Et si les USA faisaient la paix à Cuba, pour développer la guerre "hors limite" ?

, par  Danielle Bleitrach , popularité : 2%

Au regard du combat magnifique des cubains depuis plus de cinquante ans, il ne faut pas mêler la satisfaction que l’on peut éprouver, avec les légitimes inquiétudes sur la raison qui a poussé Obama à reconnaître son échec à faire plier l’île. Pourtant cette reconnaissance signifie également, on peut le craindre, un choix qui n’a rien de pacifique et dont le monde risque de faire les frais durablement.

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Il est clair que les États-Unis ont entamé la guerre "hors limite" [1] contre la Russie, et au-delà c’est la Chine qui est visée. Hors limite, parce que si tout à été fait pour entraîner la Russie dans un foyer de guerre civile en Ukraine, une situation comparable à l’Afghanistan, les occidentaux malgré les cris d’orfraie de leur presse aux ordres ne sont jamais arrivés à démontrer que l’armée russe était impliquée dans la dite guerre civile, alors qu’il y a désormais des ministres étrangers à la tête du gouvernement ukrainien et que la direction de ce pays par l’OTAN ne fait aucun doute pour personne.

Donc, faute d’avoir pu entraîner la Russie dans un nouvel Afghanistan, les États-Unis mènent une guerre non conventionnelle : les révolutions de couleur, mêlant jeunesse occidentalisée et extrême-droite fondamentaliste, gay pride et néo-nazis, l’union de la carpe et du lapin, vont se multiplier, le terrorisme a débuté en Tchétchénie, nul doute que cela va s’amplifier en particulier dans le Caucase et en Asie centrale. Le tout sur fond de proclamations confondant néo-libéralisme et démocratie… relayée par les grandes orgues des trusts de la presse et des médias…

Surtout a été déclarée la guerre économique sur le pétrole et les manœuvres spéculatives sur le rouble.

Toutes les autres actions des États-Unis, y compris la tentative de normalisation des relations avec Cuba et l’Amérique latine, doivent être analysées dans ce contexte. Il est évident que l’administration Obama voudrait bien résoudre un certain nombre de questions qui perturbent la stratégie de ses conseillers néo-conservateurs tout entière polarisée contre le Russie et la Chine. L’Iran par exemple, mais aussi la Palestine et la situation en Asie, sont infiniment plus complexes, c’est dire…

Le fait est qu’il est des cas comme la Palestine ou Cuba dont l’importance stratégique pourrait paraître nulle, mais qui en fait sont la clé morale pour les peuples d’Amérique latine et pour les peuples musulmans et le Moyen Orient. Donc il s’agit d’en finir avec ces injustices manifestes qui révoltent la conscience universelle et font contre elles l’unanimité, sans pour autant créer de véritables conditions, simplement paraître se dégager en tant qu’États-Unis, en tant que président ouvrant par ailleurs la pire des guerres possibles pour le 21ème siècle.

Les États-Unis sont pressés depuis des années par les néo-conservateurs d’en finir avec des affrontements secondaires pour attaquer ceux qui menacent réellement leur hégémonie héritée de la deuxième guerre mondiale et qui repose 1) sur leur puissance militaire sans équivalent dans le monde, 2) le rôle d’étalon du dollar et on pourrait ajouter du pétrodollar, 3) la puissance médiatique la plus considérable, un véritable système de propagande. Leurs véritables adversaires sont les Chinois mais aussi le système d’alliance que ceux-ci ont patiemment tissé, et la Russie est la pièce centrale de cette nouvelle diplomatie mondiale basée sur l’intérêt réciproque, le respect des souveraineté.

La paix avec Cuba tient compte avec réalisme du fait que cinquante ans de blocus, d’hostilité n’ont pas entamé la capacité de résistance de l’île et que loin de l’isoler ont élargi les alliances autour de celle-ci. Le combat de David et Goliath est totalement contreproductif. Paradoxalement, y renoncer est dire à quel point la déclaration de guerre de la Chambre des représentants contre la Russie ne relevait pas d’une mauvaise fièvre, mais correspond bien à un choix stratégique sur le long terme qui risque de structurer tout notre environnement économique, politique et social sur le long terme.

La lutte pour la paix et contre le fascisme est donc plus que jamais d’actualité. Le fascisme n’est pas seulement représenté par les quelques organisations actuelles qui se réclament plus ou moins de cette idéologie, ont des relents xénophobes, mais bien cet impérialisme belliciste que nous voyons à l’œuvre aujourd’hui. Il est militariste, provoque partout des foyers de guerre, entretient y compris les guerres civiles, mais exerce également une pression constante sur la vie des peuples, sur l’appropriation de leurs ressources par les jeux spéculatifs, la guerre "hors limite".

Est-ce que cela est inévitable ? Est-ce que nous pouvons dans l’immédiat refuser cette guerre au cœur de l’Europe, à laquelle on tente de nous habituer ? Quitte à le faire en célébrant la réconciliation des États-Unis avec Cuba… A bon compte puisque le blocus continue…

Mais premièrement, il n’y a rien d’assuré que la stratégie de blocus marche mieux avec la Russie qu’avec Cuba, si ce n’est la présence d’une oligarchie "cinquième colonne" en Russie. Le socialisme est une plus grande garantie d’unité populaire. Deuxièmement, cela ne changera pas grand chose, du moins pour le moment, à la vigilance des cubains et de l’Amérique latine, et il est à peu près assuré qu’il y a peu de pays et de dirigeants dignes de ce nom qui se fassent d’illusion sur ce que l’on peut attendre du "pacifisme" américain…

Quel rôle la France peut-elle jouer ? Cela dépend de nous… tous… et peut-être méditer ces paroles de Fidel Castro citant Céspedes, et posant la relation entre la patrie et l’humanité, la nation et l’international, le contraire du chauvinisme et du bellicisme et le caractère irrésistible d’une telle stratégie :

« Avec douze hommes, on fait un peuple. Alors si avec douze hommes on fait un peuple, combien de fois sommes-nous douze hommes ! Et douze hommes multipliés par aller savoir combien de fois, armés d’idées, de connaissances, qui savent comment va notre monde, qui s’y connaissent en histoire, en géographie, qui s’y connaissent en lutte, parce qu’ils possèdent ce qu’on appelle une conscience révolutionnaire, qui est la somme de bien des consciences, qui est la somme des consciences humanistes, la somme d’une conscience d’honneur et de dignité, des meilleurs valeurs que peut récolter un être humain, qui est la fille de l’amour de la patrie et de l’amour du monde. »

Ne gâchons pas notre joie et celle des cubains, mais ne soyons pas naïfs… et pour cela, le mieux est d’analyser la résistance cubaine… et de nous en inspirer…

Danielle Bleitrach

Tiré de son blog Histoire et Société

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