère les difficultés suivantes :

  1. Nous avons déjà essayé d’en « faire une », avec le Programme commun de gouvernement de la gauche et nous avons échoué.
  1. Au cours des quarante dernières années, le carcan européen s’est refermé sur nous.
  1. Nous sommes gouvernés par une grande bourgeoisie de plus en plus fascisante et prête à tout.
  1. Cette bourgeoisie fascisante a des petits copains, allemands, britanniques, nord-américains, polonais, ukrainiens, autres, qui eux aussi n’hésiteront pas une seconde à nous tirer dessus si le besoin s’en fait sentir, et s’ils le peuvent.
  1. Notre système électoral est totalement pourri et nous n’en tirerons rien.
  1. Nombre des combattants du système se sont retirés sur l’Aventin de l’abstention.
  1. L’individualisme libertaire capitaliste nous a envahis et submergés.

Ces phénomènes (on pourrait en trouver d’autres) tiennent les masses populaires éloignées de la conclusion selon laquelle le socialisme serait une nécessité de notre temps. Ce sont des facteurs de "non-transition". Par ailleurs, je ne crois pas que les combats actuels pour des retraites décentes à un âge décent, aussi importants et nécessaires soient-ils, puissent renverser cette lourde tendance. Que faire dans ces conditions ?

Le socialisme serait-il une question d’audace ? « Osons le socialisme », disent, en effet, certains communistes. Mais, malgré les doutes que j’ai émis à ce propos, ne serait-ce pas plutôt une question de luttes ? L’expérience des combats menés à propos du régime des retraites, par exemple, ou celles d’autres combats, pourraient-elles progressivement nous y conduire ? Ou bien alors, serait-ce une question de confiance ? En gagnant des mairies, en protégeant tant bien que mal les populations, en y vendant des légumes ou des fruits à prix coûtant par exemple, les communistes n’accroissent-ils pas le degré de confiance que leur accordent les classes populaires ? Ne serait-ce pas également une question de niveau et de contenu de l’explication apportée relativement au socialisme ? Ne faudrait-il pas, par exemple, imaginer davantage ce que pourrait-être « le socialisme à la française » et approfondir cette notion, à propos de laquelle on a quand même déjà quelques idées ? Oui, mais la mise en place d’une transition effective vers la transition socialiste ne supposerait-elle pas, aujourd’hui, la reconstruction de "la gauche" ? Ou alors, cette transition vers la transition pourrait-elle se résumer à la reconstruction d’un PCF démocratique et de combat, tel que nous disposions de l’appareil dont nous avons besoin pour mener la lutte révolutionnaire ? Je ne mentionne pas, dans cette énumération, les partisans du « communisme déjà-là » puisque, pour eux, la transition socialiste n’aurait pas lieu d’être et donc a fortiori la transition vers cette transition.

Au total, à la question soulevée de savoir ce qu’il conviendrait de faire aujourd’hui en France pour engager réellement et concrètement le processus de construction d’une société socialiste, on observe que chacun apporte la réponse qu’il peut, mais que les réponses sont diverses et très hypothétiques. L’idée la plus communément acceptée est que la construction du socialisme ne sera pas facile. Mais il n’y a pas d’accord sur ce que pourrait ou devrait être la transition vers la transition socialiste. Il s’en suit que les chemins imaginés pour aider les masses populaires à prendre conscience qu’il serait de leur intérêt de construire une société socialiste sont divers, disparates, peu opérationnels.

Je me pose alors la question suivante : la théorie marxiste pourrait-elle nous aider à dessiner les cartes de cette navigation compliquée ? Sans doute le marxisme n’est-il pas fiable à 100%. Mais cela ne tient pas à la théorie en cause. Elle est solide et elle a fait ses preuves, n’en déplaise à celles et ceux qui n’y connaissent rien. Cela tient aux limites de notre subjectivité. Et puis il faut trouver une réponse à la question posée, c’est vital pour le bien-être de notre peuple.

