Présidentielles : JLM, le peuple, l’organisation et le rapport de forces

, par  pam , popularité : 4%

Ainsi Jean-Luc Mélenchon a annoncé sa candidature aux présidentielles de 2017. Certains peuvent penser qu’il prend de court les appels à des primaires, l’éventuel retour du Front de Gauche, et... les discussions des communistes préparant leur congrès. Mais en fait, il reproduit fidèlement sa tactique de 2012, présentant sa candidature en Janvier de l’année précédente, et obligeant chacun à se déterminer par rapport à lui...

JLM en 2017 comme en 2012 ?

Il sait bien qu’il n’aura pas le soutien des écologistes, tout entier tournés vers leur place dans les institutions. Certains verts la cherche avant la présidentielle dans les valises du PS, d’autres tenteront de se compter dans une primaire ou au premier tour pour négocier leur soutien au premier ou au second. De toute façon, comme en 2012, la seule question qui compte chez les verts, c’est le nombre de places, et le niveau des promesses anti-nucléaires... JLM affirme donc au coeur de son projet la fin du nucléaire, jouant ainsi à "plus vert que moi tu meurs"...

Il est beaucoup moins sûr de la position du PCF. Quand il annonce sa candidature en 2011, il sait déjà que la direction du PCF l’a choisit dans sa démarche du Front de Gauche. Il est bras-dessus bras-dessous un peu partout avec Marie-Georges Buffet. En interne, Pierre Laurent s’est déjà engagé dans la stratégie du Front de Gauche, ne voulant pas reproduire la situation de 2007 où la secrétaire nationale du PCF était contrainte de se présenter au nom des collectifs anti-libéraux qui avaient choisi José Bové. Pierre Laurent connait le résultat dérisoire que tout le monde a mis sur le compte du PCF... pourtant absent des affiches de la candidate. Donc, quand JLM annonce sa candidature en 2011, il a l’accord de Pierre Laurent, même s’il lui faudra attendre 6 mois pour que le vote des communistes, très disputé, le confirme.

Il peut cependant espérer reproduire 2011, et obtenir l’aval du congrès du PCF en juin 2016... En a-t-il déjà négocié les conditions avec Pierre Laurent ? Apparemment non. Beaucoup de ceux qui ont défendu la stratégie du Front de Gauche au PCF protestent depuis des mois contre le comportement du PG et de son ex-leader, JLM ne serait plus en odeur de sainteté au conseil national du PCF... A suivre. Mais malheureusement, la direction du PCF est, comme les verts, préoccupé d’abord par les places qu’elle pourrait sauver, après les centaines de places perdues aux législatives, municipales, cantonales, régionales... Bien malin qui peut prédire ses décisions... Même si à la différence des verts, elle a un problème... les militants communiste sont de plus en plus exaspérés par les compromis avec le parti socialiste, ils ne veulent plus de cette "union de la gauche" qui fait progresser l’austérité et la guerre, et ils ne veulent plus de ces "sauveurs suprêmes" qui parlent dans la vie médiatique pour eux, et leur demande juste de diffuser des tracts et... payer la campagne.

Cependant, JLM sait qu’il a marqué des points en 2012. Aucune personnalité de "gauche radicale" n’a autant de légitimité présidentielle que lui. Pas de "présidentiable" au PCF, et évidemment encore moins dans les nombreux groupes qui ne tiennent leur légitimité que de leur présence dans le "cartel" d’organisations qu’est le Front de Gauche. Il peut penser que l’essentiel des 11% conquis en 2012 est à sa portée... Le PCF avait cru échanger les présidentielles contre les législatives, il a perdu les législatives... et a donné les clés de son électorat présidentiel à JLM.

Mais à vrai dire, tout communiste s’interrogeant sur ce qui peut être utile contre le FN, sans tomber dans le piège de l’union républicaine, se dit que peut-être JLM est le seul outil dont nous disposons... un outil qui n’est pas le notre, pas celui qu’on préférerait... Mais est-ce qu’on a le choix... ?

Répondre à cette question suppose d’aller au fonds, de répondre à la seule vraie question posée aux communistes, comme au peuple dans son entier. A quoi peuvent bien servir les présidentielles de 2017 ?

A quoi peuvent bien servir les présidentielles de 2017 ?

A priori, une élection sert à choisir un élu... et à mesurer les rapports de forces politiques. Mais qui peut penser que l’élection présidentielle peut permettre de changer... une politique ? L’expérience nous apprend que, quoi qu’on vote, la politique suivie sera plus à droite, plus dure pour le monde du travail, les services publics... Toute l’énorme machine médiatico-politique de la présidentielle va écraser la vie publique autour d’une seule question : comment éviter le pire, comment éviter Marine le Pen ? Progressivement, la guerre idéologique poussera tout ceux qui croient le vote utile à se résigner au vote contre le pire, pour Hollande, ou même, pour la droite, car "tout mais pas le FN"... Le peuple a l’expérience aux dernières régionales !

En fait, dans une élection présidentielle, le peuple est dans un piège, soit il croit à l’élection et il accepte de voter contre son intérêt, soit il ne croit pas à l’élection, et il s’abstient... L’urgence est de sortir de ce "coup d’état permanent"... de la 5ème république. JLM en fait d’ailleurs le premier point de son discours, il a bien raison.

