nous sommes entrés dans des temps nouveaux et il serait temps de s’en apercevoir

, par  Danielle Bleitrach , popularité : 2%

Au moment même où partout sur la planète est célébré l’anniversaire de Fidel Castro, je crois que ce qu’il faut souligner de cette célébration est le « génie » politique de ce dirigeant qui a fait d’une île des Caraïbes un exemple d’aboutissement de l’intelligence et de l’humanisme en matière de relation internationale. « Génie » politique, Fidel Castro lui-même a souligné à quel point ce type de génie lui paraissait plus aisé et plus répandu que celui dans d’autres domaines. En fait il s’agit selon Machiavel de voir ce que personne ne voit, une cible lointaine, l’herbe en train de pousser et pourtant cette prescience ne suffit pas si elle ne s’assortit pas d’une capacité de conviction, entraîner un peuple, des peuples partout dans le monde à agir alors qu’ils ne voient pas encore ce qui se dessine dans le lointain. A ce titre nul ne comprend le « génie de Fidel Castro » si on ne le met pas en relation avec l’histoire du peuple cubain, le lent aboutissement d’une maturation de la lutte séculaire contre l’esclavage et le colonialisme. L’art de se positionner à partir de cette expérience non seulement dans les rapports de forces existant mais dans le mouvement du monde en devenir.

Face à un tel géant, on reste stupéfait devant la petitesse de certains de nos journaleux, de leurs ricanements, mais passons, comme le disait Marti il y a des gens qui ne voient que les tâches du soleil et que l’envie mesquine ronge. Le fait est que l’ensemble de la planète y compris les adversaires s’inclinent devant Fidel identifié à son peuple mais aussi à tous les opprimés, tout en cherchant partout à dénouer les conflits et à apporter la paix avec un total désintéressement.

L’exemple du génie politique de Fidel Castro est a contrario de notre monde politique français qui d’une part tente de nous faire oublier les leçons de l’histoire, les traces indélébiles laissées dans la conscience des êtres humains, les priver de cette mémoire c’est leur interdire la force de résistance et d’émancipation, les aliéner dans l’esclavage du présent. Mais dans le même temps il faut aussi refuser les ornières, avoir conscience des conditions nouvelles dans lesquelles on doit mener le combat.

Le message que nous envoie encore Fidel Castro aujourd’hui est l’appel à la paix et à faire bloc devant le danger que représente un empire américain de plus e plus erratique, de moins en moins capable de lucidité. A ce titre ce n’est pas un hasard s’il souligne l’incapacité d’Obama à demander des excuses pour ce qu’il a fait subir au peuple cubain, comme d’ailleurs au peuple japonais avec Hiroshima. Cette absence de conscience historique laisse mal augurer de sa capacité à prétendre gouverner le monde dans le sens d’une libération nécessaire et de la paix.

C’est en ce sens là que Fidel Castro en appelle à un projet nouveau qui est porté par la Russie et la Chine, celui d’endiguer l’empire américain par le respect mutuel des souverainetés et la négociation difficile sur les avantages mutuels. Sa référence à la Chine et à la Russie ne doit pas nous faire illusion, nous ne sommes pas dans le temps de l’URSS ou celui d’une Chine en proie à la Révolution culturelle, mais nous sommes dans un temps très dangereux où existe la potentialité de la destruction de l’humanité.

Aujourd’hui dans ce blog, nous avons tenté de vous présenter deux articles, l’un témoigne de la manière dont les Russes divisés sur l’analyse de leur propre expérience révolutionnaire et de leur avenir sont en revanche quasi unanimes à respecter ce qui a permis à Cuba et à la Chine de résister à la corruption et aux insuffisances de leur propre classe dirigeante. On a envie de leur dire que rien n’est joué et que la grande question de ce qu’on pourrait appeler « le naturalisme » du capitalisme, son art de s’imposer à l’humanité formé depuis des millénaires à la concurrence et à la propriété privée, aux leurres de la consommation, à une sorte de perversité narcissique est un long combat… Cuba et la Chine comme bien d’autres pays sont confrontés à ces problèmes d’une difficile transition.

En outre nous sommes dans une période d’effondrement de l’hégémonie américaine avec l’aiguisement des contradictions impérialistes dans le partage du monde, et se joue à la fois la défense des souverainetés menacées et les appétits de conquête. A cela pour le moment la Chine et la Russie proposent l’édification d’un monde multipolaire dont nous devons percevoir les nouvelles données.