Essayons donc d’élaborer ensemble une réponse théoriquement fondée à la question soulevée par Danielle. Je vais énoncer quelques idées et puis je passerai le relais, si mes idées en valent la peine. On verra bien.

Que suggère la théorie marxiste à propos de la « transition vers la transition » ?

Dans cette partie, j’aborde deux points.

Le premier est que le socialisme étant l’antithèse de l’impérialisme, si nous voulons, par la pensée, avoir une approche du socialisme dans notre pays, nous devons comprendre ce qu’est l’impérialisme. Nous devons comprendre en quoi et comment la grande bourgeoisie implantée en France participe du système général de l’impérialisme et en est, bien malgré nous, une partie prenante.

Mais il nous faut également développer la conscience de la nécessité du socialisme. Le deuxième point porte donc sur le socialisme. Et l’impérialisme d’aujourd’hui n’étant plus exactement l’impérialisme d’hier, (c’est ce que je me suis efforcé de montrer dans un texte récemment publié sur ce site), cela veut dire que le socialisme d’aujourd’hui n’est plus exactement le socialisme d’hier. Notre compréhension du socialisme doit évoluer et cela aura vraisemblablement un effet en retour sur notre compréhension de ce que devrait être, ou pourrait être, la transition vers la transition socialiste.

Je fais l’hypothèse que, à partir de ces deux points, on peut dégager le profil de ce que devrait être la transition vers la transition. Ce profil n’est pas exclusif des voies que j’ai précédemment indiquées (l’audace, la confiance, les luttes, les formes d’union, etc…) mais il les oriente, il les ordonne et parfois conduit à leur reformulation (l’union populaire au lieu de l’union de la gauche).

Premier point : Le socialisme est l’antithèse de l’impérialisme. Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ? Est-il équivalent de dire que « le socialisme est l’antithèse du capitalisme » ?

Dire que le socialisme est l’antithèse de l’impérialisme signifie, selon moi, que l’impérialisme crée les conditions de l’apparition du socialisme par les destructions qu’il engendre, sans construire par ailleurs les conditions de l’existence du socialisme.

Nous avons été un peu trompés par notre lecture de Lénine sur ce point. En effet, nous en avons déduit que l’impérialisme construisait de vastes systèmes bancaires, de vastes moyens de transport, de vastes ceci et de vastes cela. Et donc, que, dans les pays capitalistes développés, l’impérialisme était l’anti-chambre du socialisme, ou encore que le socialisme consisterait à mettre nos pieds dans les chaussons de l’impérialisme. Je crois que cette interprétation est erronée et doit être revue. En particulier, elle nous conduisait à ne pas comprendre pourquoi le socialisme avait pris racine dans des pays agraires industriellement sous-développés, et pas dans les pays impérialistes, par définition développés.

Ce que nous devons comprendre, me semble-t-il est que l’impérialisme, par les destructions qu’il engendre, crée les conditions de l’apparition du socialisme. Mais il revient au socialisme de créer les conditions (matérielles, politiques, culturelles, militaires) de son existence. Ces deux moments sont distincts.

Le mot « antithèse » signifie donc, d’une part, que la société dans laquelle prend forme l’idée du socialisme est traversée de contradictions si fortes, si antagoniques, si mortelles, que, pour être surmontées et résolues, ces contradictions doivent être plongées dans un contexte totalement renouvelé. Mais cela signifie d’autre part que cette société renouvelée sera celle dans laquelle le développement, économique, politique, culturel, scientifique, sera réalisé.

Je reprends ci-après cet énoncé très général de façon à mettre en lumière deux orientations distinctes nécessaires.

