Pour faire fructifier la mémoire de nos déportés... Par Jacques Delepine

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Pour faire fructifier la mémoire de nos déportés, notamment communiste, j’ai écris un texte qui reprend ce qu’en novembre j’ai vécu lors de l’Assemblée Générale de l’Association Française Buchenwald Dora et Kommando (AFBDK) d’où j’ai été exclu du Conseil d’administration ; ce texte présente aussi les risques à venir et la liquidation de ce qu’étaient les devoirs de l’association.
Salut communiste
Jacques Delepine

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L’AFBDK doit rappeler l’Histoire, refuser la révision euro-maccarthyste des faits historiques et défendre l’engagement des Déportés !

Des nouvelles de l’AFBDK

- L’Europe avec son infamante résolution du 19 septembre assimilant le communisme au nazisme, a confié aux pseudo historiens et autres chiens de garde du capital un petit bagage conceptuel destiné « à avoir l’air quand on n’a pas l’air du tout » honnête et rigoureux ! Dans le journal de l’association, à longueur d’éditoriaux, nous sommes assommés de ce qualificatif de « populiste » qui d’évidence désigne l’ennemi et souvent le communiste. A l’AG de l’association, j’ai interrogé les doctes historiens composant la direction, sur l’usage de cet outil conceptuel, mais en vain ! Après « une intervention trop longue », m’a-t-on fait savoir, car, réflexe d’ancien régime, « elle était plus longue que l’intervention présidentielle (de l’AFBDK) destinée à introduire l’échange », on m’a sommé via quelques excités de service de me taire. Étrange conception de l’échange ! Le débat étant clos même avant d’avoir débuté, je me suis donc retiré.

- Malgré, et c’est un euphémisme, le peu de chaleur organisationnelle que je supposais m’être réservée, je me suis tout de même, honnêteté militante oblige, présenté à l’AG. L’accueil fut glacial, je me retrouvais seul, isolé sur 2 rangées de chaises, à croiser des regards qui ne me voyaient plus. Comme j’avais maintenu ma candidature au conseil d’administration, celle-ci fut donc, après mon départ, abordée. Par courriel 13 jours après l’AG, j’ai été prévenu du résultat du vote me concernant : 0 pour, 12 contres et 18 abstentions. Toute réflexion faite, et sauf interprétation contraire et pertinente que je suis bien sur prêt à entendre, le résultat est pas si mal ! En effet, nonobstant mon absence, l’absence de bulletin de vote et le vote préalable et éclairant des contres, qu’il y ait eu par la suite 18 abstentions, soit un tiers de plus que les partisans de l’exclusion, cela doit avoir une signification. On sait d’expérience qu’un vote à mains levées ne répond pas strictement aux mêmes déterminations qu’un vote à bulletin secret. 60% de l’AG ne se prononce pas ! Faut-il interpréter cela comme un refus de suivre ceux que je gène ?

Pourquoi n’utilisent-ils plus le mot fasciste ?

- Communistes, gaullistes, anarchistes… se sont retrouvés dans les heures périlleuses, souffrantes de la résistance et de la déportation, parce qu’ils refusaient le fascisme et parce qu’ils voyaient à travers leur union combattante des lendemains à la mesure de leurs espérances. Aujourd’hui l’AFBDK et d’autres associations pratiquent l’amnésie sélective, privant la mémoire de ces déportés, de leurs victoires sur le fascisme. Derrière le qualificatif de fasciste, on retrouve la lutte des classes et le travail d’esclaves que les IG FARBEN, DAIMLER BENZ, VW, ALLIANZ, SIEMENS… ont imposé aux déportés. Ce rappel dans la fabrique actuelle du consentement à l’exploitation ne convient pas à l’Europe de Merkel-Macron. Utiliser le mot fasciste, c’est rétablir la collaboration étroite et existentielle qu’ils entretiennent avec le Capital aux abois.

- Les institutions européennes, de même que les États-Unis n’utilisent jamais le terme de fasciste. En effet dès la fin de la guerre, les États-Unis ont même choisi de combattre les antifascistes, en recrutant des fascistes et notamment des nazis zélés comme Barbie (chef de la SS de Lyon, tortionnaire et assassin de Jean Moulin), Von Braun (les V1 et V2 de DORA), Gehlen (chef SS de l’occupation en URSS, puis responsable des services secrets US en zone américaine puis d’Adenauer en RFA), etc… Pour dissimuler l’opprobre, on élimine le mot fasciste en Europe et aux États-Unis et on crée une catégorie passe partout avec le terme de populiste. « Ni vu ni connu je t’embrouille » dirait-on aujourd’hui.

- En avril de cette année sur la place d’appel de Buchenwald, sera commémorée la libération du camp en présence d’un invité « de marque », JC. Juncker. JCJ, entre autres faits d’armes, a couvert les sinistres réseaux Gladio au Luxembourg, a fait l’éloge funèbre d’un nazi avéré [1], et a permis l’expression de la résolution du 19 septembre ! Malgré ces éléments de CV, il paradera à Buchenwald sans qu’à ce jour les associations de déportés n’aient émis une quelconque réprobation ! De JC. Juncker on peut craindre le pire lorsqu’il prendra la parole aux cérémonies commémoratives en avril 2020.