A ce titre, j’ai traduit un article qui me semble éclairant sur ce contexte. Cet article traduit une fois de plus du très documenté National Interest – qui plaide pour que les Etats-Unis aient une vision plus réaliste de l’état du monde – montre une situation sur laquelle dans ce blog nous ne cessons d’insister. D’abord prendre conscience que nous ne sommes plus au temps de l’Union soviétique.

Bien mesurer que s’il existe toujours en filigrane des alliances héritées de la guerre froide comme par exemple celles entre l’Europe et les Etats-Unis, la Turquie au sein de l’OTAN, si au proche-orient Israël a toujours des relations privilégiés avec les Etats-Unis alors que la Russie et la Chine conservent des alliances privilégiées diplomatiques avec les pays arabes, la Syrie, l’Iran, les Palestiniens et donc les ennemis officiels d’Israël, dans les faits nous avons un bougé important. Les complémentarités économiques, voire comme ici militaires prennent de plus en plus d’importance et contredisent souvent le jeu diplomatique.

Cet article parle en effet des complémentarités militaires qui se développent entre la Russie et Israël, mais un article parallèle pourrait être produit sur les intérêts économiques et scientifiques (par exemple dans l’exploitation du désert) entre la Chine et Israël.

Le fond de ces collaborations qui ne sont pas nécessairement des alliances étant l’apparition d’un monde multipolaire avec un autre mode de relations internationales. Si l’on ajoute à cela la politique catastrophique d’Obama avec ou sans Clinton, qui a multiplié les facteurs d’insécurité pour ses alliés et les messages contradictoires, nous avons une des clés de l’évolution. L’autre clé étant la situation de plus en plus dégradée des peuples et les violences subies. Le tout aboutissant à resserrer les liens non seulement entre la Chine et la Russie mais en créant les conditions d’ouverture de dialogue entre les ennemis potentiels en vue de défendre leur développement et leur souveraineté devant des Etats-Unis de plus en plus erratiques.

Et c’est en ce sens que le cas israélien est tout à fait intéressant pour comprendre ce qui est en train de naître : « Netanyahu n’est pas en train de changer de camp, mais ce à quoi nous assistons, c’est à une tentative de manoeuvrer de manière indépendante pour défendre les intérêts d’Israël », dit Zvi Magen, ancien ambassadeur d’Israël en Russie et désormais membre de l’Institut pour les études sur la sécurité nationale au sein de l’Université de Tel Aviv.

Est-ce que pour autant il faut renoncer à soutenir des revendications des peuples comme les Kurdes ou les Palestiniens, certainement pas, mais il faut concevoir la pression des peuples en leur faveur dans un cadre renouvelé dans lequel la revendication à la paix demeure prioritaire. :

Poutine a très bien perçu cela et multiplie les ouvertures pour construire une base de développement qui préserve les souverainetés étatiques et la création de défenses communes militaires et de négociation.Mais il faut aussi mesurer que cet exemple extrême a son pendant en Europe. Il est clair que les exigences étatsuniennes face à l’OTAN deviennent de moins en moins protectrices pour l’Europe, comme la politique au Moyen-Orient et au Maghreb crée une instabilité généralisée. Le tout dans un contexte marqué à la fois par la montée d’un terrorisme largement entretenu et une crise économique génératrice d’instabilité politique. On voit mal comment le nouveau président des Etats-Unis pourra améliorer la situation. C’est pour cela que la lutte des peuples pour la paix est de plus en plus urgente pour que d’énormes ressources ne soient plus dévoyées vers la guerre et pour renforcer les négociations dans la justice et la paix.

Et laissons la parole à Fidel Castro qui termine son texte par les mots suivants : Les moyens techniques modernes ont permis de scruter l’univers. Des grandes puissances comme la Chine ou la Russie ne peuvent pas être soumises aux menaces de leur imposer l’emploi des armes nucléaires. Ce sont des peuples de grandes valeur et intelligence. Je considère que le discours du président des États Unis lorsqu’il a visité le Japon et qu’il n’a pas eu les mots pour s’excuser du massacre de centaines de milliers de personnes à Hiroshima a manqué de hauteur, alors même qu’il connaissait les effets de la bombe. L’attaque de Nagasaki, ville choisie par les maîtres de la vie au hasard, fut tout aussi criminelle. C’est pour cela qu’il faut marteler la nécessité de préserver la paix, pour qu’aucune puissance ne se donne plus le droit de tuer des millions d’êtres humains.

Danielle Bleitrach

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