Europe, Asie, Proche-Orient, Afrique : l’effet Trump

, par  Francis Arzalier , popularité : 2%

Décidément, les péripéties politiques aux USA sont sources d’illusions de ce côté-ci de la "grande mare". Ce fut le cas en 2009 lors de l’élection du Président Obama, que nombre de Français, journalistes accrédités ou humanistes naïfs, présentèrent en nouveau Messie de la "nouvelle démocratie antiraciste" étasunienne. Avant que, peu à peu, l’évidence s’installe : l’impérialisme nord-américain existait toujours ; des centaines de détenus qui n’ont jamais été jugés croupissent toujours derrière les barbelés de Guantanamo, l’innocent Mumia Abu Jamal est toujours en geôle, et les "bavures" racistes de la police continuent.

Le niveau des invectives a été tel durant la campagne électorale en 2016, que certains Français, prenant parfois leurs désirs pour la réalité, ont cru à l’illusion d’un basculement pacifiste de la politique internationale étasunienne grâce à l’élection de Trump. Quelques-uns allaient même jusqu’à occulter, contre toute évidence, le caractère xénophobe anti-Latinos et antimusulmans des premières mesures de Trump. La réalité, là encore, s’impose : l’isolationnisme clamé par Trump (assez de cadeaux aux autres peuples ; America first !) lui a réussi électoralement. Mais ne confondons pas cette constante politique d’une partie de l’opinion aux USA avec une idéologie progressiste : les isolationnistes de 1940 étaient pour la plupart pronazis, et ceux d’aujourd’hui aspirent toujours à l’hégémonie mondiale des États-Unis, grâce à un budget militaire accru encore, comme Trump lui-même l’a annoncé. Tout au plus sont-ils disposés à infléchir leurs tactiques diplomatiques et militaires pour tenir compte des échecs antérieurs, ce qui montre d’ailleurs qu’ils sont moins stupides que le prétendent les médias français, ce qui ne les rend pas moins dangereux, au contraire. Souvent d’ailleurs en accentuant des évolutions en cours, plutôt qu’en les contredisant.

De la Baltique à la Palestine

C’est le cas en Europe : certes Trump et ses équipiers ont dit vouloir limiter les tensions avec la Russie de Poutine, ce qui ne pourrait être que positif. Mais cela n’a pour l’instant rien changé sur le terrain. La guerre impitoyable que le Gouvernement pro-occidental et fascisant d’Ukraine mène depuis quatre ans contre les séparatistes russophones du Donbass continue de plus belle : malgré un cessez le feu officiellement accepté, les troupes nationalistes de Kiev bombardent et tuent presque chaque jour la population de Donetsk et ses environs. Prélude, selon de nombreux observateurs, a une offensive de grande envergure, qui amènerait certainement la Russie, protectrice de la République séparatiste, à riposter. A ce risque évident de guerre continentale en Ukraine, dont les bellicistes sont soutenus depuis des années par les puissances occidentales, s’ajoutent les provocations des forces de l’OTAN stationnées le long de la frontière russe, dans les pays est-européens dirigés par des gouvernements de Droite extrême. En Pologne, en Lituanie, des milliers de soldats, de tanks, d’avions de l’Alliance Atlantique déployés il y a quelques mois, menacent directement l’enclave russe de Kaliningrad au bord de la Mer baltique. Plus de 3000 de ces soldats sont états-uniens : jusqu’à présent, Trump n’a retiré aucun d’eux. Los de la récente entrevue avec les Européens à Munich, le représentant de Trump a réaffirmé la nécessité de l’OTAN, et les a appelés à multiplier leurs dépenses militaires. Les tensions régionales n’ont donc en rien diminué, elles s’accentuent au contraire quand la Droite pro-occidentale tente de s’emparer du pouvoir en Roumanie comme elle le fit à Kiev, en utilisant le mécontentement contre "la Gauche" corrompue par le pouvoir. Il est possible que, dans les mois qui viennent, Trump et son entourage cherchent en négociant à sortir les USA de l’impasse où les a menés leur interventionnisme antirusse : ce n’est pas encore le cas en Europe de l’est.

Cela peut se produire aussi à propos de la Syrie, où d’obscures transactions internationales ont déjà commencé, sur fond de reconquête des zones jusqu’ici contrôlées par DAESH. Les divers protagonistes ont tous l’intention d’en profiter pour élargir leurs zones d’influence. Turquie, Russie, États Unis, savent utiliser à l’occasion des soldats Irakiens, ou des Kurdes, en première ligne, sans lésiner sur les pertes humaines, civiles ou militaires. Mais il n’est pas certain que les nations kurde, irakienne, et syrienne, sortent gagnantes de ce grand Monopoly impérialiste.

