Gilles Poux, le PCF et les insoumis

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Gilles Poux, maire PCF de La Courneuve et défenseur de la candidature Mélenchon répond à une interview du journal Regards dans laquelle il dénonce les erreurs du PCF, malheureusement avec raison compte tenu de la valse électorale de Pierre Laurent, mais où il dit plus clairement que Marie-Georges Buffet, que si le communisme reste un joli mot [1], l’essentiel est dans ce nouveau souffle que porte la FI. Il se félicite de la faiblesse du vote FN dans sa ville en faisant totalement l’impasse sur le vote FN ouvrier des régions désindustrialisées, il valorise le projet de Mélenchon sans jamais évoquer le projet communiste, il propose aux communistes de prendre toute leur place dans la FI même s’il ne propose pas de faire table rase du parti, mais il propose de sortir du cadre qui nous ankylose, car pour lui, le parti gêne le rassemblement qu’il construit dans sa ville.

L’interview a fait le buzz pour une réponse instinctive à la question "s’il n’y a pas d’accord avec les insoumis,c’est la faute aux communistes", réponse directe "oui"... Mais ce n’est pas le plus intéressant de l’interview.

Cette interview a provoqué un échange sur une liste de diffusion d’un militant PG du Gard.

Pietro critique vertement Gilles Poux

si le pape est argentin c’est la faute aux communistes !
si la terre n’est pas plate c’est la faute aux communistes !
si le soleil ne se lève pas à l’ouest c’est la faute aux communistes !
si ma tante en avait .....c’est la faute aux communistes !
Mais "la FI compte aussi des ayatollahs et des fous furieux qui font de la surenchère" dit aussi Gilles Poux ouf !! c’est réconfortant de savoir que nous ne sommes pas responsables de tout

Et Sodol lui répond "mais pourquoi le PCF ne porte plus le mouvement réel ?"...

Réponse à sodol...

Permets-moi de noter ce qui me parait un idéalisme marqué et révélateur de nos désaccords...

Tu écris, en quelque sorte pour justifier l’idée que le PCF serait dépassé : "Pourquoi le PCF n’est plus en mesure de créer le mouvement réel qui abolit l’état actuel”

Mais crois-tu vraiment que Marx parlait du parti, ou même du syndicat en parlant du mouvement réel ? Quand il s’exclame "bien joué, vieille taupe", de quoi parle-t-il ?

Il faut replacer cette phrase du mouvement réel dans son contexte, l’idéologie allemande. Elle intervient en conclusion d’un exposé sur les conditions de la révolution

"Cette "aliénation", — pour que notre exposé reste intelligible aux philosophes —, ne peut naturellement être abolie qu’à deux conditions pratiques. Pour qu’elle devienne une puissance "insupportable", c’est-à-dire une puissance contre laquelle on fait la révolution, il est nécessaire qu’elle ait fait de la masse de l’humanité une masse totalement "privée de propriété", qui se trouve en même temps en contradiction avec un monde de richesse et de culture existant réellement, choses qui supposent toutes deux un grand accroissement de la force productive, c’est-à-dire un stade élevé de son développement.

C’est là que Marx dit "le communisme est le mouvement réel..." Et le texte se poursuit par le chapitre "de la production de la conscience"

A vrai dire, dans l’histoire passée, c’est aussi un fait parfaitement empirique qu’avec l’extension de l’activité, au plan de l’histoire universelle, les individus ont été de plus en plus asservis à une puissance qui leur est étrangère, — oppression qu’ils prenaient pour une tracasserie de ce qu’on appelle l’Esprit du monde, — une puissance qui est devenue de plus en plus massive et se révèle en dernière instance être le marché mondial. Mais il est tout aussi fondé empiriquement que cette puissance, si mystérieuse pour les théoriciens allemands, sera abolie par le renversement de l’état social actuel, par la révolution communiste (nous en parlerons plus tard) et par l’abolition de la propriété privée qui ne fait qu’un avec elle ; alors la libération de chaque individu en particulier se réalisera exactement dans la mesure où l’histoire se transformera complètement en histoire mondiale. D’après ce qui précède, il est clair que la véritable richesse intellectuelle de l’individu dépend entièrement de la richesse de ses rapports réels. C’est de cette seule manière que chaque individu en particulier sera délivré de ses diverses limites nationales et locales, mis en rapports pratiques avec la production du monde entier, (y compris la production intellectuelle) et mis en état d’acquérir la capacité de jouir de la production du monde entier dans tous ses domaines (création des hommes).

