La Grèce dans la tourmente entraine aussi toute la gauche dans l’œil du cyclone

, par  Gilbert Remond , popularité : 2%

L’édition du Monde-Europe du 29-07 rend compte d’un article du quotidien grec conservateur Kathimerini. Ce dernier donne une information stupéfiante. La cour suprême grecque a transmis au parlement deux plaintes déposées contre Yanis Varoufakis qui est accusé, rien de moins, que de haute trahison. Savez-vous pourquoi ? Parce qu’il a osé réfléchir secrètement avec un groupe de personnes choisies de lui, à un plan d’action pour instaurer un système bancaire parallèle et une monnaie nationale en cas d’échec des négociations avec l’Eurogroupe. Il faut pourtant savoir qu’en novlangue européiste, nous disons depuis le référendum sur la constitution européenne qu’il faut toujours avoir par devers soi un plan B pour de telles circonstances. Eh bien c’est un cas de lèse majesté lorsque comme la Grèce l’on appartient à une nation dite de seconde zone.

Ceux qui le poursuivent ne manquent pas d’humour. Ils l’accusent tout bonnement d’avoir exposé la Grèce à des sanctions. Ils lui reprochent aussi d’avoir fait participer à ce projet des personnalités non politiques. Non mais, rendez vous compte, si des citoyens lambdas viennent se mêler au business des politiciens, ça va tuer le métier ! Ces personnes étrangères à la confrérie seront donc aussi concernées. Elles sont poursuivies dans une troisième plainte pour appartenance à une organisation criminelle et pour violation de données personnelles. Il va sans dire, que nous avons affaire à une nouvelle variétés de dangereux terroristes qui menacent les trafics d’influence et les profits des élites financières du continent, ceux là qui appartiennent à la première zone des pays associés, celle des gens qui comptent. Il fallait faire un exemple !

Avec cette manière de faire, on peut toujours essayer de nous faire peur avec le Front national qui monte, qui monte comme la petite bête, effrayer le bon peuple de gauche pour qu’il continue à avaler des couleuvres. Ils crient au loup, mais le loup est déjà là, sous l’espèce d’un fascisme bon teint, qui n’a besoin ni de nervis, ni de sections d’assaut, en tout cas pas encore, d’un fascisme normal, qui n’est autre que la dictature du capital et qui utilise les nouvelles armes que l’appareil d’état s’est donné avec l’union européenne, pour imposer à tous sa volonté. Il faut maintenant le dire et l’écrire, si tu compromets les affaires, les déambulations du libre renard dans le libre poulailler, que tu cherches à défendre les intérêts de ton peuple, que tu respectes le mandat de ceux qui t’ont élu, alors tu te retrouves déféré devant les cours de justice au service de la Troïka. Il n’existe face à cela qu’une solution. Il faut se saisir du pouvoir et imposer la dictature des classes populaires, ce que l’on appelait jadis la dictature du prolétariat. L’information que nous donne le monde n’est qu’un exemple supplémentaire sur ce que l’Europe se permet d’être. Elle est non seulement une dictature sur les peuples, mais une instance coercitive qui sait se donner les moyens de traiter en délinquant tout dirigeant qui ne lui prête pas une allégeance absolue. Cela nous rappelle la manière dont la France traitait ses protectorats et ses colonies.

Je pensais que cette information valait son pesant d’euro et qu’elle méritait d’être partagée, portée à la connaissance du public, des camarades. Je l’ai fait avec les moyens dont nous disposons pour ce genre de situation. Je l’ai publié sur ma page facebook. Mais à mon grand étonnement les commentaires qu’elle a reçus, sont venus de gens qui n’en supportaient pas l’existence au motif qu’elles ne tenaient pas compte de la réalité et qu’elles dénigraient le gouvernement grec qui faisait tout son possible pour respecter la volonté exprimé par la majorité du peuple et pour la défendre. J’étais accusé et avec moi les communistes qui sont favorables à une sortie de l’euro et de l’Europe, de défendre des positions partisanes, éloignées de toute forme de bienveillance à l’égard de la Grèce et de son peuple, de vouloir les condamner. Mais le plus étonnant venait d’une espèce de vigile rouge, chargé des intérêts de la boutique française affiliée au PGE, venu certifier notre mauvaise conduite en expliquant avec hauteur et autorité :

« La politique du PCF et de sa direction sont sur la même longueur d’onde que toi, disait-il à mon premier contradicteur. C’est au peuple grec et à ceux qu’il a élus de décider et le PCF soutient cela. Ce que pensent certains se revendiquant du PCF, le pensent à titre personnel, mais cela n’a rien à voir avec la politique du parti actée par une très large majorité ».

