Osons la paix !

, par  Marie-Christine Burricand , popularité : 3%

Pour ceux qui ressentiraient un petit coup de mou quand la pression monte pour nous contraindre à l’Union sacrée, je mets à disposition quelques textes fondamentaux écrits par des femmes et hommes qui ont traversé des épreuves parfois bien plus périlleuses.

Commençons par Jean Jaurés dans son dernier discours du 25 juillet 1914 à vaise (Lyon) Extraits
« Citoyens,
Je veux vous dire ce soir que jamais nous n’avons été, que jamais depuis quarante ans l’Europe n’a été dans une situation plus menaçante et plus tragique que celle où nous sommes à l’heure où j’ai la responsabilité de vous adresser la parole.
...Ah ! citoyens, je ne veux pas forcer les couleurs sombres du tableau, je ne veux pas dire que la rupture diplomatique dont nous avons eu la nouvelle il y a une demi-heure, entre l’Autriche et la Serbie, signifie nécessairement qu’une guerre entre l’Autriche et la Serbie va éclater et je ne dis pas que si la guerre éclate entre la Serbie et l’Autriche le conflit s’étendra nécessairement au reste de l’Europe, mais je dis que nous avons contre nous, contre la paix, contre la vie des hommes à l’heure actuelle, des chances terribles et contre lesquelles il faudra que les prolétaires de l’Europe tentent les efforts de solidarité suprême qu’ils pourront tenter.
Dans une heure aussi grave, aussi pleine de périls pour nous tous, pour toutes les patries, je ne veux pas m’attarder à chercher longuement les responsabilités. Nous avons les nôtres, Moutet l’a dit et j’atteste devant l’Histoire que nous les avions prévues, que nous les avions annoncées ; lorsque nous avons dit que pénétrer par la force, par les armes au Maroc, c’était ouvrir l’ère des ambitions, des convoitises et des conflits, on nous a dénoncés comme de mauvais Français et c’est nous qui avions le souci de la France.
...Quoi qu’il en soit, citoyens, et je dis ces choses avec une sorte de désespoir, il n’y a plus, au moment où nous sommes menacés de meurtre et, de sauvagerie, qu’une chance pour le maintien de la paix et le salut de la civilisation, c’est que le prolétariat rassemble toutes ses forces qui comptent un grand nombre de frères, Français, Anglais, Allemands, Italiens, Russes et que nous demandions à ces milliers d’hommes de s’unir pour que le battement unanime de leurs cœurs écarte l’horrible cauchemar. »

Lénine bien sur, déterminé dès le début de la Révolution
"Pour le pain et pour la paix
Deux questions sont passées au premier plan ce mois-ci avant toutes les autres questions politiques : celle du pain et celle de la paix ! La guerre impérialiste, la guerre menée par les plus grandes, les plus riches banques d’Angleterre et d’Allemagne, cette guerre faite pour la domination du monde, pour le partage du butin, pour la spoliation des peuples, petits et faibles, cette guerre effroyable, cette guerre criminelle a dévasté tous les pays, a épuisé tous les peuples, a placé l’humanité devant ce dilemme : ou bien sacrifier toute la civilisation et périr, ou bien secouer le joug capitaliste par la voie révolutionnaire, jeter bas la domination de la bourgeoisie, conquérir le socialisme et une paix solide.
Si le socialisme ne triomphe pas, la paix entre les Etats capitalistes ne sera qu’un armistice, une trêve, la préparation d’une nouvelle boucherie entre les peuples. La paix et le pain - telles sont les revendications majeures des ouvriers et des exploités. La guerre a exacerbé ces revendications au dernier point. Elle a voué à la famine les pays les plus civilisés, les plus avancés. Par ailleurs, en tant qu’immense processus historique, la guerre a accéléré d’une façon incroyable le développement social. Devenu impérialisme, c’est-à-dire capitalisme des monopoles, le capitalisme s’est transformé sous l’influence de la guerre en capitalisme monopoliste d’Etat. Nous avons aujourd’hui atteint ce degré d’évolution de l’économie mondiale, prélude du socialisme.
C’est pourquoi la révolution socialiste qui a éclaté en Russie n’est que le début de la révolution socialiste mondiale. La paix et le pain, le renversement de la bourgeoisie, les moyens révolutionnaires pour guérir les plaies causées par la guerre, la victoire totale du socialisme - tels sont les objectifs de la lutte."
Pétrograd, le 14 décembre 1917

