Catalogne : un test de résistance des matériaux

, par  Gilbert Remond , popularité : 1%

La situation en catalogne est préoccupante mais le sont aussi tout autant, les prises de positions qu’elle provoque ici et là. En gros deux tendances se dégagent qui sont les effet avers et envers d’une même médaille. Je parle de cette instance que promènent avec ostentation les clercs spécialisés en embrouilles de masses pour masquer les coups de force que leurs maîtres imposent : coté face tu perds coté pile aussi . Partisans de la nation souveraine rejoignent ceux de l’Europe unie dans un grand déni fait sur le dos des peuples et de leurs droits démocratiques, car c’est bien de cette question qu’il est au fond question dans cette affaire, celle des peuples a disposer d’eux même, tant dans le registre de la souveraineté géographique que dans celui qui leur donne la possibilité d’intervenir dans les affaires qui les concernent.

Dans un article "tester la résistance des matériaux" , Gabriel Jaraba développe une idée qui mérite notre attention quand il écrit : « la crise catalane n’est pas a y bien regarder , ce que nous croyons ». je lui laisse la responsabilité des propos qu’il tient sur la Chine mais pour l’essentiel son article donne une analyse de la situation qui me semble juste.

L’Europe ; loin de vouloir favoriser une régionalisation des états nations cherche au contraire à en tester la solidité leur donnant la possibilité d’établir des pouvoirs fort . En France le terrorisme permet l’état d’exceptionpermanent. En Espagne une autre forme de « terrorisme » celui des dissidences culturelles et politiques lui donne l’occasion de reprendre en main ce que la fin du franquisme l’avait obligé de concéder en apparences démocratiques. Le PCE lui aussi dénonce un piège et appelle a l’union des travailleurs contre l’état espagnol. Ce qui est sur c’est que seul, le socialisme pourrait permettre le dépassement des contradictions qui travaillent la société espagnole .

Le franquisme fût un temps la réponse apporté par les milieux conservateurs à la monté du mouvement populaire mais arrivé à un certain point, le capital avait besoin pour son développement de ses fameuses libertés économiques données sous l’enveloppe du libéralisme. La concurrence, la guerre de tous contre tous, l’impopularité de ses politiques le conduit à nouveau à réclamer plus d’autorité dans l’application des décisions. Nous sommes face à de nouveaux dangers concernant nos libertés. L’Europe loin de vouloir casser les états en morceau plus facilement intégrables, redoute avant tout l’expression démocratique des peuples . Ces derniers depuis le référendum sur sa constitution devraient le savoir.

Ce qui est frappant dans l’affaire de la catalogne, c’est que les milieux d’affaire et de la finance, loin de se précipiter sur l’aubaine, sont pris dans un sauf qui peut qui leur fait prendre la poudre d’escampette. Ce qui est frappant a contrario de l’Écosse c’est la grande réserve des états de la zone euro vis a vis la nouvelle entitée démocratique, pour ne pas dire l’ostracisation qu’ils organisent a son égard. Enfin ce qui est frappant c’est l’unanimité médiatique contre les indépendantistes.

La catalogne n’est pas la Bretagne ni moins encore la Corse ou la Lombardie. La catalogne s’est révélée dans la lutte anti-fasciste quand tous les autres s’en sont fait les complices. Si le morcellement d’une nation n’est pas une solution sa mise sous tutelle par un pouvoir rigide et conservateur ne l’est pas d’avantage. Seule l’union des prolétariats et des peuples pourra nous sortir des crises qu’ils traversent . En attendant je vous engage a la lecture de ces éléments, d’en fournir d’autres pour nourrir le débat et de commencer d’en analyser les attendus

Gilbert Rémond

Catalogne : un test de résistance des matériaux

La crise catalane n’est pas, à bien y regarder, ce que nous croyons. Il s’agit d’une expérience à portée européenne dont la dimension stratégique semble passer inaperçue. C’est, pour le dire grossièrement, un test de résistance des matériaux. Et il s’adresse non seulement aux Catalans mais aux Espagnols et aux Européens en général. Le test consiste à vérifier dans quelle mesure la citoyenneté en général et les institutions internationales sont disposées à tolérer et à soutenir une démocratie autoritaire, non seulement en Espagne mais dans tous les pays de l’UE.