La première consiste à dire que la société nouvelle doit neutraliser et éradiquer définitivement l’antagonisme majeur dont l’impérialisme est le grand véhicule. Cet antagonisme majeur, c’est la guerre et la destruction mortelle, érigés en système de fonctionnement économique intérieur et de gouvernement mondial. L’impérialisme est, en effet, par essence, un système reposant sur la violence, la mort, la destruction, nullement créatrices. Avec l’impérialisme, nous sommes bien au delà de Schumpeter. Nous sommes dans la négation systématique et industrialisée de la vie. La mort est le métier de l’Impérialisme. Qu’il soit pendu haut et court.

La deuxième consiste à dire que la société nouvelle doit développer contradictoirement, pour le compte et dans des formes adaptées aux besoins du peuple et de la nation, et non pour le compte et dans des formes adaptées aux besoins du capital monopoliste (du très grand capital), les forces productives engendrées par ce même grand capital. La société nouvelle doit faire de ces forces productives des forces de vie et de libération alors que développés par les classes impérialistes, ce sont des forces de servitude et d’anéantissement.

Comment conclure ce premier point ? Je suggère de retenir les trois idées suivantes :

  1. Le concept de capitalisme est le concept d’une abstraction totalisante, visant à résumer un système qui fut « créateur relatif » à une certaine époque mais qui est aujourd’hui « destructeur absolu ». Le socialisme est l’antithèse du capitalisme dans sa phase « destructrice absolue ». Il n’est donc pas du tout innocent de situer la lutte des classes dans le capitalisme (ou comme on dit stupidement aujourd’hui, dans « le capitalisme néo-libéral ») ou de contribuer à cette lutte en la situant dans l’impérialisme.
  1. Lutter contre l’impérialisme, engager la lutte pour le socialisme, consiste d’abord à lutter contre les destructions mortelles réelles et contre les idéologies de mort qu’il engendre. La transition vers la transition, c’est l’ensemble des explications et des actions dont le motif explicite est « la destruction de ce système de mort » qu’est l’impérialisme.
  1. Toutefois, la lutte contre l’impérialisme, c’est aussi la lutte pour construire la transition socialiste et en créer de manière solide les conditions politiques, économiques, écologiques, militaires, scientifiques, juridiques, culturelles, de fonctionnement. C’est notamment l’ensemble des explications et des actions dont le motif explicite est de retourner, réorienter, reprendre, développer, libérer les forces productives engendrées au sein de l’impérialisme et par lui, mais par lui aussi totalement dévoyées.

Or nous ne vivons pas exactement dans le même impérialisme que celui du début du 20ème siècle. Nous sommes dans l’IMPÉRIALISME GLOBALISÉ. Puisque le socialisme est l’antithèse de l’impérialisme, est-ce que les changements que nous observons relativement à l’impérialisme ont pour effet de modifier notre conception du socialisme et notre approche de la lutte pour le socialisme ? Quelle pourrait être l’incidence de ces changements sur les luttes pour le socialisme ?

Dans l’état actuel des choses, nous sommes prisonniers, comme des lapins, des phares de la voiture qui nous poursuit, nous aveugle et se prépare à nous écraser. Comment interpréter cette situation pour ne pas la subir ? Comment en surmonter et en briser la contrainte ? Comment l’écarter définitivement, en trouvant cette transition vers la transition qui, pour l’instant, nous fait défaut ?

Deuxième point : L’impérialisme a évolué depuis les années 1970. C’était un impérialisme de nations. Cet impérialisme s’est globalisé, en même temps qu’américanisé et hiérarchisé, tout en développant des forces productives nouvelles. Quelles incidences sur la transition vers la transition socialiste et son double contenu ?

