De grandes ambitions communistes pour relancer l’activité économique, industrielle et sociale Critique des propositions des parlementaires communistes sur l’énergie

, par  Gilles Pereyron , popularité : 3%

Lettre de Jean-Luc Fargier du 24 octobre 2020

Copie : Monsieur le secrétaire national PCF, Monsieur le secrétaire départemental PCF


Mesdames et messieurs les députés du groupe de la Gauche Démocrate Républicaine, Mesdames et messieurs les sénateurs du groupe Républicain, Citoyen et Ecologiste,

Vous avez produit un important dossier intitulé « Pour une transformation économique, sociale et écologique ». Avec ses 118 propositions, ce document a le mérite d’engager le débat sur d’autres perspectives politiques que celles assénées par les formations de droite comme de gauche avec l’appui des médias à leur service. Cependant dans le domaine de l’énergie, je suis très déçu par des propos ambigus et les intentions implicites qu’ils recèlent.

Page 12. Décarboner la production et les usages de l’énergie, assurer l’accès à l’énergie pour tous

Nos propositions :

  • Création d’un service public unifié et démocratisé de l’énergie permettant d’assurer l’appropriation publique et sociale et la démocratisation de l’ensemble des filières industrielles de production et de distribution de l’énergie.
  • Réduire les taxes sur l’électricité : suppression de la charge dite de "service public de l’électricité" (CSPE) et baisse de la TVA sur la fourniture en électricité.
  • Mise en œuvre d’un plan de formation pour la requalification professionnelle des salariés du secteur nucléaire.
  • Développer la recherche dans la filière hydrogène et développer la filière biogaz.
  • Développer la recherche dans le nucléaire civil dans l’éventualité de préparer l’entrée en production de nouvelles centrales à partir de 2035 dans le cadre d’un mix électrique équilibré.
  • Définition d’un plan national d’aménagement du solaire photovoltaïque et de l’éolien terrestre et maritime avec des zonages et contraintes spécifiques.

Mes commentaires et réflexions sur ce chapitre :

Très équivoque, la formulation du titre du chapitre donne le ton. En France, la question n’est pas de produire une énergie décarbonée, cette production l’est déjà depuis longtemps, seule la Suède fait mieux en Europe ; le problème Français est l’utilisation excessive d’hydrocarbure dans les transports, dont les transits internationaux. Désolé, mais ce titre n’est pas sans rappeler l’intitulé du 4ème paquet Énergie de l’Union Européenne « Une énergie propre pour tous les Européens » qui est un ensemble de directives qui conduit en fait au développement de l’ultralibéralisme sans frontière dans le domaine de l’électricité, au détriment du service public.