Nous sommes à l’extrémité ouest de l’Europe et pas en Turquie, donc le test ne peut pas être réalisé selon la méthode d’’Erdogan mais à la sauce Rajoy-Felipe. Le test consiste en une interprétation musclée de la constitution et des lois pour que tout acte de coupure démocratique puisse être pris pour le respect de la légalité.

En période de crise économique, de chômage et de précarité, de peur pour les retraites et autres, la preuve est pertinente : dans quelle mesure les citoyens sont-ils prêts à supporter une démocratie, non plus sous tutelle militaires, mais assumée de plein gré moyennant une bonne combinaison de conservatisme social, de nationalisme espagnol, de revendication d’autorité et de main de fer ? Dans d’autres pays on observe une montée électorale de l’ultra-droite. Ici, c’est l’expérimentation de l’ultra-droite au sein de l’exécutif, soutenue par le pouvoir judiciaire et le pouvoir législatif (Cs mais aussi PSOE).

Il est intéressant, par exemple, d’observer comment des citoyens espagnols démocrates, légitimement fiers d’être et de se sentir espagnols, s’accommodent de l’expérimentation menée sous leurs yeux et affirment d’un signe de tête que ce qui se passe est la « conséquence » d’une transgression de la loi, "Disloyalties" et "challenges". Tant et si bien qu’il n’y a pas un seul journal publié à Madrid qui soit en désaccord avec une telle approche. Le quatrième pouvoir a ainsi adhéré à cette sinistre collusion.

Les regards internationaux restent attentifs à l’expérimentation en cours, non pas parce qu’ils se sentent concernés par ce qui se passe en Catalogne mais pour vérifier le résultat de l’essai des matériaux et pouvoir agir en conséquence, comme par exemple, lorsque Macron s’apprête à appliquer à la France une réforme du travail de cheval qui peut conduire à des émeutes dans les rues.

Les choses ne sauraient être plus claires, et pourtant voilà les quadragénaires scandalisés acquiesçant d’un hochement de tête à l’ultra droite par amour de la patrie et de la constitution. Nous verrons des choses graves, non seulement en Catalogne mais dans toute l’Espagne et l’Europe.

Cet autoritarisme acceptable n’aura pas à s’imposer comme fascisme du vingtième siècle, par la propagande et la persuasion. Nous sommes entrés dans une nouvelle phase où l’argument persuasif du XXe siècle (propagande politique et publicité) a cédé la place à la manipulation et à la prise directe du pouvoir sur le citoyen. L’assentiment du citoyen n’est plus basé sur la persuasion mais sur la jonction des deux formes les plus anciennes de domination, la flatterie et la peur, l’une ou l’autre ou les deux à la fois. Le PSOE s’est montré très sensible à cette question en se positionnant sous l’aile de Rajoy parce qu’il veut être de ceux qui peuvent offrir de l’ordre à une population qui l’exige de plus en plus explicitement (aussi parce que si Rajoy organisait de nouvelles élections, il obtiendrait la majorité absolue).

L’expérience transeuropéenne de résistance des matériaux a lieu, malgré les aboiements de Trump, dans un contexte de pax américana que personne ne veut rompre. En fait, le capitalisme conduit ce test encore et encore depuis que la question du capital a été soulevée : la productivité, le profit et la prospérité peuvent-ils être obtenus sans en payer le prix de la démocratie ? Le test effectué dans les années 1930 ne portait pas sur la guerre mais sur la défaite des classes laborieuses ; comme aujourd’hui. La résolution de l’épreuve de résistance en guerre n’est ni obligatoire ni inévitable. Le système ne vise pas à consolider la logique de la domination une fois pour toutes. En ce moment, le capital financier a gagné la bataille contre le capital industriel, c’est ce qu’on a appelé la crise. Après deux guerres mondiales, ils savent déjà dans quelle mesure la guerre détruit les tissus productifs. C’est pourquoi il n’y a pas eu de troisième guerre mondiale au XXe siècle, avec et sans l’URSS.

