Capitulation nucléaire ou capitulation capitaliste ?

, par  pam , popularité : 3%

Dans un communiqué ravageur (la capitulation nucléaire), la "France insoumise" dénonce la décision de Nicolas Hulot de reporter l’objectif de la réduction de la part du nucléaire...

Nicolas Hulot dit qu’il est impossible de réduire la part du nucléaire tout en réduisant la part des énergies fossiles en France... il est vrai qu’un Français émet en 2016 deux fois moins de gaz à effet de serre qu’un... allemand, et qu’il est donc plus difficile de réduire les émissions en France... il reste 4 centrales électriques au charbon à fermer... et si on ferme aussi des centrales nucléaires, que se passe-t-il ?

Petit commentaire de texte du communiqué de la FI...

Le gouvernement avance que cette difficulté de réduire la part du nucléaire à 50% en 2025 était connu sans avoir été révélé. Alors pourquoi Macron l’a-t-il annoncé dans son programme présidentiel ?

Et bien pour la même raison que Mélenchon s’est brutalement transformé en anti-nucléaire intégriste pour absorber l’électorat écolo après avoir digéré le plus gros de l’électorat communiste... une raison toute électorale... ! Les couches moyennes et moyennes supérieures que visait Macron ont besoin d’une bonne conscience verte pour se sentir à l’aise dans leur niveau de vie... La loi pour la transition énergétique leur était destiné... eux qui sont tout content de gagner des sous photovoltaiques avec le toit de leur résidence secondaire... payée par tous les usagers sur leurs factures... La guerre idéologique menée contre toute idée de progrès cache derrière le refus du progrès technique, le refus du progrès social. Le capital applaudit des deux mains les promoteurs de la frugalité... Pensez, si les pauvres étaient en plus contents de ne pas consommer ! Un peu à l’indoue, soyez zen et pensez à votre karma pendant qu’on fait nos affaires !

Le gouvernement considère que cette baisse du nucléaire à 50% en 2025 ne peut se faire sans hausse des émissions de CO2 du fait du maintien voire de la relance de centrales thermiques (charbon et gaz), car les énergies renouvelables ne pourraient pas suppléer. Cette équivalence est fausse si on agit sur une baisse de la consommation.

Si on relit bien, il est donc vrai que cette baisse est impossible si on ne baisse pas (fortement) la consommation... mais au fait, de combien ? le scénario negawatt [1], l’annonce sans ambiguïté... Si on ne veut pas du transport électrique, il faut diviser par 2 la mobilité globale des Français... [2] C’est la proposition de la FI ?

Mais regardons les chiffres de l’Allemagne, championne de la réduction rapide du nucléaire et d’un développement accéléré des renouvelables. Voilà les chiffres des sources de la production électrique allemande, de 1990 à 2015... [3]

production 1995 2000 2005 2010 2015
autre 26,8 28,5 36,1 35,5 33,3
gaz 41,1 49,2 72,7 89,3 78,5
lignite 142,6 148,3 154,1 145,9 150
charbon 147,1 143,1 134,1 117 110
nucléaire 154,1 169,6 163 140,6 84,9
ENR 25,1 37,9 62,5 104,2 191,4
total 536,8 576,6 622,5 632,5 648,1

Donc, la part du nucléaire a bien été réduite très fortement, de 28,7% à 13,1%, la part des ENR a explosé de 4,68% à 29,5%... mais il n’y a eu aucune réduction des consommations de fossiles, et donc aucune réduction des émissions de gaz à effet de serre... 330,8TWh en 1995, 338,5 en 2015 ! légère augmentation même...

Mais alors, pourquoi l’augmentation énorme de la production renouvelable ne provoque pas de réduction des fossiles...? Bien sûr d’abord parce que l’Allemagne a décidé la sortie du nucléaire ! Et aussi pour une raison que tout le monde connait s’il s’en donne la peine... l’intermittence naturelle de toutes les énergies renouvelables, l’absence de solution de stockage à grande échelle, et... les choix politiques de priorité absolue au renouvelable sur le réseau...

Quand il y a du vent ou du soleil, les ENR produisent en Allemagne beaucoup favorisant les ventes de l’Allemagne à ses voisins, car les ENR sont prioritaires sur tout le reste... Elles ne produisent pas quand la consommation le demande, comme les autres énergies, mais on consomme toujours ce qu’elles produisent et les autres s’adaptent... Mais quand il n’y a ni vent ni soleil... il faut des énergies suffisamment souple pour démarrer dès la fin du vent ou du soleil, et ce sont les fossiles qui répondent alors...

Les deux graphiques ci-dessous sont illustratifs... En été, il y a du soleil (!), mais peu de vent, en hiver, il y a peu de soleil (!) et du vent par moment uniquement...