D’où sortait ce lascar ? Et avec quel mandat venait-il faire de la retape en répétant sa petite notice toute faite avec ses manières de procureur chargé de poursuivre inlassablement l’infâme ? Il y avait quelque chose de donquichottesque dans cette traque grotesque d’un ennemi imaginaire. Mais pour en revenir au fonds, il me fallait bien reprendre mon premier interlocuteur pour le mettre en garde contre ce genre de séduction, mais surtout pour lui signifier que s’il avait le droit de ne pas partager les positons des communistes grecs, il n’avait pas celui de déformer leurs positions, ni celles de ceux qui en France comme dans le monde les soutiennent au nom de l’internationalisme prolétarien, d’autant plus, quand la réalité est en train de donner raison à leurs analyses.

L’histoire nous l’a démontré maintes fois, les révolutionnaires sont rarement entendus dans un premier temps. Les masses qui n’ont pas toujours tous les éléments en main, ont besoin de faire leur expérience. Il n’est pas à la porté de tous, de les avoir, surtout quand l’idéologie de la classe dominante brouille les données. Pour y parvenir, ce n’est pas spontané. Cela suppose d’avoir fait des rencontres qui le permettent et donnent la possibilité d’entendre d’autres sons de cloche. Et puis il y a ceux qui se réclament du communisme pour combattre ses valeurs et ses objectifs qui n’arrangent pas les choses. Or c’est hélas ce que fait la direction actuelle ainsi que tous ceux qui se réclament du PGE. Patience ! Ces questions là se règleront. Elles se règlent toujours tôt ou tard, tant les peuples ont besoin d’instruments et d’une organisation pour donner une issue à leurs luttes. Le peuple Grec comme tous les autres n’échappe pas à cette loi. 

L’euro groupe n’a qu’un objectif : saigner à blanc la Grèce et son peuple. Il veut en faire une colonie à sa merci, comme il l’a fait avec d’autres pays dans un récent passé. Tout le monde n’est pas dupe, y compris parmi ceux qui se trouvent à la tête du pays. Varoufakis par exemple écrivait le 20 juillet :

« Existe-t-il en effet une manière plus sûre de défenestrer le pays de la zone euro que cet accord non viable qui assure au ministre des finances allemand le temps et les arguments pour mettre sur les rails le grexit tant souhaité »,

puis le 23 juillet alors qu’il venait de voter oui pour soutenir le gouvernement en exprimant le souhait qu’il temporise :

« Je suis malheureusement certain que mon vote n’aidera pas le gouvernement dans notre objectif commun. Et ce parce que l’accord de "l’Eurosommit", dont font partie les deux mesures de ce soir, est conçu pour échouer. Néanmoins, je donne ce vote à mes camarades dans l’espoir qu’ils gagnent du temps de sorte que, ensemble, unis, nous planifions la nouvelle résistance au totalitarisme, à la misanthropie et à l’accélération et à l’approfondissement de la crise fomenté ».

Sathis Kouvélakis membre du comité central de SYRIZA, de son côté, déclarait dans un article « Le non n’est pas vaincu, nous continuons », mais il déplorait dans la foulée, l’absence de stratégie de son gouvernement qui n’avait pas prévu de solution de repli. Pour lui,

« il y a un véritable aveuglement de Tsipras et de la majorité de Syrisa dans l’illusion européiste : l’idée qu’entres bon européens, nous finirons par nous entendre même si, par ailleurs, demeurent des désaccords importants ; une croyance dure comme fer que les autres départements européens allaient respecter le mandat légitime de SYRIZA. Et pire encore, l’idée de brandir l’absence de plan B comme un certificat de bonne conduite européiste, qui fut le comble de cet aveuglement idéologique ».

Voila le mot est lâché, nous sommes dans l’idéologie et non plus dans la politique. 

Sathis Kouvélakis s’insurgeait contre l’idée développée par certains qu’il y aurait eu trahison. Ce serait de son point de vue obscurcir la réalité. Si trahison il y avait eu selon lui, elle n’était pas consciente mais conséquence d’une stratégie inadaptée à la situation. Ce que voulait dire alors ce dirigeant de la gauche de SYRIZA, c’est qu’il y avait eu aveuglement et donc incompétence. Or, il ne suffit pas de dire une chose pour qu’elle soit. Le faire s’appelle du nominalisme et s’appuie sur la croyance que choses et phénomènes existent parce qu’on leur donne un nom. Les partisans de l’euro se trouvent pris dans cette sophistique. Ils se trouvent pris dans ce que Marx nommait le fétichisme de la monnaie. Ils ont l’illusion qu’en ayant dans la poche la monnaie commune, il accèdent symboliquement au même rang que les allemands et les français. La démarche de ceux qui défendent cette orientation n’a rien de marxiste. Elle s’appuie sur un colossal déni de réalité économique.