L’extrême affaiblissement de la démocratie va de pair avec l’aspiration au solutionnisme technologique néolibéral, comme le craint Evgeni Morozov. Le capitalisme financier triomphant compte sur lui pour résoudre les dernières contradictions macrosystème. Le problème, c’est que les robots ne produisent pas de plus-value (de là la recherche sur les super-algorithmes, l’intelligence artificielle et les ordinateurs quantiques). C’est pourquoi il ne renonce pas à avoir sous la main l’autoritarisme, la dilution de la démocratie et la guerre en dernier recours. Trump est, à son niveau, aussi un test de résistance des matériaux, dans ce cas de la démocratisation aux USA et de l’ordre mondial basé sur la pax americana.

Nous vivrons et verrons des moments intéressants, selon la malédiction chinoise classique. Disons le en passant, avec une autre expérience de développement économique maximum sans démocratie, comme l’est le cas chinois sous la présidence de Xi Jinping ; ce n’est pas un hasard si cette expérience compte, parmi ses partisans les plus enthousiastes, Henry Kissinger. Si la position dubitative et timorée de l’Europe devait se poursuivre et les "Trumperies" aux Etats Unis, l’expérience chinoise pourrait s’ériger comme troisième voie réellement existante.

En réfléchissant ainsi, nous avons l’intuition que la révolution socialiste envisagée par Marx et les conditions d’exacerbation des crises capitalistes n’étaient pas prévues pour le début du XXe siècle, mais plutôt vers le milieu du XXIe siècle. J’ose l’imaginer vers 2040. Alors la question du socialisme ou de la barbarie sera d’actualité. En attendant, réfléchissez en termes d’essais de résistance des matériaux."

Gabriel Jaraba

Les communistes et le droit à l’autodétermination des nations

Un petit rappel nécessaire sur la question du droit à l’autodétermination des peuples et du droit des nations à disposer d’elles-mêmes. Dans le cadre de la proclamation de la République de Catalogne, il y a urgence de cesser de dire n’importe quoi. Laissons la parole à Karl Marx et Lénine

Les communistes et le droit à l’autodétermination des nations
Il y a un texte qui est essentiel sur cette question du droit à l’autodétermination des peuples et du droit des nations à disposer d’elles-mêmes. C’est un texte écrit en 1916 par Lénine et qui porte sur "La révolution socialiste et le droit des nations à disposer d’elles-mêmes".

Ce texte enrichit une réflexion de Karl Marx et Friedrich Engels sur la question nationale irlandaise.

Dans une lettre à Engels du 10 décembre 1869, Karl Marx écrit : "longtemps j’ai pensé qu’il était possible de renverser le régime actuel de l’Irlande grâce à la montée de la classe ouvrière anglaise (…) Or une analyse plus approfondie m’a convaincu du contraire. La classe ouvrière anglaise ne fera jamais rien tant qu’elle ne se sera pas défaite de l’Irlande. C’est en Irlande qu’il faut placer le levier. Voilà pourquoi la question irlandaise est si importante pour le mouvement social en général". (Karl Marx, Friedrich Engels, Correspondance, vol. X, Editions sociales, 1984).

La lecture du chef d’oeuvre de Friedrich Engels sur "La Situation de la classe ouvrière en Angleterre" de 1844 est d’ailleurs conseillée pour comprendre la relation entre le prolétariat anglais et irlandais en cette époque et aussi avoir une approche matérialiste (et surtout pas post-moderniste) sur la question du racisme. Mais là n’est pas la question.

Le socialisme et le droit des nations à disposer d’elles-mêmes

Pour Lénine "le socialisme victorieux doit nécessairement instaurer une démocratie intégrale et, par conséquent, non seulement instaurer une égalité totale en droits des nations, mais aussi mettre en application le droit des nations opprimées à disposer d’elles-mêmes, c’est-à-dire le droit à la libre séparation politique". Il réaffirme le rôle des partis socialistes (les partis communistes n’existaient pas encore à l’époque) à permettre l’émancipation des "nations asservies" et que toutes les "alliances libres" entre les nations ne peuvent être véritables que si la "liberté de séparation" est garantie, sous peine de "trahir" le socialisme.

Il est important de noter que Lénine souligne que la révolution socialiste ne se mène pas sur un seul front. Et que le droit des nations à disposer d’elles-mêmes n’est ni "irréalisable" ou "illusoire" à "l’époque de l’impérialisme".

C’est avec justesse que Lénine explique que "la révolution socialiste peut éclater non seulement à la suite d’une grande grève ou d’une manifestation de rue (...) ou à la faveur d’un référendum à propos de la séparation d’une nation opprimée, etc."

