Une lettre de Gisèle Cailloux, membre du CN, à Pierre Laurent

, par  Marie-Christine Burricand , popularité : 1%

A juste titre, Gisèle Cailloux s’inquiète et alerte quant au risque que la direction force la main aux communistes pour la désignation du candidat à la présidentielle, en faveur évidemment de Mélenchon.

Si les membres du Conseil national acceptaient un tel coup de force les 8 et 9 avril, ils prendraient la responsabilité de trahir les communistes et de l’explosion du PCF.

Cher camarade.

J’ai lu attentivement la réponse que tu adresses à Cyril Cineux et je dois dire qu’elle me laisse non seulement sur ma faim, mais qu’elle heurte mon point de vue.

Tu proposes « que le choix de candidature entre dans sa phase décisionnelle au second trimestre et que d’ici là, (souligné par moi), toutes les informations sur ces candidatures soient mises à la disposition des communistes pour qu’ils entament la discussion ».

D’ici là, c’est presque demain. Le second trimestre démarre au 1er avril et le prochain CN aura lieu les 8 et 9 Avril.

Ta lettre étant ambiguë à ce sujet, je ne sais pas si le fait que : « le CN d’avril devra évaluer l’ensemble de ces débats et proposer à la discussion des communistes les bases de ce qui pourrait constituer un accord d’ensemble » signifie que ce CN d’avril proposera dans le cadre de cet accord d’ensemble, un nom précis sur celui qui pourra porter le projet partagé ?

Ce serait grave. Le « d’ici là » ne laisse pas de temps au débat des communistes dont la majorité est en campagne pour les cantonales.

1) Je ne vois pas en quoi, et comment, penses-tu que « d’ici là » toutes les informations sur les candidatures, que ce soit celles de JL Mélenchon et A. Chassaigne qui ambitionnent de porter les couleurs du Front de Gauche ou encore celle de A. Gérin, seront mises à la disposition des communistes ?
Rien n’est fait dans ce sens à ton niveau.

 Pour l’instant, je vois JL Mélenchon systématiquement invité par les médias. La droite sarkozyste ne booste pas que la candidature DSK pour reprendre un constat de l’Humanité sur DSK ! Mais ce qui semble choquer notre journal pour l’un, est acceptable pour l’autre.

 Je vois aussi la candidature de JL Mélenchon portée par l’Humanité qui utilise toutes les occasions pour la promotionner.

 Je vois MG Buffet, très omniprésente, supporter cette candidature (voir notamment la photo parue dans l’Huma à l’occasion du congrès de la GU qui a choisi JL Mélenchon).

 Je vois que ma FD adresse à l’ensemble des communistes du département des photos pour illustrer le Front de Gauche dans la propagande des cantonales, et que sur toutes ces photos, il y a JL Mélenchon.

 Je vois que « l’adresse » d’André Chassaigne a du mal à parvenir à l’ensemble des communistes, cette transmission étant laissée à l’initiative des FD dont certaines bloquent volontairement ces informations.

 Je vois que les comptes-rendus de « Communistes » escamotent le contenu des quelques débats où A. Chassaigne est invité comme a été escamoté l’accueil qu’il a reçu à l’occasion de l’Assemblée Nationale des animateurs de section du 8 janvier.

Etc.

Dans ces conditions, que tu ne « cesse d’encourager les communistes à évaluer à égalité toutes ces hypothèses » (les différentes candidatures) m’apparaît comme un affichage vide de sens.

2) Je ne vois pas non plus comment, si tu restes sur le positionnement actuel, « d’ici là », les communistes seront en possession des informations sur ce que chacun porte dans ce Front de Gauche. Il me semble en effet que pour construire un programme partagé, il faut que chacun mette dans la corbeille ce dont il est porteur. A partir des propositions des uns et des autres, les débats qui en résultent, confrontés aux attentes des gens, et de préférence en ne restant pas en tête-à-tête avec les seuls PG et GU, permettent ensuite de parvenir à un consensus.

Comment on associe les communistes dans les quartiers, dans les entreprises, non pas pour réunir les organisations déjà associées dans les meetings, mais pour le lien qu’ils ont avec les salariés, avec la population, et comment ce qui en ressort est réellement pris en compte, notamment d’ici là ?

Or là encore, c’est le black-out. En somme, à lire l’Huma ou la propagande du parti, il n’y aurait que très peu de différences entre ce que porte le PG et ce que porte le PCF.

Cela ne peut me satisfaire. JL Mélenchon s’exprime beaucoup dans les médias et s’exprime au nom du F de G. Cette expression tourne autour d’un autre partage des richesses et des salaires maximums, thèmes dont manifestement il veut faire le centre de sa campagne.

Certes, les salariés de mon entreprise veulent des augmentations de salaires. Ils font même grève pour cela.

Mais leur problème N°1, c’est l’externalisation des charges de travail qui a déjà conduit à la disparition de plusieurs milliers d’emplois ces dernières années, alors que le groupe, dont les carnets de commandes sont pleins pour plus de cinq ans, ouvre tous les ans des filiales en Chine, en Pologne, au Maroc, au Mexique, aux Etats-Unis, etc. Les salariés du site de Gennevilliers, ceux de Corbeil comme tous les autres, veulent la pérennité de leur travail, ne pas pointer au chômage, même avec des indemnités améliorées dans le cadre d’un meilleur partage des richesses.

Ils s’indignent du salaire octroyé à leur PDG, mais ils veulent que l’entreprise investisse et se développe sur le site, ce qui ne peut se régler avec la diminution dudit salaire !