Malgré les tonnes d’idioties visant à illustrer chaque jour le déroulement des affaires du monde et à en déformer le sens, il serait superficiel de ne pas observer combien notre époque, tout en étant stupide, est intelligente. Nous, êtres humains, vivons aujourd’hui des événements nous conduisant à penser que l’Histoire est entrée dans une phase d’accélération. Nous sommes donc poussés à comprendre des situations inédites. De manière simultanée, nous constatons combien les interprétations peuvent diverger les unes des autres. Certes le monde se réveille et chacun dit quelque chose. Mais c’est un vacarme qui en sort, et ce vacarme n’a vraiment rien à voir avec les symphonies sonores de Beethoven, saluant la Révolution de 1789. Dans cet énorme "bruit", le marxisme a peu de place et, paradoxe des paradoxes, quand il est évoqué, c’est pour engendrer des conclusions radicalement contraires. Tout cela est étrange.

Mais revenons à l’objet de ce texte. Pour ce qui me concerne, je crois, au cours des dernières années, avoir, dans mon système de pensée, vraiment compris trois faits majeurs. Le premier est que la société française est structurée par l’impérialisme et non par « le capitalisme néo-libéral ». Le deuxième est que l’impérialisme d’aujourd’hui est sensiblement différent de celui du début du 20ème siècle et cela depuis une cinquantaine d’années. La prise en compte de la révolution scientifique et technique en cours donne sa pleine signification à cette affirmation et la consolide. Le troisième est que notre compréhension du socialisme doit évoluer en conséquence. Je crois que ce troisième point est l’élément le plus important de la présente discussion, et peut choquer certains. Je vais donc m’expliquer à ce propos en abordant brièvement deux points.

Le premier point est que le socialisme est certes national. Il doit être pensé et construit comme tel. Mais il est aujourd’hui, plus et autrement qu’hier, plongé dans des rapports internationaux renouvelés.

  • Le socialisme doit être pensé comme national, aujourd’hui comme hier. D’un côté, l’Impérialisme contemporain cherche beaucoup plus qu’hier à détruire et à transcender les nations, pour mieux exploiter et dominer les peuples. Par raison contraire, c’est dans le cadre de leur nation que les peuples peuvent au mieux exercer leur souveraineté politique, et prendre les décisions qu’ils estiment conformes à leurs intérêts, tant au plan politique, qu’économique (rapports entre production et consommation), culturel et religieux.
  • Cela dit le contexte mondial est profondément renouvelé par les besoins de la majorité de la population mondiale (62%). L’Impérialisme cherche, encore plus qu’hier, car il est sorti, depuis les années 1970, de son cadre national originel, à dominer le reste du monde. Plus il se globalise et plus il est urgent pour ses agents monopolistes, de soumettre à leurs exigences tous les autres peuples, car le capital monopoliste se sent vulnérable. Mais l’Impérialisme ne parle qu’au nom d’une très petite fraction de la population mondiale, alors que sa globalisation a enclenché un processus désormais irréversible, à savoir l’aspiration générale des peuples au développement. Cette aspiration concerne au moins 82% de la population mondiale (pays sous-développés industriellement et pays socialistes), et certainement davantage si l’on considère qu’une partie importante de la population résidant dans les pays capitalistes développés est elle-même en situation de misère.
  • Il s’en suit que le développement national, quel que soit le régime dans lequel il prend forme, a fortiori lorsque ce régime est de type socialiste, doit être pensé désormais comme développement national et comme développement prenant place dans un contexte international. La lutte pour le socialisme, ainsi que le but de cette lutte, le socialisme, doivent refléter cette évolution. On peut certes concevoir « le socialisme à la française » comme une stratégie de développement franco-française. Mais dans ce cas, on va à contre-courant des tendances du monde. Celles-ci exigent d’abord, ou simultanément, de contrôler durablement ce Conglomérat Pluriel Américano-centré et Globalisé qu’est l’Impérialisme contemporain et ensuite d’inscrire le développement des nations extérieures à ce conglomérat dans un contexte mondial favorable à la coopération et aux échanges de toutes sortes.