Bref, ce "mouvement réel", ce n’est évidemment pas celui des formes politiques, encore moins électorales qui se réclament du communisme, c’est celui des forces productives enserrées dans des rapports sociaux, formant la base de l’idéologie et qui créent les conditions de ce qui reste indispensable... la révolution (qui ne se résume évidemment pas à un grand soir !)

Le PCF tel qu’il est devenu, en gros, depuis que tu l’as quitté (!) nous a désappris que "l’histoire est toujours celle des luttes de classes" et a concentré l’énergie militante sur les élections et les institutions, jusqu’à ce parti tel qu’il est aujourd’hui, parti dirigé et animé par des élus (directement ou indirectement avec les emplois que les élus maitrisent...)

Mais ce n’est pas QUE le PCF qui a désappris... Malheureusement, c’est tout le mouvement social, et les grandes manifestations de 2009 pour défendre les retraites s’inscrivaient dans la perspective de virer Sarko, comme si la gauche allait revenir sur la casse des retraites et de la SECU !!! La CGT et le mouvement du printemps ont commencé à émietter ce masque électoraliste aux luttes de classes...

Bien sûr, il y a encore à l’inverse du "gauchisme" du spontanéisme et du basisme, type zadiste et autres, en miroir de cette "institutionnalisation", mais ce sont deux facettes de la même démission devant la question centrale de porter les luttes de classe sur le terrain politique du changement de société, de la révolution pour dire vite...

Bien sûr, le "mouvement réel" n’aboutit pas tout seul, mécaniquement, à la révolution ! il faut que la conscience de ce mouvement prenne corps dans de larges masses qui seules, font l’histoire...et c’est pour cela qu’il y faut un parti...

Mais ce qui est extraordinaire, c’est que tu restes toi-même, comme tout ce qui est sorti du mouvement refondateur, dans ce même cadre qui survalorise la bataille idéologique en passant sous silence les luttes de classes réelles et l’effort d’organisation... c’est à dire justement le "mouvement réel"... Comme beaucoup de communistes, j’ai lu tardivement le rapport au CC de 1984, et beaucoup discuté de l’analyse qu’en fait Sève dans "commencez par les fins", et il est désolant que le vrai dialecticien Sève se soit laissé entrainé dans un révisionnisme mortifère... C’est au contraire à partir de la critique de son livre que je me suis mis à relire Marx et Lénine et à orienter les efforts de reconstruction communiste, resté malheureusement émiettés et minoritaires dans le PCF.

L’interview de Gilles Poux est désolante pour moi, et révélatrice de qui dirige le parti communiste. on verra si lui comme MG Buffet et d’autres tirent les conclusions logiques... si le communisme n’est qu’un mot sympa, si on peut se passer d’un parti organisé et si la FI est ce mouvement réel...alors je ne comprends pas qu’ils hésitent encore ! Si tous ceux qui dirigent le PCF et n’y croient plus le quittait, ce serait certainement très déstabilisant, car ils sont majoritaires dans l’appareil, mais au moins, les militants pourraient reconstruire... et on vous laisserait gérer les tendances dans la FI !

Malheureusement, les communistes sont coincés entre la direction du PCF à la recherche désespérée d’une nouvelle union de la gauche et ceux qui comme Poux et Buffet veulent "dépasser" le PCF...

Mais la vieille taupe creuse toujours...

La réponse de Sodol à Pietro

Oui cher Pietro, il se peut que chez les Insoumis (ils sont près de 540.000), il y est des Ayatollahs, des fous furieux (comme il y en avait dans les comités anti-libéraux, comme il y en a chez les décroissants et chez les écolos)... Mais le programme “l’avenir en commun” qui est le programme “l’Humain d’abord” actualisé avec plus de 3000 contributions et le seul programme cohérent pour sortir de la triple crise ECOLOGIQUE/SOCIALE/DEMOCRATIQUE.

