Conférence nationale du PCF : habemus papam ?

, par  Guillaume Sayon , popularité : 2%

Ainsi, ni fumée blanche ni fumée noire n’est apparue dans le ciel parisien lors de la conférence nationale du parti. Une incroyable surprise a pourtant conclu cette intense journée de dialogue. Alors même qu’il y a quelques semaines et même quelques jours à peine cette orientation semblait peu probable ; alors même que la veille Pierre Laurent se positionnait dans la presse comme étant favorable à un soutien critique à Mélenchon et à sa France Insoumise, une majorité des camarades réunis en un profane et public conclave a tranché pour l’option d’une candidature issue de nos rangs.

Les camarades ont pu s’exprimer en toute transparence, argumenter, sous-peser. Les choses ont été dites avec précisions, convictions, respect. Autant dire que cette conférence a donné l’image d’un grand parti. Ce dernier en sort, quoi qu’on puisse penser de son choix provisoire et même si cette conférence arrive bien tardivement, grandi.

Un choix provisoire puisque la conférence n’a émis qu’un avis. Les adhérents vont maintenant dans la France entière pouvoir se prononcer et avoir le dernier mot. Enfin, pas tout à fait. Dans le texte de la résolution adoptée lors de cette même conférence, il est dit que même si nous allons faire un choix collectif à la fin du mois, celui-ci pourrait être remis en cause dans le cas où une candidature dite « plus rassembleuse » verrait le jour. Sans le dire clairement mais suffisamment sous-entendue, cette hypothétique candidature supposée plus rassembleuse pourrait sortir du chapeau lors de la primaire socialiste de janvier prochain. Du moins c’est ce que pensent à tort quelques-uns de nos camarades. Inutile de surjouer la surprise.

Je pense que nous devons nous battre pour que la souveraineté des communistes soit respectée jusqu’au bout. Qui-plus-est le calendrier se resserre de plus en plus et il serait euphémisant de souligner le fait que nous avons perdu beaucoup de temps, vraiment beaucoup de temps. Je reste persuadé comme d’autres que ce débat, ce choix, aurait du être fait dès notre congrès. Qu’importe… Les faits sont ce qu’ils sont.

Néanmoins, comme j’ai pu l’écrire samedi en suivant les travaux en direct sur internet, on peut, sans haine ni calcul, déplorer que la direction du parti s’est octroyée de trop nombreuses libertés et s’est noyée dans de multiples et amples tergiversations avec comme point de départ, la décision unilatérale de Pierre Laurent de répondre positivement en janvier dernier à l’invitation publiée dans le journal Libération à participer à la primaire de gauche. Un tollé qui a d’ailleurs fragilisé Pierre Laurent lui-même lors du congrès avec une division inédite ou presque de la direction sortante, des traditionnels soutiens de la ligne politique en cours depuis la fin du triste règne de Robert Hue. Sans doute que l’objectif, on peut se le dire sans polémique, était de rendre impossible toute hypothèse d’une candidature communiste en jouant la montre.

Alors, Jean-Luc Mélenchon a accéléré sa manœuvre ; alors la France insoumise a eu le temps d’ériger les contours de son dessein, de prendre de la force, de déployer sa toile nous prenant finalement au piège. Nous n’avons rassemblé personne et nous voilà maintenant au pied du mur pour gérer une rude contradiction : continuer de porter un message de rassemblement tout en construisant une nouvelle candidature, la nôtre. Telle est l’équation à avoir en tête pour nous prononcer lors du scrutin des 24, 25 et 26 novembre.

Nous avons maintenant à sortir vers le haut de cette situation. Par ailleurs, les camarades attendent avec envie une puissante mise en mouvement de notre organisation. Il faut donc vite désigner nos candidats à la législative et se mettre d’accord sur un projet communiste que nous pourrons, avec enthousiasme, promouvoir sur tous les territoires. Il est temps d’arrêter de se regarder dubitativement, de tâtonner mollement en espérant retomber sans trop de dégâts sur nos pattes. Nous devons nous armer solidement pour la bataille et réaffirmer sans honte ce que nous sommes. Des militants de la lutte des classes, des militants révolutionnaires, des militants communistes.