Il y aurait infiniment plus que je l’ai fait, à réfléchir et à dire, sur ces aspects de la lutte contemporaine, en France, pour le socialisme et sur le socialisme lui-même dans le nouveau contexte mondial. Il serait par exemple intéressant, pour approfondir théoriquement cette réflexion, de reprendre la très ancienne discussion sur « la révolution permanente ».

Je me borne à conclure que la conception nationale que l’on doit avoir aujourd’hui du socialisme, et par conséquent la lutte pour le socialisme dans un pays donné, ne peuvent être séparées de leur dimension internationale.

Cela dit, il me semble que la dimension internationale du socialisme, c’est je crois le point nouveau de mon propos, doit être elle-même un objet de lutte. Nous devons penser la dimension internationale du socialisme national comme le résultat d’une lutte spécifique, et non comme une simple modalité d’inscription dans l’existant, dans la mesure où le Conglomérat Pluriel de l’Impérialisme Globalisé est désormais la forme mondialisée de l’Impérialisme.

Le deuxième point, découlant donc de ce qui précède, est que le socialisme est, aujourd’hui, plus et autrement qu’hier, dépendant de la paix. Lutter pour le socialisme, c’est aujourd’hui plus qu’hier lutter pour la paix, pour l’établissement entre les nations de rapports sociaux durables de paix, de coopération et de respect mutuel. Un fonctionnement économique optimal, la prise en compte effective des évolutions climatiques, le contrôle mondial des pandémies sont les trois phénomènes que le socialisme doit promouvoir au plan international, leur traitement rendant nécessaire la mise en place de rapports sociaux de paix.

La paix acquerrait donc aujourd’hui le statut d’un rapport social indispensable. Ce ne serait plus seulement un état souhaitable. Ce serait un rapport social que nous devrions absolument imposer à l’impérialisme et à ses agents, puis institutionnaliser et garantir. Nous devrions élaborer une sorte de dictature mondiale des peuples à l’encontre de l’impérialisme tout comme le peuple, dans chaque pays, doit exercer une dictature nationale à l’encontre de sa grande bourgeoisie, et non nianiasser à ce propos, s’il veut construire durablement le socialisme. Il n’existe pas de solution intermédiaire.

La lutte de masse pour la paix et la coopération pacifique entre les peuples, pour le développement économique, pour l’attention portée au réchauffement climatique, pour la promotion de la santé au plan mondial, constituent, me semble-t-il, la réponse au problème soulevé par Danielle Bleitrach. Ce serait la véritable transition vers la transition socialiste.

Quelques mots pour conclure

Ai-je été clair ? En laissant de côté les personnes qui, comme Bernard Friot, estiment que les sociétés développées sont déjà dans la maison du communisme et que, pour cette raison, nous n’avons pas besoin d’une transition socialiste pour y parvenir, la plupart des communistes français estiment, me semble-t-il, que le PCF doit contribuer à construire le socialisme. Nul ne met en doute que cette construction devra être l’affaire des masses populaires. Nous ne savons pas trop comment mais je crois que le principe ne soulève pas de problème.

Oui, mais comment créer un mouvement populaire suffisamment puissant pour rendre crédible ce choix de société ? Plusieurs options sont proposées : 1) la voie électorale (il faut refonder la gauche) ; 2) la voie municipale (il faut conquérir des mairies et gagner ainsi la confiance majoritaire de la population) ; 3) la voie économique (il faut lutter, avec les syndicats, contre les attaques que le grand capital et ses représentants mènent avec constance contre les travailleurs ; 4) la voie sociétale (il faut lutter contre le patriarcat, bien antérieur à la lutte des classes) ; 5) la voie morale (il faut oser). Curieusement, une franche sortie de l’Union européenne est sans doute la voie la moins explorée de toutes les voies envisagées, même si la sortie de l’OTAN est une option qui commence à prendre forme.

Est-ce que ces voies, qui ne sont pas exclusives les unes des autres, peuvent être efficaces, demande Danielle Bleitrach ? Est-ce que ce sont de véritables transitions vers cette transition qu’est le socialisme ?

