« Décroissance ou socialisme ? » Une sans doute trop longue réflexion.... sur la problématique de la décroissance... et bien au delà !

, par  Claude Roussie

Le 25 juillet 2011 à 21:30, par Claude Roussie En réponse à : « Décroissance ou socialisme ? » Une sans doute trop longue réflexion.... sur la problématique de la décroissance... et bien au delà !

A propos d’un article de la revue « la Pensée » (n° de 363 juillet/septembre 2010)

"Agitant le spectre malthusien, on nous dit aussi que les ressources seraient limitées et assimilables à un stock fixé une fois pour toutes et condamné à l’épuisement, oubliant rapidement que le principal créateur de ces ressources a toujours été l’homme et que le pétrole serait peu de chose sans le moteur à explosion, et l’uranium rien sans la maîtrise de l’atome... Le véritable défi est de savoir si le stock des ressources se développera aussi vite que les besoins de l’homme et si son exploitation restera compatible avec la survie d’écosystèmes viables permettant le maintien de l’activité humaine sur la planète."
MICHEL ROGALSKI (Edito de « Recherche Internationales » n° 88 Octobre décembre 2010)

-  Apparemment, Rogalski rassemble sous le même concept de ressources, celles qui viennent de la nature et celles qui se présentent sous forme de valeur. Etonnant de sa part. cela me rappelle l’échange que j’avais eu avec il y a quelque temps et dont je reproduis une partie plus bas.
-  Si les écologistes posent en général le problème du stock des ressources naturelles dans des termes proches de ceux de Rogalski, il me semble que la vraie question doit être posée en termes de classes. C’est un vilain mot, mais je m’explique. Qu’en est-il de « l’activité humaine sur la planète ».
o Pour le capital le but ultime de l’activité de toute entreprise est de « maximiser le profit ». Il suffit pour s’en convaincre d’ouvrir un cours de comptabilité. Ceux que j’ai eus entre les mains l’annonçaient explicitement dans leur introduction.
o Pour les salariés, le but de leur activité est de nourrir, habiller, abriter, distraire, éduquer, soigner leur famille.

Dans le premier cas la fuite en avant dans l’accumulation conduit aux limites de la nature. Marx l’avait déjà montré comme on peut le lire plus bas. La question "croissance décroissance" mérite plus qu’un rejet pur et simple de ceux qui se la posent.

Dans le second cas la préservation de la nature fait partie des besoins même du monde salarial. On objectera que les capitalistes, en tant que personnes ont également besoin d’un environnement naturel de qualité, mais dans leur vision « ossifiée par le profit », ils espèrent préserver un espace suffisant à leurs propres besoins.


Problème de fond impose un débat de fond :
" D’une part, la richesse est en effet produite par les salariés et plus particulièrement les ouvriers qui créent de la plus-value. Le vol d’une partie de cette plus value par les propriétaires des moyens de production et d’échange (et plus politiquement, le contrôle de la récupération et de l’usage de cette plus-value) leur permet d’amasser des capitaux. Dont ils font l’usage qui leur convient." m’écrivait un camarade.

1- Il n’est pas juste d’affirmer que la richesse est « produite par les salariés ». En fait la richesse provient de deux sources : la nature et le travail des hommes, qu’ils soient salariés qu’ils soient propriétaires de leurs moyens de production.
Ce que la nature ne crée pas, c’est la valeur dans sa forme abstraite c’est à dire sous sa forme valeur d’échange. La richesse comme valeur d’usage ne provient pas seulement du travail humain. « L’homme… ne fait que changer la forme des matières. Bien plus, dans cette œuvre de simple transformation, il est encore constamment soutenu par des forces naturelles. Le travail n’est donc pas la seule source des valeurs d’usage qu’il produit. Il est le père, et la terre, la mère, comme dit William Petty ». (Capital, livre I, tome 1, p. 58)

2- Sans doute est-ce pour avoir perdu de vue cette double origine des richesses que le mouvement ouvrier en général, et les Partis Communistes, pendant toute une longue période, n’ont pas su prendre en compte la nécessité d’une gestion économe de la nature. Il faut reconnaître aux mouvements écologiques d’avoir compris plus tôt que le mouvement ouvrier toute l’importance de la préservation de la nature.

3- La faiblesse de la plupart des écologistes, est de ne pas voir, ou ne pas vouloir voir, la seconde source des richesses, celle qui est seule créatrice de valeur. Analyser comment se forme celle-ci conduit à critiquer au fond la société capitaliste et à comprendre pourquoi elle doit être dépassée.