C’est je crois le message le plus important que nous délivre la conférence nationale. C’est la réaffirmation du parti, la volonté inaltérable de très nombreux communistes de faire subsister notre parti, sa singularité, son histoire, son réseau pluriel. Mélenchon et ses lieutenants sont de très habiles tacticiens en période de pré-campagne présidentielle. Cependant la France Insoumise souffre d’une énorme faiblesse. Elle n’a aucun ancrage territorial, elle n’a aucun réseau militant parfaitement organisé localement. La France insoumise n’a pas d’histoire, elle est vide de sens sur nos territoires. Elle n’est là que pour servir l’intérêt d’un homme et c’est tout. D’ailleurs, des voix s’élèvent enfin pour lever le voile aveuglant de sa démarche vendue comme horizontale et citoyenne. La conférence du parti communiste a donné à voir bien plus de gages de démocratie que tout ce que peut nous vendre la communication offensive des insoumis. Pouvoir choisir souverainement, désavouer intelligemment et sans haine le secrétaire national, discuter la stratégie, pouvoir marquer son accord ou son mécontentement avec l’orientation proposée sans risquer l’excommunication ou l’auto-marginalisation.

Qui a pu, ne serait-ce qu’un instant, discuter le nom du candidat chez les Insoumis ? Comment celles et ceux qui se revendiquent de ce mouvement peuvent-ils remettre en cause la stratégie, les axes de la campagne ? Qui va composer la commission chargée de valider les nominations pour les législatives ? Qui a pu discuter et amender la charte d’engagement pour les futurs candidats estampillés France Insoumise ? Comment comprendre que malgré les milliers de contributions écrites, le discours du candidat tout puissant n’a pas changé d’un iota depuis des mois et des mois ?Où est donc la sacro-sainte démocratie dans tout cela ? C’est bien d’une aventure individuelle dont il est ici question. Alors que nous allons sortir un matériel en début d’année pour pulvériser les propositions de la droite, pour ré-orienter le débat politique national sur les questions de l’emploi, des salaires, de la défense des services publics, etc, à la France Insoumise on tape continuellement sur ce qui gravite à gauche, comme si l’éclairante pureté était exclusivement délivrée aux fidèles et dociles pèlerins de leur sainte Église. Comme si le danger le plus prégnant ne venait pas de la droite et de l’extrême-droite.

Des replis et quolibets sectaires pourraient bien très vite ratatiner les espoirs à mon sens démesurés que revendique ce mouvement, qui rapidement se transformera en parti après les échéances électorales, prenant ainsi le parfait contre-pied de ce qui n’est nul autre que de la démagogie de bas étage quand il s’en prend aux partis, démons du vieux monde. Les sondages ne sont que des sondages et il reste encore de longs mois avant le premier tour de l’élection présidentielle. Souvenons-nous du cas Chevènement !

Voilà donc une série d’arguments qui, je crois, peuvent assez radicalement démentir les camarades qui déclarent qu’une candidature communiste serait une candidature de division. Il manque sans doute à ces derniers une vision de long terme que chaque communiste doit pourtant prendre en compte dans ses appréciations. Même s’il est évident que nous ne gagnerons pas sous notre bannière, les année de plomb qui se profilent dangereusement sous nos yeux avec une droite extrême et une extrême-droite au plus haut et qui promeuvent des thèses et des postures aussi absurdes qu’écœurantes, vont réclamer une force organisée, patiente, militante, révolutionnaire. Il faudra pouvoir durablement être de toutes les batailles, ouvrir un chemin capable d’arracher une à une les consciences livrées pour l’heure à la résignation ou à une sombre colère. C’est cela être communiste et c’est ce message que pourrait porter librement, avec force et constance, notre possible futur candidat communiste. L’heure de la reconquête politique et populaire a sonné.

G.S.

Lu sur son blog

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