Pour en finir avec la question Mélenchon

, par  Dautrey

Le 13 février 2011 à 22:20, par Dautrey En réponse à : Pour en finir avec la question Mélenchon

Depuis plusieurs mois maintenant, certains militants communistes ont ouvert une tir de barrage nourri contre Jean-Luc Mélenchon. Dans leurs tracts, sur leurs blogs et forum, pas une parution où l’on ne rappelle toutes les turpitudes passées du militant socialiste d’il y a peu. On a le sentiment, vraiment, que le patron du parti de Gauche est devenu l’ennemi de classe numéro 1. Certains, même parmi des élus communistes de haut rang, n’hésite pas à dénoncer en lui une taupe du PS, en service commandé pour capter ce qu’il reste de l’électorat communiste.

C’est à mon sens une faute politique majeure.

Jean-Luc Mélenchon est un militant social-démocrate, issu de la mouvance trotskiste des années soixante-dix. Il a été mitterrandien et Maastrichtien. Une vrai caricature de militant du PS. C’est par ailleurs un militant laïque irréprochable. C’est un tribun et un débatteur de talent. Inutile de s’appesantir sur son CV.

Tous ceux qui s’intéressent à la politique en France depuis suffisamment longtemps ont constaté que la longue dérive droitière du PS depuis 30 ans n’avait pas suivi le cours d’un long fleuve tranquille. Que de tiraillement, congrès après congrès, que d’appétits personnels et de coups de Jarnac entre « camarades », que de tensions entre les tendances, que de magouilles mille fois dénoncées dans les votes internes... Le PS est devenu un gigantesque panier de crabes.

Au moment de se positionner sur le referendum de 2005 sur le traité constitutionnel européen, le grand écart était tel que ça a commencé à craquer à l’entrejambe. Au congrès qui a suivi, une partie de ce qu’on appelait « l’aile gauche » du PS a quitté le navire derrière Mélenchon pour fonder le parti de Gauche. A l’évidence, ils ne sont pas devenus communistes. Ils ne le prétendent d’ailleurs pas. Aller chercher là-dedans une manœuvre socialiste concertée pour garder une base à gauche, cela tient plus de la « théorie du complot » que de l’analyse politique. D’ailleurs, de la même façon que certains socialistes ont quitté leur parti pour rester, peu ou prou « à gauche », qui peut dire que le cas ne se présentera pas que des militants communistes, bientôt, quitteront leur parti eux aussi pour rester -justement- communistes ? Faudra-t-il y voir une opération de la direction du PCF pour garder deux fers au feu ? C’est absurde !

Dans leur lutte pour la conquête du pouvoir, à partir du rapport de force tel qu’il est (et non pas tel qu’on le voudrait), les communistes devront aller au combat politique avec d’autres qui ne seront pas des communistes. Mais avec lesquels ils partageront des idées, des valeurs et des objectifs. Jean-Luc Mélenchon sera sans doute de ceux-là.

Car non, Mélenchon n’est pas l’ennemi des communistes. L’ennemi des communistes, c’est la bourgeoisie capitaliste !
Et si Jean-Luc Mélenchon est candidat à l’élection présidentielle, c’est son problème et celui du parti de gauche. Cela ne regarde pas les communistes. Car les communistes veulent un candidat communiste.

Partout dans le monde, de l’Amérique latine à l’Afrique du Nord, les peuples se lèvent contre la misère et pour la liberté. La stupeur née il y a 20 ans de l’effondrement du soviétisme s’efface, tant les coups portés par le capital sont violents. L’alternative socialiste attire à nouveau une part grandissante de l’humanité. L’idée que l’histoire était finie et que le « marché » était le seul système économique viable (fut-ce au prix de quelques régulations) est battue en brèche.

Voilà pourquoi il faut un candidat communiste à l’élection présidentielle. Pas par esprit de boutique. Mais parce l’expression marxiste est absolument indispensable, pour apporter dans le débat majeur de la vie politique française les éclairages de classe sans lesquels on ne saisit pas dans sa globalité la logique de la crise économique, et des sacrifices que le FMI, la commission européenne ou les gouvernements de droite et de gôche imposent aux peuples.

Seul un candidat communiste dira qu’il n’y pas d’aménagement possible du capitalisme. Il montrera que la construction d’une société socialiste est la seule issue. Et surtout, lui seul portera des propositions concrètes et immédiatement applicables pour faire reculer la main-mise des puissances financières sur le destin et la vie quotidienne des nos concitoyens.

Voilà. Il faut un candidat communiste. Jean-Luc Mélenchon est un homme de gauche qui mérite le respect. Mais il ne peut pas être le candidat communiste... parce qu’il n’est pas communiste.

Cette question du rapport à Mélenchon ne me paraît pas anodine. Car dans le combat politique d’aujourd’hui, les communistes ne doivent pas apparaître comme les diviseurs de la gauche. Il doivent se présenter pour ce qu’ils sont : porteurs d’une option politique originale.

Nul besoin de candidat « unitaire » au premier tour d’une élection présidentielle. On n’y participe pas pour aligner des scores mais pour défendre des choix politiques. Rien n’empêche que Mélenchon défende les siens et les communistes les leurs propres. Sans être « ennemis »...

Je comprends bien que la perspective que la direction du PCF se range derrière le patron du parti de Gauche devenu candidat du « Front de Gauche » hérisse de nombreux communistes. Mais taper sur Mélenchon à bras raccourci ne règle pas le problème ! Serait-t-il bien plus acceptable qu’un communiste soit le candidat du Front de Gauche ? Quelle sera la plateforme politique sur laquelle il s’appuiera ? J’ai le souvenir des dernières élections européennes où les propositions mises en lignes sur le site internet du Front Gauche n’étaient qu’un copier-coller des propositions du parti de Gauche !

Je le dis : même si le candidat du Front de Gauche était issu du parti communiste, cela signifierait à court ou moyen terme la disparition du PCF et sa fusion dans un organisation sans doute de gauche, mais qui ne serait plus une arme de lutte des classes.

Mais cela pose en conséquence une question politique majeure : si la direction du PCF engage le parti, en juin, derrière un candidat qui ne sera pas un candidat communiste, que feront les militants opposés à ce choix ? Se donneront-ils les moyens politiques de maintenir une candidature communiste autonome ? Cela pourrait aller, ne nous le cachons pas, jusqu’à la création d’une nouvelle organisation des communistes français.

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