La conséquence est par exemple que l’Allemagne a investi pour 6GW de capacités ENR nouvelles en 2016, pour une production... en baisse !
- Eolien terrestre : + 4.3 GW pour une baisse de - 4100 GWh de production
- Solaire : + 1 gigawatt pour une baisse de - 400 GWh de production
- Biomasse : + 40 MW installés pour une augmentation de production de 1000 MWh... (bien faible puisque cette production correspond à... 25h de fonctionnement)

La traduction économique est évidente... les prix augmentent, et notamment parce que les taxes qui financent les ENR (l’équivalent de la CSPE en France) continuent à croitre... (+ 0,53c/KWh en 2016...). Ces taxes qui représentaient 33% du coût total de l’électricité allemande en 2011 en représentent désormais 70% !

L’équilibre de la transition énergétique à l’allemande repose donc sur
- l’augmentation sans cesse des financements publics des ENR... pas de "parité de marché" à l’horizon...
- la revente garantie des surplus momentané d’ENR aux pays voisins... favorisant les spéculations et la financiarisation du marché de l’électricité [4]
- l’abandon de toute ambition de réduction massive des émissions de gaz à effet de serre de la production électrique...

On peut répéter des slogans à l’infini, seule la vérité est révolutionnaire, et la vérité est que dans l’état actuel des technologies, les ENR ne peuvent contribuer à la réduction des émissions carbonées.... Nicolas Hulot ne fait que se contorsionner devant une réalité qui s’impose à son discours... Macron s’en fout, de toute façon, il sait lui qu’il est là pour mentir !

La conclusion politique de la FI est comme toujours toute dans l’analyse fine du réel... (!)

La France Insoumise prend acte du partenariat définitif du gouvernement avec tous les lobbies, derrière une communication de façade qui s’en va donner des leçons au monde entier.

On pourrait polémiquer en leur demandant qui prend acte du partenariat des anti-nucléaires avec les lobbies des énergies renouvelables... en premier lieu les mastodontes de l’énergie (dont EDF ou TOTAL) qui investissent par milliards grassement subventionnés par la CSPE, donc par les factures d’électricité de tous, y compris les plus pauvres, pour produire une électricité de plus en plus chère, malgré son subventionnement, et ne réduire en rien les émissions de gaz à effet de serre ?

Mais l’important, c’est que quand on cache le système derrière la technique, on se retrouve complice du système, même à son corps défendant... D’ailleurs, que dit la FI sur la fin des tarifs réglementés de l’électricité que les lobbies privés de l’électricité, y compris ENR, nous imposent ?

Ce ne sont pas les techniques qu’il faut changer, ce sont les systèmes économiques et politiques ! Ce n’est pas du nucléaire qu’il faut sortir, c’est du capitalisme !

[1Porté à l’origine par quelques écologistes et devenu la référence de la FI, et d’ailleurs aussi de l’état et son agence ADEME, devenu le thinktank public des écologistes.

[2Se déplacer deux fois moins... un jour sur deux à la maison ? chic ! Mais on travaille deux fois moins ?!

[4Ils sont même arrivés à inventer des prix négatifs !

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    Un film
    Sur une musique de Hans Eisler, le requiem Lenin, écrit sur commande du PCUS pour le 20ème anniversaire de la mort de Illytch, mais jamais joué en URSS... avec un texte de Bertold Brecht, et des images d’hier et aujourd’hui de ces luttes de classes qui font l’histoire encore et toujours...

  • (2009) Déclaration de Malakoff

    Le 21 mars 2009, 155 militants, de 29 départements réunis à Malakoff signataires du texte alternatif du 34ème congrès « Faire vivre et renforcer le PCF, une exigence de notre temps ». lire la déclaration complète et les signataires

  • (2011) Communistes de cœur, de raison et de combat !

    La déclaration complète

    Les résultats de la consultation des 16, 17 et 18 juin sont maintenant connus. Les enjeux sont importants et il nous faut donc les examiner pour en tirer les enseignements qui nous seront utiles pour l’avenir.

    Un peu plus d’un tiers des adhérents a participé à cette consultation, soit une participation en hausse par rapport aux précédents votes, dans un contexte de baisse des cotisants.
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  • (2016) 37eme congrès du PCF

    Texte nr 3, Unir les communistes, le défi renouvelé du PCF et son résumé.

    Signé par 626 communistes de 66 départements, dont 15 départements avec plus de 10 signataires, présenté au 37eme congrès du PCF comme base de discussion. Il a obtenu 3.755 voix à la consultation interne pour le choix de la base commune (sur 24.376 exprimés).