Dans leur ouvrage où ils règlent leur différend avec « L’idéologie allemande » Marx/Engels résume leur idée du communisme en ces termes :

« Le Communisme n’est pas pour nous un état qui doit être crée, un idéal d’après lequel la réalité doit se régler. Nous appelons communisme le mouvement réel qui abolit l’état actuel »

La question qu’il serait temps de se poser : “Pourquoi le PCF n’est plus en mesure de créer le mouvement réel qui abolit l’état actuel” ?

Pour ma part, cela fait plus de 30 ans que je pose la question… Comme à mon avis, une majorité du comité central se l’était posé en juin 1984… Mais la très grande majorité des communistes n’ont eu connaissance de discutions de ce comité central où le rapport du Bureau politique ne fut pas voté… Voir l’ouvrage de Michel Cardoze : “Nouveau voyage à l’intérieur du PCF” paru en 1986 et notamment le chapitre : “Naissance d’un comité central” Page 117

33 ans après, la crise de direction du PCF va-t-elle enfin prendre fin ? C’est mon souhait le plus ardant !

Dans ma réponse à Sodol, j’aurais du commenter sa dernière phrase

33 ans après, la crise de direction du PCF va-t-elle enfin prendre fin ? C’est mon souhait le plus ardant !

Nous sommes tout aussi "ardent"... , sauf que si la crise de direction dure, c’est que contrairement à l’Italie, la direction du PCF n’a jamais obtenu une majorité pour décider clairement de la rupture avec l’histoire communiste et la métamorphose du parti en "autre chose"... même si en pratique, elle est bien arrivée pour l’essentiel à une "mutation".

Sodol souhaite ardemment une direction PCF compatible "insoumis" qui pourra donc dissoudre le PCF dans la FI...

Et nous souhaitons une direction qui rompe avec le réformisme humaniste désespérant de Pierre Laurent et retrouve le fil de l’histoire communiste... et qui reconstruirera une stratégie de rassemblement populaire dans laquelle la FI pourrait d’ailleurs prendre une grande place, si elle tient le choc de l’après présidentielle et... de l’après Mélenchon.

[1un super bon mot dit Gilles Poux qui pour lui évoque la communion, l’émancipation humaine, le partage... mais jamais la lutte de classe, le socialisme, une société exploitation, le pouvoir aux travailleurs... en ce sens, la démocratie chrétienne peut reprendre sans difficulté ce "bon mot"...

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  • (2002) Lenin (requiem), texte de B. Brecht, musique de H. Eisler

    Un film
    Sur une musique de Hans Eisler, le requiem Lenin, écrit sur commande du PCUS pour le 20ème anniversaire de la mort de Illytch, mais jamais joué en URSS... avec un texte de Bertold Brecht, et des images d’hier et aujourd’hui de ces luttes de classes qui font l’histoire encore et toujours...

  • (2009) Déclaration de Malakoff

    Le 21 mars 2009, 155 militants, de 29 départements réunis à Malakoff signataires du texte alternatif du 34ème congrès « Faire vivre et renforcer le PCF, une exigence de notre temps ». lire la déclaration complète et les signataires

  • (2011) Communistes de cœur, de raison et de combat !

    La déclaration complète

    Les résultats de la consultation des 16, 17 et 18 juin sont maintenant connus. Les enjeux sont importants et il nous faut donc les examiner pour en tirer les enseignements qui nous seront utiles pour l’avenir.

    Un peu plus d’un tiers des adhérents a participé à cette consultation, soit une participation en hausse par rapport aux précédents votes, dans un contexte de baisse des cotisants.
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  • (2016) 37eme congrès du PCF

    Texte nr 3, Unir les communistes, le défi renouvelé du PCF et son résumé.

    Signé par 626 communistes de 66 départements, dont 15 départements avec plus de 10 signataires, présenté au 37eme congrès du PCF comme base de discussion. Il a obtenu 3.755 voix à la consultation interne pour le choix de la base commune (sur 24.376 exprimés).