Je me suis efforcé à mon tour de répondre à cette question en situant la France dans son véritable texte et contexte, qui est l’Impérialisme. Mais qu’est ce que l’impérialisme aujourd’hui ? J’ai avancé la notion de Conglomérat Pluriel Américano-Centré et Globalisé, pour le décrire. J’ai essayé d’en déduire les principaux traits du socialisme pour lequel nous luttons et simultanément les principaux traits de la transition vers la transition socialiste.

Sur ce point, j’ai avancé deux hypothèses. La première est que le socialisme, antithèse de l’Impérialisme, n’était pas une forme indifférente à la structure dont il est l’antithèse. Cela signifie que si l’Impérialisme a évolué en se mondialisant, notre conception du socialisme doit évoluer. Elle doit à son tour être mondialisée. Le développement interne socialiste ne peut être disjoint des rapports internationaux entre les nations.

Ma deuxième hypothèse est que, dans la mesure où l’impérialisme s’est globalisé et mondialisé, il intervient dans les rapports internationaux, en sorte que le socialisme ne peut envisager ses relations externes qu’en les construisant contre l’impérialisme. C’est pourquoi j’ai avancé la notion de « rapports sociaux de paix », pour indiquer que la paix était désormais non seulement un état souhaitable mais une exigence du fonctionnement mondial.

La lutte pour la paix m’apparaît donc comme étant la forme que doit prendre la transition vers la transition socialiste. Le problème politique majeur auquel nous sommes confrontés aujourd’hui n’est pas de refonder la gauche. Il est d’unir, de façon immédiate, la majorité des Français pour durablement imposer des rapports sociaux de paix à l’Impérialisme globalisé.

Réussirons-nous dans cette entreprise ? La question mérite d’être posée, puisque nos députés, et parmi eux, Fabien Roussel, défendent la guerre et soutiennent l’OTAN, quoi qu’ils puissent penser par ailleurs. Yves Dimicoli, que j’ai connu plus perspicace, engage Economie et Politique dans le soutien à l’Impérialisme. Le Secteur International du PCF fait de même.

Les compte-rendus par Franck Marsal, sur ce site, du débat en cours parmi les communistes préparant leur 39ème Congrès, apportent sans doute une certaine fraicheur dans cette ambiance lourde. Ainsi en est-il, par exemple, du texte signé par 168 militants, d’un âge moyen compris entre 25-30 ans, ou bien encore de la prise de position de la Fédération du Pas-de-Calais, relayée par Hervé Poly dans la presse nordiste, concernant la nécessaire lutte contre les forces de l’OTAN, ou bien encore certaines initiatives pétitionnaires que je soutiens totalement.

Nous engager, dans un tel contexte, à construire un vaste mouvement populaire en faveur de la Paix, c’est toutefois comme si nous cherchions à courir vite avec un boulet au pied.

Mais nous n’avons pas d’autre choix. Le port de Rhodes est en vue. Il va falloir que nous sautions et cela sans ambiguïté.

Ou bien nous dénions à la Fédération de Russie le droit de se défendre contre l’Impérialisme contemporain. Cela signifie que nous dénions à tout pays capitaliste autre que les impérialistes, le droit de se développer et d’être maître chez lui. La population de ces pays ne fait jamais que 62% de la population mondiale, un détail en quelque sorte. En prime, nous offrons tacitement aux Impérialistes le droit d’attaquer la Chine, un autre détail.

Ou bien nous condamnons clairement les actions follement guerrières du système impérialiste mondialisé contre les pays en développement et contre les pays socialistes ; actions dans lesquelles la grande bourgeoisie française est totalement impliquée, et nous organisons une lutte réelle pour la paix, avec la portée indiquée dans cet article.

Voir en ligne : Lu sur le blog histoireetsocieté de Danielle Bleitrach

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