- L’AFBDK n’a pas pris la mesure des récents événements ainsi que ceux à venir ! Il est vrai, qu’elle n’a pas fait dans la clairvoyance. A Strasbourg, déjà, en septembre 2014 pour son AG, elle avait invité de son propre chef : masochisme historique, connerie organisationnelle ou volonté politique délibérée, « un représentant de la Commission Européenne en charge de la mémoire ». Ce ou plutôt cette représentante avait, en réunion plénière, donné le ton pour l’Europe : communisme et nazisme c’est du pareil au même ! Que croyez-vous qu’il soit advenu de ce premier jet révisionniste ? Rien ! La direction de l’association est restée muette ! Seul un ancien président de l’association s’était ému de cette sinistre équation. Jusqu’où iront les dirigeants de l’AFBDK dans ce que l’on peut, pour le moins, qualifier de lâcheté « européiste » ?

Au « mourir pour des idées » de Brassens, préférons la réponse d’Escudero « vivre pour des idées »

- Dans les années 60-70, alors que Georges Brassens, « anar de droite », ravi de faire oublier qu’il n’avait jamais résisté à l’occupant, chantait « mourir pour des idées, d’accord mais de mort lente », il s’est vu opposer un autre chant plus fin, plus poétique et plus universel, celui de Lény Escudero qui, plus responsable, plus grave lui répliqua « vivre pour des idées » (à écouter ou réécouter cf. lien : https://www.youtube.com/watch?v=1InsgUpcJxQ). A une époque où l’anticommuniste et l’ignorance historique est de mise, parions sur Escudero contre Brassens. Nos pères, nos oncles, nos amis… se sont engagés au risque de leurs vies pour des idées et aujourd’hui leurs associations n’osent pas, au mieux défendre leurs idées ou au moins, reconnaître ces idées de libération nationale et sociale comme possibilités honorables.

- Au titre d’une intelligibilité historique, ces dangereux bricoleurs de l’histoire, en dehors de toute rigueur scientifique, à travers leurs écrits, proposent comme concepts des mots sans contenu, sans contours mais propices à l’amalgame (communiste égale nazi), comme « populistes et totalitaires » dissimulant leur combat anticommuniste. Et toute honte bue ils vont se proclamer : « passeurs de mémoire » ou historiens ! Comment comprendre la seconde guerre mondiale sans nommer précisément les forces en présence, poser les enjeux économiques, éclairer les rapports de force, sans rappeler notamment le rôle des communistes français et soviétiques dans la défaite du « Reich de mille ans », du nazisme et du fascisme en général.

- Le voyage commémorant la libération du camp est nommé à l’AG par le président comme « Notre pèlerinage annuel » ! Se rend-il compte des mots qu’il use ? Si l’AFBDK fait un pèlerinage annuel, alors, lorsqu’en AG il distribue ses remerciements, c’est donc vers des dames patronnesses qu’il se tourne ? Arrêtez ! Cela devient si étriqué, si peu sérieux ! En effet il ne s’agit pas de patronage mais de luttes, d’Histoire, et d’histoires de sang et de souffrances humaines, de mémoire agissante pour l’avenir. « Faire notre pèlerinage » disait-il, mais qui dira la messe sous le drapeau « européen » de la Vierge Marie, légué par l’Église romaine de Pie XII, qui a été un artisan majeur du sauvetage-recyclage des criminels de guerre ? JC. Juncker sans doute, avec les chœurs du Parlement européen et de ses séides fascisants, qui ont voté presque comme un seul homme, de la gauche européiste à la droite toutes catégories, la résolution infâme du 19 septembre 2019.

- Parions qu’a l’occasion des cérémonies du 75ème anniversaire de la libération du camp de Buchenwald, le grand invité JCJ, dans son homélie, rappellera le recyclage du camp de Buchenwald fait par les sans dieux soviétiques (jusqu’en 1950 le camp fut utilisé comme camp d’internement des nazis) ! Il omettra sûrement de préciser que le camp a servi la dénazification de l’Allemagne de l’Est. Qui les Soviétiques ont-ils internés en 1945 à Buchenwald ? Les tortionnaires de nos pères, oncles et amis, n’est-ce pas, et dont aucun n’a subi, pendant l’internement, un sort comparable aux déportés fondateurs de nos associations ! L’après-guerre fut rude pour les nazis à l’Est et tendre à l’Ouest. En RFA ils firent si bien que la fonction publique était interdite aux communistes, alors que l’essentiel des nazis, civils et militaires, avaient retrouvé place et promotion. Faut-il rappeler qu’en RDA, 80% des juges, des enseignants et des fonctionnaires furent remplacés pour cause de collaboration avec les nazis ? Des milliers de dirigeants nazis furent emprisonnés et six-cents d’entre eux exécutés pour crimes de guerre. A l’Ouest leurs alter ego furent recyclés, notamment dans les services policiers pour leurs compétences avérées en anticommunisme, Gehlen en tête.