  • On ne peut qu’être d’accord sur l’objectif de (re)créer un Service Public de l’énergie, unifié (électricité, gaz, hydrogène, ENR, pétrole… ) et démocratisé (?) ; mais comment et avec qui construire la politique énergétique ? A mon avis, cela devrait commencer par un débat et une décision nationale au niveau du parlement, après que les députés en aient débattu dans leur circonscription. De plus, il ne peut y avoir d’appropriation publique sans un réel développement de la culture scientifique et technique, sinon les dogmatismes continueront à sévir.
  • Très bien aussi. La TVA doit être à 5,5% sur la consommation domestique, comme tout produit de 1ère nécessité, c’est mieux en le disant, et la CSPE est à supprimer sur le volet "rente" aux ENR, mais à conserver sur les aspects solidarité avec les 13 millions de précaires énergétiques et les DOM-TOM. Pour que cela ne soit pas qu’une proposition démagogique et une posture politicienne sans effet, cela signifie que la Nation devra dénoncer certains accords et les prix garantis sur plusieurs décennies aux ENR, comme par exemple le parc éolien marin de Saint-Brieux exploité par Iberbola qui bénéficiera d’un prix assuré pendant 20 ans à 155 €/MWh alors que le même parc à Dunkerque confié à EDF doit se contenter d’un tarif de 44 €/MWh. Ces escroqueries scandaleuses, financières et écologiques, et leurs instigateurs, doivent être publiquement condamnées !
  • Consternant ! Pour les adeptes de la religion anti-nucléaire, le message subliminale coule de source. Si on requalifie (le terme reconvertir eut été moins obscur) au travers d’un plan de formation les salariés du nucléaire, qui va faire tourner les centrales ? Personne, donc on arrête le nucléaire ! Même pas le courage de le dire en face et explicitement !
  • Ok pour le biogaz, il vaut mieux le récupérer et le consommer que de le laisser se diffuser dans l’atmosphère car c’est un GES naturel 25 fois plus puissant que le CO2. Sans attendre des lustres, on peut déjà produire proprement de l’hydrogène en grande quantité à un coût raisonnable, grâce à l’électrolyse, qui nécessite des unités de production de grande puissance, donc du nucléaire… mais pour cela il ne faudrait pas démanteler le parc nucléaire actuel. Depuis l’arrêt de Fessenheim il a fallu rallumer des turbines à charbon, non qu’il y ait une demande forte (pas de froid, ni d’activités économiques en surchauffe) simplement des ENR aux abonnés absents.
  • « Dans l’éventualité de préparer »… les élus communistes ne prennent pas position, ils démissionnent en laissant à d’autres la responsabilité politique de maintenir, ou pas, le nucléaire… mais si les salariés sont reconvertis (en 3), il n’y aura personne pour les faire tourner. La décision politique de lancer la construction de plusieurs EPR doit être prise maintenant, pas dans 15 ans, ainsi que le redémarrage de la recherche sur le réacteur de 4ème génération "Astrid". Je suis perplexe à propos de l’allusion « un mix électrique équilibré »… est-ce à dire qu’aujourd’hui il serait déséquilibré ? La faute à qui s’il n’y a pas assez d’hydroélectricité, l’énergie la plus propre qui soit ? Hors considération dogmatique, où se situe le point d’équilibre ? Le dogme du 50% nucléaire est une triste stupidité. En puissance installée, le nucléaire ne représente plus aujourd’hui que 45% du parc de production français (et pourtant on compte encore sur lui pour passer l’hiver !). Il ne devrait pas y avoir de point d’équilibre dans la production, celui-ci dépend uniquement des besoins de consommations, du moment considéré et de la situation météorologique…
  • A rapprocher du point 1, car si l’on recrée un SP unifié, éolien et photovoltaïque y seront intégré et auront une place, à déterminer après un vrai débat portant sur leur intérêt et inconvénients. Ce point est particulièrement important car la commission européenne exige, dans un silence politique assourdissant pouvant s’assimiler à un accord tacite, l’éclatement définitif d’EDF en au moins 2 entreprises distinctes dont l’une regrouperait les activités rentables (ENR, Distribution) car subventionnées et garanties par un État inféodé au capitalisme vert ; l’autre entreprise serait à la charge totale de l’État qui devra assumer la cout financier du démantèlement de l’industrie nucléaire. Avant la privatisation rapportait un peu d’argent à l’État, maintenant il lui en coute.

Personnellement, je ne vois pas de grandes ambitions communistes dans ces 6 premières propositions, rien d’enthousiasmant et de mobilisateur, ni de quoi relancer l’activité économique, industrielle et sociale ; certes la déconstruction de l’industrie nucléaire créera momentanément des emplois, mais où seront les plus-values économiques, sociales et scientifiques ? Nous pourrions entrer dans une trajectoire de décroissance renforcée par une crise sanitaire et économique longue. Il y a urgence à prévenir cette tendance mortifère, c’est capital si l’on veut pouvoir répondre aux besoins de protection sociale, santé et retraite, dont la croissance des dépenses était déjà avant la crise supérieure à l’augmentation du PIB. Avec une récession durable, il n’est même pas certain de pouvoir maintenir le niveau actuel. Certes, les plus riches doivent payer mais cela sera-t-il suffisant ? On peut en douter dans la durée.

Oui il faut un grand service public de l’Énergie, créateur d’emplois de tout niveau, tourné vers l’avenir, la recherche et l’intérêt collectif (et donc écologique).