4- On ne peut pas reprocher à Marx d’avoir été aveugle aux effets ravageurs que pourrait revêtir l’activité économique de l’humanité. Il fallait quelque clairvoyance pour le faire au 19ème siècle, alors que le positivisme triomphant faisait rêver de progrès indéfini avec ceux continus de la connaissance scientifique. « … chaque progrès de l’agriculture capitaliste est un progrès non seulement dans l’art d’exploiter le travailleur, mais encore dans l’art de dépouiller le sol ; chaque progrès dans l’art d’accroître la fertilité pour un temps, un progrès dans la ruine de ses sources durables de fertilité. Plus un pays, les Etats-Unis du Nord de l’Amérique, par exemple, se développe sur la base de la grande industrie, plus ce procès de destruction s’accomplit rapidement. La production capitaliste ne développe donc la technique et la combinaison du procès de production sociale qu’en épuisant en même temps, les deux sources d’où jaillit toute richesse. » (Capital, livre I, tome 2, p. 182). Marx insiste plus loin sur la responsabilité dont devra faire preuve chaque génération dans le cadre d’une société non capitaliste : «  Du point de vue d’une organisation économique supérieure de la société, le droit de propriété de certains individus sur des parties du globe paraitra tout aussi absurde que le droit de propriété d’un individu sur son prochain. Une société entière, une nation et même toutes les sociétés contemporaines réunies ne sont pas propriétaires de la terre. Elles n’en sont que les possesseurs, elle n’en ont que la jouissance et doivent la léguer aux générations futures après l’avoir améliorée en bonis patres familias  ».(Capital, livre III, tome 3, p. 159).

5- Les capitalistes de leur côté avaient parfaitement compris, qu’ils pouvaient laisser aux ouvriers la libre propriété de leur force de travail. La bourgeoisie a été, en ce sens, un facteur de libération de l’humanité. L’esclave n’était plus la propriété de son maître, ni le serf celle du hobereau. Mieux, l’ouvrier moderne est même totalement détaché de l’outil ou de la machine qu’il met en œuvre. Il n’a plus à se préoccuper de leur usure, ou du caractère obsolète qui ne manque pas de se manifester. Ces petits ennuis de gestion justifient largement pour la société, le fait que les marchandises produites par les salariés soient propriété pleine et entière de celui qui possède les outils et les machines. Dans cette société, l’ouvrier n’est pas « volé ». Pour qu’il soit volé de la plus value, encore faudrait-il qu’il en soit le propriétaire, mais la société est ainsi faite qu’il n’est en rien propriétaire des marchandises créées par le collectif de travail. De tout ce qui participe à la production, il n’est propriétaire que de sa force de travail. Et le capitalisme précisément, est la société qui l’a fait propriétaire de sa force de travail qui, dans les sociétés précédentes, était propriété d’un autre…

6- Ce que les capitalistes avaient également compris, c’est que pour s’approprier les richesses, ils devaient s’assurer la propriété de leur source « naturelle ». Et dans le même mouvement qui rendait sa « liberté » au monde ouvrier (en donnant à ce mot un sens dynamique), les capitalistes mettaient fin aux formes de propriété collective des sols, qu’il s’agisse du sol ou du sous-sol…

7- Enfin, je ne crois pas qu’il soit juste d’affirmer ex abrupto, que les capitalistes font « ce qu’il leur convient » de la plus value qui se crée. Ce n’est vrai que pour la part qui leur revient en tant que consommateurs, en tant que jouisseurs. Pour le reste ils ne peuvent pas faire « ce qui leur convient » sans mettre en péril leur existence même de capitalistes. Dans la concurrence acharnée qu’ils se livrent, les capitalistes doivent utiliser la majeure partie de la plus value produite pour développer leur outil de production, le perfectionner sans cesse. Lorsque la baisse tendancielle du taux de profit se fait ressentir dans la sphère de la production, il faut chercher à déconnecter toujours le profit, du profit industriel proprement dit. Il s’agit là d’un véritable travail d’une grande complexité, générateur sans aucun doute de stress, de fatigue, d’angoisses. Tant et si bien que les capitalistes délèguent cette charge à du personnel qu’ils paient grassement en les intéressant à la survie du système par tous les artifices que l’on peut constater aujourd’hui. Plus les capitaux se concentrent, plus il est difficile aux capitalistes productifs de maintenir leur propre taux de profit, plus le capitalisme évolue vers un capitalisme financier, au caractère de plus en plus spéculatif, et parasitaire.

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