Rosa Luxembourg en 1917. Celui-là, il est un peu long et pose un paquet de questions. Une belle lucidité, elle aussi assassinée en 1919 par des militaires allemands
« L’action en faveur de la paix, à la manière de Stockholm, qui consiste à vouloir concilier les gouvernements belligérants, trouver des formules acceptables pour tous sur les buts de la guerre et garder l’équilibre entre les différents Etats impérialistes, n’est qu’une politique purement bourgeoise. La politique du prolétariat conscient, dans son action pour la paix, doit suivre une voie entièrement différente.
Le socialisme international n’a aucun intérêt à ce que les gouvernements impérialistes trouvent un terrain où ils puissent concilier leurs intérêts et à ce qu’ils fassent la paix de leur propre initiative. Ce que le prolétariat doit faire, au contraire, c’est d’empêcher que la paix se fasse de cette manière, c’est-à-dire qu’elle soit l’œuvre de gouvernements capitalistes. Le seul devoir et l’intérêt vital du socialisme international consiste pour le moment à faire que la paix soit l’œuvre du prolétariat international et le résultat de son action révolutionnaire, qu’elle soit obtenue en luttant contre les gouvernements capitalistes, qu’elle résulte de la puissance acquise par le prolétariat et qu’elle aboutisse à un changement radical dans la situation sociale et politique des Etats capitalistes. Du point de vue du prolétariat conscient, il n’y a pas d’autre moyen pour mettre fin à la tuerie impérialiste que la résistance ouverte des masses du peuple, résistance qui, en même temps, devra s’élargir et devenir une lutte pour la conquête du pouvoir politique. Nous nous trouvons en ce moment devant la même alternative que celle devant laquelle s’était trouvé le socialisme international le 4 août 1914. Et ce n’est que lorsqu’on aura compris et qu’on se sera bien pénétré de la fatalité d’une décision qui fait époque dans l’histoire du monde que le sort tragique du socialisme dans la guerre mondiale cessera d’être une énigme insoluble.
Il n’y a que des innocents en matière de politique, dans le genre de Haase, pour s’imaginer que tout le problème qui se posait devant le socialisme à la date du 4 août pouvait se résumer dans la question de savoir si les députés socialistes, oui ou non, voteraient les crédits de guerre. Si on se place à ce point de vue, qui est celui du crétinisme parlementaire, le socialisme eut été sauvé, pourvu que les 110 députés au Reichstag aient refusé les crédits, tout en recommandant aux masses ouvrières de faire leur « devoir de citoyen », c’est-à-dire de fournir de la chair à canon dans la tuerie impérialiste. On croit ainsi pouvoir garder sa vertu socialiste tout en se mettant à l’abri de tout risque. Mais l’histoire ne rend pas la solution des problèmes devant lesquels se trouve le socialisme aussi commode. Et c’est une erreur que de croire pouvoir réduire la question à un vote de quelques députés socialistes, dans le pays qui, à ce moment, se trouvait à la tête du socialisme. En Allemagne, le vote des députés pour ou contre les crédits de guerre n’aurait eu son importance qu’en tant qu’il aurait conduit les masses à adopter telle ou telle tactique, qu’en tant que préambule d’un programme positif préconisant la lutte des classes en temps de guerre. Refuser les crédits de guerre, le 4 août 1914, n’aurait eu d’importance que s’il eût été le mot d’ordre d’une lutte générale contre la guerre et contre l’impérialisme. Ce vote aurait dû être l’occasion de présenter aux masses un programme d’action révolutionnaire et de les inviter à s’emparer de la défense des organisations contribuant à la défense du pays, c’est-à-dire du pouvoir politique, par la révolte. Un autre moyen de s’opposer à la guerre, par des actions et non pas seulement par des mots, n’existait pas alors, comme il n’existe pas aujourd’hui.