L’objectif, pour Lénine, du socialisme est de mettre fin au morcellement de l’Humanité et que la fusion des nations libérées du joug de l’exploitation capitaliste ne se fera que par "la libération complète des nations opprimées, c’est à dire de la liberté pour elles de se séparer."

Trois types de pays par rapport au droit des nations à disposer d’elles-mêmes

Pour Lénine une "union pacifique de nations égales en droit à l’époque de l’impérialisme, est une utopie qui trompe me peuple". Le message est ainsi clairement exposé. Le prolétariat doit "revendiquer la liberté de séparation politique pour les colonies et les nations opprimées par "sa" nation. Sinon, l’internationalisme du prolétariat demeure vide de sens et verbal".

Pire sans liberté de se séparer il ne peut y avoir une "unité complète et absolue" du prolétariat.

Ainsi Lénine va distinguer trois principaux types de pays.

1- Les pays capitalistes avancés de l’Europe occidentales et les Etats-Unis. Ces "grandes nations" qui "opprime d’autres nations dans les colonies et à l’intérieur de ses frontières".

2- Les pays de l’Est de l’Europe (Autriche-Hongrie, Balkans, Russie). Dans ces pays où existent une forte lutte nationale (et bourgeoise), le prolétariat ne peux pas passer outre ces mouvements. Si il ne défend pas le droit des nations à disposer d’elles-mêmes, il n’y aura pas de révolution socialiste.

Il y a une tache ardue pour le prolétariat, c’est de "fusionner la lutte de classe des ouvriers des nations oppressives et des ouvriers des nations opprimées."

3- Les pays semi-coloniaux (Chine, Perse, Turquie, Inde ...). Dans ces pays, les socialistes ne doivent pas seulement réclamer la liberté du pays (simple revendication du droit des nations à disposer d’elles-mêmes), "les socialistes doivent soutenir de la façon la plus résolue les éléments les plus révolutionnaires des mouvements démocratiques bourgeois de libération nationale de ces pays et aider à leur insurrection (ou, le cas échéant, à leur guerre révolutionnaire) contre les puissances impérialistes qui les oppriment".

Le piège du social-chauvinisme

Lorsque Lénine rédige cet article en 1916, nous sommes en pleine boucherie mondiale. Depuis 1914, les grandes puissances européennes et coloniales se font la guerre et des millions de personnes sont déjà mortes pour enrichir les marchants de canons.

Pour Lénine il est nécessaire "de lutter contre le chauvinisme et le nationalisme des les pays avancés". Parmi ces gens là deux catégories de de sociaux chauvins : les "opportunistes" et les "kautskistes", ces gens là "maquillent et idéalisent la guerre impérialiste, réactionnaire, en lui appliquant la notion de défense de la patrie".

Ces faux révolutionnaires "prostituent le marxisme" selon Lénine car, explicite t-il, ils perdent toute faculté de comprendre la portée théorique et l’importance tactique de Karl Marx portée dans l’analyse de la situation de l’Irlande.

Rappelons les écrits de Marx cités en début d’article : "Longtemps j’ai pensé qu’il était possible de renverser le régime actuel de l’Irlande grâce à la montée de la classe ouvrière anglaise (…) Or une analyse plus approfondie m’a convaincu du contraire. La classe ouvrière anglaise ne fera jamais rien tant qu’elle ne se sera pas défaite de l’Irlande. C’est en Irlande qu’il faut placer le levier. Voilà pourquoi la question irlandaise est si importante pour le mouvement social en général". (Karl Marx, Friedrich Engels, Correspondance, vol. X, Editions sociales, 1984).

Pour approfondir vos lectures sur cette question :

Lénine "Du droit des nations à disposer d’elles-mêmes", col les éditions du marxisme-léninisme, Editions sociales, 1978 (à lire en ligne sur le site de Gallica)

Rosa Luxembourg "La question nationale et l’autonomie", Le temps des cerises, 2001

Voir en ligne : traduction de l’auteur sur le grand soir

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    Signé par 626 communistes de 66 départements, dont 15 départements avec plus de 10 signataires, présenté au 37eme congrès du PCF comme base de discussion. Il a obtenu 3.755 voix à la consultation interne pour le choix de la base commune (sur 24.376 exprimés).