La conclusion que Sathis Kouvélatis apporte à son analyse est sans appel pour l’actuelle gauche radicale au pouvoir :

« Ce qu’il faut c’est une nouvelle gauche anticapitaliste, nous dit-il. Et l’une des conditions, non pas suffisante mais nécessaire pour y parvenir, est d’ouvrir un front résolu contre notre adversaire actuel, c’est-à-dire l’Union européenne et tout ce qu’elle représente ».

Il termine son article sur le constat suivant de la situation :

« Il y a donc d’un côté un aspect de radicalité réelle, mais de l’autre, on a vu que la stratégie choisie était profondément inadéquate et renvoyait à des faiblesses de fond et par la même à des contradictions dans la constitution de SYRIZA, qui n’a pas résisté à cette épreuve terrible du pouvoir gouvernemental. La contradiction a ainsi fini par éclater. Il s’agit à présent d’assumer ce fait et de passer à l’étape suivante pour que cette expérience chèrement acquise par le peuple grec et les forces de gauche de combat servent au moins à ouvrir une perspective d’avenir »

(pour rappel le comité central a voté majoritairement contre le troisième mémorandum, plus de trente députés, trente deux exactement ont voté contre au parlement dont plusieurs ministres qui seront démissionnés, six ont voté blanc et un s’est abstenu). 

Le KKE qui est partout stigmatisé y compris par ceux qui s’égosillent à traiter d’anti-communistes tous ceux qui refusent de s’accorder à la position euro-chauvine du PGE, a cherché le rassemblement sur des bases qui ne soient pas anti-populaires pendant tout le temps des évènements. Il avait dans cette intention, posé au parlement les questions suivantes pour qu’elles soient posées au référendum. Il voulait que le peuple puisse se prononcer : A) sur la proposition de la troïka, B) sur celle du gouvernement, C) sur celle du KKE d’un désengagement de l’UE, de l’abrogation des mémorandums et de toutes applications des loi antipopulaires. Le gouvernement a arbitrairement refusé de soumettre au vote la proposition du KKE. Pour ce dernier, il était clair que son but était de tromper le peuple et d’exploiter son vote comme une approbation de sa propre proposition, constituée en nouveau mémorandum... C’est la raison pour laquelle le KKE a expliqué au peuple que les deux options, le oui et le non seraient utilisées pour imposer de nouvelles mesures anti populaires.

Le moins que l’on puisse dire c’est que les évènements qui ont suivi lui ont donné raison puisque, in fine, Tsipras acceptait de mettre en place un accord qui était encore plus destructeur et plus couteux pour le peuple que les accords précédents. Je ne vais pas m’étendre d’avantage sur l’appréciation que porte le KKE sur la situation politique et sur les forces qui y sont engagées en Grèce comme ailleurs. Nous tenons de la science du dialogue et du logo, que la vérité se taille toujours son chemin dans le conflit. Assumons en l’occurrence, mais pas n’importe comment ! 

En effet, contrairement à ce que toute une tradition veut nous faire accroire, Le KKE n’est pas dogmatique. Il est par contre dans le vif du combat de classe, ce qui participe d’une autre épreuve de vérités que celles déployées dans d’obscures conventions. Le KKE s’est forgé loin des cénacles et des fondations. Il représente la volonté de fer de l’avant-garde du prolétariat face à l’impérialisme. Tsipras n’est pas coulé dans ce métal. Les derniers faits nous montrent qu’il file du mauvais coton. Il a accepté un compromis avec le club des requins de la commission européenne. Pour justifier sa reculade, Il invoque l’excuse d’avoir eu un revolver sur la tempe ! Mais s’il s’est trouvé dans cette position, c’est qu’il a manqué de résolution et surtout qu’il n’a pas su esquisser d’autres perspectives. Or celles-ci ne peuvent se trouver dans le cadre des institutions qui soutiennent l’euro. Elle ne le lui permettront jamais. C’est ce qui vient de lui être indiqué "un révolver sur la tempe" !