Celle de Palestine risque fort aussi de faire les frais de ce "règlement". Car il est au moins une région où le nouveau Président des USA a déjà renforcé les tensions bellicistes, le Proche-Orient. Il menace l’Iran, flatte les petro-monarques intégristes d’Arabie Saoudite, soutient leur invasion meurtrière au Yémen, et cautionne les colonialistes racistes qui gouvernent l’état d’Israël. Les risques d’explosion guerrière dans les années prochaines sont accrus, notamment parce que l’extension parrainée par la Maison Blanche des colonies israéliennes en Palestine occupée réduit à l’état de fiction la cohabitation de deux états, palestinien et israélien, envisagée par l’ONU. Il suffit pour s’en convaincre de lire ce qu’a écrit John Kerry, En charge des Affaires étrangères sous la présidence Obama (voir ci-dessous des extraits publiés par le Monde diplomatique de juin 2017).

Un aveu un peu tardif, qui oublie de préciser que cette invasion d’une Palestine possible (270.000 colonies israéliennes éparpillées en Cisjordanie) n’a eu lieu que grâce au soutien politique, militaire et économique de Washington depuis des décennies.

DE LA MÉDITERRANÉE À LA MER DE CHINE

En fait, le basculement stratégique à peine esquissé par le Président Trump était déjà envisagé aux USA à l’ère Obama. Elle repose sur une analyse déjà ancienne au sein de "l’Establishment" nord-américain. Négocier avec une Russie qui n’en est plus à la déliquescence de l’époque d’Eltsine, plutôt que persister à la provoquer comme savent le faire certains dirigeants européens, notamment le Français Hollande et ses fidèles, c’est une façon de tenter de briser le rapprochement actuel entre Moscou et Pékin. Car, pour Trump et la majorité des stratèges US actuels, le centre névralgique du monde n’est plus comme le disaient Brzezinski et le Président Bush près de la Méditerranée, mais dans le Pacifique et en Mer de Chine. Dès sa campagne électorale, Trump a multiplié les déclarations provocantes à l’égard de la Chine, présentée en menace majeure pour les USA sur les plans économique, militaire et diplomatique. Depuis son entrée en fonctions, même s’il a dû atténuer certains propos outranciers sur les "deux Chines", il a déjà peaufiné l’encerclement de l’ennemi désigné, le resserrement des liens avec ses alliés régionaux les plus anticommunistes, la Corée du Sud, Taïwan, le Pakistan, et surtout le Japon, dont le dirigeant nationaliste Abe rêve d’effacer la Constitution pacifiste de 1945, et de refaire de son pays une grande puissance militaire : Abe a été le premier chef d’état asiatique reçu par Trump, avec une effusion démonstrative. Ce "cordon sanitaire" antichinois, grâce à un réseau de bases, de troupes et de navires à capacité nucléaire, devient peu à peu le risque majeur pour la paix du monde, alors que de nombreux peuples de la région commencent à renâcler face à la "protection nord-américaine" (Les Philippines, et même la fidèle Australie).

On constate la même accélération de tendances antérieures à nos portes. Depuis des années, les USA, échaudés par leurs échecs de la fin du siècle dernier en cas d’engagement direct (en Somalie, en Afghanistan, etc.), préfèrent voir leurs alliés faire l’intervention armée à leur place : ce fut déjà le cas en 2011, quand Sarkozy expédia l’armée française détruire l’état libyen, au nom de l’OTAN et de l’Occident. Trump ne fait guère qu’accentuer cette tendance, en incitant sans fioritures les gouvernements européens à accroître leurs dépenses militaires, au lieu de compter sur les États Unis. Ce qui se traduit par une aspiration plus grande encore à une "Défense Européenne" de nos bellicistes locaux, donc une aggravation évidente des risques.

Preuves supplémentaires s’il en fallait de la pérennité nocive de l’Impérialisme états-unien, de Bush à Obama, d’Obama à Trump, et du danger mortel qu’il représente, quelles que soient ses inflexions tactiques.

Francis Arzalier

Discours de John Kerry le 28 décembre 2016

À propos de la Palestine

(extraits publiés par le Monde diplomatique de février 2017)

La population des quelques 130 colonies (israéliennes) à l’Est des frontières de 1967 n’a cessé de croître. Depuis la signature des accords d’Oslo (en 1993) le nombre de colons a augmenté de 270.000 dans la seule Cisjordanie (sans compter Jérusalem Est), dont 100.000 depuis le début de Barack Obama en 2009… Près de 90.000 colons vivent à l’Est du mur de séparation construit par Israël au beau milieu de ce qui, selon toute définition raisonnable, constituerait le futur état palestinien. Et la population de ces petites colonies lointaines a augmenté de 20.000 personnes depuis 2009. De surcroît, le gouvernement (israélien) vient d’approuver une nouvelle implantation encore plus à l’Est du mur, plus près de la Jordanie que d’Israël… Il existe plus de 80 colonies à l’Est du mur de séparation, dont beaucoup à des emplacements qui rendraient impossible la création d’un état palestinien continu. Peut-on vraiment penser que, si les colons restent là où ils sont, il serait possible d’instaurer un état palestinien viable ?... La question ne porte pas tant sur la quantité de terre disponible en Cisjordanie que sur sa continuité. Si elle est formée de petites parcelles éparses, comme un gruyère, elle ne pourra pas constituer un véritable Etat…

(ndr : Les mots entre parenthèses sont des ajouts facilitant la compréhension du texte)

Voir en ligne : sur le blog du collectif communiste polex

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