Oui il faut du débat, sur la base de données scientifiques, économiques, sociales et écologiques, comprises et partagées par le plus grand nombre, sinon le dialogue de sourds continuera.

Oui c’est aux principaux intéressés (élus, usagers, salariés, industriels…) de définir les besoins et les moyens d’y répondre, dans le cadre national et sous le contrôle du parlement.

Oui les usagers captifs du gaz et de l’électricité doivent être protégés des pompes à fric (ENR subventionnées par la CSPE) et des conséquences négatives de l’ARENH qui devra cesser, oui à la TVA à 5,5% sur les usages domestiques.

Oui à la vente au prix de revient, oui à l’égalité de traitement et à la péréquation nationale (et donc non au développement des communautés d’auto-producteurs subventionnés par la CSPE et le Tarif d’Acheminement dont le surcout lié à la gestion des ENR est assumé par tous les usagers)

Oui au développement du nucléaire, EPR puis Astrid, pour fournir en base l’électricité dont la nation a besoin, oui à la recherche sur la fusion, oui à la récupération et à l’exploitation des grandes quantités de chaleurs issues du refroidissement des réacteurs, largement de quoi réduire significativement la consommation d’énergie pour le chauffage de milliers de logements, l’industrie est aussi très intéressée.

Oui la part de l’hydroélectricité et surtout des STEP (stockage naturelle de grande quantité d’énergie restituables aux moments voulus) doivent être accrues.

Oui à l’implantation d’éoliennes et de panneaux photovoltaïques à des endroits stratégiques pour compenser les pertes en ligne et améliorer ainsi la qualité et l’efficacité des réseaux de transport et de distribution, de quoi économiser quelques tranches nucléaires. L’installation de centaines d’éoliennes et de milliers de panneaux photovoltaïques en vallée du Rhône, déjà largement excédentaire en production d’électricité (nucléaire, hydroélectricité), ne présente aucun intérêt, à part enrichir les capitalistes verts.

Oui les usagers ont le droit (comme ils l’ont toujours eu) de produire, de consommer leur énergie et de vendre le surplus au Service Public à un tarif qui ne lèse pas les autres usagers.

Oui au développement de tous les types de captage (hors fracturation hydraulique et chimique) et de production du méthane (gaz naturel), oui à la recherche scientifiques sans les interdits dogmatiques instaurés depuis le gaz de schiste.

Oui au développement du GNL (acheminé par le rail) pour l’alimentation des communes éloignées des grands réseaux du transport Gaz. Création de nombreux réseaux de distribution gaz dans « l’arrière-pays ».

Oui au développement des usages de l’hydrogène (transports ferroviaire et maritime notamment) et à sa production par électrolyse (propre s’il s’agit du nucléaire, hydroélectricité, ENR…).

Oui au développement de la solidarité, nationale pour que tous ait un droit plein et entier à l’énergie, oui à la coopération internationale avec des accords négociés, non imposés par l’UE et l’ultralibéralisme.

Oui le pétrole est une matière première exceptionnelle qui offre des possibilités de production d’une multitude de produits chimiques et de matériaux de synthèse, oui il faut gérer cette ressource avec parcimonie en privilégiant la récupération et la réutilisation dans le cadre d’une économie circulaire.

A tous points de vue, cette liste non exhaustive de propositions me semble beaucoup plus novatrice, dynamisante, tournée vers l’avenir et porteuse d’espoirs.

Merci d’avoir porté attention à ces commentaires.

Recevez, mesdames, messieurs, mes fraternelles salutations.

Jean-Luc Fargier

Et signataires associés :

Mme Neumayer Virginie, Vaucluse
MM Barra Jean, Hauts de Seine
Basset Jean-Pierre, Drôme
Cauvin Jean-Claude, Alpes de Haute Provence
Cayron André, Ardèche
Foulquier Luc, Bouches du Rhône
Gama Jean-Michel, Essonne
Guezenec Jean-Yves, Côtes d’Armor
Lelong Frank, Drôme
Mante Franck, Vaucluse
Pereyron Gilles, Rhône
Zanolin Ludovic, Hauts de Seine

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