Lordon nous l’explique sans ambiguïté dans un article du 18 juillet :

« l’entreprise de transformer l’euro ou l’hypothèse d’un autre euro possible, sont des chimères qui par désillusions successives, ne mènent qu’à l’impasse et à la désespérance politique », « l’euro interdit radicalement toute politique progressiste possible » or « abandonner aux extrêmes droites toute perspective politique d’en finir avec lui et ses institutions est une faute politique qui condamne les gauches européenne à l’impuissance indéfinie ».

Je rajouterai qu’ à l’inverse de toutes les déclarations faites par la gauche de la gauche, c’est au contraire son attitude qui est le plus sûr moyen de booster le fascisme. Et c’est bien là, que se trouve en effet la lourde responsabilité que prennent Tsipras et Laurent quand ils approuvent l’accord sorti des dernières négociation avec l’eurogroupe et qu’ils s’apprêtent à l’imposer au peuple grec. La situation dans laquelle nous nous trouvons est extrêmement grave pour les peuples. Elle rappelle à bien des égards celle de l’Allemagne au lendemain de la première guerre mondiale, quand la volonté de son peuple a été détournée et muselée par la social-démocratie au profit du capital et des forces d’extrême-droite venues à son appel pour briser la résistance populaire. Rosa Luxemburg avait essayé de prévenir la catastrophe. Juste avant d’être assassinée par "les corps franc" armés par le ministre social-démocrate Ebert, que d’ailleurs, en révolutionnaire éprouvée et expérimentée, elle voyait venir. Consciente de ce qu’avait de mortel l’improvisation et le manque de décision, elle écrivait : 

« Le prolétariat de Berlin fut sacrifié par une provocation froidement calculée et soigneusement exécutée. Le gouvernement cherchait l’occasion de porter un coup mortel à la révolution : le mouvement de janvier le lui offrit. Le prolétariat révolutionnaire était sans doute armé et mobilisé, mais il n’était aucunement prêt à des combats sérieux. Il tomba dans le piège des négociations et y perdit du temps des forces et son élan révolutionnaire. Pendant ce temps le gouvernement ayant à sa disposition toutes les ressources de l’état préparait son assujettissement complet ».

Rosa Luxemburg dans son texte mettait cette défaite sur le compte de la contradiction qui s’était révélé entre « la manifestation vigoureuse, résolue, offensive des masses berlinoises, et l’irrésolution, les hésitations, les atermoiements de la direction » politique du mouvement. Plusieurs exemples de cette trempe nous apprennent que cette idiosyncrasie est le propre de la sociale-démocratie qui inscrit toujours son action dans la légalité des institutions voulues par l’adversaire. Ses envolées enflammées post-électorales se terminent fatalement par des constats d’impuissance qui la poussent à capituler dès qu’elle est au pouvoir. Nous en voyons une fois de plus la preuve ! 

Il avait manqué à l’Allemagne de 1918 le type de parti que Lénine avait construit vingts années avant de l’éprouver au feu de la révolution d’octobre. Sans ce dernier, les idées d’émancipation du peuple auraient été réduites à des commentaires sur les évènements, faute de pouvoir leur imprimer une orientation. Ce défaut est ce dont souffre en Grèce la fraction de gauche de SYRISA ainsi que tous ceux qui lui font confiance. C’est ce qui arrive aux gauchistes qui une fois sortie des bla bla révolutionnaires se trouvent nus devant la détermination de la réaction et ne savent plus comment lui opposer de résistance. Heureusement pour le peuple grec il existe un parti de la tradition de Lénine qui lui aussi a été éprouvé par les années de combats qui ont précédé l’épreuve. Il existe le KKE, un parti qui garde la tête froide, pose les diagnostics qui conviennent à la situation. Il existe un parti qui reste dans le jeu pour imprimer une orientation au mouvement grâce la rigueur et à la justesse de ses analyses et ne se dérobe pas.. 

Après avoir tiré la leçon des mouvements qui se déroulaient en Hongrie, en Autriche, en Angleterre et en Allemagne, Lénine écrivait dans « Le gauchisme, maladie enfantine du communisme » que

« C’est surtout à la fin de la guerre impérialiste et dans l’après-guerre, que le dissentiment entre les chefs et la masse s’est marqué dans tout le pays avec le plus de force et de relief. La cause principale de ce phénomène a été maintes fois expliqué par Marx et Engels, de 1852 à 1892, par exemple de l’Angleterre. La situation exclusive de l’Angleterre donnait naissance à une aristocratie ouvrière à demi petite bourgeoise, opportuniste, issue de la masse. Les chefs de cette aristocratie ouvrière passaient continuellement aux côté de la bourgeoisie qui les entretenait directement ou indirectement. Marx s’attirait la haine flatteuse de cette racaille pour les avoir ouvertement taxés de trahison. L’impérialisme moderne (du XXème siècle) a créé à quelques pays avancés une situation exceptionnellement privilégiée, et sur le terrain, ce qu’on a vu partout dans la deuxième internationale se dessiner, le type des chefs traitres, opportunistes, social-chauvins, défendant les intérêts de leur corporation, de leur mince couche sociale : l’aristocratie ouvrière. Les partis opportunistes se sont détachés des masses, c’est-à-dire des plus larges couches de travailleurs, de leur majorité, des ouvriers les plus mal payés. ».

