Voter, ou faire de la politique ? - commentaires

Voter, ou faire de la politique ?

OK, les rêves sont dissipés, parlons des choses sérieuses maintenant.

Affirmer que je n'ai rien d'autre à proposer qu'une tactique électorale c'est vite dit.
D'abord la tactique électorale ne se limite pas aux élections présidentielles. Le cas particulier du choix mineur d'un président, qui sera dans tous les cas un représentant de la classe capitaliste, est un aspect tout à fait secondaire de notre action, y compris sur le terrain électoral.

La France n'est pas le Chili. La révolution démocratique et anti impérialiste n'est pas à l'ordre du jour dans notre pays. Au Chili et dans tous les pays émergents la bourgeoisie nationale peut encore jouer un rôle révolutionnaire. En France non.
La France est un vieux pays impérialiste où la contradiction principale entre la bourgeoisie et le prolétariat se résout par la révolution prolétarienne. Ce sont deux situations différentes et il est faux de mélanger les deux.

Le but de ces élections pour la classe dominante était de résoudre le conflit gauche-droite qui entrave la mise en place des réformes anti-sociales, établir l'Union Sacrée et remettre la France sur les rails du monde multipolaire. C'est le cahier des charges de Macron, que Gattaz avait adoubé dès l'année dernière pendant le conflit sur la loi travail, si on se souvient bien. Peu importe le personnage même si c'est un président par intérim, de toutes façon c'est l'homme de paille du grand capital.
L'Union Sacrée, initiée lors de l'attentat terroriste de cette semaine, est déclarée dès l'entre deux tours par le rassemblement républicain autour de lui, avec le FN comme repoussoir.
Au passage il est lamentable que Pierre Laurent tombe une fois de plus dans le panneau.

Revenons à nos moutons.
Si quelque chose nous a plombés des décennies durant ce n'est pas l'abstentionnisme, c'est que le pcf se soit déconsidéré à ce point en soutenant mordicus la "gauche" anticommuniste dont Mélenchon n'est qu'un résidu. Et qui est le pendu dans cette opération ?
Il serait temps de reconsidérer les objectifs et la manière de façon indépendante des partis bourgeois, enfin.
Le compromis social n'a plus cours, c'est la guerre de classe maintenant. Il faut reprendre l'identité communiste. Définir le programme et les mesures immédiates d'une société socialiste, remettre le socialisme à l'honneur au lieu de censurer ce mot comme une maladie honteuse. C'est autour d'un tel programme que l'unité peut se réaliser et non derrière la gauche radicale et ses vieilles lunes.

Voter, ou faire de la politique ?

La vraie question, l'unique, au-delà des trucs de vierge effarouchée, du genre Mélenchon est un soc-dem (et c'est tout à fait vrai) est de regarder ce qui est utile pour les luttes.
Mélenchon a un programme bien en-deçà de celui de 2012, mais il rassemble, y compris de vrais progressistes, y compris des révolutionnaires.
Je n'ai pas encore voté et ne sais pas qui je vais choisir de lui et Asselineau ou du vote nul.
Le problème, c'est que, depuis 15 jours les sondages ont "monté" Mélenchon. Je ne crois absolument pas à l'honnêteté ni à la vérité des sondages ; je me pose donc la question : pourquoi ?
Et j'y ajouterais ceci : sommes nous certains que Mélenchon élu n'éteindrait pas le mouvement social comme Mitterrand en 81 ? Et que Fillon élu ne le déclencherait pas ?
J'avoue ne pas avoir de réponse ferme. Est-ce que un Tsipras bis aidera la Révolution ?

Voter, ou faire de la politique ?

Faire de la politique et voter.

J'ai lu avec beaucoup d'attention et d'intérêt la contribution d'Alain Badiou « voter ou faire de la politique ». J'en partage bien des points, et notamment son appel à "rétablir dans ses droits la vision communiste de l'avenir, partout. Que des militants convaincus aillent en discuter le principe dans toutes les situations populaires du monde, et qu'alors, comme le proposait Mao », (ou sans faire nécessairement référence au grand timonier) « nous rendions au peuple, dans sa précision, ce qu'il nous donne dans la confusion . » C'est l'objectif que s'est fixé depuis sa création l'Association Nationale des Communistes, pour un développement sans précédent du mouvement social. Tout en se gardant bien de prendre position pour tel ou tel vote, telle ou telle candidature, c'est ce que l'ANC rappelle dans un texte récent, en présentant quelques principes qui peuvent guider nos choix, afin d'être 'utiles à notre camp'. Dans une contribution un peu antérieure, que l'on peut aussi trouver sur le site, Francis Arzalier insistait de son côté sur le lien étroit entre suffrage universel et lutte de classe. Je vous/nous y renvoie (1).
Pour sa part, au terme d'une assez longue analyse que je partage au moins en partie, Alain Badiou conclut : « Alors, voter ? Soyons, sur le fond, indifférent à cette demande de l'Etat et de ses organisations. On peut voter pour le moins pire, on peut ne pas voter par principe : c'est “l'indifférence” qui est en tout cas la bonne subjectivité. Car nous devrions désormais tous le savoir : voter, ce n'est jamais que renforcer, contre une autre, une des orientations conservatrices du système existant. Ainsi, ramené à son contenu réel, le vote est une cérémonie qui dépolitise les peuples ».
La part de vérité que comprend cette dernière affirmation ne me conduit pas pour autant à jeter une fois de plus l'enfant avec l'eau sale du bain. Me refusant à confondre la position d'Alain Badiou avec la consigne de non-vote d'anticommunistes patentés, et en me gardant autant que possible de l'outrecuidance qui consisterait à jouer un esprit d'autorité contre un autre, je ne résiste pas à faire part à tous d'une lecture toute récente, qui jette un regard sans complaisance sur 'l'indifférence'.
Il y a un peu plus de 100 ans, en février 1917, c'est à dire dans un période plus noire encore sans doute que celle que nous traversons aujourd'hui, Antonio Gramsci écrivait : « Je crois (…) que vivre veut dire être partisan... Qui vit vraiment ne peut pas ne pas être citoyen, ni prendre parti. L'indifférence est aboulie, est parasitisme, est lâcheté, ce n'est pas la vie. C'est pourquoi je hais les indifférents. L'indifférence est le poids mort de l'histoire. C'est le boulet de plomb pour le novateur, c'est la matière inerte en laquelle se noient les enthousiasmes les plus splendides, c'est le marais qui entoure la vieille ville et qui la défend mieux que les murs les plus solides, mieux que les poitrines de ses guerriers, parce qu'il engloutit les assaillants dans ses gouffres limoneux, et les décime et les décourage, et quelques fois les fait renoncer à leur entreprise héroïque... L'indifférence agit puissamment dans l'histoire. Elle agit passivement, mais elle agit .. » Les trois pages qui suivent (2) mériteraient d'être citées intégralement.
Chacun est, bien entendu, libre de son vote. Mais voyons ensemble ce qui pourrait être, en effet, le plus « utile à notre camp ».