Comment répond-on à ces questions en ignorant par exemple, et pour faire court, l’absence totale de référence à l’utilisation du crédit dans les propos du candidat du PG parlant au nom du F de G ? Doit-on se limiter à l’intervention des salariés par un droit de véto et de propositions alternatives, comme le propose JLM, quand il est quasiment trop tard, que les plans de licenciements sont en route, alors que les salariés aspirent à mettre leur grain de sel dans les décisions bien en amont ? En permanence !

3) « Le choix devra, dis-tu, lier le tout, avec l’objectif de conclure l’accord politique le plus rassembleur possible, celui qui permettra à nos yeux la meilleure dynamique possible pour la présidentielle comme pour les élections législatives ».
Je partage ce point de vue.

Mais pour être rassembleur, ce choix doit aussi, rassembler les communistes, ce qui ne peut se faire par un passage en force sur la candidature. Même avec l’assurance de 70% de candidatures PCF aux législatives annoncé par JL Mélenchon !

Il doit aussi se faire sur la base de contenus (pas des déclarations tonitruantes mais du vrai fond pour des ruptures avec le capitalisme) qui répondent vraiment aux attentes des citoyens et particulièrement des salariés et des privés de travail, attentes qui se sont traduites par une montée des exigences lors du grand mouvement sur les retraites. C’est la condition pour déjouer le vote utile face à Sarkozy.

3) Telles que les choses se dessinent aujourd’hui : la discussion du CN et le vote qui s’ensuivra à ce niveau, quelle certitude as-tu que ce sera représentatif de l’opinion majoritaire des communistes ?

Beaucoup de communistes pensent encore qu’ils choisiront le candidat. Si un tel vote intervenait au CN des 8 et 9 avril, dans les conditions que je viens d’énoncer, vote qui pèserait forcément sur la suite du processus, quel risque de divisions dans nos rangs !

Les communistes ont quelques expériences récentes. Pour mémoire, le temps n’est pas si lointain où le CN emmené par les inconditionnels de la gauche plurielle, était majoritairement pour « l’ouverture du capital » des entreprises nationales en dépit de ce que pensaient les communistes de ces entreprises, dont beaucoup ont « rendu » leur carte du Parti à cette occasion. Des cellules ou sections d’entreprises ont ainsi été rayées de la carte. Ce même CN avait refusé, cela fait à peine 10 ans, de tirer un bilan des premières privatisations (par exemple, celle de France Télécoms) et de discuter de la privatisation partielle de la Snecma à la lumière de ce bilan.

Ne nous voilons pas la face : une dichotomie entre le choix du CN sur une candidature aux présidentielles et le choix de la majorité des communistes aurait des conséquences très graves sur les campagnes électorales à venir de 2012 et au-delà.

4) Mes questions sont donc directes :

a) Que comptes-tu mettre en œuvre pour que non pas « d’ici là » mais tout de suite, les informations soient réellement mises à disposition des communistes avec un équilibre indiscutable. Il ne suffit pas d’invoquer leur intelligence (aux communistes), qui est réelle, mais qui ne peut prendre son ampleur qu’avec la connaissance.

L’information fait partie de l’exercice de la démocratie.

b) Comment les communistes pourront-ils faire valoir leur choix plutôt que d’avoir à entériner celui du CN sous la pression du « on ne peut plus faire autrement » ?
Nous avons laissé les coudées franches à JL Mélenchon pour planter le décor de sa candidature et nous savons qu’il n’envisage pas qu’une autre option soit possible. Ce qui nous ramène à la situation de 2007.

J’attire ton attention sur le fait que le PCF à la différence du PG n’est plus dans aucun sondage, n’est-ce pas le prix de l’effacement ?

Je suis aujourd’hui en campagne électorale sur St Cloud puisque nous n’avons pas de renouvellement de canton sur ma ville. Je ferais évidemment le maximum, avec mes camarades, pour que nous fassions le meilleur score possible dans cette ville très difficile. Mais j’attends de vraies réponses à mes questions.

Je t’adresse cher camarade mes salutations fraternelles.

PS : Je souhaite que ce courrier soit adressé à tous les membres du CN.

Sites favoris Tous les sites

10 sites référencés dans ce secteur

Brèves Toutes les brèves

Navigation

Annonces

  • (2002) Lenin (requiem), texte de B. Brecht, musique de H. Eisler

    Un film
    Sur une musique de Hans Eisler, le requiem Lenin, écrit sur commande du PCUS pour le 20ème anniversaire de la mort de Illytch, mais jamais joué en URSS... avec un texte de Bertold Brecht, et des images d’hier et aujourd’hui de ces luttes de classes qui font l’histoire encore et toujours...

  • (2009) Déclaration de Malakoff

    Le 21 mars 2009, 155 militants, de 29 départements réunis à Malakoff signataires du texte alternatif du 34ème congrès « Faire vivre et renforcer le PCF, une exigence de notre temps ». lire la déclaration complète et les signataires

  • (2011) Communistes de cœur, de raison et de combat !

    La déclaration complète

    Les résultats de la consultation des 16, 17 et 18 juin sont maintenant connus. Les enjeux sont importants et il nous faut donc les examiner pour en tirer les enseignements qui nous seront utiles pour l’avenir.

    Un peu plus d’un tiers des adhérents a participé à cette consultation, soit une participation en hausse par rapport aux précédents votes, dans un contexte de baisse des cotisants.
    ... lire la suite

  • (2016) 37eme congrès du PCF

    Texte nr 3, Unir les communistes, le défi renouvelé du PCF et son résumé.

    Signé par 626 communistes de 66 départements, dont 15 départements avec plus de 10 signataires, présenté au 37eme congrès du PCF comme base de discussion. Il a obtenu 3.755 voix à la consultation interne pour le choix de la base commune (sur 24.376 exprimés).