La situation politique de la gauche radicale ressemble à celle que Lénine décrit dans son texte. Après la chute de l’URSS, l’impérialisme s’est de nouveau retrouvé seul, tout puissant, dans un monde où plus personne pouvait le limiter. Il se retrouvait sans butée. Nous subissons par contre coup une situation qui retrouve les caractéristiques par certains côtés, de la période des années vingt. D’autres catégories sociales jouent le rôle que Lénine attribue à "l’aristocratie ouvrière". Ce sont les classes moyennes, objet pendant les trente glorieuses et les années qui ont suivies, de toute les attentions de la classe au pouvoir. L’époque où Giscard d’Estaing se plaignait de l’anomalie française qui donnait un parti communiste à vingt pour cent est révolue. La France gouvernée au centre et son "deux français sur trois" sont devenus réalité ; mieux les classes populaires se sentant de trop dans le nouvel espace de l’expression politique, se sont retirées du jeu, faute de cartes à jouer. 

Les classes moyennes se sont imposées dans la représentation citoyenne. Elles en monopolisent le discours. Leurs revendications envahissent les programmes des formations politiques de gauche dont les préoccupations jadis tournées vers le mouvement ouvrier sont remisées, taxées d’obsolescence. L’ouvriérisme des gauchistes d’hier a fait sa mue vers l’écologie et le sociétal. La classe ouvrière est devenue invisible. La sociologie a décidé sa disparition. L’hégémonie politique des classes moyenne est à priori réussie sauf qu’elle repose sur la sortie des classes populaire de l’espace électoral.

La première conséquence de cette opération, qui est la véritable nature de la "mutation" : c’est que la nouvelle avant-garde n’est plus placée au devant pour prévenir et guider. Elle a réintégré le centre. Elle s’est normalisée pour devenir la proie d’un président normal au service du grand capital et de l’atlantisme. Elle s’est coupée du terrain et des couches populaires tout autant et pour les mêmes raisons que l’était l’aristocratie ouvrière de l’époque de la IIème internationale. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, nous assistons à une corruption des idéaux prolétariens qui laisse beaucoup de désarroi dans les couches populaire et un grand vide sur le terrain du politique .

Cette situation est dangereuse à bien des égards, cependant monte en même temps l’exigence de quelque chose qui viendrait tenir le rôle qu’a tenu le congrès de Tours. Non pas pour revenir en arrière et retrouver Jaurès comme certains nous y invitent, non pas pour rejouer la France avec ses lampions, ses flonflons sur l’air de la Madelon et le "tous a Berlin", mais pour refonder le parti de la classe ouvrière et repenser ses alliances. Les raisons de cette exigence sont proches de celle de Lénine quand il rédigeait la maladie infantile. Les temps que nous vivons nous donnent à comprendre la leçon d’alors, à savoir que :

« La victoire du prolétariat révolutionnaire est impossible si on ne lutte pas contre ce mal, si on ne dénonce pas, si on ne chasse pas les chefs opportunistes sociales traitres » (tome 31 des œuvres complètes, page 87).

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Aujourd’hui le social chauvinisme à élargi ses frontières. Comme nous le montre l’exemple de la Grèce, ce sont les mêmes forces qui nous poussent vers l’union sacrée pour faire oublier leurs responsabilités de classe dans ce qu’ils présentent sous la dette, ou la faillite d’une économie, et ce sont les mêmes responsables politiques qui viennent à leur secours pour rendre incontournables leurs décisions. Par manque d’une véritable alternative, ils justifient le « Their is no alternative » de Tacher. La seule solution qui prévaut, reste celle qui nous permettra de sortir de tous leurs cadres, juridiques, économiques, monétaires et militaires pour construire dans l’union avec la classe ouvrière une société des producteurs associés, une société socialiste. Il nous faut pour cela retrouver un authentique parti communiste en phase avec son époque mais résolument anticapitaliste c’est-à-dire résolument décidé à la rupture.

Gilbert Rémond

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