Si on craignait de suivre cette voie, la seule possible, il ne restait d’autre ressource que de renoncer complètement à la lutte et a toute politique inspirée des principes du parti, c’est-à-dire renoncer à toute lutte politique. Considéré de ce point de vue, le vote des crédits et la politique du 4 août n’étaient que des conséquences logiques et inéluctables, puisqu’il ne pouvait pas y avoir de voie intermédiaire dans la situation historique d’alors. Le socialisme international était placé dans une situation où il devait se dire : « Ce sera : ou bien la lutte pour le pouvoir politique, ou bien la banqueroute et l’adaptation à la politique du gouvernement ». C’est la situation dans laquelle se trouve le prolétariat depuis le commencement de la guerre. Et aujourd’hui, devant le problème de la paix, l’histoire montre à la classe ouvrière la même créance avec la dureté d’un usurier : « Oui, son sein : le billet le dit. »1
Ce n’est qu’en exposant les poitrines des ouvriers dans la grande lutte ouverte de la révolution mondiale que le socialisme pourra mettre fin à la guerre mondiale. Si cela ne se fait pas, on en restera à de vains babillages sur la paix : bien plus, en aidant à entretenir ce babillage, qui tend à un compromis entre les pouvoirs belligérants, nous deviendrons les suppôts de l’impérialisme, les auxiliaires de la domination de la classe bourgeoise, c’est-à-dire que nous agirons contre nos propres intérêts et renoncerons par là, si une telle paix avait été conclue, à jouer un rôle effacé dans l’histoire du monde pour au moins une dizaine d’années.
Ce qui paraît être le point délicat de la politique qui, en temps de guerre, s’inspirait de vrais principes socialistes, c’est que, comme on le dit, les révolutions ne se font pas sur commande. C’est l’argument qu’on emploie pour excuser l’attitude du prolétariat au commencement de la grande tuerie, comme celle qu’elle observe aujourd’hui en face de la question de la paix. C’est le voile qui doit couvrir l’abandon des principes socialistes. Cependant, l’argument, qui prétend être invincible parce que « fondé sur les réalités », n’est qu’un expédient. Il est vrai qu’on ne peut faire des révolutions sur commande. Mais ce n’est pas là le devoir du Parti socialiste : son devoir est, à tout moment, sans peur et sans reproche, de « dire ce qui est », c’est-à-dire de faire voir aux masses, d’une manière claire et en évitant tout subterfuge, quels sont leurs devoirs dans une situation donnée, de proclamer le programme d’action et d’émettre les mots d’ordre que la situation exige. Le soin de savoir si et à quel moment les masses révolutionnaires se soulèveront n’est pas l’affaire du socialisme. Ce soin, le socialisme peut le remettre à l’histoire. S’il a rempli son devoir dans le sens que nous venons d’indiquer, il contribuera puissamment à déchaîner les éléments révolutionnaires que la situation comporte et aura fait le nécessaire pour accélérer le mouvement des masses. Mais, même en admettant le pire, même si d’abord le socialisme ne paraît que crier dans le désert, si les masses ne le suivent pas, en fin de compte il se présentera toujours et inéluctablement une situation morale et politique dont il récoltera les fruits au centuple quand l’heure historique sera venue.
Par contre, si les partis socialistes, comme ils l’ont fait depuis le 4 août jusqu’aujourd’hui, renient la lutte des classes, ils deviennent le moyen le plus funeste pour paralyser l’action des masses : en d’autres termes, ils deviennent des facteurs de la contre-révolution. Le socialisme international, depuis le commencement de la guerre, a joué le rôle de gardien vigilant des intérêts de la classe bourgeoisie. Aujourd’hui, comme il y a trois ans, il n’y a plus qu’une, alternative : guerre ou révolution, impérialisme ou socialisme ! Proclamer cette vérité sans réticence et sans subterfuges et en tirer les conséquences révolutionnaires, voilà quel est aujourd’hui le seul moyen possible dont dispose le prolétariat pour obtenir une paix socialiste, la seule manière pour des prolétaires et des socialistes de travailler à l’œuvre de la paix ! »