Mais comment sortir de ce piège avec le seul vote ? JLM dit "votez pour moi, c’est voter pour une assemblée constituante d’une nouvelle république". Mais quelle république ? pour quels intérêts ? avec quelle place au monde du travail ? Son insistance sur l’arrêt du nucléaire révèle par exemple la nature classiquement politicienne de ses engagements. Car s’il s’agit d’une république sociale, alors elle doit se donner entre autres comme objectif de défendre le droit à l’énergie, condition du droit au logement accessible et de qualité, du droit au transport, une énergie qui doit être décarbonée et peu chère... Stopper le nucléaire est au contraire ouvrir le règne de la concurrence, des intermittences, donc des coupures, et des hausses de prix. C’est accélérer la remise en cause du service public garanti, au nom d’une "territorialisation énergétique" qui ne veut pas dire son vrai nom, la "dénationalisation".

Ce que ne dit pas JLM quand il parle d’une nouvelle république, c’est qu’elle doit nécessairement être au service d’un changement de société. Et comment nommer une société qui ne serait plus le capitalisme ? Bernie Sanders, le démocrate US a un avantage, il n’hésite pas à appeler les choses par leur nom et à parler de "socialisme", certes à la sauce US, mais quand même ! JLM tourne autour du pot avec son écosocialisme sans dire vraiment s’il s’agit d’une société socialiste donnant la primauté à la propriété collective des moyens de production, et il ne peut pas dire vers quoi l’intervention du peuple dans cette société nouvelle doit tendre, il ne peut pas dire que le socialisme est une société de luttes pour la désaliénation humaine, qui ouvre la perspective "de chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins" ! Il ne peut pas parler de communisme ! Il reste un candidat "socialiste", très Mitterandien....

Quel projet de société pour la France, c’est bien en fait la question fondamentale que pose toute rupture politique avec l’austérité, la guerre, et la politique présidentialisée de cette 5ème république en crise profonde.

Mais il faut alors sortir clairement de l’impasse électoraliste qui gouverne la gauche depuis le programme commun. On ne change pas la société avec un bulletin de vote. Il faut un mouvement social puissant, de longue durée, capable de faire sauter les verrous bancaires, institutionnels, sociaux de toutes les forces qui défendront becs et ongles leurs intérêts dans ce capitalisme mondialisé mortifère pour les peuples.

Une campagne des présidentielles pour reconstruire une organisation politique du monde du travail

Non le bulletin de vote n’a aucune utilité pour "changer la vie". S’il est utile, c’est à autre chose. Et c’est cet autre chose qu’une candidature de rupture avec la 5ème république, le capitalisme et la guerre devrait porter. S’il faut un puissant mouvement social pour changer la société, chaque élection est l’occasion de le mettre en débat. La grande bataille politique des présidentielles ne peut servir qu’à une seule chose concrète : faire progresser la capacité du peuple à s’unir pour résister, pour se défendre, pour revendiquer, pour exiger, pour gagner, et au final pour construire le changement de société.

Que peut être une telle organisation du peuple ? de type Front Populaire ? Seul le mouvement le dira, peut-être d’un type nouveau, à l’ère des réseaux sociaux, d’une société largement mondialisée, avec l’expérience de l’échec du socialisme à l’Est, de l’union de la gauche, et en retrouvant ses liens avec les autres mouvements historiques de libération en Amérique latine et en Asie.

Mais pour cela, il faut mener la bataille politique contre toutes les formes d’idéalisme, notamment électoral, celles de Hollande jouant la peur de Le Pen, ou celle de JLM jouant le rejet de Hollande, il faut une organisation politique qui porte cette perspective révolutionnaire. C’était le rôle historique du PCF et c’est la question politique portée en creux dans le piège des primaires. Non, nous n’avons pas besoin d’une énième formule politicienne de gauche ! Nous avons besoin d’un grand parti communiste renouvelé, parti de combat et de résistance, mais aussi intellectuel collectif porteur de repères et de débats, d’analyses et de propositions, parti populaire ancré dans le monde du travail, parti qui impose la primauté du peuple dans les institutions, la primauté du mouvement social sur l’élection.

Bien sûr, JLM ne peut pas porter une telle perspective. Mais nous n’avons pas besoin d’un "présidentiable" pour mener une telle bataille dont l’objet premier n’est pas de faire croire à l’illusion électorale, mais au contraire, de gagner l’autonomie du mouvement social et sa capacité à s’organiser... Alors le champ des candidats s’ouvre et plusieurs noms viennent rapidement en tête.

Qui n’a pas été impressionné par la force médiatique du coup de poing télévisuel de Xavier Mathieu ou Mickael Wamen au Grand Journal ? Voila d’incroyables candidats pour soulever le peuple, le pousser à s’unir, à s’organiser, à reprendre pied pour lui-même dans la vie politique, et pour personne d’autres...

L’émancipation des travailleurs doit être l’œuvre des travailleurs eux-mêmes. Le candidat qui peut porter le refus de la présidentialisation, la révolte anti-capitaliste, la rupture avec l’histoire de l’union de la gauche, et la perspective communiste, c’est un combattant du mouvement social, et, au meilleur sens du mot, ce doit être le dirigeant communiste que nous n’avons pas, pas encore. Le vrai enjeu des présidentielles n’est pas de savoir quel président aggravera encore la guerre de classe demain, mais de savoir si de nouveaux dirigeants politiques populaires, si un nouveau dirigeant communiste est apparu dans cette bataille.

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