Pierre Lenormand
Collectif Communiste Polex
22 avril 2017

(1) Histoire française du suffrage universel, également sur le site « www. ancommunistes.org »
(2) On peut trouver ce court texte de Gramsci « les indifférents » aux pages 56 et 59 de « la cité future » petit livre qui vient d'être publié pour la première fois en français par les Editions critiques, avec une longue préface d'André Tosel. Dans le même esprit d'autres passages pourraient être convoqués, montrant l'importance pour le mouvement social de ce qui se passe dans les têtes...

Voter, ou faire de la politique ?

Xuan qui na rien d'autre à proposer que la voie funeste du "Non aux élections" qui a plombé depuis 50 ans les militants et les groupes qui s'en sont adonnés, raisonne en abstrait et nous sert ....des principes généraux.
Mélenchon ne serait pas ce qui convient...La belle découverte !
Si on votait pour M. pour adhérer à son programme social démocrate ou à sa douteuse personne on commettrait une erreur politique évident.
Mais si on le fait pour utiliser sa popularité et préparer les luttes à venir, c'est tout autre chose.
Il faut réfléchir à l'appel des camarades d'autres pays, comme les artistes US qui ont appelé à ne pas commettre l'erreur d'une élection sans option 'de gauche'.
Le tremblement politique national et mondial qui provoquerait l'arrivée de Mélenchon au deuxième tour, l'impulsion que cela donnerait aux luttes et à la confiance des masses partout, rappellent à un vieux chilien comme moi les années Allende où, là bas aussi, un vieux sénateur socialiste de droite s'est transformé, par la poussé d'en bas, en l'expression des masses qui luttaient pour bien plus, pour le socialisme.
La politique n'est pas de se mettre de côté et pointer du doigt les défauts du mouvement réel de la classe ouvrière, mais d'en faire partie en étant son aile la plus avancée. De "soutenir le candidat social démocrate des masses comme la corde soutient le pendu", d'y être pour faire avancer l'ensemble du mouvement, pour construire ou reconstruire un vrai parti de masses avec comme objectif la fin du capitalisme.
Mais Xuan, blanchi sous le harnais de bonnes intentions théoriques éloignées du mouvement réel des travailleurs, risque de passer tout sa vie dans l'enfer gauchiste, aussi stérile que absurde.

Voter, ou faire de la politique ?

Sur Mélenchon, la « lisière précaire entre vieux socialisme en ruine et communisme fantomatique » est une définition floue, à se demander qui est visé d'ailleurs.
Mélenchon est un mitterrandien et on ne devrait pas remettre le couvert quel qu'en soit le prétexte.
Aujourd'hui ce ne sont pas les communistes qui rendent au peuple, dans la précision, « ce qu'il nous donne dans la confusion » mais ce serait plutôt l'inverse lorsque le peuple se défie des élections elles-mêmes.
Tandis que dans la confusion, le pcf a perdu toute initiative et doit céder au chantage du soutien inconditionnel, pour avoir l'autorisation de présenter ses candidats aux strapontins parlementaires. Tu parles d'une « insoumission » !

C'est vrai que la confusion est générale : les amis de Fillon ont déjà avalé pas mal de couleuvres et maintenant 'Sens commun' les pousse chez Macron. Et chez les socialos, Cambadélis soutient Hamon à coups de pieds au cul.

Beaucoup de bruit pour des élections au forceps, destinées à rafistoler avec les millions du Medef la division gauche-droite qui a plombé toutes les réformes antisociales, reconstituer l'Union Sacrée, et surtout adapter la position de l'impérialisme français au monde multipolaire qui a émergé l'an dernier.
Il n'est pas gagné que Macron va résoudre ces contradictions. Mais même un âne serait "élu" envers et contre tous s'il peut suivre le cap fixé par les monopoles industriels, commerciaux et financiers. Dans ce genre de course, c'est le vent qui décide, pas le barreur.

« rétablir dans ses droits la vision communiste de l'avenir », alors commençons par définir cette vision communiste : pour faire la révolution il faut un parti révolutionnaire.