- Ils n’utilisent plus le mot fasciste parce que leurs maitres à penser, européistes, leurs ont tricoté des grilles à penser, leur gourou JCJ affirme en démocrate confirmé : « Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens ». Les Grecs en savent quelque chose, mais aussi les 55% de Français ayant voté non au referendum de 2005. Les postures anticommunistes sont indispensables aux institutions européennes et à l’application de la ligne de l’Union européenne. Les Anglais, avec deux votes concordants contre l’UE, ne pourraient décidément pas retirer leurs œufs de l’omelette, comme les en a menacés Pascal Lamy [2] ?

- Avec JCJ la démocratie est en berne. La falsification de l’histoire, la répression, l’interdiction de l’activité communiste relèvent des conditions nécessaires au consentement à l’exploitation capitaliste, cœur de l’Europe de Maastricht. Les parlementaires européens se sont déshonorés le 19 septembre, leur vote est un soutien aux forces les plus réactionnaires. Des groupes antisémites, des partis fascistes et nazis, des campagnes de haine refont surface en Pologne, en Hongrie, dans les Pays Baltes (où le ministre letton de la défense, entre autres, considère que « la Waffen SS est la fierté de la Lettonie » [3], en Ukraine, en Tchéquie, des musées de la seconde guerre mondiale sont fermés, des monuments déboulonnés, des cimetières profanés, des attaques xénophobes organisées, des criminels de guerre « dédommagés » et la direction de l’AFBDK met cinquante jours, un record pour faire mine de réagir ! La direction de l’AFBDK explique que l’association est « apolitique » mais elle dénonce les communistes qu’elle a au préalable rangés dans la catégorie des « populistes » ! Par ailleurs elle explique que les drapeaux rouges ne sont plus acceptés à Buchenwald, mais qu’il faudrait agréer la présence officielle de triste sire comme JCJ. Jusqu’à quel degré de capitulation, « l’Europe » du capital financier les conduira-t-elle ?

Et si l’AFBDK faisait son travail de mémoire ?

- Au regard de l’ardente nécessité de conserver l’honneur de l’engagement de nos résistants communistes et de leurs compagnons de lutte, il y a urgence à faire un véritable travail d’histoire avec les outils et les mots de l’historien, afin d’enrayer cette honteuse boursouflure de mots qui masquent le vide de l’analyse, mais qui exprime aussi clairement son but : criminaliser et faire disparaitre l’espoir communiste. Il y a urgence car aujourd’hui l’Europe banalise, voire réhabilite insidieusement le nazi-fascisme et les nostalgiques de Hitler, de Mussolini, de Franco, de Bandera et du Régent Horthy qui refont benoîtement leur trou dans la « démocratique » UE dominée par la « République de Berlin » !

- Qu’une journée d’étude intitulée « le corps du Déporté, icône tragique du XX siècle » sollicite la mémoire dans sa dimension artistique, c’est bien, mais sans penser exclusivité en termes de production de l’association, celle-ci doit tout de même se penser en terme de priorité et d’efficacité. Aujourd’hui la priorité c’est faire vivre « le Serment » au regard des dangers présents et à venir ! La priorité au regard de l’urgence du quotidien où « le ventre de la bête immonde » enfante à nouveau des monstres, c’est d’éclairer sérieusement la population sur les tenants et aboutissants du fascisme, c’est éclairer la population, jeunes et moins jeunes sur les dangers mais aussi sur les moyens d’y faire barrage ! Pour citer le résistant communiste L. Landini : la mémoire ne vaut pas que pour le souvenir, elle vaut surtout pour l’avenir. Alors que l’AFBDK s’empare et fasse siennes les deux propositions suivantes et, de mon point de vue, l’association sera à la hauteur de son héritage et de sa responsabilité historique.

  • Il existe des incontournables dans le débat historique : c’est l’échange rigoureux. Alors, que l’AFBDK fasse son travail, qu’elle organise une journée d’étude sur l’histoire de la seconde guerre mondiale où elle veillera à s’entourer d’historiens indépendants et pas seulement d’institutionnels en service commandé « européen », et à donner à cette journée l’ampleur et la qualité qu’imposent les enjeux.
  • Au plus vite et cela avant les cérémonies d’avril, il faut que l’AFBDK soit à l’initiative d’une vaste pétition exigeant le retrait de la résolution européenne du 19 septembre 2019 et refusant le veto contre les drapeaux rouges et nationaux, et la présence ou le parrainage de JCJ aux cérémonies, afin de protéger concrètement la mémoire des déportés contre les graves dérives en cours.

« Notre idéal est la construction d’un monde nouveau dans la paix et la liberté »
le Serment, le 19/4/1945.

Jacques Delepine, le 10/01/2020.

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