Clara ZETKIN, en août 1904, en direction des femmes prolétaires
« La fraternité entre les peuples n’est pas une vaine invention pour la classe ouvrière, la paix mondiale n’est pas un joli mot. Il y a derrière une réalité tangible : la ferme solidarité des exploités et des opprimés de toutes les nations. Elle ne doit pas laisser les prolétaires pointer le fusil meurtrier contre d’autres prolétaires. Elle doit insuffler aux masses la détermination d’utiliser dans la guerre contre la guerre toutes les armes à sa disposition. La force avec laquelle les masses prolétaires s’opposeront à la furie de la guerre mondiale sera une bataille gagnée dans leur lutte de libération. L’énergie et la passion révolutionnaires de leur engagement les exposeront à des persécutions, les mettront en danger et leur imposeront des sacrifices. Qu’importe ? Il y a des moments dans la vie de chacun et dans la vie des peuples où l’on ne gagne tout que si l’on s’engage totalement. Un tel moment est là. Femmes prolétaires, soyez prêtes ! »

Fidel Castro, droit au but
« Si les hommes d’État des pays capitalistes sont incapables de voir que la paix, le désarmement et la dette extérieure sont des questions inséparables, ils admettront leur incapacité totale pour contribuer à la solution des problèmes du monde actuel ».

Celui là est bien à droite, mais quand un Président refuse la guerre, résiste aux Etat-Unis et à l’Otan, cela vaut la peine de s’en rappeler ; nous ne pouvons quand même pas être en dessous de lui
Déclaration de M. Jacques Chirac, Président de la République, sur l’ultimatum américain adressé à l’Irak le 17 mars, Paris le 18 mars 2003.

« Depuis le début de la crise irakienne, la France s’est attachée à rendre possible le nécessaire désarmement de l’Irak sous l’autorité des Nations unies. Ce désarmement est en cours, les inspecteurs en témoignent.
La France a agi au nom de la primauté du droit et en vertu de sa conception des rapports entre les peuples et entre les Nations.
Fidèle à l’esprit de la Charte des Nations unies, qui est notre loi commune, la France considère que le recours à la force est le dernier recours, quand toutes les autres options ont été épuisées.
La position de la France est partagée par la grande majorité de la communauté internationale. Les derniers débats ont clairement montré que le Conseil de sécurité n’était pas disposé, dans les circonstances présentes, à cautionner une marche précipitée à la guerre.
Les Etats-Unis viennent d’adresser un ultimatum à l’Irak. Qu’il s’agisse, je le répète, du désarmement nécessaire de l’Irak ou du changement souhaitable de régime dans ce pays, il n’y a pas là de justification à une décision unilatérale de recours à la guerre.
Quelle que soit l’évolution prochaine des événements, cet ultimatum met en cause l’idée que nous nous faisons des relations internationales. Il engage l’avenir d’un peuple, l’avenir d’une région, la stabilité du monde.
C’est une décision grave, alors que le désarmement de l’Irak est en cours et que les inspections ont démontré qu’elles étaient une alternative crédible pour désarmer ce pays.
C’est aussi une décision qui compromet pour l’avenir les méthodes de règlement pacifique des crises liées à la prolifération des armes de destruction massive.
L’Irak ne représente pas aujourd’hui une menace immédiate telle qu’elle justifie une guerre immédiate. La France en appelle à la responsabilité de chacun pour que la légalité internationale soit respectée. Elle appelle à préserver l’unité du Conseil de sécurité en restant dans le cadre fixé par la résolution 1441.
S’affranchir de la légitimité des Nations unies, privilégier la force sur le droit, ce serait prendre une lourde responsabilité. »
Oui, osons la paix !

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    Signé par 626 communistes de 66 départements, dont 15 départements avec plus de 10 signataires, présenté au 37eme congrès du PCF comme base de discussion. Il a obtenu 3.755 voix à la consultation interne pour le choix de la base commune (sur 24.376 exprimés).